Another Brooklyn (Un autre Brooklyn) – Jacqueline Woodson

Sérieusement, je ne sais plus du tout pourquoi j’ai choisi de lire ce roman à ce moment précis, ni encore moins pourquoi il était dans ma pile. En fait, c’est peut-être juste à cause du mot « Brooklyn ». Bref, le mystère est et demeure total.

De quoi ça parle

August arrive à Brooklyn à la fin de l’enfance, avec son père et son petit frère. Sa mère n’a pas supporté la perte de son propre frère et elle n’a pas suivi la famille. Quand elle aperçoit trois jeunes filles dans la rue, elle est fascinée par elles et se demande comment elles ont réussi à seulement… être.

Mon avis

Je crois que ce roman est le meilleur roman jeunesse que j’ai lu cette année. Tout du moins dans le top 2. En fait, j’y réfléchis… et il pourrait aussi être classé en adulte car nous avons une narration passé présent qui nous fait aussi rencontrer August adulte. Un peu comme dans Sleepers, vous voyez? Les agressions dans les prisons en moins. Les prisons en moins, en fait. Bon, oubliez ça, c’est juste l’atmosphère enfant-adulte-amitié qui ressemble. L’histoire, c’est tout autre chose.

Nous sommes donc transportés dans un Brooklyn des années 70, un Brooklyn qui n’existe plus. Nous avons une jeune fille qui se cherche, en tant que jeune fille noire et en tant que fille tout court. D’abord de l’autre côté de la fenêtre, elle verra Gigi, Angela et Sylvia, qui semblent occuper vraiment l’espace et elle voudra êre comme elle ou du moins être avec elle. Quand la fenêtre va se fracturer, elle va tenter l’extérieur, les rencontrer et leur amitié sera intense, alors qu’elles traverseront ensemble la fin de l’ensemble.

C’est un récit par petites touches, tendre, auréolé de cette atmosphère idéalisée que j’aime tellement retrouver dans les récits passé-présent. Il y a une vraie fragilité dans le personnage principal (et dans les autres), une sensibilité à fleur de peau et l’autrice saisit tellement l’âme de cette période où on croit que tout est éternel et où les amitiés sont magnifiées. C’est délicat, réalistes, le portrait Brooklyn est extrêmement vivant. Le portrait passé-présent des quatre amies est aussi fort réussi et j’ai été très touchée. Impossible de ne pas songer à ces amis « bff » de la fin de l’enfance qu’on a perdus de vue et voilà, ça me parle tout de suite.

Une belle plume, un peu lyrique, une vraie exploration de la peine et du deuil… j’ai adoré.

Félixe et la maison qui marchait la nuit – Sophie Bédard

Cet album m’a été envoyé par surprise et dès que j’ai vu une maison à pattes, j’ai su que j’allais le lire. Entendons-nous, ici, on est loin de Baba Yaga mais sous cette couverture qui semble fort enfantine, il y a un sujet sérieux qui se cache.

De quoi ça parle

Félixe habite dans une maison qui marche pendant la nuit. Elle se réveille chaque matin dans un endroit différent. Un jour, elle a trouvé Mi sur le pas de sa porte. Un tout petit chat. Puis arriveront d’autres personnages qui vont petit à petit peupler son quotidien. C’est que Félixe dort beaucoup et n’a envie de rien. Sa maison doit la trouver tellement ennuyante, non?

Mon avis

Je ne savais pas du tout de quoi parlait cet album jeunesse quand je l’ai ouvert et j’ai beaucoup aimé l’expérience de l’aborder sans savoir et de découvrir petit à petit l’univers et les secrets de Félixe. Toutefois, en en parlant ici, je réalise que je ne peux pas vous le vendre correctement – car il en vaut le coup – sans vous dire un peu de quoi il s’agit.

J’avais beaucoup aimé Les petits garçons, la précédente BD de Sophie Bédard et je savais donc que son ton me plairait. Ici, elle aborde le deuil d’une façon qui sonne vrai et qui parlera au jeune public. Félixe est seule et n’a envie de rien. Son train train tristounet va être chamboulé par l’arrivée consécutive d’un tout petit mini-chat, d’un oiseau-qui-n’a-pas-de-bras, d’une lapine maniaque de propreté et d’un Bébé affamé qui a bien besoin qu’on le nourrisse. De gâteau, idéalement. Petit à petit, elle va à doucement guérir et s’ouvrir à nouveau aux autres.

