Vaillante – Chris Bergeron

De la même autrice, j’ai beaucoup aimé Valide, qui se passe dans un univers futuriste avec une intelligence artificielle toute puissante. Quand nous l’avons rencontrée au Salon du livre, elle nous a conseillé de lire cette nouvelle avant de lire le tome 2 (que j’ai également pris)… et parce que des fois, je lis rapidement ce que j’achète, je l’ai lu dans la foulée.

De quoi ça parle

Deux astronautes sont seules en mission vers Vénus et Mars. Mais un accident va survenir et l’une d’entre elles va se trouver condamnée. La survivante va donc raconter son histoire à une base qui ne répond plus.

Mon avis

J’avais beaucoup aimé Valide et je crois que j’ai encore préféré cette nouvelle, sachant dans quel contexte elle s’inscrivait. Même si l’histoire est très différente, elle m’a par moment rappelé « This is how you lose a time war« , en moins poétique. Et pas en guerre. Bref, je ne saurais pas pantoute dire pourquoi mais la vibe m’a rappelé ce court roman.

Comme dans son roman précédent, nous avons un personnage qui se raconte, sans pudeur, à un interlocuteur assez vague qui, cette fois, ne répond pas. Andrea Chang, astronaute extraordinaire, va raconter son histoire avec son équipière et amante. Leur amour et la mort de celle-ci. Ça parle de deuil d’une façon très touchante, sur fond d’étoiles et de planètes à découvrir.

La plume de Chris Bergeron a ce côté enveloppant mais intense à la fois que j’aime retrouver dans ce type de récit. On sent l’immensité de l’attachement et de l’amour des deux personnages, on sent la douleur derrière les mots mais aussi l’espoir qui pointe parfois le bout de son nez. J’aime que l’autrice se permette des petites flèches bien senties à son monde et au patriarcat, tout en restant dans le thème, tout en servant son message.

Bref, j’ai maintenant très hâte de lire Vandale, son roman suivant pour retrouver cet univers aplani « pour le bien des hommes » (of course). Ça devrait être fait en 2024!

Après les tempêtes – Patrice Godin

Je n’ai jamais lu Patrice Godin. Je dois être snobinette (ou mécréante) mais quand je connais une personne dans un certain rôle, j’ai du mal à croire que la dite personne puisse avoir du talent partout. Mais Marie-Josée m’a convaincue de lire celui-ci au salon du livre… et c’est aussi ma première lecture pour le gala du roman québécois.

De quoi ça parle

Martin est un écrivain blessé. Il est dans la cinquantaine, un peu (ok, beaucoup) paumé et s’est isolé dans un chalet du Maine. Un soir, il reçoit un appel : sa mère est décédée. Sa mère avec qui il avait une relation complexe et qu’il n’avait pas vue depuis un moment. C’est avec Jane, un femme mystérieuse, qu’il va faire la route jusqu’à son enfance.

Mon avis

Je n’avais pas raison de douter de la qualité d’écriture de Patrice Godin. Tout de suite, ça a fonctionné avec moi. J’aime bien les longues phrases pleines de virgules. Le thème me plaisait bien également. Je suis une fille-à-maman alors les relations mère-enfant m’intriguent toujours, même si celles-ci sont aux antipodes de ce que moi j’ai vécu. Le deuil d’un parent est ma hantise… je n’ose même pas imaginer la fin d’une telle relation sur des non-dits.

J’ai donc apprécié tout le début avec l’ombre de Yourcenar qui plane. J’ai aussi aimé le retour en arrière, même si les choix narratifs impliquent d’expliquer sans montrer. La violence familiale et surtout le silence, les yeux qui se ferment, sont poignants et on comprend la colère et le ressentiment du personnage principal.

Par contre, je n’ai pas du tout adhéré à l’histoire avec Jane, femme évanescente qui m’a semblé là uniquement pour « sauver » le personnage. Genre, la version mature de la manic pixie dreamgirl, avec un lourd passé en prime. C’est d’ailleurs parfaitement assumé par l’auteur. Ceci dit, j’aurais préféré que la relation ne soit pas si rapidement charnelle. Mais est-on surpris que ce soit le côté « histoire d’amour » qui me touche moins?

