La ballade du Serpent et de l’oiseau chanteur – Suzanne Collins

Quand ce roman est sorti, on m’avait dit de passer mon chemin, qu’il était moins bien que la trilogie d’origine. Puis, 4 ans après, on m’a dit le contraire. Je l’ai donc lu. Et j’ai bien fait.

De quoi ça parle

Nous sommes 64 ans avant la trilogie originale et les Hunger Games en sont à leur 10e éditions. Le Capitole a décidé d’impliquer les élèves dans les Jeux en les nommant mentors. Coriolanus Snow, issu d’une noble famille désargentée, est du nombre. Il sera donc jumelé à Lucy Gray, la fille du district 12, sur laquelle personne n’aurait parié. Bienvenue dans l’histoire d’un grand méchant!

Mon avis

J’aime beaucoup les « villain origin story ». J’aurais dû savoir que je passerais un très bon moment, surtout que The Hunger Games fait partie de mes dystopies préférées. Nous passerons quelques mois avec Coriolanus Snow, ceux qui seront déterminants dans son parcours. De quoi est fait un vilain? De son passé? De ses choix? De lui-même? Ici, Suzanne Collins ne se contente pas de nous dire « il a eu une dure vie donc maintenant, il tue des gens ». Nous avons droit à une vraie évolution en terrain fertile. Si nous rencontrons un jeune homme crédule, qui tente de faire la bonne chose au début du roman, il est loin d’être un humain parfait. Arrogant, persuadé de sa propre importance, il souhaite récupérer l’honneur perdu de sa famille, il veut briller, avoir le pouvoir. Dès le départ. Toutefois, dans les jeux, il agit certes pour lui-même mais n’est pas non plus un être méprisable. Pas vraiment, il y a pire que lui. C’est petit à petit qu’il va faire des choix, qu’il va déterminer lesquelles des personnes influentes de sa vie il va croire.

Et c’est ce que j’ai vraiment apprécié. Certes, la spirale le prend assez rapidement, mais c’est une modification profonde de sa façon de voir le monde, de considérer les gens, qui va le transformer et lui apprendre à ne plus jamais être vulnérable. Car il l’est devant Lucy Gray, son tribut, de qui il va tomber amoureux. J’adore ce personnage, droite dans ses bottes malgré ses failles et les décisions difficiles qu’elle a dû prendre. Tous les personnages secondaires sont intéressants et l’évolution de leurs relations l’est tout autant. Ils sont pris dans leurs croyances et leurs perceptions et ils vont se confronter sans toujours réussir à s’influencer suffisamment. C’est selon moi hyper bien fait.

Bref, une réflexion sur la nature humaine, une histoire qui nous transporte de l’arène au district 12, beaucoup d’action et de moments déchirants. Être dans la tête de Snow devient de plus en plus difficile au fil des pages, alors qu’il est encore persuadé d’être le bon de l’histoire et de ne pas avoir eu le choix. Impossible de ne pas apprécier les liens avec la trilogie originale et de s’imaginer la colère et le désarroi du Président Snow quand Katniss est apparue. J’aime beaucoup la finale ambigue.

Bref, une lecture qui me donne envie de relire la trilogie originale… et d’écouter le film. Maintenant, je chante The hanging Tree!

Tata – Valérie Perrin

J’ai déjà lu Valérie Perrin. Changer l’eau des fleurs m’avait plu, dans le genre roman grand public émouvant qui rejoint une grande quantité de gens. La prémisse de Tata me plaisait bien… alors je l’ai lu!

De quoi ça parle

Quand Agnès reçoit un appel de la gendarmerie, elle a la surprise de sa vie. On lui annonce que sa tante célibataire, Colette Septembre, est décédée. Sauf que Colette est déjà morte. Trois ans plus tôt. Elle va donc revenir dans le petit village où elle a passé tous ses étés pour tenter de résoudre le mystère qui entoure sa tante.

