Badjens – Delphine Minoui

J’avais repéré ce titre par mi les nombreux romans de la rentrée littéraire car la révolte des iraniennes suite au meutre de Mahsa Amini m’avait beaucoup touchée. Un roman dans ce contexte ne pouvait donc que m’attirer.

De quoi ça parle

Zahra a 16 ans. Debout sur une benne à ordure, elle décide de brûler son foulard. Nous sommes en 2022 et les iraniennes font entendre leurs voix suite à la mort de Mahsa Amini. Qui est-elle?

Mon avis

Voici donc un roman qui peut faire polémique. J’ai lu quelque part qu’il s’agissait d’un ouvrage féministe blanc anti-voile. Je l’ai plutôt vu comme un roman féministe qui prone le droit des femmes à choisir ce qu’elles veulent faire de leurs corps, de leurs vêtements, de leurs vies alors que tout les en empêche. En Iran, le régime les en empêche et toute tentative de rébellion est fortement réprimée. L’autrice est née de père iranien et de mère française. Journaliste, elle a travaillé entre autres en Iran. Donc, voilà le contexte.

Nous somme donc avec une adolescente de 16 ans. À 16 ans, on veut être libre. On se révolte. Et c’est ce que fait notre jeune Zahra, dite Badjens. Mauvais genre. Il s’agit certes du voile qu’elle préférerait ne pas porter mais ce n’est que la pointe de l’iceberg. Elle en veut à la société d’invisibiliser les femmes. De les faire taire. De les cacher. De leur demander d’être vierges et pures et de les laisser se faire violer en fermant les yeux. Si elles parlent? C’est leur faute. Ce sont elles qui sont déshonorées. Entre Badjens et son petit frère, aucune équité. Il a tout. Elle n’a rien. Sa mère tente de lui rendre la vie plus douce mais comme elle, elle revêt un masque au quotidien. Elle ne dit rien mais n’en pense pas moins.

Ici, il s’agit de l’Islam. Par contre, entendons-nous, la plupart des grandes religions se sont entendues à un moment ou un autre de l’histoire pour traiter les femmes comme des carpettes. Il n’y a pas si longtemps, nos grands-mères arrêtaient l’école en 7e année pour s’occupée de leurs jeunes frères et soeurs et ainsi permettre aux garçons d’être éduqués, le tout sous le regard bienveillant de monsieur le curé. Non mais quand nous foutra-t-on la paix?

Ce roman n’est pas un bijou littéraire et stylistique mais le ton choisi concorde avec la protagoniste. Elle est jeune, en colère et scande ses revendications d’une voix forte. Elle s’indigne, va droit au but. Elle veut croire en ses rêves et au sens de ce qu’elle et ses amies font pour retrouver une voix, une vie. Nous ne sommes pas dans la nuance, sauf peut-être une fois, quand elle comprend même quand les combats sont différents à travers les années, les femmes devraient pouvoir choisir. C’est un texte fort, brut et sensible à la fois. Bref, j’ai beaucoup aimé, même si j’en aurais pris un peu plus longtemps.

Long Island (Eilis Lacey – 2) – Colm Toibin

J’ai adoré Brooklyn, lu il y a plus d’une décennie. Le personnage complexe d’Eilis Lacey m’avait beaucoup touchée et j’avais vraiment hâte de la retrouver vingt ans plus tard.

De quoi ça parle

Eilis et Tony, son bel italien, sont mariés depuix 20 ans. Ils habitent dans une allée près de toute la famille élagie de Tony et ont deux enfants. Sauf que Tony a peut-être pris au premier degré l’un de ses contrats de plombier et un jour, un homme somme à la porte d’Eilis. Sa femme est enceinte, le père est Tony et le jour de sa naissance, il compte bien le laisser sur le pas de sa porte. Eilis ne compte absolument pas élever l’enfant d’une autre mais il semblerait que sa belle-famille ait peut-être une autre idée en tête. Eilis va donc décider de changer d’air et retourner en Irlande pour les 80 ans de sa mère.