En résumé, certains aspects m’ont touchée. Cette difficulté à « ne pas aimer » malgré les blessures, ce deuil plein de « unfinished business », ça me plait. J’aurais peut-être préféré davantage d’accent sur cette partie, une plus grande plongée dans la psyché de cet homme. J’aurais voulu voir les scènes au lieu de me les faire raconter. Je crois que j’aurais été davantage touchée. Ceci dit, c’est clairement un parti pris par l’auteur.

Relirai-je l’auteur? Probablement. Sa plume m’a plu. Par contre, je suis mitigée avec ce roman-ci.

Vidéo – Lisons les favoris des booktubeurs

Avouons tout, mon Feedly est mort. 

Retrouver les billets « favoris des blogueurs » était… compliqué cette année mais je me suis promis de reprendre ce concept l’an prochain, mais avec d’autres blogueurs au lieu de seulement des booktubeurs. Bref, j’ai épluché les listes de livres favoris de 2023… et je me suis donné  un choix pour en lire quelques uns. Pourquoi ne pas tenter de faire des bonnes lectures, tant qu’à faire!

En attendant, tous les livres et les booktubeurs mentionnés sont dans la barre d’info sous la vidéo!

Et vous, avez-vous fait un billet « les meilleurs de 2023? »

Triste tigre – Neige Sinno

Je ne sais pas si j’aurais eu le courage de lire cette histoire sans une vidéo sur les prix littéraires. J’ai toujours du mal à parler – et encore davantage à porter un jugement de valeur – quand il s’agit de faits vécus, surtout sur ce thème. Mais je l’ai lu. Et j’ai été secouée.

De quoi ça parle

Neige Sinno a été violée par son beau-père tout au long de son enfance. Plus tard, elle a décidé de dénoncer. Et encore plus tard, d’en parler dans ce texte, difficile à qualifier tant il est particulier par sa forme. Entre roman, essai et questionnement, on explore cet acte qui a marqué l’autrice.

Mon avis

Ce que j’ai pu être remuée par ce texte, par ces mots. Ça parle de viol et d’inceste, d’abus d’enfant, c’est parfois explicite mais jamais impudique. C’est assez paradoxal comme affirmation, je l’avoue. Mais la perspective, la mise à distance sans jamais nous couper de l’émotion permet une vraie réflexion sur l’acte, certes, mais aussi sur la suite, les conséquences sur la vie de la victime. C’est fort. Très fort. Et ça frappe sans jamais que le lecteur se sente voyeur. Je pense que ce n’est que de cette façon que je peux apprécier un tel texte.

Nous avons ici un long questionnement. L’autrice tourne et retourne les événements, les points de vue. Certaines affirmations sonnent juste et blessent par leur réalisme. Par exemple, la personne intéressante dans l’histoire, n’est-ce pas le bourreau? N’est-ce pas sa psyché à lui qui est fascinante? Et pourquoi elle? Qu’est-ce qui a motivé ce choix. Cet homme est un monstre. Ben non, voyons, jamais il n’abuserait de l’un de ses PROPRES enfants! Quel manipulateur.

De plus, l’autrice aborde l’écriture qui, pour elle, n’est ni rédemptrice ni libératrice. Elle ose les références littéraires, elle ose faire des parallèles. Comme j’ai lu Lolita cette année, ça me parle. Le format écrit est aussi très intéressant et alterne articles, flashbacks et réflexions. Bref, lecture difficile mais nécessaire.

L’Iris blanc – Astérix 40 – Fabcaro / Conrad

Fabcaro + Astérix. Il fallait. CQFD.

De quoi ça parle

César a une nouvelle idée pour vaincre les Gaulois : une toute nouvelle philosophie basée sur la pensée positive est supposée rendre leur courage aux romains qui les combattent. Sauf que côtoyer l’énergumène gourou qui enseigne cette philosophie va avoir un drôle d’effet sur les irréductibles Gaulois.

Mon avis

Il y a longtemps que je n’avais pas autant ri en lisant un Asterix. Pourtant, ici, j’ai éclaté de rire (fort) à plusieurs reprises en retrouvant les jeux de mots potaches et les références détournées à la France d’aujourd’hui. Rien à faire, les références, c’est mon truc. J’a-do-re. Il n’en fallait pas davantage pour me charmer.

Pourtant, si j’admire l’originalité de Fabcaro, son humour absurde ne passe pas toujours avec moi et il me manque souvent des références. Ici, c’était tellement de base, tellement gros, que j’ai pu tout comprendre. Ravie je suis.