Mon avis

Encore une fois, j’ai passé un très bon moment de lecture avec ce roman de Valérie Perrin. C’est un roman à la plume très accesible, avec des personnages très attachants sans être parfaits. Certes, certaines ficelles sont parfois faciles, il y a un côté folklorique, on tombe un peu dans la surenchère de malheurs et de thèmes exploités mais, allez savoir pourquoi, ça a passé et c’est pour moi une bonne lecture.

Nous avons donc Agnès, cinéaste célébrée qui a vécu un divorce difficile duquel elle ne se remet pas. Son ex-mari célèbre a refait sa vie mais elle l’aime toujours et ce retour aux sources obligé n’est pas simple pour elle. Sa tante qu’elle croyait morte et qui ne l’était finalement pas se révèle une femme bien plus complexe que la vieille fille rigide fan de foot qu’elle semblait être. Agnès va retrouver des cassettes enregistrées – sans montage – par sa tante et cette écoute lui permettra une incursion dans le quotidien de Colette et ainsi savoir ce qui se cachait dans les pages blanches de l’histoires familiales.

C’est donc un roman sur les secrets de famille. Les nombreux secrets de famille. C’est que Colette en a vu des choses, ayant grandi dans une petite ville, dans une famille paysanne pauvre avec une mère qui ne l’aimait pas. Elle est prête à tout pour protéger son petit frère Jean, pianiste prodige et faire son propre chemin dans la vie, idéalement par elle-même, Et nous, comme lecteur, nous voulons connaître la suite de l’histoire, nous voulons savoir pourquoi elle a choisi de faire semblant de mourir trois ans plus tôt.

C’est donc une histoire de découverte de soi et de reconstruction, de souvenirs d’enfance et de retour aux sources. Certes, j’ai ressenti des longueurs vers la fin du roman et le procédé de l’écoute des cassettes s’épuise après un moment, même si l’histoire de Colette est centrale. J’aurais peut-être aimé explorer davantage la relation tante-nièce mais somme toute, c’était agréable. Et j’ai eu envie d’aller voir un match de foot!

Mr. Mercedes – Stephen King

Ma mère et mon frère ont adoré Holly. Je voulais le lire sauf que j’ai cru comprendre qu’il fallait avoir lu la série de Bill Hodge avant. Alors voilà. J’ai commencé.

De quoi ça parle

Bill Hogue est un policier à la retraite. Un policier qui s’ennuie ferme à la retraite. Il reste hanté par un dossier, celui du tueur à la Mercedes qui, un jour, a foncé à toute allure dans une file d’attente avec une luxueuse voiture, pour ensuite disparaître dans la nature. Quand il reçoit une lettre du dit tueur, il va sortir de sa torpeur et débuter la traque.

Mon avis

Je suis fan de King. Je sais que je passe toujours un bon moment dans ses romans et je m’attache généralement aux personnages. Du coup, mes attentes sont élevées. Mr. Mercedes est un bon roman, qui m’a tenue en haleine et qui m’a divertie du début à la fin. Ceci dit, ce n’est pas mon King préféré. Même si c’était bien. On dirait que je ne juge pas Stephen King avec le même standard que les autres auteurs!

Nous avons donc un personnage principal qui m’a beaucoup plu et que je prendrai plaisir à suivre dans les prochains romans qui lui sont dédiés. Il ne s’embarrasse pas des règles, ne vit pas du tout bien sa retraite et il se sent revivre dans son rôle de flic. Il ne veut pas passer la main à ses anciens collègues, même s’il sait clairement qu’il le devrait et on comprend pourquoi. Bref, un très bon personnage.

Stephen King est un vrai conteur. Son écriture est cinématographique et, comme d’habitude, j’ai eu l’impression de voir les images défiler devant mes yeux. De plus, il réussit toujours à glisser dans ses romans un portrait de l’époque, avec ses bons et ses mauvais côtés. Nous avons aussi un méchant bien méchant dans la tête duquel il ne fait pas bon vivre, même le temps d’un roman. Il est raciste, homophone, sexiste, méprisant… impossible de ne pas réagir à ses propos. Clairement, ça ne va pas bien dans sa tête. Et il va le faire subir à tous. Là aussi, c’est très réussi. La scène d’ouverture est glaçante.