Mon avis

J’aurais aimé vous dire que cet opus est à la hauteur de Brooklyn. Je l’espérais vraiment. Toutefois, pour moi, ça n’a fonctionné qu’à moitié. J’ai été ravie de retrouver Eilis devenue adulte, qui doit « faire avec » sans non plus renoncer à son indépendance. Elle reste un personnage complexe, calme au dehors mais bouillonnante en dedans. Et pour ça, elle n’a pas vraiment changé et reste toujours pleine de contradictions.

J’ai beaucoup aimé la première partie. On y dissèque les relations familiales complexes, les non-dits, les petites manipulations et la misogynie de l’époque y a une bonne place. Et ça fait rager. Les mecs, et la belle-mère… OMG! Tout se passe en secret, même si tout le monde est au courant… bref, pas très sain comme atmosphère. On est dans l’époque, clairement. Eilis se trouve pratiquement à la merci de son mari et de sa belle-mère.

Puis, elle sacre son camp en Irlande (way to go girl) et à partir de ce moment, il y a tout de même des longueurs. Eilis y retrouve son ancienne meilleure amie Nancy, maintenant veuve, ainsi que Jim Morris, l’homme qu’elle avait fréquenté lors de son retour à la mort de sa soeur Rose. On pourrait s’attendre à une histoire d’amour de film Hallmark, sauf que non. Eilis est toujours mariée, ses problèmes n’ont pas disparu, et Jim a aussi des secrets.

Mon problème, c’est que tous les personnages sont détestables. Pas un pour rattraper l’autre. La mère d’Eilis est une vieille chipie, Jim ne se comprend pas, Nancy me plaisait bien, mais l’évolution… bof… J’avais hâte que ça finisse et d’un autre côté, aucune fin ne m’aurait vraiment plu. Et je ne crois pas que je suis satisfaite de la fin choisie. Je les reverrais bien 5 ans plus tard.

Une lecture en demi-teinte donc. Mais maintenant, j’ai envie de relire Brooklyn. Et de tenter Nora Webster, que nous croisons dans ce roman.

Le bastion des larmes – Abdellah Taïa

J’ai lu ce roman parce qu’il devait être dans une liste de prix littéraire quelconque. Des fois, je fais des fixations sur les listes. Êtes-vous surpris?

De quoi ça parle

Youssef est enseignant en France. Il est homosexuel, né au Maroc, et il doit revenir à Salé, sa ville natale, à la mort de sa mère, matriarche solide et ayant mené sa famille d’une main ferme. Là-bas, il va se souvenir. De ses soeurs et de Najib, qu’il croit avoir aimé.

Mon avis

Je n’ai jamais lu Abdellah Taïa. Quand j’ai lu ce roman, j’étais certaine que c’était un premier roman. C’est que nous sommes ici dans le retour aux sources, aux traumatismes originels. Ceci dit, ce n’est pas du tout le cas. Mais même si j’ai quelques petits bémols, j’ai globalement passé un très bon moment de lecture.

Je suis toujours partante pour les romans un peu nostalgiques, Et j’aime aussi les constructions un peu floues, qui nous baladent entre passé et présent, et parfois entre fantasme et réalité. C’est le cas ici, avec un homme qui revient dans la ville qui l’a vu grandir et qui revit son enfance et son adolescence dans un pays où être gay n’est pas bien vu. Ce qu’il a vécu, presque au vu et au su de tous sans que personne ne fasse quoi que ce soit, a influencé sa façon de considérer famille et passé.

