Les aiguilles d’or – Michael McDowell

Gros aveu, j’ai lu ce roman pour la couverture. Je l’ai vu « en vrai » au salon du livre de Québec et j’ai craqué. Impossible de résister. Oui, je suis faible.

De quoi ça parle

New York, fin du 19e siècle. La famille Stallworth, dirigé d’une main de fer par le juge Stallworth, sans pitié, qui souhaite l’avancement et la gloire de sa famille. Pour ce faire, il souhaite libérer New York de la corruption et il va jeter son dévolu sur un quartier en particulier, le triangle noir, quartier pauvre et fréquenté par les prostituées et criminels de bas étage. De tous les étages en fait!

Dans ce quartier, nous rencontrons la famille Shanks, qui représente, disons, tout ce que le juge Stallworth exècre. Et qui a en plus des comptes à régler avec lui.

Mon avis

Je ne sais pas à quoi je m’attendais… mais clairement pas à passer le roman complet à rager contre un personnage. Non mais je HAIS le juge Stallworth, mais d’une puissance! Imaginez, je soutenais les criminels avec passion, alors que ce ne sont pas des « gentils » criminels!

Deux familles vont donc s’opposer. Chez les Stallworth, nous avons donc un juge, un pasteur, un avocat et son épouse très respectable, ainsi que les deux enfants du pasteur. Chez les Shanks, Lena, matriarche dont le mari a été envoyé à l’échafaud. Entre la mère receleuse, la belle soeur prostituée de luxe, la fille avorteuse, la fille faussaire et les jumeaux voleurs, cette famille a des revenus… diversifiés disons? Le roman parle certes de leur affrontement, mais aussi de la condition de pauvreté extrême dans laquelle vivait une partie de la population, ce qui les poussait vers les activités illicites. Ce discours est ma foi très actuel alors que le roman a été écrit en 1980. Et dans ce contexte, j’avais clairement envie de faire une fête à chaque fois que Lena la noire plaçait bien un pion. Genre « Way to go girl »!

L’auteur a encore une fois réussi à créer une atmosphère palpable. Un véritable voyage dans le temps dans un New York grouillant et bigarré. On retrouve une ambiance un peu Dickensienne, mais aux États-Unis et peut-être avec un peu moins d’humour (parce que oui, Dickens est hilarant, je ne le dirai jamais assez). Vous savez, cette sensation de voir de haut les personnages s’agiter en tous sens? C’est ce que j’ai ressenti ici et j’ai passé un excellent moment de lecture. Tout en étant enragée. Les discours du fameux juge… ARGHHHH! Puant de condescendance et de bien-pensance.

Comme il y a beaucoup de personnages, l’action met un moment à se mettre en place. Mais quand l’action commence… c’est passionnant. J’y étais. Ce qui se passe est horrible mais captivant. Bref, j’ai tout aimé. Et je continuerai clairement à lire l’auteur car je ressens rarement les choses à ce point… même quand il me met dans un état pas possible!

Seven days in June – Tia Williams

La romance et moi, nous avons une relation amour-haine. En fait, j’avoue que ça fonctionne rarement. Mais ici, j’avais vu ce roman dans des listes de « best books » depuis sa sortie que j’ai décidé d’essayer… et sérieusement, je pense… que j’ai aimé ça? Oui, je sais, vous êtes surpris. Moi la première. Mais je m’explique.

De quoi ça parle

Eva est autrice de romance érotique paranormale. Elle raconte en plusieurs tomes l’histoire Gia, sorcière, et Sebastian, vampire, amoureux maudits qui se cherchent à travers le monde. Elle fait partie d’une communauté d’auteurs noirs et souffre de migraines chroniques et très sévères.

Lors d’un événement littéraire, elle revoit Shane Hall, auteur de romans très littéraires connu comme étant très « messed up » et surtout antisocial. Sauf qu’ils se sont connus adolescents durant quelques jours très intenses et qu’ils ne se sont pas revus depuis 15 ans. Ce qui ne veut pas dire qu’ils se sont oubliés…

Mon avis

On m’a vendu ce livre comme une romance et si oui il y a une histoire d’amour, s’il y a de la chimie et du smut (un peu), c’est aussi une histoire très contemporaine, bien ancrée dans le Brooklyn d’aujourd’hui, dans cet univers qu’est le milieu littéraire noir. Et c’est cette culture omniprésente, ces références assez ciblées qui font que ce roman m’a plu. Certains chroniqueurs ont mentionné qu’il y a « trop » de ces références mais comme ce n’est pas mon monde et ma culture, j’ai dû en manquer les trois quarts… ce qui fait que j’ai beaucoup aimé les reconnaitre.