J’ai aussi beaucoup aimé les personnages secondaire, notamment Holly, qui apparaît un peu plus tard dans le roman et qui est… un phénomène! J’adore Holly et sa bizarrerie. Le jeune Jerome est aussi un personnage succulent. J’ai moins apprécié l’histoire avec Janey, soeur d’une femme impliquée dans l’histoire, qui m’a semblée un peu capillotractée et la partie du milieu est moins haletante mais, somme toute, c’est une bonne lecture, avec un King qui utilise les codes du polar/thriller avec des clin d’oeils à ses anciens romans. Je lirai la suite… mais je pense quand même attendre un peu!

Le guide et la danseuse – R.K. Narayan

J’ai lu ce roman en Inde, lors de mon récent voyage, plongée dans la culture de l’endroit. Aurais-je autant aimé si je l’avais lu à un autre moment? Je ne sais pas. Toujours est-il que ce roman est arrivé juste à point.

De quoi ça parle

Raju, au départ, n’avait rien d’un saint homme. À sa sortie de prison, il va s’installer dans un temple abandonné et il sera repéré par un paysan qui le prend pour un sadhu, un saint homme. Il va accepter le rôle, devenir swami et être nourri par la population, tout en réfléchissant sur son passé et sur ce qui l’a mené là.

Mon avis

Je ne sais pas s’il m’aurait été possible d’apprécier ma lecture sans avoir entrevu la culture indienne et la façon de penser des Indiens. J’ai vu ces saints hommes errants, j’ai ressenti cette atmosphère de foi profonde qui émane parfois des gens et des communautés. J’ai aussi pu voir la débrouillardise des Indiens qui n’ont pas le choix d’avoir plusieurs cordes à leurs arcs. Bref, j’aurais pu aimer, mais j’en aurais certainement manqué des bouts.

Le récit n’est pas linéaire mais il demeure très accessible. La plume est simple malgré les thèmes variés et spirituels. Nous le rencontrons après sa sortie de prison alors qu’il se fait passer pour ce qu’il n’est pas : un saint homme. Pourtant, il va donner le change parce que c’est plus simple. Sauf que la mousson n’arrive pas et que l’eau manque. Que peut faire le swami? Petit à petit, il va raconter son histoire et nous allons voir ce qui l’a amené là. Est-il vraiment un Guide?

Né d’un père commerçant, le jeune Raju tient boutique à la gare, oeuvrant comme guide touristique occasionnellement pour les riches visiteurs. Est-il qualifié? Pas du tout. Il va apprendre sur le tas et y croire. C’est lors d’une de ces missions qu’il va rencontrer Rosie, femme mariée qui ne souhaite que danser. Son mari est passionnée d’archéologie et ne la regarde que très peu, contrairement à Raju, qui est fasciné. La femme est ici soit une femme parfaite, soit une prostituée au yeux des gens et la présence de l’ensorcelante jeune femme ne va pas faire ressortir que les bons côtés de Raju, qui va céder à ses passions et à des instincts pas saints du tout. Pourtant aucun personnage n’est tout d’une pièce, chacun a ses bons et ses mauvais côtés, chacun peut trahir ou faiblir. Ils ne sont que plus intéressants.

Nous avons ici un récit de rédemption alors que Raju se coule peu à peu au rôle qu’il s’est inventé, mais ce n’est pas non plus gagné d’avance. De plus, on peut y voir une critique de la société de l’époque. Bref, même si les croyances qui sont au centre du récit sont loin des miennes, c’est une très bonne lecture.

Meurtres avec vue – DreadfulWater – 1 – Thomas King

C’est mon amie Yueyin qui m’a conseillé la lecture de cette série. Elle m’a parlé de littérature autochtone, de crimes pas trop gore et de polars avec de l’humour dedans. Of course, j’étais pour!

