Présentation de l’éditeur
« Peut-être pouvez-vous vous permettre d’attendre. Peut-être que pour vous, il y a un demain, ou trois mille, ou dix, tellement de temps que vous pouvez vous en enrouler, le laisser couler comme des pièces à travers vos doigts. Tellement de temps que vous pouvez vous permettre de le perdre.
Mais pour certains d’entre nous, il y a seulement aujourd’hui. Et la vérité, c’est qu’on ne le sait jamais vraiment. »
Commentaire
Si vous suivez un peu la blogosphère anglophone, il était difficile à manquer, celui-là. Il était partout et la plupart du temps avec tout plein d’étoiles et de coeurs à côté du titre. J’avais donc d’énormes attentes. Ce qui est toujours risqué. Alors mes impressions générales? J’ai beaucoup aimé, vraiment. Mais j’ai des petits bémols, tout de même.
Ce roman, c’est l’histoire de Sam, étudiante de terminale (Senior, aux É-U). Et, pour la présenter brièvement, Sam is a bitch. Vous savez le genre de fille insouciante qui est très jolie, qui est copine avec la plus belle fille – et la plus bitch – de l’école, qui a la meilleure table, qui sort avec LE gars, qui peut tout se permettre, qui peut ruiner une réputation en claquant des doigts? Celle qui, aussi, ne se gêne pas pour rire des autres, quitte à leur faire du mal. Celle qui ne s’abaisserait pas à parler à ses anciens amis de peur de descendre dans l’échelle sociale de son High School. Bref, Samantha n’est pas une gentille et douce fille.
Ce jour-là, le 12 février, c’est une journée à peu près normale. Sam s’en va à l’école avec ses amis et se prépare à LE faire avec son copain Rob. Sauf qu’après une fête chez Kent, un ami d’enfance auquel elle n’a plus adressé la parole depuis 7 ans – j’adore le personnage, soit dit en passant-, elle et ses copines sont impliquées dans un accident et Sam meurt. Sauf qu’elle se réveille le lendemain matin. Le 12 février. Encore. Et encore.
Ça vous dit quelque chose? Groundhog’s Day – Bill Murray, un reportage, une marmotte, la radio qui chante « I got you babe »?) Oui, un peu. Le film est d’ailleurs mentionné dans le livre. Sam aura 7 jours – mais ça, elle n’en sait rien – pour redresser les choses. Pour se sauver. Sept jours où ce sera encore et toujours le 12 février.
C’est un roman résolument dans l’adolescence que nous lisons ici. Le portrait de l’école secondaire, avec ce qu’elle comporte de méchanceté ordinaire, parfois un peu insconsciente, est bien réussi et j’ai revu certaines scènes de mon propre passage dans ces murs. Sam n’est pas agréable tout de suite mais on sent tout de même qu’il y a vraiment quelque chose entre elle et ses copines, aussi mesquines soient-elles envers 90% de l’humanité. Et même si Ally, Elody et Sam sont quand même joyeusement menées par Lindsay. Si elles, m’ont parfois fait sourire entre elles, avec leur franc-parlé, leurs sms, leurs petites habitudes, leurs blagues qu’elles seules peuvent trouver si drôles et leurs grandes déclarations, une fois à l’école, c’est tout autre chose. On a un peu envie de les frapper et on est pas si peinés que ça quand Sam meurt. Sauf que là, elle nous dit…
« But before you start pointing fingers, let me ask you: is what I did really so bad? So bad I deserved to die? So bad I deserved to die like that?
Is what I did really so much worse than what anybody else does?
Is that really so much worse than what you do?
Think about it. »
Comme ça, ça semble moralisateur et plaqué mais dans le contexte, ça passe très bien. Et ça fait réfléchir. Parce que oui, c’est facile de suivre. D’être centré sur soi et de ne pas penser aux conséquences. Même adulte. Mais surtout quand on est adolescent. Je n’étais pas une vilaine fille et je n’étais pas « the it girl ». Mais je ne suis pas fière de tout ce que j’ai pu faire non plus.
Dans ces sept jours, nous assisterons donc à l’évolution de Sam, qui ne comprend rien, qui est en colère, qui tente de changer, de régler les choses, de dire au revoir et de chercher la rédemption. Pour ma part, je n’ai pas trouvé ces 7 jours si répétitifs que ça (bon, oui, il y a des répétitions mais disons que ça ne m’a pas du tout embêtée) et si Sam reste quand même Sam, on sent un réel désir de réparer ce qu’elle a fait mais aussi d’apprécier les petits riens quotidiens, parce qu’on ne sait jamais quand c’est la dernière fois. En ce décentrant de sur elle-même, elle réalise les grosses conséquences qu’ont pu avoir ses paroles et soudain, elle tombe un peu des nues.
Ce roman m’a captivée. Je l’ai commencé un soir tard, j’en ai rêvé – pour vrai – et je l’ai terminé le lendemain, sans le reposer ou presque. L’écriture est accessible, on se sent dans l’époque actuelle, les jeunes ne sont pas parfaits, loin de là, et même les méchants sont la plupart du temps dans les teintes de gris. Dans ces sept jours, Sam découvre des choses sur ses amis, sur elle-même, sur les gens qui l’entourent, parce qu’elle prend le temps de regarder, parce qu’elle ose, et rien n’est souvent exactement ce qu’il semble. Même si je ne me suis pas identifiée à Sam, j’ai pu ressentir son malaise lorsqu’elle réalise qu’elle est prise dans cette journée, qu’elle ne peut rien construire, qu’elle ne peut pas avancer. Je me suis réellement sentie coincée dans cette histoire et moi aussi, je cherchais la sortie.
Bien entendu, on n’évite pas quelques clichés et quelques petites leçons de morale au passage. Pour ma part, j’ai trouvé difficile que tout « s’efface » à chaque jour, tous ces moments qui n’ont existé que pour Sam et pour personne d’autre, ces moments perdus pour ses proches… je crois que c’est ce qui m’a fait le plus de peine. Et le septième jour n’est pas non plus celui que je choisirais pour terminer le roman, ayant préféré certaines autres journées. En effet, difficile d’expliquer pour quoi Sam est soudain si différente… personne n’y comprend rien et par rapport à une situation en particulier, je suis réellement perplexe.
Mais malgré tout, un beau moment de lecture pour un livre que j’ai dévoré. Je crois qu’il fera réfléchir plusieurs adolescents et j’espère qu’il en forcera certains à se remettre en question. Certains passages sont quand même assez forts. D’après ce que j’ai pu lire ailleurs, on adore ou ou déteste – et je comprends pourquoi on pourrait vraiment rager. Moi, j’ai aimé et ce roman m’a touchée, me faisant passer du sourire aux presque larmes (non, je ne me suis effondrée à aucun moment). Mais je ne suis pas en train de sauter au plafond non plus!
Ce roman n’est pas encore traduit en français mais le deuxième livre de l’auteur, Delirium, est prévu pour février (j’écris ce billet un 16 janvier), en anglais comme en français .