La ballerine de Kiev – Stéphanie Perez

Disons-le d’emblée, l’autrice n’est pas ukrainienne. Si vous ne lisez que du own voice, ça risque vous déranger. Par contre, elle est journaliste et elle a déjà visité le pays en plus de faire des recherches. Vous voilà donc avertis!

De quoi ça parle

Sviltalna et Dmytro sont danseurs étoiles à l’opéra de Kiev. Ils vivent pour la musique, pour la danse, le mouvement et cultivent la perfection de leurs corps, leur outil de travail. Sauf que nous sommes en 2022 et que bientôt, les bombes vont pleuvoir et la guerre va éclater.

Mon avis

À voir la couverture, je croyais avoir affaire à un roman YA sur la danse. Je ne l’avais donc pas repéré d’emblée avant que Mallo me dise qu’il en valait le coup et que mon idée préconçue était totalement à côté de la plaque. Comme souvent, elle avait raison! Il faut dire qu’on a souvent des goûts communs, elle et moi.

Nous sommes donc avec un couple de danseurs. Ils sont célèbres, adulés dans leur domaine. Ils ne le savent pas, mais ils viennent de danser ensemble pour la dernière fois. Nous suivrons l’homme et la femme dans leurs choix respectifs et aussi dans leurs différents parcours. Si vous connaissez un peu l’histoire de Vladminir Shklyarov, vous comprendrez rapidement où je m’en vais. C’est d’ailleurs cette expérience qui a inspiré l’un des personnage. Ces personnages sont zéro équipés pour la guerre, pour les bombes et la peur, pour les abris sous-terrains. Qui l’est, direz-vous. Mais leur vie, c’était paillettes, pointes, corps qu’on maîtrise et qu’on dompte. Leur vie c’était l’art. Et quelle place a l’art dans toute cette horreur?

Nous avons donc un roman très touchant, émouvant au possible, où la souffrance et la douleur ne nous est pas éparganée. Ce n’est pas fleur bleue, aucun faux romantisme à propos de la guerre, mais nous aurons des personnages qui devront s’élever plus haut qu’eux-mêmes. Nous vivrons les premiers mois de cette guerre qui ne finit plus, ça parle d’amour, de solidarité mais surtout de résilience. Svitlana devra se dépasser pour jeter une certaine lumière, une certaine grâce, dans des situations terribles. Tous prennent des décisions que personne ne devrait avoir à prendre. Je garderai en souvenir Tchaïkovsky, ports de bras et arabesques, mais aussi les ailes d’hôpitaux, les amputations et visites au cimetière.

Un roman fort qui humanise ces gens qui vivent dans la peur et l’angoisse, une vraie réflexion sur la place de l’art dans un monde en guerre, une très très bonne lecture.

Lettre à D. – André Gorz

J’ai lu ce roman dans le cadre de ma vidéo « je lis les favoris de… » pour 2025. Je ne connaissais pas l’auteur/philosophe alors je ne crois pas que je l’aurais pris sinon! En fait non. Je ne l’aurais clairement pas lu, soyons honnête!

De quoi ça parle

Au crépuscule de sa vie, André Gorz écrit une longue lettre à sa femme Dorine, l’amour de savie, et à travers ces pages, il va raconter leur histoire.

Mon avis

Nous avons donc ici un court texte sur l’amour, rendu encore plus poignant en sachant que l’auteur et son épouse ont choisi de mourir ensemble quelques mois plus tard.

Je ne connais pas la pensée d’André Gorz. J’aurais sans doute apprécié davantage si j’avais un peu su de qui il s’agissait. C’est une lettre d’amour certes, mais surtout une histoire de leur relation, de leur rencontre à leur mort, et de l’évolution de celle-ci. Il va parler d’elle, de son influence sur sa vie et son quotidien, tout en nous racontant leurs grands moments. Les histoires d’amour qui durent, les histoires qui parlent de personnes âgées, ça me parle particulièrement donc cet aspect m’a touchée.

Est-ce un peu autocentré? Certes. Ok, beaucoup. On rencontre Dorine avec André. Très peu de Dorine seule et on ne la connaît qu’à travers ce prisme. Il y a toutefois un acte d’humilité dans ce texte quand il revisite ses anciennes oeuvres où il ne la manquait pas! Alors que c’était plus ou moins vrai, voire même faux. Mais ce roman est un « merci », un « pardonne-moi » , un gros « je t’aime » et certains passages sont extrêmement émouvants.