Entendons-nous, on est dans le flou-mou, C’est un homme blessé qui nous parle du destin des hommes gays au Maroc, du poids des familles et des traditions et sur la nécessité, parfois, de partir pour survivre. Les soeurs sont presque un choeur antique, qui sont presque la voix de la bien-pensance, celle qui a occasionné la souffrance de Youssef. Au départ, leur traitement étonne tant il peut sembler misogyne mais je l’ai perçu comme le reflet de valeurs qui se sont imposées à elles, les jeunes filles vivantes ayant été laissées derrière parce que c’est ce qu’il faut faire.

Le style ne plaira pas à tout le monde mais pour ma part, il m’a beaucoup touchée, oscillant entre l’intime et le plus grand. C’est rempli de trigger warnings, ce qu’on a fait subir à Youssef est indicible alors qu’on le condamne parce que gay. Haram. J’ai beaucoup aimé le fantôme de Najib, qui a tenté tirer le meilleur de sa situation alors que les choix étaient limités ainsi que le lien entre les événements et l’histoire de la ville et du fameux bastion des larmes.

Bref, un bon moment de lecture. Floris n’a pour sa part pas du tout été convaincu.

Le rêve du Jaguar – Miguel Bonnefoy

J’avoue avoir lu ce titre car il était disponible en audio. Ceci dit, il était question de réalisme magique alors je suis franchement surprise de ne pas l’avoir repéré avant! J’aime généralement ce genre d’histoire.

De quoi ça parle

C’est une histoire de famille sur plusieurs générations, qui s’ouvre à Maracaibo, au Venezuela. Une histoire qui commence avec bébé Antonio, qui ne le sait pas, mais qui a un destin grandiose, déposé près d’une vieille mendiante muette, et qui se termine 4 générations plus tard.

Mon avis

Ce roman a somme toute été pour moi un bon moment de lecture. Vais-je en rester marquée? Je ne saurais dire. Toutefois, j’avoue m’être laissée transporter par les mots dans l’auteur dans la touffeur de ce pays. Fable métaphorique, histoire familiale teintée de réalisme magique, on sent l’inspiration Garcia Marquez… mais un peu plus moderne dans le traitement des personnages féminins, disons!

Marquez a marqué mon adolescence, malgré mes malgré. Ici, je n’en dirais pas autant. Par contre, la langue est belle, souvent lyrique, ce qui colle parfaitement au propos et aux personnages plus grands que nature qui apparaissent et disparaissent par moments. Antonio est vraiment l’ancêtre de l’auteur. Il aurait vraiment été trouvé dans la rue, été vendeur de cigarettes, employé dans une maison close. J’ai aussi particulièrement apprécié le personnage de sa compagne Ana, femme forte qui devient mythique, première femme médecin du pays. Leurs histoires de mêlent à celle de Venezuela, où en rencontre marins et bandits et où les grands rêves côtoient les révolutions. J’aime toujours quand les personnages deviennent des légendes.

Il m’a certe manqué un petit plus, peut-être un attachement aux personnages et aux nombreuses histoires d’amour pour que ce soit une lecture remarquable… mais c’est somme toute un bon roman!

Cabane – Abel Quentin

C’est clairement la pub qui m’a fait lire ce roman. Il faut savoir que des romans écologistes, ça me rend terriblement anxieuse et que j’ai tendance à les éviter. Mais faut croire que je suis faible.

Présentation de l’éditeur (que je trouve bien)

 » Berkeley, 1973. Département de dynamique des systèmes. Quatre jeunes chercheurs mettent les dernières touches au rapport qui va changer leur vie. Les résultats de l’IBM 360, alias « Gros Bébé », sont sans appel : si la croissance industrielle et démographique ne ralentit pas, le monde tel qu’on le connaît s’effondrera au cours du XXIᵉ siècle. Au sein de l’équipe, chacun réagit selon son tempérament ; le couple d’Américains, Mildred et Eugene Dundee, décide de monter sur le ring pour alerter l’opinion ; le Français Paul Quérillot songe à sa carrière et rêve de vivre vite ; et l’énigmatique Johannes Gudsonn, le Norvégien, surdoué des maths ? Gudsonn, on ne sait pas trop. Certains disent qu’il est devenu fou. »

