Rue Duplessis – Jean-Philippe Pleau

Je ne pense pas que j’aurais lu ce livre sans ma mère. Elle a entendu dire qu’il était très populaire et a donc eu envie de le lire. Donc je l’ai emprunté à la bibliothèque sans attente.

De quoi ça parle

Jean-Philippe Pleau est né d’un père analphabète et d’une mère qui n’est pas allée à l’école longtemps. Ils vivaient dans un quartier populaire, d’une paye à l’autre, avec tous les préjugés de l’époque et plus particulièrement de cette classe sociale qui n’a pas eu les mêmes opportunités et qui ne les cherche pas nécessairement.

L’auteur est devenu animateur à la radio de Radio-Canada. Le grand écart avec le milieu d’où il vient. Il devient donc un transfuge de classe, étranger partout. 

Mon avis

Ce roman, c’est l’histoire d’une déchirure, d’une migration culturelle. L’auteur est allé à l’université, a côtoyé Serge Bouchard et parle de philosophie à la radio. Radio-Canada, ce n’est pas la classe moyenne. Genre, je suis allée à l’université, je suis née dans cette classe et je serais complètement décalée d’arriver là. L’auteur y est débarqué avec ses expressions truculentes et ses zones d’ombre et d’ignorance. Et ce n’est pas simple. On sent immédiatement que cet ouvrage est le fruit de longues réflexions et qu’il s’est remis en question à de nombreuses occasions. Ici, pas de victimisation mais des faits. Et une mise en relief des différences de classe, même ici, même maintenant. Entendons-nous, l’auteur a mon âge. Donc, très très jeune, n’est-ce pas!

L’auteur nous parle de son parcours, nous abreuve d’anecdotes sur son enfance et les défis quotidiens qu’ont amené son transfert de classe sociale. Si l’auteur a parfois un regard extérieur sur ses parents, sa famille, son milieu, on sent son profond amour pour ses parents sans pour autant romantiser cette esistence qui a été la sienne. Il jette son oeil de sociologue sur son milieu, explique certains comportements, certains préjugés et nous remet en pleine face que même hors du 1%, on ne nait pas tous avec les mêmes opportunités.  On sent également la souffrance, l’omniprésence de cette question pour l’auteur qui ne se sent plus chez lui « nulle part », étranger à son milieu actuel et à son ancien milieu. 

Entendons-nous, avec le travail que j’exerce, j’ai dû lire sur la vulnérabilité sociale, sur les inéquités ainsi que sur la pauvreté. Je n’ai donc pas « appris » en lisant ce texte. Je l’ai commencé en me disant que c’était un peu enfoncer des portes ouvertes. Sauf que j’ai continué. Certes, certaines références sont répétitives mais l’auteur réussit à vulgariser les concepts et à rendre les choses accessibles à tout le monde. Il raconte l’histoire de ceux qui n’ont pas toujours de voix, ceux qu’on ne voudrait pas voir.  Et, surtout, qui ne réussissent pas à toucher la « moyenne » quand ils prennent la parole. 

En lisant ce texte, j’ai reconnu certaines personnes, pas nécessairement de ma génération. Et, étrangement, si j’avais fait le lien avec les gens avec qui je travaille, je n’avais jamais transposé au reste de ma vie. Et, surtout, on en a parlé. Longtemps. Avec plusieurs personnes. Un roman qui ouvre la discussion, qui crée des conversations, je ne peux que recommander. 

Trop semblable à l’éclair – Terra Ignota -1 – Ada Palmer

Voici donc une série que je veux lire depuis des années. J’ai attendu d’avoir tous les tomes dans ma pile avant de me mettre dedans… et je sens que j’ai bien fait parce que si j’attends pour continuer la série, je vais être OVER perdue. Mais vraiment.

De quoi ça parle

Nous sommes en 2454, trois siècle après les événements terribles ayant remodelé la société. Les êtres humains n’ont plus de nation physique mais sont réparties par affinités et croyances dans sept Ruches aux buts et ambitions différentes. Utopie? Extérieurement, on dirait. Mycroft Canner, le narrateur, est un serviteur condamné et qui nous explique lui-même qu’on ne peut pas se fier totalement à lui. Au début du roman, une liste a fuité dans les médias, liste qui détermine les personnalités les plus influentes du monde, ce qui met en péril l’équilibre des Ruches. Mais Mycroft cache un secret encore plus dangereux : un enfant qui a des pouvoirs qui peut changer le monde.