Bref, une bonne lecture, une très belle plume, des moments touchants, mais un peu moins d’enthousiasme que Cornelius et Paper Palace qui m’ont donné envie de le lire.

In the Dream House – Carmen Maria Machado

Je vois ce livre dans des tops en anglais depuis plusieurs années. Habituellement, les témoignages et moi, ça le fait moyen alors j’hésitais. Par contre, ici, c’est un autre niveau! Quelle bonne lecture.

De quoi ça parle

Nous avons donc ici un témoignage/essai écrit qui relate la relation abusive que l’autrice a vécue avec son amoureuse de l’époque, la femme de la maison rêvée. Mais pas que. Et c’est génial.

Mon avis

Mais quelle excellente lecture! Je ne m’attendais tellemement pas à ça, à aimer autant. L’autrice a une plume magnifique, poétique mais accessible, elle est articulée, c’est bourré de références… tout ce que j’aime!

L’autrice et narratrice est tombée amoureuse de la femme de la Maison Rêvée quand elle était jeune adulte. Elle était plus ou moins à l’aise avec son corps et n’en revenait pas que cette femme belle, vive et intelligente l’aime, elle. La maison rêvée est celle de cette amoureuse quand, elles étudient dans deux villes différentes. Et la relation qui semblait merveilleuse, sexy as hell, pleine de moments doux et de fous rires, va basculer.

Sauf que c’est tellement plus qu’un témoignage. L’autrice s’interroge également sur la violence conjugale dans les relations queer, plus particulièrement des relations lesbiennes. Elle nous explique la difficulté à comprendre son vécu et sa propre expérience sans l’éclairage de récits antérieurs, la recherche sur les violences lesbiennes étant limitée et celle-ci étant relativement peu représentées dans la littérature et la fiction. Et ceci amène à tout un discours sur la représentation, justement. Discours que j’ai trouvé très intéressant et différent, avec un accent sur l’imperfection des personnes queer, qui fait aussi toute leur humanité.

Ce n’est jamais lourd pourtant. Jamais misérabiliste même si l’impact de cette emprise et de cette violence n’est jamais minimisée. Et quel style! L’histoire nous est racontée par courtes vignettes inspirée d’un genre particulier, ce qui interroge également sur l’importance et l’influence des clichés et des références de la pop culture actuelle. C’est donc PLEIN de références et vous savez comme j’aime les références. J’ai tout aimé de ce récit : le thème, le format, la plume et la réflexion. C’est définitivement une autrice que je relirai.

The Ministry of Time – Kaliane Bradley

J’ai lu ce roman car je l’ai vu PARTOUT dans les tops anglophones cette année. Bon, pas nécessairement dans les listes de ceux qui ont beaucoup de goûts communs avec moi, mais quand même. Je voulais comprendre la hype.

De quoi ça parle

Angleterre, dans un futur proche. Notre personnage principal est une jeune femme brittano-cambodgienne recrutée pour un projet ultra-secret du Ministère. Son mandat? Servir de guide, de pont, à un voyageur temporel arrivant droit du 19e siècle. De l’expédition maudite du Terror et de l’Erebus, plus particulièrement.

Sauf qu’entre choc des cultures et mystérieux problèmes de « hereness » et de « thereness », tout n’est pas si simple. Et probablement que le Ministère n’a pas tout dit.

Mon avis

Entendons-nous, j’aime les histoires de voyages dans le temps. Je suis super fan à la base du Wiggly-Woggly-Timey-Wimey… stuff. Je dois donc admettre que j’ai passé un très bon moment de lecture avec ce livre. Très divertissant. Juste l’idée d’avoir des gens provenant de différentes époques qui débarquent dans notre monde me plaît. J’ai beaucoup aimé la première partie, souvent drôle, qui traite de leur arrivée et de leur adaptation. J’aimais l’ambiguité du personnage principal, chargée de rapporter leurs progrès, leurs allées et venues… tout en se sentant devenir toute chose à la vue de son protégé victorien.

Il faut aussi savoir que j’ai beaucoup lu sur l’expédition du Terror, que ce soit des documentaires ou encore des romans (Du bon usage des étoiles, The Terror de Dan Simmons… que je voulais d’ailleurs relire). Donc, avoir le Commandant Graham Gore comme personnage, ça me parlait, of course. J’ai bien aimé l’évolution des relations, la finale un peu ambigue et même si la deuxième partie m’a moins interpelée, je garde somme toute un bon souvenir de lecture.