Mon avis

Les avis lus sur ce titre étaient dithyrambiques. Rien de moins. C’est que l’auteur s’est basé sur un rapport qui a réellement existé… et qui n’a clairement rien changé. Toutefois, les auteurs ne sont pas réellement ceux du roman et l’histoire qui nous est ici présentée est fictive. Personne n’a existé, sauf quelques personnages secondaires croisés au fil des pages, notamment Unabomber, ayant enseigné à Berkeley. Aurais-je aimé mieux connaître, la vraie histoire? Peut-être. Ou pas. À voir!

Cette lecture a été faite pour moi de hauts et de bas. Je trouvais très bonne l’idée de départ : nous faire connaître ce groupe, et le monde de la dynamique des sytèmes (je trouve les maths fabuleux… je suis cette genre de personne, pardonnez-moi). J’espérais comprendre leur momentum, leurs liens… mais non, rien de tout ça. On les rencontre les uns après les autres et la partie sur le Français a failli avoir ma peau. Des longueurs, donc. Puis, le personnage du journaliste apparaît au milieu du roman, il part à la recherche du mystérieux Gudsonn, et j’ai espéré que ça redémarre. Et oui, ça fonctionne. Mais ça s’essouffle. Et je reste très dubitative par rapport à la fin.

Ceci dit, la réflexion est intéressante. Que se passe-t-il quand on voit une catastrophe arriver, que les gens démontrent d’abord un intérêt fou, et qu’ensuite… rien ne se passe? Comment peut-on réagir, revenir de ça? L’exploration de l’idée avec 4 personnalités différentes était bonne et je suis déçue d’être déçue. À aucun moment je n’ai eu l’impression de connaître ces personnes et je suis restée externe à tout ça. Par contre, le contexte, l’histoire… c’est anxiogène, angoissant et surtout ENRAGEANT. Toutes ces magouilles, toutes ces politicailleries… c’est tellement frustrant de voir l’humanité se diriger droit dans le mur. Et je me regarde… et je ne suis pas certaine d’aider tant que ça.

Bref, un roman écologiste et militant qui fait réagir et qui fait surtout comprendre que nous savions. Et que nous n’avons rien fait. Je comprends parfaitement pourquoi il a plu mais je suis pour ma part dans un entre deux. Un genre de 3/3,5 étoiles? En fait, ça aurait pu être TELLEMENT bien que je lui en veux un peu!

La barque de Masao – Antoine Choplin

Je voulais découvrir la plume de cet auteur depuis quelques années, parce que mon amie Lisa m’en parle souvent et le place presque chaque année dans ses favoris. Et là, ce roman se passe au Japon. C’était un signe, je dis.

De quoi ça parle

Masao, un homme d’âge mur, travaille dans une usine. Un jour, à la sortie du travail, l’attend sa fille, qu’il n’a pas vue depuis plusieurs année. Elle est architecte et habitera sur une île proche le temps d’inaugurer un tout nouveau musée, écrin pour oeuvre seule. C’est de cette rencontre dont nous serons témoins.

Mon avis

J’ai du mal à parler de ce roman. J’ai apprécié le temps passé dans ses pages, mais je suis loin d’être certaine qu’il laissera une trace durable dans ma mémoire. Nous sommes avec un homme qui se sent « moins ». Moins car il n’a pas su s’occuper de sa fille, parce qu’il n’a pas su sauver son amour, parce qu’il ne « sait » pas beaucoup de choses selon lui. La rencontre avec sa fille brillante et cultivée va le confronter à ce qu’il voit comme ses failles et ils vont apprendre à se connaître.