De quoi ça parle

Thumps DreadfulWater était policier en Californie. Était. Il a quitté cet univers pour le nord, à Chinook, près d’une communauté autochtone. Il souhaite seulement faire son petit bonhomme de chemin en tant que photographe mais quand un meurtre survient dans le futur casino dont les bénéfices reviendraient à la communauté, il se trouve malgré lui empêtré dans l’histoire. C’est que le suspect numéro 1 n’est nul autre que le fils de sa « bonne amie », membre importanté de la communauté. Il va donc se mettre le nez dans l’enquête.

Mon avis

Voici donc le genre de roman auquel je demande de passer un moment et d’être un peu dépaysée si possible. C’est tout à fait ce que j’ai eu ici. J’ai été transportée dans une réserve dans les montagnes, avec son lot de petites magouilles et de grands projets. Si l’enquête est somme toute conventionnelle, les personnages ne le sont pas et la plupart d’entre eux sont prometteurs et hauts en couleurs. Nous avons une coroner au coeur solide, une femme du conseil de bande prête à tout pour son fils, un officier de police qui fait de son mieux et une réceptionniste qui ne se laisse pas marcher sur les pieds. L’esprit de communauté est partout présent, on sent l’entraide malgré tous les obstacles qui se dressent devant eux. L’atmosphère est super réussie.

Thumps est un personnage en soi. Il a abandonné la police pour une raison qui sera révélée dans le roman et se reconstruit petit à petit. Il est attachant, bourru mais surtout très drôle. En fait, la plume est drôle. La façon de présenter les événements, parfois tragique, devient occasionnellement hilarante. Le regard jeté sur les événements est décalé et intelligent, il joue avec les stéréotypes sans jamais sombrer dans la farce. Du coup, je serai ravie de lire les autres tomes de la série.

Célèbre – Maud Ventura

Je n’ai pas lu le premier roman de l’autrice, Mon mari. Je me suis toutefois laissé tenter par celui-ci, l’attachée de presse me l’ayant très très bien vendu. Et j’ai bien fait de l’écouter!

De quoi ça parle

Cléo a toujours voulu être célèbre. Mieux, elle a toujours SU qu’elle serait célèbre. Elle le mérite après tout. Elle y travaille, elle fait tout pour et après tout, elle est Cléo Louvent!

Elle devient star internationale et nous entraîne dans la part cachée de la célébrité.

Mon avis

Non mais quelle lecture! J’ai rarement autant détesté un personnage que la célèbre Cléo Louvent, qui est tout de même une sérieuse candidate au titre de Number one sociopathe! L’histoire est racontée au « je » et nous sommes dans sa tête pendant tout le roman, ce qui est parfois épuisant. Entre la façade et la réalité, il y a tout un monde, voire tout un univers. Peut-être deux.

On nous dresse donc un portrait au vitriol du monde des célébrités, des ultra riches et des grandes vedettes. Le personnage de Cloé est certes caricatural et détestable mais elle fascine et nous entraîne dans toute une ride. On se demande jusqu’où elle va aller dans sa méchanceté et dans ses exigences, et elle réussit toujours à aller plus loin. Après cette lecture, impossible de ne pas se questionner sur nos idoles et sur ce qu’elles sont « en vrai ». Disons que l’univers du show business n’est pas tendre et qu’on se demande presque comment nous, on réagirait. Certes pas comme ça, j’ai trop horreur de faire de la peine aux gens… mais bon… quand même.

C’est donc l’histoire d’une ascension et d’une apogée. Cloé avait tout planifié, elle se croit réellement supérieure, porte un jugement sans concession sur l’ensemble du monde et est prête à tout pour atteindre ses buts. Disons que côté santé mentale, il y a de quoi creuser. Si on rit un peu au départ devant sa haute opinion d’elle-même et son acharnement, on est vite catastrophé face à son égocentrisme et ses traits tyranniques.

C’est donc sur une île déserte que nous la rencontrons Cléo. Non mais une île ultra-secrète-juste-pour-les-meilleurs, il lui fallait ces vacances. Ça et s’éloigner de la folie ambiante pour composer son quatrième album qui sera encore mieux que les précédents. C’est de cet endroit qu’elle nous raconte son histoire… et elle va nous raconter comment elle est venue à s’exiler à cet endroit.