Tia Williams a une plume addictive et aussi très drôle. Eva est une femme intelligente, vive d’esprit, qui a un lourd passé dont elle semble s’être sortie. Mais est-elle vraiment guérie? Étonnament, l’humour n’enlève rien à l’intensité des thèmes abordés, souvent avec beaucoup de délicatesse. On parle ici de douleur chronique, de traumas générationnels et du besoin de les comprendre pour les dépasser, des enfances brisées et de l’amour maternel, celui qui fait mal et celui qui guérit. Nos deux protagonistes étaient brisés et ils se sont trouvés lors d’une période où ils étaient très vulnérables… et ils ne se sont jamais oubliés.

Et c’est hyper intéressant comme concept, surtout que quand on est ados, « the one who got away », il fascine. Cette semaine très intense, vécue dans un brouillard de drogue et d’alcool, était-ce de l’amour? Dans ma tête, clairement pas, mais ce n’est pas ce qui importe. Les amours adolescentes, nous les idéalisons souvent et peu importe ce qu’elles étaient, on se questionne parfois à savoir « et si je le revoyais »… Et tout le questionnement de Eva et de Shane sur leur capacité à être ensemble, à être bien ensemble est vraiment pertinent.

Bref, j’ai aimé le côté « recherche de soi », l’atmosphère, les réflexions sur le fait d’être une autrice noire, dans un monde de l’édition pas toujours fait pour elles. C’est un roman sur une autrice noire, par une autrice noire, et c’est un aspect très important. Je serais preneuse pour lire le prochain livre de la protagoniste! Comme d’habitude, les scènes cutes (qui SONT cutes) sont ce qui m’a le moins plu, mais ça, c’est moi! Il y a aussi le traitement d’un autre point… dont je ne peux par parler ici pour ne pas spoiler!

En général… avis positif donc!

Amuleto – Roberto Bolano

J’ai eu envie de lire ce roman après en avoir entendu parler dans Autoportrait d’une autre d’Élise Turcotte. J’avais été tellement frappée par 2666 de l’auteur qu’il fallait que je tente le coup avec ce court ouvrage.

De quoi ça parle

Auxilio Lacouture est la femme qui s’est cachée dans les toilettes du 4e étage de l’université quand la police y est entrée, ce qui a mené à un massacre un peu plus tard. Mère de jeunes poètes mexicains, elle erre dans leur univers.

Mon avis

Je sais, ce résumé ne vous dit rien. À moi non plus. Pourtant il m’est difficile d’en dire davantage car nous avons affaire à un étrange ouvrage avec une narration presque en spirale, qui nous balade entre les fameuses toilettes du quatrième étage de l’université et différents moments dans l’espace et le temps, avec la communauté artistique de l’époque. Nous y croisons entre autres Arturo Belano, alter ego de l’auteur ainsi que de nombreux « jeunes poètes » qui traînent dans les cafés tout en critiquant la génération précédente. La narratrice vit un peu autour d’eux, sans trop se fixer, vivant presque à travers eux. On se balade dans son esprit qui revient constamment à ce moment marquant de sa vie et qui nous balade d’un côté et de l’autre… et c’est fascinant.

Un roman où il se passe peu de choses mais qui questionne constamment. Vous pouvez imaginer que ça me plait. C’est une histoire remplie de poètes dans une époque violente. Ça parle de littérature et du pouvoir de la poésie en ces temps troublés, ça parle de résilience et de perte des illusions. Le voyage de Belano vers le Chili, celui qui part, celui qui revient, c’est magnifiquement réussi.

C’est rempli de symboles, on sort de ce court texte un peu groggy, ayant eu l’impression d’entendre la voix d’un fantôme. On est dans une ambiance un peu surréaliste et j’ai réalisé après ma lecture que nous le personnage d’Auxilio Lacouture était déjà apparue dans Les détectives sauvages du même auteur. Roman que je veux lire, of course. Malgré ses 900 quelques pages!