Ici, tourne en dérision la pensée positive souvent étalée à la truelle par plusieurs personnes. J’ai adoré voir les gens se faire prendre au point d’en être ridicules et le pire, c’est que des fois, on reconnait certaines attitudes. Bref, j’ai aimé. Certes, le rythme de l’intrigue est assez inégal mais pour ma part, ça a passé. Voire même très bien passé. Non mais des Gaulois qui n’ont plus envie de se taper dessus, ça ne va pas le faire. Mais clairement pas!

C’était très chouette d’entendre nos personnages préférés avec leurs répliques cultes (rien à faire, je les entends dans ma tête!) et le dessin respecte quand même le style des albums originaux. Après les déceptions qu’ont été les derniers albums, celui-ci est une excellente surprise!

C’était ma BD de la semaine! Tous les billets chez Noukette cette semaine!

Veiller sur elle – Jean Baptiste Andrea

Je ne sais pas si j’aurais décidé de lire ce roman sans le Goncourt. Sans le fait que plusieurs aient dit que c’était un roman trop « populaire » et « facile » pour gagner le Goncourt. Du coup, je voulais le lire, Of course.

De quoi ça parle

Mimo n’a pas été gâté par la vie. Il présente de l’achondroplasie, a été envoyé en apprentissage à un scupteur sans intérêt et jaloux. Viola a grandi tout près de chez lui, mais elle est née dans une riche famille, a grandi choyée par la vie, mais ses parents ont pour elle des ambitions. Ils n’auraient pas dû se rencontrer dans l’Italie de l’entre-deux guerres mais ils vont devenir tout l’un pour l’autre.

Mais le fascisme rôde et leurs différences de classe ne vont pas simplifier leur relation. Et que dire de cette mystérieuse Pièta sculptée par Mimo qui doit rester loin des regards?

Mon avis

Ok, ce roman est hyper accessible. Ok, il y a quelques facilités. Mais depuis quand est-ce une mauvaise chose? Surtout quand, comme moi, on le dévore en 3 jours? Je suis bien obligée de dire que j’ai vraiment beaucoup aimé ce roman qui raconte l’histoire de Mimo, un homme plein de contradictions et de failles. Il n’a pas tiré les bonnes cartes, fait beaucoup de mauvais choix pour réussir, pour être à la hauteur de Viola, son grand amour. Il a un talent fou pour la sculpture, n’aime pas jouer selon les règles établies et a la morale élastique. Viola, quant à elle, refuse les règles établies mais vit dans un univers très codifié, à une époque où il n’est pas facile d’être une femme. Une femme intelligente? Encore pire. J’aime énormément ce personnage qui n’est pas d’accord avec sa famille qui se rapproche de Mussolini mais qui a aussi des périodes difficiles. Vraiment difficiles.

On parle de longueurs… peut-être. Peut-être les scènes de beuverie sont-elles un peu redondantes. Mais j’ai dévoré cette histoire. J’ai été in-ves-tie. Les chapitres relatifs à la Pièta m’a énormément plu. Cette sculpture qui fait un effet incroyable à plusieurs personnes et qui doit rester cachée dans un monastère, monastère où se meurt maintenant Mimo, qui partira probablement avec le secret de cette sculpture. Et parce que je n’ai pas cherché, parce que mon attention était retenue ailleurs, par cette histoire d’amour impossible, j’ai été ma foi surprise par la dernière phrase. Parce que je ne croyais pas qu’il y avait là quelque chose à voir venir. Et je suis restée la bouche ouverte. Pour une petite chose. Toute petite.

Cette histoire a un vrai souffle romanesque. On voit passer le début du siècle à travers les yeux des personnages, on voit leurs contradictions, il y a presque une touche de réalisme magique, j’ai aimé détester certains personnages… bref, ça passe parfaitement avec moi. Ils existaient, ces gens, avec leurs passés et leurs blessures qui vont influencer leur choix. Et j’adore Viola! Je l’ai dit hein? Je vais donc me répéter… j’adore Viola!

Agréable surprise. Je ne m’attendais pas à tant aimer.

Match – Lili Boisvert

J’ai récemment entendu parler de ce livre sur la chaîne d’un youtubeur québécois (et réalisateur et animateur) connu pour parler de livres. Ceci dit, il en parle une ou deux fois par année et il est full populaire. je l’ai entendu en parler et je me suis dit… HEIN? A-t-on lu le même livre? Alors je vous en parle à mon tour.