Mon avis

Ok. Je vais commettre un presque sacrilège pour tous ces copains qui ont adoré et qui vénèrent cette série. En fait… je ne sais pas trop comment me situer face à cette histoire et j’aurais du mal à le conseiller. J’ai passé ces presque 700 pages complètement perdue. Investie dans l’histoire mais perdue.

Nous sommes donc dans un univers incroyable. Passionnant, bien construit, rempli de détails, de complots et de conspirations. On sent que l’autrice a réfléchi aux mécanismes et à l’histoire. C’est rempli de références, notamment de références philosophiques de l’époque des lumières, c’est recherché et ça explore une panoplie de thèmes. Nous sommes lancés dans l’histoire comme si nous étions des contemporains du narrateur ayant déjà connaissance d’une partie des événements qui sont racontés et si j’aime l’idée, je me suis rarement sentie aussi… nouille en lisant un roman!

Dans cet univers, la religion est interdite, les croyances sont permises mais strictement personnelles. Interdiction d’en parler en groupe sans supervision d’un Sensayer qui vérifie qu’aucun culte n’est en formation. De même, toute notion de genre est gommée, on utilise le pronom « on » ou « ons » (aucun « iel » ici), ce qui ne plait pas au narrateur qui ne comprend pas pourquoi le genre devrait être effacé. Ce qui ne signifie pas que les pronoms qu’il utilise sont ceux qui correspondent au sexe biologique. Bref… ça peut aussi déconcerter, surtout quand tout le monde considère comme tabou toute référence genrée.

Mycroft, le narrateur, on aime ou ou déteste. Moi j’adore. J’aime qu’il ne nous dise que ce qu’il veut nous dire et qu’il s’adresse à nous. Nous nous baladons aussi d’un personnage à l’autre, on sait que cette narration a été demandée par quelqu’un… bref, encore une fois, ce n’est pas simple.

Là, vous vous dites : on a compris. C’est compliqué. Mais on ne sait toujours pas de quoi ça parle!

Savez-vous quoi… je pense que moi non plus. J’en sais un peu plus sur les deux principaux enjeux du début du roman, j’ai découvert des TONNES de personnages que je n’ai pas l’impression de connaître et qui sont un peu froids, j’ai découvert l’univers et quelques uns des enjeux… mais j’ai bien du mal à discerner les arcs narratifs. Et certaines scènes entre les puissants sont… dérangeantes. Je ne comprenais clairement pas pourquoi tant de c… dans cette scène hautement politique. Peut-être ne suis-je pas à la hauteur de l’humour! C’est un roman intelligent, foisonnant… mais peut-être est-ce moi qui n’est passez wise pour tout comprendre!

Je lirai la suite. Rapidement sinon je suis foutue! Et probablement que cette fois, je vais prendre des notes!

How to become the Dark Lord and die trying – Django Wexler

Ce roman, c’est 100% la faute de Kayla de Books and Lala. Je ne sais pas où j’aurais pu entendre parler de ce roman autrement!

De quoi ça parle

Davi a tout vu. Dans le sens littéral du terme. Pour une raison qu’elle ne comprend pas, elle vit et revit la même histoire depuis environ 1000 ans et tente de devenir l’héroïne qui réussit à vaincre le Dark Lord. Sauf que ça ne fonctionne jamais et qu’elle finit toujours par mourir dans d’atroces circonstances… pour recommencer encore une fois au même endroit.

Elle décide donc que cette fois, ça suffit. Elle ne va pas tenter de vaincre le Dark Lord, elle va DEVENIR le Dark Lord. Bonne idée, non?

Mon avis

Je n’aurais pas dû aimer ça. C’est horriblement vulgaire, c’est souvent gore, Davi est une femme qui se fiche d’à peu près tout – du moins au début – et qui a pour but principal dans la vie de s’envoyer en l’air avec tout ce qui bouge. Tout. Aucun distinction de genre ou d’espèce. Et si personne n’est à disposition, elle va limite se donner une tendinite au poignet à se satisfaire elle-même.