Bref, j’ai beaucoup aimé. Mais je ne le conseillerais pas à tout le monde!

L’été où tout a fondu – Tiffany McDaniel

J’étais un peu déçue de ne pas avoir aimé plus que ça la précédente suggestion de Corn8lius dans mon challenge « je lis les favoris de… » alors j’ai décidé d’en lire un autre. Illogique, direz-vous. Tsé, fille, t’as pas tant aimé le premier, pourquoi tenter d’en lire un autre? En fait, j’ai quand même des goûts communs avec Cornélius et quand même, c’est Tiffany McDaniel! Il fallait tenter le coup!

De quoi ça parle

Tiffany nous ramène à Breathed, la même petite ville que dans Betty mais cette fois dans les années 80, pendant un été où sévit une terrible vague de chaleur. Suite à une annonce dans le journal mise par son père arrivera chez le narrateur un jeune garçon noir de 13 ans, Sal, qui dit être le diable. Et ce sera l’été où tout basculera.

Mon avis

Ce roman confirme que Tiffany McDaniel est une autrice que je relirai. J’accroche à ses thèmes, à sa plume et à sa façon de créer des personnages, à sa façon d’utiliser les craintes du monde pour nous faire voir à quel point les gens en général ont peur de ce qui est différent, de ce qui leur propose quelque chose de différent. Bref, une très bonne lecture pour moi.

Tout au long de l’histoire, on se questionne. Qui est Sal? Est-il vraiment le diable ou un jeune garçon échappé d’une ferme voisine? Il semble savoir des choses qu’il ne devrait pas savoir, a des réactions particulières. Un peu comme le petit Owen dans « Une prière pour Owen », il va rester mystérieux.

Nous avons donc un endroit où tout le monde se connaît, C’est triste, déchirant et l’autrice a clairement réussi à nous ramener dans les années 1980, le racisme est très présent – et les gens n’en ont même pas honte – l’homophobie est la norme, le crainte du sida plane et personne ne connaît vraiment la maladie. Le contraste entre la petitesse des vues et des préjugés et le côté flamboyant des années 80 est frappant. Le narrateur est Fielding Bliss, qui avait 13 ans au moment des faits qu’il nous raconte, mais qui a 80 ans quand il raconte cette histoire. Il nous parle parfois de façon énigmatique, par métaphores, son regard teinté par la douleur et la nostalgie. La plume est magnifique, passant parfois du réalisme à la poésie, et elle est très évocatrice de cet été caniculaire, où le diable n’est clairement pas celui qui se dit l’être.

Un texte poignant, tragique, où nous voyons les choses venir sans pouvoir rien faire pour les arrêter. La vague de chaleur agit comme catalyseur à toutes les violences possibles. Après tout, il faut bien trouver un coupable.

Bref, unt très bonne lecture.

Nestlings – Nat Cassidy

Ce roman était dans la liste de favoris de Gabby Reads et comme j’aime bien l’horreur étrange qui peut s’interpréter comme étant métaphore de la réalité, je me suis dit que ça pourrait fonctionner. Et savez-vous quoi? Yep! Vraiment!

De quoi ça parle

Après des années en fertilité, la naissance de Charlie a laissé Ana paraplégique et elle est en pleine dépression post-partum. Mais la chance semble tourner quand elle et son mari sont tirés au sort pour une lotterie d’appartement dans l’un des immeubles les plus huppés et mystérieux de New York, le Deptford. Mais lors de la visite, Ana se sent mal à l’aise, étrangère. Se sentira-t-elle chez elle dans ce magnifique immeuble?

Mon avis

Non mais quelle réussite que ce roman pour moi. J’avais un peu peur au début parce qu’en fait, le livre faisait son boulot : on ne se sentait pas bien du tout dans cet immeuble, mais pas du tout! On sait très rapidement qu’il y a un élément fantastique dans l’histoire, on sait que ça ne peut pas bien aller et que toute cette histoire est fort louche. J’ai eu l’impression de voir un film d’horreur, avec plans caméras, limite avec de la musique qui fait peur. L’atmosphère est hyper réussie et il y a de multiples interprétations possibles à la signification des événements du roman, même si l’auteur nous explique ce qui lui a donné naissance. J’ai aimé y voir de multiples choses différentes.