Une histoire profondément dérangeante et une héroïne qu’on adore détester! Je veux lire « Mon mari » maintenant. J’ai bien aimé la vision de l’autrice sur l’obsession.

Refaire l’amour – Myra-Belle Béala de Guise

Je dois tout de suite l’avouer, j’ai failli abandonner ce roman. J’ai réalisé assez tôt que ce n’était pas pour moi mais parce que je suis butée, j’ai encore du mal à abandonner. Aurais-je manqué quelque chose? Dans mon cas, pas vraiment, même si j’ai préféré la fin au début (et au milieu). Ceci dit, deux de mes amies ont adoré. Bref…

De quoi ça parle

Stella et Mikaël sont devenus parents presque avant d’être adultes. Devant son chum, Stella n’est pas « forte ». Elle le voit, elle se liquéfie. Le grand amour. De cette union, Lou est née. Maintenant, Lou a 13 ans et elle aimerait bien une vie plus harmonieuse. Sauf qu’entre ses parents, rien ne sera jamais simple…

Mon avis

Si j’ai continué ce roman, c’est parce que la plume de l’autrice me plaisait. J’aimais bien les dialogues, que je trouvais naturels, et la façon de raconter cette histoire remplie d’éternels recommencements me plaisait. L’écriture et les mots. L’histoire, moins.

C’est donc l’histoire d’une relation toxique dans laquelle est prise une jeune fille de 13 ans qui n’en demandait pas tant. Stella est une femme intelligente qui craque complètement pour Mikaël, terriblement manipulateur, roi du ghosting et de la non-reconnaissance de ses torts. Entre eux, au lit, c’est torride… sauf qu’il n’y a jamais d’après, au grand désespoir de Stella. Et en tant que lectrice, c’est épuisant. Toujours la même histoire, à répétition. J’aurais voulu frapper Mikaël.

Je suis consciente que c’était probablement le but de l’autrice, de nous faire ressentir ces cycles infernaux. Plusieurs d’entre nous sont déjà « retombées » auprès d’un mec trop beau qui ne voulait qu’une part (ou une partie) de nous. Alors qu’on savait, au fond. Mais il y a Lou, qui semble parfois la plus mature des trois, et vivra aussi plusieurs désillusions. Bref, j’avais le goût de secouer tout le monde.

J’aurais apprécié que le récit se concentre sur autre chose que la relation entre Mikaël et Stella, qu’on découvre d’autres aspects d’eux. Ici, j’ai trouvé des longueurs et je me suis lassée. Ceci dit, ce sont des longueurs bien écrites! Si l’autrice écrit sur un autre thème, je réessaierai probablement.

Ann d’Angleterre – Julia Deck

J’avais en tête cette année de lire les principaux prix littéraires pour un concept vidéo. Bon, le concept vidéo a pris le bord (avec les vidéos en général, je pense), mais j’ai quand même lu Ann d’Angleterre.

De quoi ça parle

La mère de Julia Deck a fait un AVC. Elle est restée 28 heures sans pouvoir se lever sur le sol de sa cuisine avant que Julia ne l’y trouve. Le pronostic est sombre. Pendant qu’elle se débat dans les méandres des hôpitaux et des unités de gériatrie, elle se rappelle sa mère et raconte son histoire, à laquelle il manque des cahiers.

Mon avis

Si vous me suivez depuis un moment, vous savez que je suis toujours touchée par les récits au sujet des personnes âgées. J’aime me faire remettre en pleine face qu’elles ont été jeunes, qu’elles ont vécu et aimé. Peut-être parce que ça nous pend tous au bout du nez. Bref, Julia Deck nous raconte ici sa mère, une femme née en Angleterre, qui a fui en France, s’est baladée, s’est mariée et a souffert. Elle a aussi eu une fille, avec qui les relations ne sont pas toujours simples, les deux femmes ne réussissant pas toujours à se rejoindre et à communiquer. Ann était une femme secrète et maintenant qu’elle ne peut plus parler (ou presque), sa fille tente de mieux la cerner et surtout de retrouver la femme qu’elle était dans celle qui la regarde maintenant de son lit, avec de l’eau gélifiée sur le menton.