Oui, je sais. Ça sent la femme écrite par un homme. Je sais. Pour vraiment aimer, j’ai dû m’imaginer que ça avait été écrit par une femme. Je sais, ça en dit long sur moi.

Ceci dit, on se croirait dans un jeu vidéo. Une quête classiques avec tous les clichés possibles et inimaginables? Et c’est du grand n’importe quoi. Mais vraiment. Et moi, en tant que lectrice, je m’imaginais les situations et je riais comme une folle à la stupidité de celles-ci, tout en me disant que je ne devrais pas rire parce que c’est vraiment, mais vraiment con. Et pas de classe. Entendons-nous, je n’aurais pas pu le lire en français.

Est-ce que l’univers a du sens? Je ne sais pas encore. Il y a un tome 2 et je le lirai pour voir si ça se tient un peu, beaucoup ou pas du tout. Mais la voir prise dans ses propres clichés avec des « minions » sans totalement y croire et en se laissant prendre à son propre jeu est quand même parfois hilarant. C’est rempli de références à la pop culture (ouais, étrange, je sais, vu que la protagoniste est là depuis 1000 ans et qu’elle n’a que peu de souvenirs de sa vie d’avant), ses réflexions sortent de nulle part… et j’ai passé un très bon moment de lecture. Ça non plus je ne sais pas ce que ça dit sur moi!

Et shoutout au Wilder-renard qui aime bien se faire gratter derrière les oreilles!

Urushi – Une clochette sans battant – Aki Shimazaki

J’ai fini une série! Incroyable!

De quoi ça parle

Nous sommes ici dans le cinquième volet de cette pantalogie de Shimazaki et nous suivons Suzuko Niré, la fille de Kyôko et fille adoptive de sa tante Anzu suite à la mort de sa mère biologique. Suzuko a 16 ans et est amoureuse de son frère adoptif, qui est en fait son presque cousin, d’une dizaine année son aîné. Lui avouera-t-elle ses sentiments?

Mon avis

Dans cette série, j’ai beaucoup aimé trois tomes et deux m’ont moins plu. Celui-ci fait partie de ceux qui pour moi étaient « bien, sans plus ». Agréable lecture, une plume toujours aussi pudique, aussi dépouillée mais l’histoire étant plus convenue. Un passage à l’âge adulte. Une jeune fille qui va prendre conscience du monde des adultes et de la complexité des relations. Serait-elle à l’image de cet oiseau blessé qu’elle a recueilli?

Suzuko est très attachée à son grand frère, qu’elle considère comme un amoureux potentiel depuis qu’elle est toute petite car leur niveau de parenté est somme toute plus proche de « cousins » que de « fratrie ». Tôru s’est toujours occupé d’elle mais il a quitté sa région natale plusieurs années auparavant. Pour Suzuko, le moment de l’université est une raison toute trouvée pour aller le rejoindre. Cette relation qui n’est clairement pas vue de la même manière par les deux parties est intéressante et de l’extérieur, les sentiments du grand frère sont clairs. La jeune fille rêve un futur impossible et voit toutes les filles, même ses cousines, comme des rivales potentielles. De plus, depuis la mort de sa grand-mère qui souffrait d’Alzheimer, elle n’a plus de confidente à laquelle elle puisse se confier en toute sécurité.

Si c’était une lecture somme toute agréable, je suis restée assez distante par rapport au personnage principal que j’ai eu du mal à comprendre. J’ai surtout aimé les parties traitant du kitsugi, cet art japonais de réparer avec de l’or, qui est une très belle métaphore des déceptions qui nous font avancer, des brisures que nous réussissons à réparer. La réalité des personnes queer au Japon est également effleurée. Je suis donc contente d’avoir terminé la série… mais je reste tout de même un peu sur ma faim par rapport à certains autres tomes.

L’inconnue du portrait – Camille de Peretti

Suite à ma vidéo « Ces livres qui parlent de peinture », on m’a plusieurs fois recommandé ce roman sorti l’an dernier. Et en effet, on est clairement dans le thème.