Donc, le Deptford, immeuble fascinant, rayonnant, dans un New York grouillant et mouvant. Il n’y a presque aucune information sur l’endroit mais il semble avoir été témoins de drames multiples et variés. Si Ana se sent rapidement « pas chez elle », Reid, son mari, qui a été proche aidant et qui a tenu le fort depuis la dernière année, s’y plait davantage et comprend de moins en moins les réactions de sa femme, qu’il juge exagérées. Bref, l’immeuble le hante, mais dans le bon sens.

Entre les deux époux, Charlie, la fillette d’un an qui réagit très fortement à l’arrivée dans le nouvel appartement chic et qui semble pleurer sans arrêt. Ana n’en peut plus et sa relation avec sa fille est trouble. Elle a un historique avec sa mère et ne se sent pas la mère « qu’il faut » pour sa fille. Sa fille qui lui semble de plus en plus étrange et elle a peur de ses propres réactions face à elle, alors que la voix de sa mère à elle, dans sa tête, lui rappelle combien elle n’est pas adéquate. Bref, Ana est une personne dont la vie a complètement changé, qui ne sait plus qui elle est et qui n’a pas encore fait le deuil de qui elle était avant. Elle est loin d’être parfaite mais elle sonne vrai et ce même si l’auteur n’est pas lui même en fauteuil roulant.

Un roman qui utilise l’horreur pour discuter du sentiment de n’appartenir à nul endroit, de la maternité et de la dépression post partum, du handicap, du deuil et des effets secondaires de toutes ces transformations autour de soi, surtout quand les tragédies s’accumulent et que nous perdons pieds. J’ai adoré la fin qui parle d’amour maternel, d’acceptation de qui sont nos enfants… bref, j’ai adoré.

Un très bon roman et maintenant, j’ai envie de lire le précédent roman de l’auteur. Quand j’aurai envie d’un peu d’horreur ou de gothique!

The Hearing Trumpet (Le cornet acoustique) – Leonora Carrington

Je connaissais Leonora Carrington comme peintre surréaliste mais je ne savais pas du tout qu’elle avait écrit des romans. Quand je l’ai vue dans la liste de favoris de Paper Palace, j’ai eu envie de m’y plonger, of course. Surtout quand je l’ai croisée dans deux autres ouvrages dans la même semaine. C’était écrit dans le ciel.

De quoi ça parle

Ou plutôt « comment ça commence ». Nous rencontrons donc Marian Leatherby, nonagénaire presque complètement sourde habitant avec son fils, sa belle-fille et son petit-fils. Son amie Carmella lui offre un jour un cornet acoustique qui lui permet d’entendre parfaitement et Marian découvre que comme ils la pensent sénile (et bon, elle dérange, en fait, cette vieille qui ne sert plus à rien), ils veulent la placer en maison de retraite. Le problème, c’est qu’elle, elle souhaitait aller en Laponie.

Et ça va arriver. Et elle va arriver dans un milieu complètement barré… et ça ne va pas s’améliorer. Mais je vous laisse découvrir!

Mon avis

Clairement, j’ai adoré cette courte lecture. Plus ça part dans tous les sens plus j’aime. Et ici, on part d’une maison de personnes âgées tenue par un couple chrétien, les Gambits, qui tente de contrôler les 10 pensionnaires en les « améliorant » et en les aidant à expier et éliminer leurs fautes. Non mais comme si on n’avait que ça à faire à 90 ans! Elles mangent presque du pain sec, habitent dans des bottes, des igloos, des phares, des champignons mais dans la salle à dîner, un curieux portrait, une nonne qui semble leur faire un clin d’oeil.

C’est un roman féministe, presque anarchiste. On explore le traitement des personnes âgées et surtout des femmes âgées qui n’ont pas beaucoup de choix dans les rôles qu’elles peuvent tenir. Une fois moins belles, moins désirables, elles n’ont plus de place dans la société et perdent tout pouvoir, devenant ainsi des fardeaux dont on veut se débarrasser. La famille de Marian est dé-tes-ta-ble en ce sens. Tout ce propos est hyper intéressant sans être non plus martelé. Il est impossible à manquer par contre car si ça peut vous sembler étrange… attachez vos tuques, ça va encore déraper!