Ceci dit, entendons-nous. Il ne faut pas lire ce roman pour l’aspect scientifique ou SF… c’est presque zéro expliqué et tout ce qui est « thriller » est selon moi moins bien réussi. Par contre, la réflexion sur le colonialisme, sur les différentes façons de réagir face au racisme et surtout, sur la pluralité des regards qu’on jette sur l’histoire est hyper intéressante. Qui sont les méchants, dans tout ça? Comment l’Histoire nous regardera-t-elle dans 100 ans? Peut-on faire le mal en toute bonne foi, en étant persuadé d’être le « bon » de l’histoire? Clairement, la réponse est oui… mais j’ai bien aimé le traitement ici, qui ne nous martèle pas le message mais qui nous le propose.

Bref une agréable lecture, sans prétention, qui m’a fait passer un bon moment.

La lettre écarlate – Nathaniel Hawthorne

Je ne sais pas pourquoi je n’avais jamais lu cet auteur. Peut-être parce que j’ai du mal avec plusieurs auteurs américains du 19e. Mais après avoir lu « La part de l’océan » de Dominique Fortier, j’ai eu envie de le découvrir. Et j’ai fait ça simple, avec son roman le plus connu.

De quoi ça parle

Hester Prynne porte la lettre écarlate, pièce de tissus rouge sang sur son vêtement la désignant à toute sa communauté puritaine de la Nouvelle-Angleterre comme femme Adultère. Elle a toujours refusé de révéler l’identité du père de sa petite Pearl, fruit d’une union interdite et quand se présente à elle seule son mari que tous croyaient perdu en mer, sa situation devient encore plus difficile.

Mon avis

Quelle étrange aventure que cette lecture, que j’ai beaucoup aimée. Et – fait incongru – c’est avant tout une histoire d’amour. Incroyable non? Attention, je n’ai pas dit une romance. On n’est pas du tout dans ces codes-là. Hawthorne a écrit un roman historique, l’action se déroulang presque 200 ans avant son époque. Et il est particulièrement d’y jeter un autre regard 200 ans plus tard. Oui, je sais, j’adore analyser et lire une oeuvre dans son contexte historique. En effet, l’auteur dénonce le puritanisme, leur rigueur face aux dogmes et leurs exigences pour les humains. Ceci dit, en lisant le texte aujourd’hui, impossible de ne pas noter le profond aspect chrétien de l’oeuvre. Moins strict, certes, mais fort présent, mettant en avant et en valeur la foi et le repentir profond. Et ce côté m’a fascinée.

Ceci dit, Hawthorne a également réussi à créer un personnage de femme forte, qui tente de rester droite et digne dans sa disgrâce. Sa fille reste une enfant, un peu hors-contrôle, certes, mais une enfant. Je ne sais trop si son comportement est le signe de « quelque chose »… mais bon! J’ai aimé la voir tenter d’élever sa fille avec les meilleurs valeurs possibles et dans une profonde solitude, sans personne pour la conseiller. C’est un roman qui parle de culpabilité, de moralité et de rédemption. S’il jette un regard plus tendre sur Esther que ses comtemporains, il ne lui pardonne pas réellement ce qui, selon lui, est une grave faute.

Un texte très symbolique (assez simple, le symbolisme, avouons-le) et dans un style très « 19e siècle », c’est à dire aux phrases assez tarabiscotées, souvent longues, avec certains aspects répétitifs. Si ça dérange profondément certains, j’ai plutôt tendance à apprécier, ce qui fait, je sais, un être un peu étrange. C’est un peu mélodramatique, mais dans ce contexte, j’adore.

Bref, très bonne lecture pour moi. Mais pas pour tout le monde!

Le Dieu des petits riens – Arundhati Roy

Depuis mon périple indien, j’ai envie de découvrir davantage la littérature de ce pays. Entendons-nous, les endroits où je suis allée sont assez loin du Kerala où se passe cette histoire. Mais j’ai quand même quelques références.

De quoi ça parle

Rahel et Estha sont jumeaux. Des « faux jumeaux » mais qui n’ont qu’une seule âme. Ils vivent dans un village indien avec leur mère Amma, divorcée, leur oncle Chacko, chef d’entreprise converti au communisme pour les besoins de son portefeuille, leur grand-mère aveugle et leur petite-grande-tante Baby Kochamma, ancienne bonne soeur encore amoureuse d’un prêtre irlandais. Ils ont 8 ans quand un événement vont les séparer.