De quoi ça parle

Ce roman est basé sur l’histoire rocambolesque du tableau « Portrait d’une dame » de Klimt. Repeint d’un tableau disparu « portrait d’une jeune dame », il a été volé en 1997, été copié, revolé, et retrouvé presque par hasard plus de 20 ans plus tard près du musée où il avait été dérobé.

Camille de Peretti invente une vie à la jeune dame du tableau et à ses descendants et ce sont ces vies qui nous sont racontées.

Mon avis

Ce roman, c’est tout à fait le genre d’histoire dont je suis friande. Une saga intergénérationnelle, qui nous amène de Vienne à New York, en passant par le Texas moderne. Je sais que tout est imaginaire, mais je me surprends chaque fois à y croire.

Nous rencontrons donc les personnages à différentes époques et à différents moments de leurs vies. Nous comprenons petit à petit les relations qui les unissent ainsi que leur lien avec le fameux tableau. Les personnages sont assez divers: une jeune servante viennoise, un jeune cireur de chaussures et une jeune avocate texane à qui un test d’ADN va révéler son père. Ces personnages m’ont tous plu. Ils ont tous des failles, surtout Isidore. C’est hautement romanesque, ça se lit tout seul, la plume est accessible et ça coule tout seul. Je l’ai lu en une petite soirée, c’est tout dire!

L’histoire du portrait est rocambolesque mais l’explication, étonnament, se tient. Le portrait fascine, parfois jusqu’à la folie et ouvre toute une conversation sur la filiation. Qu’est-ce qu’un père? Quelle place ont les liens du sang dans les sentiments et dans relations?

Le procédé n’a rien de super-extra-original (même si l’histoire de ce tableau est ma foi fascinante) mais il a parfaitement fonctionné avec moi. Je me suis investie dans l’histoire, je voulais savoir ce qui allait arriver, ce qui ÉTAIT arrivé et surtout, comment les personnages allaient le découvrir. Vais-je m’en souvenir dans 10 ans? Je ne sais pas. Mais j’ai passé un excellent moment de lecture.

Rythmes de guerre – Les archives de Roshar – 4 – Brandon Sanderson

Je sais, je deviens redondante avec cette série. J’en ai parlé 22 mille douze fois déjà. Si vous n’avez pas commencé la série, sachez que j’adore. Ces personnages existent pour moi, cet univers est vrai, j’adore toutes les référence et les easter eggs. Bref, c’est de l’excellente fantasy adulte. Epic fantasy pour être exacte. Go for it!

De quoi ça parle – ATTENTION SPOILERS SUR LES PREMIERS TOMES

Si vous en êtes ici dans votre lecture, c’est soit que vous avez lu les premiers tomes ou encore que vous savez que vous ne les lirez jamais et que vous vous fichez d’être spoilés! Nous sommes donc un an plus tard, toujours à Urithiru, mais cette fois, la tour est menacée par les Fusionnés qui ont prix le contrôle de Ceux qui chantent. Voire même qu’ils les ont éliminés. Nos personnages principaux sont éparpillés dans Roshar et chacun doit réussir sa mission tout en tentant de combattre ses propres démons. Shallan et Adolin doivent convaincre les sprènes d’honneur de rejoindre leur combar, Dalinar est au loin avec l’armée, Kaladin a du mal à continuer à combattre tandis que Navani reste dans la tour et doit réunir ses rôles de reine et de scientifique. Nous rencontrons aussi plusieur Fusionnés ainsi que Venli, qui doit vivre avec ses propres décisions. Difficile à résumer, un tome 4, n’est-ce pas!

Mon avis

Arrivée à ce point dans la série, je pense que j’aimerais n’importe quoi! Est-ce que c’est mon tome préféré? Peut-être pas. Il y a beaucoup de points de vue, beaucoup de retours dans le passé et les personnages font autant de voyages intérieurs que de voyages extérieurs. Il y a certes de l’action, mais sur plusieurs fronts, ce qui peut donner l’impression que le récit avance très lentement. Ici, nous avons des regards différents qui sont jetés sur les événements, les points de vue varient et nous commençons à comprendre davantage ce qui s’est passé à Roshar il y a 1000 ans et ce qu’est vraiment Urithiru. Pas que nous allons tout savoir, loin de là, mais disons que les perspectives s’élargissent. j’avoue par contre que la première partie va sembler un peu lente à plusieurs. Voire même pas mal lente! Vous pouvez vous imaginer que ça ne me dérange pas hein!