Le récit est totalement surréaliste. On y retrouve des référence à la mythologie (aux mythologies devrais-je dire), aux évangiles gnostiques, aux créatures surnaturelles ainsi qu’aux symboles ésotériques. Entre Graal, Déesse et sorcellerie, il faut accepter de se laisser porter par le propos de l’autrice, accepter les impossibilités et apprécier l’imagination et les liens que fait l’autrice. Je ne crois pas avoir compris toutes les références, loin de là… mais j’ai adoré.

Mon amie Mamaki a moins aimé la partie sur la fameuse bonne soeur qui lui a semblé longue mais pour ma part, j’ai apprécié à cause des fameuses références. Et à partir de là, ça part vraiment ailleurs. Mais VRAIMENT.

Bref, si vous voulez être déstabilisé, tentez le coup. C’est drôle, la voix de la narratrice est hilarante et déconcertante, c’est intelligent et ça attaque férocement le patriarcat ainsi que la religion. Tout ce que j’aime.

Autoportrait d’une autre – Elise Turcotte

J’aime beaucoup Élise Turcotte. Je sais que je suis fan de sa plume, de son intelligence aussi. J’ai ce livre depuis un moment mais c’est quand ma mère l’a lu et me l’a mis dans les mains en me disant « tu vas aimer ça, c’est écrit pour toi » que je me suis décidée à m’y mettre. Et j’ai DRÔLEMENT bien fait!

De quoi ça parle

Elise Turcotte a toujours été fascinée et intriguée par l’une de ses grandes tantes, morte jeune, qui a vécu à Paris et au Mexique et qui a côtoyé de nombreuses personnalités de l’époque surréaliste. Quand elle découvre une correspondance avec Miron, elle réalise que là où devrait se trouver sa tante, celle qui voulait être actrice, il n’y a que du vide. Et c’est en cherchant cette tante Denise qu’elle va peut-être trouver des fragments d’elle-même.

Mon avis

Ce roman, c’était pour moi. Là-dedans, il y a tout ce que j’aime et surtout, j’en suis ressortie avec une folle envie d’APPRENDRE et de découvrir tous les gens et artistes de l’époque qui est explorée dans le roman. Et j’adore cette sensation.

Entendons-nous, ce n’est pas une lecture si simple. Elle nous pousse à réfléchir, à fouiner sur le net quand on n’a pas tous les codes et toutes les références. Car Denise, la tante de l’autrice, a vécu à Paris et lontemps au Mexique. Elle a côtoyé de grands noms, des artites moins connus aussi, elle a été mariée à Alejandro Jodorowsky, a connu Leonora Carrington et Remedios Varo, étant la grande amie d’Alan Glass… bref, elle était là mais dans les écrits, on ne la rencontre nulle part sur le net ou dans les archives. Ou presque.

Ce roman, c’est le roman de la recherche, une recherche de cette tante mais aussi de soi vu qu’Elise Turcotte s’était toujours identifiée à cette tante Denise, morte trop jeune et qu’elle a somme toute peu connue. D’elle, il ne lui reste que des images d’une femme fumant dans la cuisine. Et à travers ces pages, elle réussit à nous la rendre vivante.

Ce livre parle aussi de maladie mentale. Celle qui était incomprise, celle qu’on taisait, qu’on ignorait et qu’on dédaignait aussi. Surtout la maladie mentale chez la femme. La réflexion sur la folie et sa perception, surtout quand elle est associée à la création est hyper intéressante. Comme Turcotte le mentionne, si elle avait été une grande artiste, elle aurait été perçue autrement. La maladie mentale serait devenue une partie de son art… mais voilà, elle n’a pas créé. Et elle est donc devenue juste « persona non grata ».

Bref, un roman fascinant pour moi. Il ne plaira pas à tout le monde, il faut avoir du temps, de la concentration et avoir envie de se creuser la tête. Mais pour moi, totale réussite. C’est recherché (très), intelligent (vraiment), bien écrit… Bref, si les thèmes vous intéressent, tentez le coup!