Mon avis

Ce roman, c’est tout ce que j’aime. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé : j’ai passé un superbe moment de lecture, après un petit flottement initial, le temps que je me fasse une place dans ce récit que nous abordons un peu en plein milieu. Cette narration, entre passé et présent, m’a beaucoup plu et j’ai aimé ces allers-retours alors que nous, lecteurs, nous voyons arriver l’inexorable sans rien pouvoir faire. Inexorable arrivé 23 ans auparavant. Alors que l’on nous raconte l’histoire de trois générations simultanément.

À huit ans, difficile de savoir à qui on peut faire confiance. Difficile aussi de comprendre qui on peut aimer et jusqu’où. Pour ces jumeaux, ce ne sera jamais clair. Ils se sont attachés à Velutha, jeune intouchable intelligent et drôle, qu’ils vont voir quotidiennement. Sauf qu’entre Touchables et Intouchables, toute relation n’est pas bienvenue. Ni celle-là ni aucune autre. Surtout aucune autre. D’emblée on sait qu’il va arriver un drame. D’emblée, on sait que Sophie Mol, la cousine anglaise, va mourir. On sait aussi qu’Estha sera Renvoyé-à-l’Expéditeur.

C’est certes un roman sur les inégalités sociales et sur le système de castes dont les prémisses semblent profondément ancrés dans la construction de la société indienne mamis c’est surtout le récit de la perte de l’innocence. Le jeu du langage, les mots inventés, la façon de jouer avec l’anglais des jumeaux, langue coloniale, le tout ajoute au regard parfois naïf qui est jeté sur leur monde et leur famille. Certains personnages sont détestables (non mais la petite-grande-tante) et leur façon de tenter de se sauver eux-mêmes va précipiter tout le monde dans le drame. Pourtant on voit pourquoi ils ont agi ainsi. On n’est pas d’accord, mais on comprend. Et on comprend aussi pourquoi c’était difficile pour eux d’agir autrement tellement certaines notions sont internalisées.

Bref, une excellente lecture. J’ai adoré.

Parfois les plantes meurent – Gabrielle Maurais

J’ai lu ce roman parce qu’il s’agissait d’une histoire de peine d’amitié. C’est un sujet qui me touche particulièrement. Je savais que c’était du YA, mais au cégep et à l’université. Ça aurait pu passer. Sauf que c’est passé moyen.

De quoi ça parle

Sabrina et Miro se sont rencontrés au cégep dans de drôles de circonstances. Ils vont devenir très proches, les meilleurs amis du monde. Sauf que dès le début du roman, nous savons que, quelques années plus tard, ils ne sont plus amis. Que s’est-il passé?

Mon avis

Ma lecture de ce roman était bien partie. J’aimais leurs deux points de vue et je trouve qu’on ne parle pas assez d’amitié et de peine d’amitié. Pourtant, dieu sait que ça fait mal. Et que nous sommes plusieurs à en avoir vécu une ou plusieurs. Pour ma part, j’en ai une bonne, à peu près au même âge, avec mon mailleur-ami-gars de l’époque. J’étais le bon public, non?

Sauf que bon, j’ai trouvé ça long. Très long. Je comprends ce que l’autrice a voulu faire. Elle a voulu nous faire comprendre leur amitié, nous faire vivre leurs bons moments. Sauf que ces bons moments deviennent répétitifs à la longue. De plus, si deux personnages principaux sont bien développés, tous leurs amis sont à peine esquissés, même s’ils sont souvent en groupe et que le groupe est tellement important à cet âge.

Ce qui a vraiment accroché, c’est l’écriture. C’est simple, ça se lit facilement (jusque là, pas de souci)… mais les répétitions! Des fois, il y avait 3 fois « mon meilleur ami/ma meilleure amie » dans une double page. En fait, cette expression est mentionnée tellement souvent que ça m’a donné le goût de hurler. Et comme je le lisais à 1h du matin, ça n’aurait pas été l’idée du siècle.

Je n’ai lu QUE de bons avis pour ce roman. Il n’y a que moi qui suis grumpy. Je n’ai pas été convaincue par le ton, ni par la fin. J’ai certes été émue parfois et ce livre m’a ramenée à mon cégep. Très fortement. Suis-je trop vieille? Peut-être! Mais bon, vous pouvez aller voir l’avis de Hello Kimmy ou encore le tas d’avis positifs sur Goodreads si vous voulez avoir une opinion contraire!