Pour ma part, j’ai beaucoup aimé l’évolution de Shallan, qui doit finalement faire face à son passé ainsi que celle de Kaladin qui doit se redéfinir. Sanderson traite de santé mentale d’une façon qui passe très bien, tout en restant romanesque. Je ne connais pas très bien les problématiques dont il traite ici alors clairement, j’ai un avis extérieur. J’aime aussi énormément les divers lieux où se déroulent les faits, tous assez mystérieux mais ils semblent magnifiques.

Ce que j’aime dans la série, c’est que si nous avons un fil rouge qui tient du début à la fin du récit, celui-ci s’étoffe au fur et à mesure des tomes. De nombreuses énigmes sont résolues petit à petit dans l’histoire, de nouveaux mystères apparaissent, ainsi que de nouveaux complots et de nouvelles alliances. Nous n’avons pas du tout cet effet de « tout se règle à la fin de chaque tome et on soulève de nouvelles questions à la fin ». Non, c’est beaucoup plus graduel et ça passe beaucoup mieux. Il y a une vraie évolution dans les personnages et dans les situations.

Entendons-nous, il ne faut pas lire Sanderson pour la romance. Les passages sur Ceux qui chantent sont peut-être moins réussis mais en ce qui me concerne JE M’EN FICHE. Je les aime tous, j’aime les détester et j’aime les mystères, les situations en apparence inextricables. J’adoooore Wit, je me demande où s’attachent les Sang des Spectres dans le Cosmere, la fin m’a laissée pantelante… bref, j’ai hyper hâte de lire la suite! En décembre!

La femme de ménage – Frieda McFadden

J’ai refilé ce roman à mon frère car je n’en entendais que du bien et mon frère n’est pas un lecteur fréquent. Comme il a moyennement aimé, je me suis dit qu’il fallait que je tente le coup à mon tour et… bon. Moyen? Très moyen?

De quoi ça parle

Millie vient de sortir de prison. Elle n’a rien, dort dans la Casa Nissan et elle ne croit pas en sa chance quand elle obtient un emploi incroyable de femme de ménage à domicile chez le riche couple Winchester où elle devra s’occuper du ménage, de la cuisine et de leur fille. Sauf que la Nina adorable et agréable du départ se transforme rapidement en harpie qui accuse Millie de tout et n’importe quoi. Son mari est toutefois plus aimable et tente de rattraper le tout. Petit à petit, Millie se sent prisonnière dans cette grande maison vide. Nina est-elle vraiment dangereuse?

Mon avis

Allons-y d’emblée : j’ai été déçue. J’ai failli abandonner ma lecture à de multiples occasions, même si l’atmosphère était plutôt réussie en termes de tension et de lieux clos. Certes, Millie peut sortir… mais le peut-elle vraiment? Ceci dit, elle prend des décisions tellement, tellement… non mais POURQUOI ? Je comprends qu’elle soit mal prise, mais peut-on se demander comment il est possible d’avoir passé 10 ans en prison et c’être aussi naïve? Aussi mal équipée à affronter « les pas fins » en général? Elle m’a agacée, c’est incroyable. Comment est-il possible de ne pas voir tous ces « red flags »? C’est moi où ça saute aux yeux? Bref, j’ai été TRÈS énervée.

Ceci dit, même si l’écriture est hyper simple, ça se lit rapidement et si tu n’est pas devin (comme moi) et que tu n’as pas vu venir à des kilomètres, il y a des aspects qui surprennent et qui peuvent retourner le cerveau. La seconde partie du roman est selon moi mieux réussie que la première et apporte quelque chose à l’histoire qui nous est racontée. Dans cette partie, Millie est moins crédule, elle prend davantage son destin en main et certaines parties sont un peu jouissives. Est-ce que ça a suffi pour que je puisse dire que c’était une « bonne » lecture pour moi? Nope. C’était trop peu trop tard. Mais je conçois parfaitement la réaction des gens à cette lecture, sur laquelle je resterai vague pour ne pas trop en dire.