Justicière – Les Archives de Roshar – tome 3 – Brandon Sanderson

Si vous me suivez un peu en Story instagram, vous savez que je suis en plein dans Roshar de Sanderson. Et j’ai fini les deux tomes qui forment le troisième tome en anglais (Oathbringer)… et je vais tenter de vous en parler sans trop spoiler. Quoique ce n’est pas gagné. Vous pouvez donc zapper cette chronique… et vous saurez que j’adore cette série et que les personnages sont devenus mes amis! Voilà, c’est dit!

De quoi ça parle – ATTENTION POSSIBLES SPOILERS SUR LES PREMIERS TOMES

Dans ce troisième tome, nous sommes après la désolation. Le pire est arrivé et les Néantifères sont de retour, quoique bon… ils n’ont jamais été bien loin. Nos personnages principaux sont réfugiés dans la cité-tour d’Urithiru et tentent de survivre tout en essayant de réaliser la mission sacrée de Dalinar Kholin : « Unissez-les ».

Mon avis

Je l’ai dit dans mon paragraphe d’ouverture, cette saga fantasy est un bonbon pour moi. Il ya beaucoup – beaucoup – de pages mais chacune d’elle est un délice, qu’elle traite de sombres histoires du passé, de la mythologie, de la science derrière les fabriaux ou encore des dieux divers et variés. C’est simple, Sanderson pourrait me passer n’importe quoi et j’aimerais. J’ai donc trouvé ce tome palpitant même si après discussions, j’ai réalisé que plusieurs l’ont trouvé un peu longuet. Déprimant aussi. Et je peux comprendre parce que rien de va plus à Roshar. Nos personnages tâtonnent, échouent, font d’énormes erreurs et plus on en sait sur cet univers, plus on réalise à quel point il est vaste et à quel point il nous manque d’éléments pour tout bien saisir. Ici, les concepts de bien et de mal ne sont clairement pas clairs et certaines découvertes de nos héros vont les plonger dans la perplexité et parfois les faire déraper.

Ici, on est aussi dans les jeux politiques, dans les magouilles et les faux semblants. Les personnages s’étoffent, ils ont de lourds passés et ceux-ci vont les rattraper alors qu’ils tentent de faire ce qui leur semble le mieux. Les Radieux apparaissent, on voit poindre les Hérauts et la cause semble souvent perdue pour nos protagonistes.

J’adore les différents points de vue qui éclaire les événements d’une autre façon, les intermèdes et le fait que personne n’est parfait. Les décisions – bonne ou mauvaises – sont logiques en fonction des personnalités et expériences de chacun… bref, c’est intelligent, bien construit et tout se tient.

Il faut aimer les looooongues séries par contre. Sinon, pas certaine que ce soit pour vous. Mais chose certaine, c’est pour moi!

Une prière pour les cimes timides – Monk and Robot #2 – Becky Chambers

Je vais commencer par mon habituel commentaire inutilo-superficiel : mais cette couverture… CETTE COUVERTURE! Rien à faire je craque à chaque fois!

De quoi ça parle

Dans le premier tome, nous rencontrions un moine de thé qui partait à la recherche soi, hors des sentiers battus. Il rencontrait un robot, le premier à parler à un humain depuis l’éveil et celui-ci a aussi une question : que veulent les humains. Dans le premier tome, ils font un bout ensemble et dans le second, ils reviennent dans le monde civilisé, celui de Sibling Dex, un monde utopique que le robat va découvrir.

Mon avis

Vous avez adoré le premier? Vous allez adorer celui-ci. C’est la suite directe, c’est la même vibe et on explore encore davantage cet univers utopique. Sincèrement, j’ai mieux aimé que le premier. Sauf que si ce sont pour moi de « bonnes lectures », on est quand même loin du coup de coeur pour ma part. C’est agréable, c’est doux, positif, on passe un bon moment mais il n’y a pour moi aucune pensée révolutionnaire là-dedans. Rien qui soit « life changing ».

On est ici dans l’utopie. L’effondrement a eu lieu et ensuite, les gens se sont relevés et ont fait mieux. C’est un bon monde. Plus égalitaire, plus respectueux de la nature, plus à l’écoute des besoins de chacun. L’idée du moine de thé est tout à fait géniale, on est au-delà des préjugés et des stéréotypes. Sauf que je suis une grosse pessimiste et que je n’y crois pas une seule seconde. J’ai eu mon époque idéaliste mais plus je suis confrontée à l’humain et à l’humainerie, moins j’y crois, Et dans ce roman, il manque d’humainerie. Je ne peux m’empêcher de me dire « mais tel aurait fait ci… et tel type de personne aurait contourné comme ça… » bref, j’ai du mal à croire en un monde où tout le monde est bon et gentil. Et je décroche.