Nous avons donc un roman très bien écrit, à la narration qui passe du « je » au « elle » dans les parties au passé. Une fille recherche sa mère, qu’elle voit comme une étrangère, dans tous les sens du terme. Comme quoi l’amour n’a pas qu’une seule forme. Mais c’est aussi une rencontre difficile avec le système de santé, ses failles et ses incohérences. Entre les tracasseries administratives, les gens désabusés (et ceux qui ne le sont pas) et le manque de services, elle se retrouve dans la peau d’une proche aidante complètement perdue comme dans la maison qui rend fou. Cette analyse est à la fois touchante et cynique et elle joue avec les noms propres pour refléter ses sentiments par rapport aux gens et au système. Rempli de failles, le système. Et si c’est comme ici, ça ne s’améliore pas.

C’est autobiographique, c’est une histoire de famille et le reflet d’une époque révolue où certaines choses aberrantes étaient presque normales et où on balayait volontiers sous le tapis ce qui pourrait faire honte à la famille. Ann était une transfuge de classe, toujours plongée dans un livre et c’est d’ailleurs la littérature qui va soutenir le lien mère-fille. J’ai beaucoup aimé mais comme presque tous les autres romans de l’autrice sont spoilés dans celui-ci… je vais attendre d’oublier!

L’hôtel des oiseaux – Joyce Maynard

J’ai découvert Joyce Maynard avec Où vivaient les gens heureux l’an dernier (ou l’autre d’avant… je pense avoir oublié de faire un billet). Même si ce roman m’avait fait rager, mais rager, et que le personnage principal était à 1000 lieues de moi, j’avais envie de la relire, ne serait-ce que pour ressentir à nouveau quelque chose d’aussi fort.

De quoi ça parle

Amelia est née Joan. Elle et sa grand-mère ont changé d’identité quand la mère d’Amelia est décédée, alors qu’elle avait 6 ans, dans une explosion terroriste à laquelle elle participait. Elle a toujours gardé ce secret et quand un drame a de nouveau fait éclater sa vie, elle monte dans un bus, sans un sous, vers elle ne sait où. C’était ça ou sauter du Golden Gate.

Elle va donc atterrir à la Esperanza, petit village au bord d’un lac, au pied d’un volcan. Plus précisément, elle sera accueillie à la Llorona, hôtel fabuleux mais en piteux état. Nous la suivrons donc pendant de nombreuses années alors qu’elle tente de se reconstruire.

Mon avis

En fermant ce roman, je me suis dit que ma prochaine destination voyage serait, sans aucun doute, un petit village, au bord d’un lac et au pied d’un volcan, quelque part en Amérique centrale. Joyce Maynard a réussi à faire vivre devant mes yeux cet endroit paradisiaque rempli de fleurs, d’oiseaux et de charme. On va dire que l’atmosphère est réussie.

Encore une fois, nous avons droit à une femme qui a eu une enfance difficile, déracinée. Sa vie n’est pas facile et c’est suite à un drame qu’elle va décider de tout laisser derrière. La Esperanza est inspirée par l’endroit où l’autrice passe beaucoup de temps depuis des dizaines d’années, situé au Guatemala. Le point de vue est celui d’Amelia, toujours au « je », et le regard qu’elle jette sur la communauté souvent attachante dans laquelle elle va graduellement s’intégrer varie au fil du temps. Tous les personnages – ou presque – sont attachants, bien qu’imparfaits mais ceux qui sont détestables… disons qu’ils battent des records. J’ai presque autant détesté certains d’entre eux que Cam, le mari dans Où vivaient les gens heureux!