Ceci dit, je me suis surprise à me dire que je pourrais lire le tome 2 étant donné l’épilogue. Vu que Millie doit être plus allumée que dans le premier, non? Dites-moi que c’est le cas!

De purs hommes – Mohamed Mbougar Sarr

La plus secrète mémoire des hommes a été mon roman préféré l’année où je l’ai lu. Lire d’autres romans de l’auteur était une évidence.

De quoi ça parle

Ndéné Gueye est professeur de lettres. Un professeur de lettres désengagé, écrasé par la tradition et la lourdeur de son organisation. Une vidéo virale va profondément déranger le protagoniste. On y voit le cadavre d’un homme déterré puis trainé hors du cimetière par une foule en colère. La raison? Il était un goor-jigéen. Un homme-femme. Un homosexuel. Ndéné va donc tenter de comprendre qui était cet homme et cette recherche va bouleverser son existence.

Mon avis

Nous avons ici un roman qui frappe. J’admets avoir préféré La plus secrète mémoire des hommes, plus long, avec l’écriture comme thème, mais celui-ci nous jette en plein visage la situation des homosexuels au Sénégal. Et ça tape fort. Pour l’occidentale que je suis, l’atmosphère qui y est décrite est limite dystopique.

Notre personnage principal SAIT tout ça. Il en est conscient. Mais bon, pourquoi s’en soucier, ce n’est QUE un goor-jigéen après tout. Une discussion avec sa maîtresse va le faire réagir et se questionner… et il va tout remettre en question. Et nous, comme lecteur, on réalise jusqu’où ça va. À quel point la discrimination et l’homophobie sont valorisés, à quel point la loi va dans le sens des bourreaux et la religion, on n’en parle même pas. On valorise les gens qui persécutent les homosexuels, ce fléau selon eux venu de l’occident, les imams incitent à cette haine. Difficile de concilier cette vision du monde avec ce que mes amis musulmans me disent quand ils me parlent de leur religion, qu’ils décrivent comme une religion d’amour. Ici, disons que l’amour n’est pas universel, loin de là. Et ça fait réagir. Et ça enrage.

Parce qu’au final, une vie peut s’effondrer sur des rumeurs. Qu’importe la vérité si « tout le monde le dit », n’est-ce pas? Certes, on a du mal à comprendre ce personnage et l’intensité de cette quête mais la réflexion derrière est très intéressante. Comment être soi, vivre à la hauteur de ses valeurs quand ça peut avoir des conséquences? Des grosses conséquences. Quand l’argumentaire n’a aucune espèce d’importance?

La plume est travaillée mais accessible, remplie de références littéraires et philosophiques. J’adore la façon d’écrire de l’auteur, avec ce narrateur qui est très conscient d’être parfois pédant. De plus, ce roman soulève plusieurs questions par rapport à l’implication que nous pouvons avoir pour faire valoir les droits des minorités hors de nos pays. La culture et la religion excusent-elles tout?

Bref, une bonne lecture!

Dial A for Aunties – Jessie Q. Sutanto

Il y a des jours où je file pour un bon petit cosy mystery plein d’humour. Je sais toujours ce que j’y cherche: un bon moment sans prise de tête, sans me demander si c’est crédible ou non. Du genre de Finlay Donovan ou de Stephanie Plum. C’est ce que je voulais avec ce roman (qui est traduit avec un titre à rallonge de folie chez Hachette) et c’est tout à fait ce que j’ai eu.

De quoi ça parle

Meddelin Chan est la descendante d’une famille originaire d’Indonésie et de Chine. Pas n’importe quelle famille en plus. Il y a une malédiction sur la sienne : tous les hommes s’en vont ou disparaissent. Ce qui lui laisse sa mère (et coloc) ainsi que 3 tantes (avec des opinions, les tantes) avec qui elle travaille au sein d’une entreprise d’organisation de mariage.

Sauf que la malédiction semble la poursuivre : Meddelin va – fort accidentellement – tuer son blind date. Et comme chez elle « family comes first », les tantines vont voler à la rescousse… pendant le plus important mariage de l’année.