De si remarquables créatures – Shelby Van Pelt

J’ai lu ce roman pour Marcellus. Marcellus, c’est un poulpe. Un poulpe génial, il fallait que je le rencontre, non?

De quoi ça parle

Tova est en fin de carrière. Elle n’aurait pas besoin de travailler mais choisit de le faire en faisant le ménage à l’aquarium où habite Marcellus, un poulpe doué d’intelligence et qui prend parfois le contrôle de la narration de ce roman. Elle a perdu un fils il y a des années, se questionne à savoir si elle doit vendre sa maison et aller en maison de retraite… bref, elle est à un carrefour dans sa vie. Au même moment arrive dans la ville un jeune homme un peu paumé. Il a été élevé par sa tante et est persuadé que son père se trouve dans la ville en question. Et qu’il est riche. Son but est donc assez simple… mais il va être amené à remplacer Tova à l’aquarium… et rencontrer aussi Marcellus.

Mon avis

En me présentant ce roman, on m’avait dit que je verrais le tout venir à la page 4, mais que ce qui était intéressant était de voir comment les personnages, eux, résoudraient le mystère. Et je suis d’accord… en partie. En fait, j’ai beaucoup aimé la première partie mais je me suis assez rapidement lassée. Il y a beaucoup, beaucoup trop de pages à cette histoire!

Bon, entendons-nous, il y a Marcellus. J’ADORE Marcellus. Je suis contente d’avoir lu ce roman pour Marcellus. Toutefois, j’aurais toutefois pris davantage de chapitres de son point de vue. Ce poulpe grumpy est tellement, tellement cool! C’est mon personnage préféré, c’est lui qui m’a fait vivre le plus d’émotions (cette fin… j’ai fini en larmes)… bref, juste pour lui, je ne regrette rien.

En ce qui concerne les personnages humains, j’ai bien aimé Tova qui doit terminer son deuil et qui n’accepte pas de ne pas avoir de réponse sur ce qui est arrivé à son fils. J’aime les personnages qui sont à ce tournant de leur vie et qui doivent choisir ce qu’ils souhaitent faire du temps qui reste. Par contre, Cameron… oh boy. Je veux bien croire que sa mère l’a abandonné mais est-ce une raison pour être à ce point désagréable? Sa tante s’en est occupée, elle le fait encore vivre à trente ans… c’est triste, certes, mais pas non plus l’horreur, non? Bref, je n’ai ressenti aucune compassion pour lui. Et il est l’un des trois narrateurs principaux. Ça n’aide pas.

Bref, un roman qui est pour moi « unremarcable » sauf pour Marcellus. Une histoire prévisible, une écriture « correcte » mais sans rien de spécial. Je vais donc à l’encontre des avis dithyrambiques mais lecture moyenne pour moi.

Mais ya Marcellus!

Poudreuse – Sophie Lalonde-Roux

La sélection du gagnant pour le Gala du roman québécois approche et j’essaie de lire les titres qui ont le plus d’avis positifs. Celui-ci en fait partie et a reçu des commentaires unaniment positifs de la part de mes co-lecteurs. Il fallait donc que je tente le coup!

De quoi ça parle

Loup-Antoine est un jeune adulte dans la vingtaine. Quand nous le rencontrons, il dort place Émilie Gamelin et n’est pas souvent clean. Il ne se voit pas d’avenir. Il va rencontrer Étienne qui va lui faire voir un peu de lumière au bout du tunnel. Pourtant, plus tard, c’est à Gaspé que nous le retrouverons, loin de Montréal, loin de tout, alors qu’il essaie de survivre à chaque jour.

Mon avis

Nous avons ici un roman dur et touchant qui parle de deuil et de dépendance sans pour autant tomber dans le glauque. Nous avons un jeune qui a pris de mauvaises décisions, qui essaie – des fois – de s’en sortir mais le chemin n’est pas de tout repos, loin de là. Entre tentatives – parfois molles – et rechutes, entre culpabilité et colère, Loup va petit à petit réapprendre à s’aimer un peu.

Je crois que j’aurais pu être vraiment enthousiaste si j’avais lu ce roman plus jeune. En effet, j’ai l’âge des parents de Loup et j’ai vraiment eu de la peine pour sa mère qui a, elle aussi, pris de mauvaises désisions et son impuissance va droit au coeur. Ça en dit long sur mon âge, n’est-ce pas! Loup-Antoine est un jeune qui est difficile à connaître tellement il va mal. Il est presque impossible de voir qui il est vraiment derrière toute cette douleur. Il m’émeut, ce jeune, mais je m’y attache difficilement.