Pourtant, l’exploration des valeurs, de l’univers, des différents villages est intéressante. Aucun ennui ici. Le seul problème, c’est que je suis restée à distance. Ceci dit, je suis seule dans mon équipe, ce roman a été un coupe de coeur pour 99% de la population qui l’a lu!

De belles réflexions, des images qui sonnent juste (ce titre, entre autres… magnifique)… mais peut-être ne suis-je pas faite pour ce type de roman. Ou du moins pas faite pour ADORER ce type de roman.

Le mystère Jérome Bosch – Peter Dempf

J’aime les livres qui parlent d’art. Du coup, j’ai difficilement pu résister à un polar qui a pour base le fameur tryptique de Jérome Bosch. Surtout quand je l’avais dans ma pile. Depuis sa sortie. Of course. Sinon c’est pas drôle.

De quoi ça parle

Le Prado, 2013.

Un moine se précipite vers le célèbre Jardin des Délices de Bosch et lui lance du vitriol. Lors de la restauration, les artistes réalisent que sous la peinture, il y a peut-être des inscriptions mystérieuses, qui pourraient nous en apprendre davantage sur le mystère qu’est le peintre et le tableau.

Quand la psychiatre en charge du prêtre demande au restaurateur de lui parler car il refuse de s’ouvrir à elle, il va justifier son action par la découverte d’un manuscrit ancien. Ils vont être entraînés sur les traces de Petronius Oris, dans un récit assez incroyable qui vont les ramener à la création du tableau en 1511, dans un petit village pris d’assaut par les inquisiteurs.

Mon avis

J’écris ce billet une petite semaine après ma lecture et clairement, mon avis final est « bien mais sans plus ». C’est un bon divertissement, les recherches dans le tableau de Bosch à mesure qu’il est décrit dans l’histoire est fascinante (j’avais l’impression de jouer à Où est Charlie… j’adore!). Nous avons ici un typique passé-présent avec Keie le restaurateur, la psychiatre, un collègue et le moine-vandale-raconteur en 2013 ainsi que Petronius Oris, disciple de Bosch, à Bois-le-Duc, au 16e siècle. Pour ma part, j’aimé le passé, avec le village où règne presque une guerre entre l’inquisiteur et l’illustre compagnie de Notre-Dame dont fait partie Jérôme Bosch. La part de vérité là-dedans? J’en doute quand même vu que nous partons dans l’ésotérique et les sociétés secrètes mais j’avoue que je m’en fiche un peu… quand on parle de peintres, de tableaux et de suppositions de folie, ça me plaît. Tout en sachant que nous sommes dans un roman.

J’ai trouvé l’atmosphère du 16e très bien faite, avec l’impact de la religion, les magouilles et les complots. Bosch, peintre au sujet duquel nous avons somme toute assez peu d’information, est décrit comme un être mystique, que nous rencontrons sous le regard d’un jeune peintre qui souhaite faire ses classes. Le jeune Petronius Oris sera pris dans quelque chose de plus grand que lui, tisser de liens et surtout, son existence va être menacée. C’est plein de mystères et d’aventures et il y a le célèbre triptyque comme fil rouge. Bref, cette partie n’est pas mal du tout, même si l’un des mystères n’est pas si mystérieux que ça.

J’ai moins adhéré la partie dans le présent, avec notre charmant moine mysogine. Les personnages m’ont moins intéressée et j’ai aussi trouvé le lien entre les deux époques assez artificiel. De plus, il y a un certain thème féministe dans le roman. On en parle. Beaucoup. Sauf que dans l’histoire, les femmes sont très secondaires et souvent définies par leur position par rapport à un homme. Elles se veulent libérées mais bon… dans le livre, ça ne paraît pas tant que ça. Ceci dit, je ne suis pas capable de déterminer la date de publication en VO (je vois 1999, 2007, 2013… bref, je ne sais pas) et si c’est plus vieux… ceci explique peut-être cela.

Bref, pas mal, intéressant si vous aimez la peinture dans les livres, mais pas révolutionnaire non plus.