Mon avis

Entendons-nous, il ne faut pas s’attendre à quelque poésie que ce soit. À aucun réalisme dans l’enquête non plus. Mais quand je prends ce type de roman, JE M’EN FICHE! Je voulais rire, passer un bon moment, être divertie et me dire constamment « non mais c’est n’importe quoi »! Et c’est n’importe quoi. Les situations sont loufoques à souhaits, Meddelin prend des décisions complètement extraterrestres et les tantes, les tantes! J’en voudrais des comme ça… mais pas comme coloc ni comme collègues de travail. Elles se mêlent de tout et n’importe quoi, ont une vision bien à elle des choses et leur façon de juger les situations est ma foi… originale?

La veille du mariage d’une riche héritière avec Tom Cruise (Sutanto), Meddelin finit par accepter le blind date organisé – fort maladroitement – par sa mère. Le seul problème, c’est que le mec va mourir après avoir tenté de faire des guili-guilis à la protagoniste sans son consentement. Au lieu d’appeler la police, elle appelle ses tantes… et à partir de ce moment, tout va partir en vrille. Tsé les idées de m…???

Ceci dit j’ai aimé les tantes. Elles sont envahissantes, ont les idées bien arrêtées (et étonnantes) mais elles sont tellement aimantes! Et c’est cette partie « ode à la famille » que j’ai beaucoup aimée. L’autrice est elle-même d’ascendance chinoise/indonésienne, a voulu rendre hommage à sa famille toujours là pour elle, parfois drôle et en total décalage avec la façon de faire états-unienne. Ils parlent un mélange de langues, ont une maîtrise de l’anglais variable et souhaitent visiblement que Meddelin se marie. Parce que bon, quand même, il est temps!

Bref, un joli mélange d’humour et de découverte d’une autre culture. J’ai bien aimé!

Le roman d’Isoline – David Turgeon

J’avais repéré ce roman au salon du livre de l’Outaouais mais c’est l’avis de Maps et de Sylvain Démenti qui m’ont donné envie de le sortir de ma pile. Ils ont tous les deux adoré. Oui, je sais, ça fait peur. Maps et moi… disons que nous sommes rarement d’accord! Allons voir ce que j’ai pensé de ma lecture!

De quoi ça parle

Isoline est assistante éditoriale. Par un curieux hasard, elle rencontre Paula Kahn lors de son premier suicide. Kahn est une autrice populaire vieillissante, dont elle n’aime pas les écrits. Quand plus tard elle apprendra sa mort, elle se verra confier la fâche de publier ses inédits, elle va sombrer dans l’obsession et entendre une mystérieuse voix.

Mon avis

Non mais quel ovni littéraire que ce roman! Bon, ok, j’exagère peut-être un peu mais nous sommes face à une plume intelligente, à un récit bien construit malgré les digressions, les inside jokes et les apartés philosophiques.

Nous avons un personnage principal qui ne sait comment se définir et qui se transforme en fonction de sa situation actuelle. Entre mensonge et vérité, entre art, copie et inspiration, nous sommes baladés par les pensées d’Isoline, à qui il est parfois difficile de se fier. C’est qu’elle nous donne parfois une drôle d’impression sur qui elle est… ou qui elle n’est pas.

Ce n’est pas un roman qui nous donne toutes les réponses. J’ai refermé le livre en me disant : il FAUT que j’en parle. Et étrangement, ce n’est pas toujours les mêmes aspects qui nous ont fascinés. J’ai adoré le côté « méta », la critique du monde de l’édition, la narration, tandis que d’autres ont davantage été interpellés par l’obsession qui prend toute la place, jusqu’à ce que la narratrice s’oublie elle-même ainsi que son entourage. Bref, elle perd pied entre son texte, la voix qu’elle entend et ses relations qui se délitent. Et nous la regardons faire sans pouvoir intervenir, même si on a parfois le goût de la secouer.

Bref, un roman qui fait réfléchir. Sans chapitre, sans point, j’aurais cru que ce serait difficile à lire et lourd mais au contraire, pas du tout. Je l’ai dévoré en une après-midi, presque en apnée et je recommande. En plus, c’est souvent drôle. Un humour grinçant mais un humour qui me rejoint. Ne serait-ce que pour avoir davantage de gens pour en parler!