De quoi ça parle

Emilie, jeune femme présente sur les réseaux, féministe et chroniqueuse rencontre Ludwig à travers Tinder. Elle l’aime bien, le trouve chouette et drôle et malgré les red flags, elle va entrer dans cette relation qui sera toute sauf saine.

Et non, ça n’est pas « bourré d’humour » et ça n’est pas un florilège de rencontres Tinder. Pas du tout.

Mon avis

Entendons-nous, je suis des méchantes personnes qui ne trippent pas taaaant sur l’autofiction. En fait, non. Je ne suis pas ATTIRÉE par l’autofiction. Et ici, même si ce n’est pas précisé comme tel, ça y ressemble. Le personnage principal a le même passé que l’autrice, surtout au plan professionnel (en fait, pour le reste, je ne sais pas du tout) et les gens qu’elle rencontre, avec qui elle collabore, ont beaucoup en commun avec des personnes connues ainsi qu’avec leurs oeuvres. Bref, Émilie ressemble à Lili. Ses idées ressemblent à celles de Lili. Je ne sais pas si elle raconte ici son histoire d’amour toxique, mais c’est possible.

C’est une histoire de la blonde d’un mec violent. Sauf que c’est la violence qui semble moins spectaculaire, celle qui fait des bleus sur l’âme et pas sur le corps. La violence qui ne se rend jamais jusqu’au coups mais qui ne s’arrête jamais.

Ça semble « déjà lu » mais ce qui m’a interpelée est l’effet de cette situation sur cette femme, qui se définit elle-même par une femme forte, féministe, militante. Elle aussi peut se laisser prendre dans une telle spirale. Même si elle est elle, même si elle combat pour les droits des femmes. Ce récit nous montre que même quand on sait, on peut tomber dans l’aveuglement volontaire parce que ça fait trop mal de l’accepter. D’accepter que la « femme forte » se soit fait manipuler par un mec. Parce qu’après, elle est qui quand cette réalisation contredit la définition précise qu’elle a d’elle-même?

Et parfois, les commentaires! Elle, elle est forte, le mec, lui, il a souffert, tellement vulnérable, ça explique ses comportement, son imprévisibilité… disons que ça m’a rappelé des souvenirs!

Par contre, comme souvent avec ce type de texte, je me suis sentie voyeuse. Comme si je n’avais pas besoin de savoir tout ça concernant une personnalité publique. Je réagis aussi différemment quand l’auteur n’est pas une personne connue mais ici, j’avais quand même un petit malaise. C’est ce qui m’a empêchée d’être totalement embarquée dans l’histoire.

Côté plume, c’est très simple, très direct, sans fioriture. Pas le type d’écriture que je préfère mais ici, contrairement à un autre roman que j’ai lu de l’autrice, ça collait avec le propos. C’est sur celui-ci que l’attention est mise, pas sur le style. Je comprends le choix. Mais il demeure que le sujet est important… et que j’ai aimé!

Ce que je sais de toi – Eric Chacour

J’ai décidé de lire plusieurs prix littéraires. Si j’ai fait ce que je suis supposée faire, il devrait déjà y avoir une vidéo à ce sujet. Ma mère m’avait mentionné qu’elle avait beaucoup aimé ce roman, que c’était hyper accessible… et je me suis décidée.

De quoi ça parle

Le Caire, 1980. Tarek est médecin, il a suivi la vocation de son père, il est marié, il a une famille, une belle maison. Et il va bien. C’est quand il décide d’aller pratiquer dans un quartier très pauvre du Caire, presque sur une pile d’ordure, qu’il va basculer.

Il va rencontrer un jeune homme alors qu’il va soigner la mère de ce dernier. Il va nouer une relation avec de duo mère-fils… et finalement avec le fils. Et son existence sera bouleversée.

Mon avis

Disons-le d’emblée, j’ai adoré cette lecture. On m’avait bien dit que c’était bien, mais je ne m’attendais pas à aimer autant. C’était exactement ce dont j’avais besoin. Ça se lit tout seul, c’est fluide mais littéraire à la fois. J’ai totalement adhéré à la narration, à ce « tu » dont on comprend assez facilement l’origine. Sauf que peu importe. Et que la fin rend ce « tu » encore plus intéressant. Bref, c’était pour moi. Juste pour moi.