Tout d’abord, le roman se passe au Japon, mais je ne me suis pas « sentie » au Japon. Peut-être est-ce parce que j’ai visité un Japon privilégié, policé, mais je n’ai pas retrouvé ici la politesse et le cérémonial du quotidien que j’aime dans les romans japonais. Tout est tellement codifié. Ici, le niveau de langage, la distance qui semble moins présente… j’ai eu l’impression que ce roman aurait pu se passer n’importe où. Quelle importance, direz-vous? Peut-être aucune plus la plupart des gens. Pour moi, qui suis dans une passe très « Japon »… ça en a eu, malheureusement. J’ai même rapidement questionné Lisa (qui a adoré… comme quoi il ne faut pas se fier à mon unique avis) au sujet du niveau de langage utilisé.

Ceci dit, l’histoire de ce père qui ne sent pas à la hauteur de sa fille est émouvante. Ils vont s’apprécier, s’estimer et c’est à travers ses yeux qu’il se trouvera de la valeur. Elle lui fait découvrir l’art et l’émotion qu’il permet de ressentir et il lui raconte son histoire et celle de sa mère. Bref, tous deux vont évoluer côte à côte.

C’est une histoire lente et contemplative. Le chemin parcouru n’est pas clairement défini, j’ai été presque surprise de voir la dernière page se tourner (quoi, ça finit comme ça?) et je me suis questionnée sur le pourquoi de certains événements. Ceci dit, j’ai passé un agréable moment de lecture.

Le courage des innocents – Véronique Olmi

C’est le thème de l’enfance qui m’a fait me tourner vers ce roman. Quand on parle de protection de l’enfance, je suis toujours à la fois curieuse et remplie d’appréhension. J’ai peur d’un traitement simpliste et manichéen quand c’est un univers tellement complexe. Bref, j’ai redécouvert Véronique Olmi avec ce titre car j’ai réalisé que j’avais déjà lu Cet été-là il y a déjà… quelques années! Neuf pour être plus précise.

De quoi ça parle

Ben est un jeune activiste très impliqué dans diverses causes. Il est hors-norme, n’a pas peur de dormir sur les bords de la route et un jour, il réalisera que son petit frère est placé. Pas en famille d’accueil… en foyer de groupe. Et il va chercher à le retrouver et le sortir de là.

Mon avis

Quelle étrange expérience de lecture… j’ai eu l’impression de lire deux romans. Un tome 1 et un tome deux, avec Ben pour personnage principal. J’aimais beaucoup le départ, avec la recherche du frère et les limites du système de protection de l’enfance et de la jeunesse. L’affection de Ben pour son petit frère, son réel désir de le sauver, ainsi que la rencontre avec les enfants du foyer d’accueil… tout sonnait vrai et était profondément touchant. L’évolution des visions était crédible et la partie sur les rêves des jeunes était aussi très émouvante.

Et soudain, juste quand j’aurais aimé connaître la réaction de Ben à certains événements… tome deux! Fast Forward de plusieurs années et Ben part pour l’Ukraine. Comme ça, sans le dire à personne. Il va porter des médicaments mais va rencontrer, encore une fois, l’enfance, être chamboulé, et foncer tête baissée dans ce monde qu’il ne comprend pas, auquel il ne connaît rien. Un monde où les bombes tombent, où tout est possible, où l’humanité touche le fond.

J’avoue avoir mis un moment à passer d’une histoire à l’autre. C’est que je voulais rester dans la première! Pas que ce ne soit pas effarant. Le sort des enfants ukrainiens enlevés à leurs familles, déportés en Russie pour « bien paraître » et surtout mieux les endoctriner… c’est d’une horreur sans nom. Le thème de l’homme qui rencontre la guerre en extérieur et qui s’y trouve happé est également intéressant, mais je l’ai préféré dans un roman de Chalandon lu cette année. Ceci a peut-être biaisé mon avis final.

Ceci dit, c’est un roman qui met en lumière des éléments qu’il ne faut pas oublier dans une guerre qui s’éternise. Les petits abus de pouvoir, les horreurs normalisées et l’occident qui s’en désintéresse peu à peu… c’est encore nécessaire.