Impossible de ne pas être touchée, certes, mais ce n’est clairement pas mon thème préféré, pour des raisons qui me sont personnelles.  Je suis peut-être trop dérangée quand il est question de consommation et d’itinérance, mais ce ne sont pas des thématiques vers lesquelle je me dirige d’emblée.  Côté plume, nous avons un ton cru, qui sonne vrai et qui nous donne l’impression d’entrer dans la tête de Loup. Pour ma part, je préfère les plumes plus abouties mais ça passe. Ça passe. 

Je crois que ce qui m’a permis de voir davantage son humanité fut le passage au bénévolat. J’ai trouvé ça très émouvant de le voir dans une autre position. Ceci dit, TOUS mes amis ont adoré, je pourrais le conseiller à plusieurs personnes. Ça reste une bonne lecture mais je ne suis clairement pas le public cible.

Un jour de nuit tombée – Samantha Shannon

Je fais partie de ceux qui ont beaucoup aimé Le prieuré de l’oranger, mais je n’avais pas crié au génie non plus. Pour moi, c’était une longue histoire mais une histoire au rythme rapide, qui constituait une très bonne entrée en matière dans la fantasy adulte. Et savez-vous quoi? J’ai encore mieux aimé cette préquelle, que j’ai trouvée plus mature autant dans les thèmes que dans l’écriture.

De quoi ça parle

Nous sommes dans le même univers que pour Le Prieuré de l’Oranger, mais 500 ans avant, dans la période qui s’appelle The Great Sorrow (en anglais…je l’ai lu en anglais). Nous suivons donc l’histoire de personnages dans quatre différents endroits de ce monde de fantasy, alors que du plus profond de la terre, une force se réveille, faisant apparaître de mystérieuses créatures dévastatrices.

Au Prieuré, nous rencontrons Tunuva, guerrière dont la conjointe est pressentie pour prendre la tête de l’endroit. Glorian, héritière d’Inys, doit pour sa part produire un héritier pour préserver la lignée du Saint tandis qu’en Seiiki, Dumai découvre tardivement son passé… et son avenir. Entre guerres de pouvoir et invasion de wyrms, les années s’annoncent rudes.

Mon avis

Si vous avez lu le Prieuré, vous connaissez sans doute quelques éléments de cette histoire. Je ne les révélerai pas ici mais l’autrice a réussi à tisser des liens et à enrichir son univers. Nous voyons la genèse de certaines traditions tout en restant bien ancrés dans la mythologie et dans les différentes versions de l’histoire des divinités de cet univers. Il y a des dragons, des complots de cour, un vrai ennemi à combattre… et une résolution somme toute originale. Est-ce que ça va plaire à tous? Je ne sais pas. Mais moi, j’ai vraiment aimé. L’action est somme toute plus lente que dans le Prieuré, on explore davantage les personnages et il y a plus de descriptions, ce que j’ai beaucoup apprécié!

Il y a un côté « St-George et le dragon » dans cette mythologie. Du moins, certains noms rappellent certaines versions ce cette légende. Que se serait-il passé si la princesse s’était défendue? Comment l’histoire aurait-elle été racontée? On y explore les thèmes du conflit de générations et nous avons aussi des personnages plus âgés qui ont également un développement très intéressant. Ça parle de maternité, c’est féministe, c’est queer… sérieusement, j’ai adoré.

Presque tous les personnages sont attachants, tous les arcs sont reliés d’une façon ou d’une autre et, encore une fois, l’autrice explore l’évolution des histoires et des légendes selon les parties du monde et les croyances. J’ai souffert pour les personnages, je leur ai souhaité le meilleur, leur naïveté m’a parfois exaspérée, parfois fait rire. J’ai été désespérée avec eux aussi car il est surtout question de survie dans ce roman. Il y a des côtés très héroïques, d’autres beaucoup moins, on y explore la parentalité, le deuil… bref, c’est super bien fait. Ok, il faut un moment pour bien comprendre qui est qui parce qu’il y a BEAUCOUP de personnages, mais vraiment, je suis ravie d’avoir fini par sortir cette grosse brique de 1150 pages de ma pile! Je relirai avec plaisir un autre ouvrage dans cet univers.