C’est l’histoire d’un homme qui a suivi une voie qu’on a choisie pour lui. Il a suivi les traces de son père, ne sachant pas trop comment vivre autrement. Ses désirs à lui n’avaient pas leur place. Il n’a pas su leur faire une place dans cet univers, ces traditions et dans cette famille. C’est un homme touchant, qui souhaite aider mais cette clinique hors de son monde à lui va occasionner une rencontre, et cette rencontre va bouleverser sa vie, jusqu’à le mener à l’exil. C’est que le drame éclate et qu’il ne voit aucune autre solution que de partir.

À cette époque, au Caire, les relations entre hommes n’était pas nécessairement bien vues (ceci dit, ce n’est pas simple non plus maintenant). Surtout dans ce contexte. Et l’honneur de la famille, c’est important. Bref, il est parti. Et il vit depuis entre deux mondes, loin de tout, dans la gadoue, sans passion. Il est entre ici et là-bas, étranger partout, même à sa propre vie. Comment accepter le fait d’avoir laissé des gens derrière soi? Les personnages de Chacour sont complexes, les relations entre eux faites de zones de gris et j’ai été touchée par chacun d’entre eux, même si leurs actions m’ont parfois fait rager.

On se balade entre passé et présent, entre l’Egypte et Montréal… et sérieusement, cette narration… j’aime encore plus quand je pense à ce qu’est réellement ce récit. Bien fait. Très bien fait. Ensorcellant et fascinant.

Que notre joie demeure – Kevin Lambert

C’est le troisième livre que je lis de Kevin Lambert. Je l’ai un peu connu enfant et j’ai tout de suite été curieuse. Du coup, depuis, je le suis. Et cette fois, il a gagné le Médicis. Du coup, il fallait bien que je le lise n’est-ce-pas! Avec des attentes dans le plafond!

De quoi ça parle

Céline Wachowski est une architecte montréalaise. Mais une architecte-star. Talentueuse certes, mais très « in ». Glamour. Quand elle est engagée pour un énorme projet à Montréal, « sa » ville, pour créer un siège social pour « Webuy », un genre d’Amazon imaginaire, elle est ravie et persuadée de faire quelque chose de bien. Sauf qu’elle a des détracteurs. Et nous allons assister à sa chute.

Mon avis

Kevin Lambert est un homme cultivé. Il y a toujours une vraie recherche dans ses romans, dans son écriture. Des messages aussi. Ici, on discute de la vie des ultra-riches, mais surtout du capitalisme, des politiques et de la gentrification. Et même si le parti pris par l’auteur est clair, il réussit tout de même à faire ressortir quelques zones un peu grisées. Un peu. Genre, les protestataires ne sont pas non plus toujours sans reproche.

Ici, je suis encore une fois très fan de la plume. L’hommage à Marie-Claire Blais est perceptible et on ressent également plusieurs accents proustiens. Et bon, cite Proust… and I’m there. Toujours. C’est certes très travaillé, les premières phrases durent… quelques pages, mais c’est le genre d’écriture dont je me délecte. Et dans ce cas, cette qualité littéraire a fait que j’ai pu apprécier la longue scène d’ouverture, où nous entrons dans la tête des ultra-riches, de ceux qui ont le choix, de ceux qui font les règles. Nous assistons à une grande fête, très chic, très glamour (et très chère), alors que chacun vit ses propres petites anxiétés, tout en étant persuadé de sa propre supériorité. Bref, personne n’est vraiment très sympathique.

Toutefois, le personnage de Céline est plus fouillé. Elle est riche. Très. Mais elle se croit de gauche, est persuadée d’être une bonne personne. Et le pire, c’est que ses intentions ne sont pas nécessairement mauvaises. Elle croit en son projet. Elle croit que ça va être positif pour Montréal et pour les citoyens. Elle a tenté d’évincer le moins de gens possible. Mais derrière la femme, derrière ces bonnes intentions, il y a une multinationale. Et un jour, quelqu’un va en parler. Et Céline va tomber.

La réflexion derrière le tout est intéressante mais on offre assez peu de réponses, assez peu de pistes de solutions. Y en a-t-il une? J’ai aimé lire sur l’architecture, sur l’urbanisme mais j’aurais aimé davantage de résolution. Cette lecture m’a fait ressentir un réel malaise. Parce que je me retrouvais entre deux chaises. J’emmerde tout le monde depuis des années avec ma « limitation de la richesse personnelle » et impossible de ne pas détester le capitalisme après cette lecture. Les puissants décident, ceux qui ont de l’argent décident (juste à penser QUI précipite le plus la chute de Céline), on se fout des gens, même si on tente de sauver les apparences. Sauf que bon. On fait quoi avec les quartiers? On fait quoi avec les immeubles insalubres? Je peux parfaitement comprendre l’horreur de se voir pousser hors de son quartier. Je regarde les prix des apparts un peu partout et je panique. Mais tous les projets sont-ils mauvais? Laisse-t-on le tout en l’état? Même quand ce sont des bidonvilles, c’est le « chez eux » de gens… bref, il n’y en a pas de bonnes solutions.