Coeur-d’Amande – Yasmina Khadra

Ce n’est pas mon premier roman de Yasmina Khadra. J’ai surtout lu ses romans très durs sur le Moyen Orient et on m’avait dit que celui-ci était différent. Eh boy qu’ils avaient raison!

De quoi ça parle

Nestor a la trentaine. Il habite Barbès avec sa grand-mère qu’il aime plus que tout et qui a de plus en plus besoin d’aide. Il vient de perdre son boulot de vendeur et connaît tout le monde dans le quartier. Nestor a été abandonné à quelques jours par sa mère qui était dégoûtée par sa « difformité », le nanisme (je ne sais pas quel type, alors on va se limiter à ça, vu qu’il se désigne lui-même comme étant un « nain »). Sauf que sa grand-mère ne va pas bien… et que les médecins semblent croire qu’il ne peut plus s’occuper d’elle.

Mon avis

J’ai vraiment eu du mal à reconnaître Khadra dans ce roman. On est loin des hirondelles de Kaboul, mettons. Imaginez un feel good, à Paris, pleins de bons sentiments, avec un côté un peu rough and tough et plusieurs personnages. Un genre de « La vie devant soi », mais moins bien écrit et sans la voix d’enfant?

Vous l’aurez compris, ce n’est pas mon roman préféré de l’auteur. Le feel good, les leçons de vie, la beauté dans les difficultés… j’ai l’impression d’en avoir trop lu et ça m’intéresse somme toute peu. Les petites leçons de morale… ce n’est pas pour moi. Ce roman sera donc vite lu, vite oublié.

Pourtant, il y a des thèmes que j’aime beaucoup. La différence, l’amitié, la solidarité, les found family… ça aurait pu me plaire. J’ai aussi aimé Nestor, qui ne s’en laisse pas conter et qui est tout sauf limité à sa taille, à tel point qu’on l’oublie. Par contre, même si je peux comprendre certaines de ses réactions, j’ai toujours du mal avec l’injustice et la condescendance. Je n’aime pas lire ça, même si c’est réalise. Et l’arrivée d’un certain personnage qui vient saccager sa vie avec une attitude tellement « entitled » (désolée… je ne trouve pas d’équivalent français) m’a mise dans tous mes états. Non mais la b… Et l’attitude des autorités! Même si c’est peut-être réaliste, je n’éprouve aucun plaisir à lire ce genre de choses, surtout quand le personnage principal refuse de faire ce qui pourrait l’aider.

La relation d’amitié qui se bâtit de manière un peu forcée mais qui devient vraie devient touchante à mesure que l’histoire évolue. J’ai aussi beaucoup aimé la fin de l’histoire, la solidarité de quartier… mais c’était trop peu trop tard et peut-être trop prévisible.

Bref, pas mauvais, mais pas mémorable. Pour moi.

Finlay Donovan knocks’em dead – 2 – Elle Cosimano

Des fois, on a besoin d’un peu de léger-léger. J’ai donc pris le tome de de Finlay Dovonan, qui sort bientôt en français sous le titre de « Qui veut tuer mon ex-mari ». J’avais beaucoup aimé le premier donc je me suis dit qu’un moment avec cerveau en option, ça ne conviendrait parfaitement!

De quoi ça parle

Nous retrouvons donc Finlay, autrice de romans d’aventure remplis de smut dans une nouvelle aventure.  Imaginez-vous qu’elle et sa fidèle babysitter Veronica sont tombées sur un forum « pour femmes » qui semble servir de front pour tueurs à gages. Et imaginez-vous que Finlay y voit le nom de son ex, Steven, qui réclame davantage de visites avec leurs enfants. 

Comme Finlay a très peur pour sa progéniture, elle va tenter de régler le problème. 

