La maison dans laquelle – Mariam Petrosian

Je voulais lire ce – gros – roman depuis des années. Étrangement, le fait qu’il pèse une demi-tonne m’arrêtait un peu mais suite aux recommandations de Cornelius, je me suis lancée… et j’y suis restée prise 6 semaines.

Ce qui, pour moi, n’est pas normal. À croire que je me suis réellement perdue dans cette maison dont on peut – ou ne veut – pas sortir. Pourtant, j’ai aimé. Beaucoup. Mais ce n’est pas une lecture simple. Mais je m’explique.

De quoi ça parle

Nous sommes dans un internat. Un endroit d’où on ne sort presque jamais, qui a ses propres règles, son propre langage. Les jeunes qui y habitent ont tous un handicap. Il y a les marcheurs, les roulants, ceux qui voient, ceux qui vivent dans leur propre univers. Il y a les petits et les grands. Et tous les 7 ans, à l’aube des 18 dans du dernier groupe, une Sortie.

Il y a aussi la Maison. La Maison qui semble avoir une volonté qui lui est propre, qui cache également un univers tout autre, un Envers.

Ce n’est pas clair? Normal. Ce ne le sera sans doute jamais.

Mon avis

Ce roman fait partie de ceux que je relirai. Plus tôt que tard. D’ailleurs, en le refermant, complètement sonnée (parce que clairement, à le lire sur une si longue période, il y a beaucoup, BEAUCOUP de choses que je n’avais pas comprises), je m’y suis tout de suite replongée… et j’y ai passé un bon trois heures. C’est qu’en entrant dans cette Maison, il faut accepter de perdre nos repères et de parfois croire qu’on a perdu la tête. Entre les différentes temporalités, les jeunes qui évoluent et qu’on rebaptise, le côté onirique, le langage particulier, les contes et légendes du lieu, il est difficile de bien savoir à qui on a affaire… et ce que les interactions signifient vraiment. Il faut porter attention aux détails pour bien faire les liens… et ne pas hésiter à surinterpréter parce que ça, c’est chouette.

C’est chouette pendant 1118 pages. Oui, vous avez bien lu. Je sais. Ça fait peur.

Pourtant, il m’a fascinée du début à la fin. Même si j’y étais perdue et si je me demandais clairement si j’allais réussir à m’y retrouver. Mais au final… eh boy! Il y en a des interprétations possibles. Et en plus, c’est bourré de références aux classiques de la littérature jeunesse, que l’on pense à Peter Pan, à Lewis Carroll ou encore au Livre de la jungle. J’y vois une métaphore géniale de l’adolescence, avec cette peur de grandir, de l’Extérieur où les règles vont changer et où les légendes qui prennent toute la place ne seront plus que de bons souvenirs.

Chacun a son handicap dans cet internat, certes. Mais qui n’a pas ses défis, surtout ado? Leur univers est un peu crade, plein de mythes et de croyances. Il y a une Cafetière, un Croisement, même un Sépulcre. Il y a des guerres de pouvoir mais aussi beaucoup d’entraide. Des moments qui passeront à l’histoire et d’autres faisant partie du quotidien. C’est qu’à cet âge, les choses prennent une telle importance. Les adultes? Témoins. Ils sont davantage une figure qui effraie au lieu de rassurer.

Il y a l’Envers aussi, avec les Sauteurs et les Tombants, ceux qui peuvent passer d’un univers à l’autre. Il y a ces nuits sans fin, ces murs témoins de cet univers, remplis de dessins qui semblent parfois se mouvoir d’eux-mêmes. Il y a la nuit des Contes, contes de l’Envers probablement. Et le Temps, celui qu’on ne voudrait pas voir s’écouler, surtout pour certains. Entre boucles temporelles, sauts dans le passé, secondes qui se transformes en heures, on peut s’y perdre.

Et on peut se perdre entre les voix également. Qui racontent presque la même histoire, mais sous une perspective toute différente. Chacal-Tabaqui (j’adore la ref), conteur, farceur… mais aussi bien plus que ça, Sphinx, grand ou petit ou encore Fumeur, regard un peu externe, arrivé après, qui se fait parfois l’écho de nos pensées.

Bref, envoûtant. Je me souviendrai longtemps de ces ados, vivant dans leurs chambres séparés mais qui s’entraident quand même, malgré les guerre de pouvoir. L’Aveugle, Bossu, Vautour ou encore Loup et Lord. Mon préféré reste Tabaqui, of course, personnage central, mystérieux et semblans sans âge. Je le relirai. Et si vous avez le temps, l’énergie et l’envie de vous perdre dans les couloirs de la Maison, je ne saurais que trop vous le recommander.

11 Commentaires

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  1. On a pas mal parler de ce roman à sa sortie, toujours en bien. Mais toutes les chroniques étaient aussi impressionnantes/inquiétantes que la tienne. Bref, il faut se jeter à l’eau 😉

    1. Je serais TRÈS curieuse de voir ce que tu pourrais penser de ce gros roman. Je pense qu’il y a des aspects que tu pourrais apprécier.

  2. Je l’ai acheté à sa sortie (donc en grand format, tu vois l’engin !!) et toujours pas lu. Je suis pourtant persuadée qu’il me plaira, mais comme tu l’écris, je m’attends à ce qu’il me prenne du temps (et puis il n’est pas très commode à transporter, l’animal !)..

    1. Ah oui, en grand format, c’est… une brique. Dans le vrai sens du terme.

  3. Première fois que j’entends parler de ce roman. Et bien sûr, me voilà intriguée !

    1. Je pense qu’il fait peur… avec raison tout de même. Le départ est très très long… et on ne voit l’ingéniosité du truc seulement quand on prend le temps d’analyser.

  4. 1118 pages alors là je cale !

    1. J’aime bien ces looooongs romans. J’en ai lu plusieurs cette année.

  5. J’en ai entendu parler à sa sortie, lu peu de chroniques dessus par contre… il fallait oser aller au bout, d’autant que ça semble très spécial. Bravo !

    1. Oui, c’est hyper particulier. Mais il faut s’accrocher.

  6. Je ne crois pas avoir déjà lu un tel pavé et je ne suis pas sûre que j’y arriverai un jour. Bravo pour l’exploit, et en plus avoir envie de le relire :)) !

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