J’ai donc bien aimé. Je ne suis pas tombée sur le c… non plus et j’avoue avoir préféré son premier livre. C’est réfléchi, bien fait, il est intéressant d’explorer les insécurités de ces fort nantis et de voir les histoires qu’ils se racontent pour se justifier. C’est clairement anti-capitaliste mais les personnages restent crédibles. Céline devient le bouc émissaire de tout un système (auquel elle a certes participé, mais elle n’était clairement pas la seule responsable), mais disons que quand on a des sous…

Bref, je suis ressortie en colère. Contre la situation. Et contre ceux qui croient normal de détenir une si grande proportion des richesses.

Hell Bent – Alex Stern – 2 – Leigh Bardugo

Je fais partie de ceux qui avaient bien aimé Ninth House. J’avais trouvé des lenteurs, certes. Mais j’avais appris à apprécier Alex, jeune fille qui revient de loin et qui peut voir les fantômes, aux prises avec un monde de privilégiés dont elle ne détient pas les codes. Du coup, j’ai lu le tome 2. Que dire, que dire…

De quoi ça parle

Encore une fois, difficile de ne pas spoiler le tome 1 quand on veut parler de ce tome 2. Je me contenterai de dire que nous sommes toujours à Yale, dans le petit univers des sociétés secrètes et qu’Alex fait son possible, tout en essayant de comprendre ce qui a bien pu arriver à Darlington, le Gentleman de Lethe et surtout de voir si elle peut faire quelque chose pour le récupérer.

Mon avis

En fait, quand on lit le résumé, on comprend un peu ce qui a pour moi posé problème dans cette suite: mais de quoi est-il question, en fait? Quel est l’arc narratif global? Une histoire de rédemption, de bien et de mal? Quand on sent que l’auteur souhaite qu’on se balade à l’aveuglette dans un roman, je n’ai aucun souci avec ça. Au contraire, j’aime. Mais là… j’ai eu l’impression de lire un roman plein de bonnes idées, mais avec un sérieux problème de rythme. Un souci d’exécution, quoi. Comme si pendant le premier tome, on allait dans une direction… et que ça changeait en plein milieu. Vous me trouvez donc assez mitigée.

En fait, j’ai trouvé ma lecture in-ter-mi-na-ble. Les événements sont un peu répétitifs, ça ne finit jamais de finir… autant j’avais lu le premier en une journée, autant ici, ça a traîné en longueur Je n’ai même pas réussi à le finir en 2024. Pourtant, les personnages, eux, n’arrête pas une demi-seconde pour respirer. Ce qui fait que les moments de tension sont… la norme. Décevant donc.

Et décevant surtout parce qu’il y avait de quoi faire. J’aime beaucoup les personnages. Alex est un personnage intéressant et complexe sous ses apparences de fille dure à cuire qui a dû faire ce qu’elle peut pour survivre. Darlington est… Darlington et Dawes est à découvrir. L’ambiance Dark Academia est moins prégnante dans ce tome et je me suis sentie davantage dans un roman d’urban fantasy. Ce qui était peut-être l’objectif.

Ceci dit, j’adooooore le setting de Yale. L’autrice s’est servie de vrais éléments architecturaux, de vraies inscriptions et les a intégrés dans son histoire. Vous pouvez vous imaginer que je me suis amusée à aller vérifier. Il y a donc un vrai travail de recherche, de l’imagination dans l’interprétation… beaucoup de belles choses. Mais j’ai jonglé avec l’idée d’un DNF pendant toute ma lecture. Et oups, il se passait quelque chose de BIEN!

Genre, à la fin. Comme ça donne l’impression d’un roman arrêté au milieu, il va falloir que je lise la fin. Of course.

Et le commentaire inutile du jour : Non mais il y a une b… lumineuse et prête à l’action tout au long du roman… et on ne va pas l’utiliser? I feel cheated!