Si l’autrice réussit à rendre tout ce petit monde vivant, c’est surtout Amelia qu’elle nous fait rencontrer. C’est une femme de sa génération et elle fonctionne comme tel. Ses références, ses réactions, le tout est très cohérent et Maynard parvient à nous faire ressentir peines, petits bonheurs, grandes joies et moments de trahison. La douleur et le deuil, ainsi que ce que ça implique, est également très bien exploré. Amelia est très différente de moi. Je ne me reconnais pratiquement pas en elle. Mais son histoire me touche tout de même.

L’écriture est immersive, évocatrice et on nous entraîne dans la rénovation de cet endroit de rêve, avec tout ce que ça implique. Il y a des hauts et des bas et on réalise petit à petit que la philosophie des gens du village, inépuisables, va déteindre sur Amelia. J’ai un faible pour Valentina, écologiste suivie par sa horde d’enfants recycleurs et Leyla est vraiment un beau personnage. Bref, j’ai passé un très bon moment de lecture. J’aurais peut-être apprécié une fin un peu moins précipitée… mais ça peut convenir.

Je relirai clairement l’autrice!

Filibuste – Frédérique Côté

J’ai lu ce roman au mois d’août. On me l’avait conseillé lors de ma journée du 12 août et je l’avais lu dans la foulée. Mais voilà. Je n’ai pas écrit mon billet tout de suite. Et quand j’ai décidé de le faire, une vingtaine de jours plus tard, j’ai réalisé que je n’en avais plus AUCUN souvenir. Mais aucun. Ni sur le sujet, ni sur la plume, rien. Je me souvenais juste que j’avais bien aimé. Je l’ai donc relu du début à la fin. Psychorigide, vous dites?

De quoi ça parle

Dans la famille de Delphine, Flavie et Bébé, les dimanches soirs sont ceux des soupers de famille. La soupe du dimanche. Lors d’une soirée où les couteaux volent bas (mais pas plus que d’habitude), le père s’échappe après le repas et il sera impliqué dans un accident. Un gros. Nous ne l’entendrons jamais mais les voix des quatre femmes nous raconteront l’histoire.

Mon avis

Visiblement, ça n’a pas été une lecture inoubliable, dans le sens premier du terme. Toutefois, lors de mes deux lectures, j’ai passé un très bon moment et je n’avais pas envie de quitter cette histoire. Paradoxal, je sais.

Nous sommes donc avec une famille dysfonctionnelle, où les trois soeurs, bien qu’ayant grandi ensemble, n’ont pas nécessairement eu la même mère. La mère, on la blâme facilement pour tout. Elle n’est pas patiente. Pas toujours juste non plus. Et même si elle essaie, elle s’y prend souvent mal, très mal. Lors du repas familial, nous comprenons rapidement les relations entre les soeurs et leurs personnalités ressortent aussi. Delphine, l’aînée, a du caractère et c’est celle qui a les relations les plus tendues (et vocales) avec sa mère. Flavie est médecin, douce et calme, dans l’ombre de sa soeur, Quant à Bébé, surprotégée, elle est souvent en confrontation, souvent à part et est fascinée par la saison 6 de Loft Story, la All Star. Entre l’étude sociologique de la téléréalité et celle de cette famille, je ne sais pas laquelle est la plus intéressante. Parce que rien n’est simple et qu’elles sont touchantes, ces soeurs. Bon, presque toutes.

Les thèmes sont de ceux qui m’intéressent. Je ne me lasse pas d’analyser les relations entre soeurs et les relations mère-filles, qui ne sont jamais simples. Ça permet d’éclairer les attentes différentes qu’on a envers les mères et les pères. C’est très ancré dans l’époque, les scènes autour de la table sonnent presque comme du théâtre et la construction n’est pas linéaire, vu que nous revenons à ce fameux souper après avoir pu constater les points de vue différents des soeurs et de la mère. Jamais du père, même si c’est lui qui va tout bouleverser, finalement.

Ceci dit, je ne suis pas certaine d’avoir bien saisi tout ce que nous souhaitant nous transmettre l’autrice avec ce roman. J’ai aussi trouvé la fin trop rapide et j’aurais aimé en savoir davantage sur les réactions de chacun des personnages face au fameux événement. Ça reste une bonne lecture et je relirai l’autrice.