Mon avis

Entendons-nous, ce deuxième tome reprend exactement la recette du premier. Nous sommes dans le même contexte complètement loufoque, où l’héroïne prend systématiquement les mauvaises décisions sans nécessairement se remettre en question ou encore apprendre de ses erreurs. Non comment a-t-elle pu se mettre dans ce pétrin!

J’ai assez peu à apporter à mon premier billet sur cette série. C’est loufoque, déjanté, avec des accents de Stephanie Plum, mais en  plus politically correct.  Les personnages sont certes stéréotypés mais ils sont attachants, un peu foufous, et il ne faut pas chercher quelque crédibilité que ce soit. Entre le flic sexy, le futur avocat, la babysitter mystérieuse et aussi cinglée que son employeuse, les parents qui veulent la matcher et la mafia locale, on a de quoi faire. 

Ceci dit, j’ai quand même préféré le premier tome. On ne se réinvente pas tant dans ce tome 2 et c’est un peu plus fouillis. Ceci dit, avec une telle « enquêtrice », ce n’est pas étonnant.  Je lirai le 3e tome parce que je l’ai mais je souhaite tout de même un peu de renouveau. Tout de même, c’est une chouette série de cosy mystery!

Les guerriers de l’hiver – Olivier Norek

Ce n’est pas un roman que j’avais repéré dans cette rentrée littéraire. Toutefois, quand je l’ai vu en nomination dans tous les prix, je me suis dit que peut-être que j’étais en train de manquer quelque chose… donc je l’ai lu.

De quoi ça parle

Le 30 novembre 1939, l’URSS a envahi la Finlande, pays pacifique et fier de son indépendance somme toute récente. Merci Staline. Contre toute attente, David va résister face à Goliath et à son déluge de troupes. Un tireur d’élite va se démarquer du lot : Simo Häyhä. Et c’est entre autres son histoire que nous allons découvrir.

Mon avis

Pour apprécier cette histoire, il faut aimer les romans de guerre. Nous sommes sur le champ de bataille et dans les tentes de commandement du début à la fin de l’histoire. Je ne déteste pas les récits de guerre mais j’avoue les préférer quand on sort au moins occasionnellement des tranchées! Du coup, mon avis doit être tempéré par ces considérations.

Là, vous allez vous dire que j’ai détesté, ce qui n’est pas le cas. C’est une bonne lecture qui m’a fait découvrir un pan de l’histoire que je ne connaissais pas du tout. Je ne savais rien de cette invasion ni de la façon dont s’y était pris Staline. Et certaines parties sont tellement enrageantes! Avec l’invasion récente de l’Ukraine, impossible de ne pas faire de lien. Norek réussit à nous faire ressentir toute l’horreur de la guerre, toute la stupidité des commandes qui sont données, d’un côté comme de l’autre. Les soldats russes sont envoyés se faire tuer comme des pions, les officiers ont plus peur de Staline que des ennemis et du côté finlandais, il est clair depuis le début que tout est perdu d’avance.

Nous avons ici un texte très cinématographique. On s’y croirait. De nombreuses anecdotes sont véridiques et Norek a effectué un vrai travail de documentation poussé pour nous offrir ce récit. Le personnage de Simo Häyhä, homme ayant réellement vécu, sniper génial dont les conseils sont encore utilisés de nos jours. Il est parti du village de Rautjärvi avec ses amis, pour un probable exercice. Ils ne reviendront pas tous. Des petits groupes comme eux, il y en avait des milliers dans toutes les guerres. Chacun aurait pu être le sujet d’un roman. Et impossible de penser que ce n’est pas la même chose de l’autre côté.

Les pages se sont tournées toutes seules, ça ne fait pas aimer les Soviétiques et ça plaira certainement aux amateurs de romans de guerre. C’est bien construit, ça semble trop fou pour être vrai mais le tout est ma foi bien réel. Une bonne lecture pour moi, dont je retiendrai surtout les histoires d’amitié déchirantes.