C’est souvent drôle (Bébé me fait mourir de rire, ainsi que l’oiseau qui tent la patte parce qu’il n’a pas de main) mais surtout très doux, très sensible…. et ça dégouline de cutitude. Tout sonne juste. La description d’une personne en deuil, qui se sent de trop, encombrante, qui n’a envie de rien et qui ne veut que dormir était parfaite pour moi. Félixe essaie. Elle essaie vraiment, ce n’est pas le festival de la plainte. Elle est juste… triste. Le portrait pourrait aussi être parfait pour la dépression. Je me verrais très bien expliquer à un enfant la dépression de son parent avec ce roman. Avec des dialogues et des silences évocateurs, sans grand discours, l’autrice réussit à nous faire comprendre les sentiments de Félixe. Et on finit avec une belle note d’espoir et un bel hommage à l’amitié et à la sororité.

Bref, une réussite pour moi!

Désorientale – Négar Djavadi

J’avoue avoir lu ce roman après être tombée en amour avec la couverture en anglais. Bon, je l’ai lu en français car écrit en français mais l’oiseau, en anglais, il est trop beau! Ouais, en anglais, il est rose et j’aime le rose. Mais saga familiale iranienne… comment dire non à ça?

De quoi ça parle

Le roman commence dans une salle d’attente d’hôpital. Kimiâ attend et voit passer les gens qui attendent, comme elle, pour une FIV. Elle est née en Iran et est arrivée en France enfant. Sa part d’Iran, elle l’a enfouie au fond d’elle-même. Sauf que petit à petit, pour bien comprendre ce qui a pu la mener dans cette salle de tous les espoirs, elle va se souvenir de ces histoires que racontait Oncle numéro 2 et remonter le temps. S’en suivra une saga familiale fantasque qui nous fera rencontrer ces ancêtres aux yeux bleus qui recelaient tant de promesses.

Mon avis

J’ai adoré ce roman. Il y a un côté romanesque extraordinaire, un peu mille et une nuits, sans magie mais avec un côté fantasque, presque fantasmagorique. Ces personnages sont tellement plus grands que nature! À travers ces flashbacks, qui sentent l’oralité, nous pouvons avoir un portrait assez juste de l’Iran et de comprendre dans les grandes lignes les dernières révolutions et l’évolution de la pensée au cours des années. C’est hyper accessible et prenant, les parents de Kimiâ étant des activistes ayant combattu le Shah et s’étant trouvés fort déçus par ce qui s’est passé par la suite… Pas juste déçus, en fait. Pourchassés. Poursuivis. Menacés de mort. De là la fuite en France et la désorientalisation de notre personnage principal.

C’est certes un roman sur l’exil mais pas que. Roman sur la culture, sur le fait de savoir qu’on ne peut revenir en arrière, de grandir sans les saveurs, couleurs et les histoires qui ont défini ses ancêtres. Les voyages dans le passés nous amènent jusqu’au harem de l’arrière grand-père Montazemolmolk, en passant par la mort de Nour, l’arrière-grand-mère, morte exactement au moment de la naissance de Kimiâ, ce qui a peut-être changé son destin.

Nous comprenons rapidement qu’il y a un ÉVÉNEMENT qui a changé le cours des choses. Le roman n’est pas linéaire, il demande de l’attention car les histoires nous sont dévoilées par bribes et nous nous baladons joyeusement dans le temps pour connaître les ancêtres et les parents de Kimiâ, avec qui elle entretient des relations parfois conflictuelles mais surtout teintées de non-dits et d’incompréhension. Réflexions aussi sur le traitement des personnes homosexuelles en Iran (spoiler alert : ce n’est pas cool) et sur les impacts que les sanctions ont sur la vie des gens.

Une héroïne à laquelle je me suis attachée, avec qui j’ai voyagé entre les montages de l’Iran, la Belgique et Berlin et par les yeux de laquelle j’ai aussi été fascinée par une rockeuses flamboyante aux cheveux blonds.

Bref, j’ai tout aimé. C’était hyper bien écrit, très cinématographique, la construction est superbe. J’ai adoré. Dans mes meilleurs lectures de l’année.

Bonne année 2023 ! Et voici mes meilleures lectures de 2022

2022 n’a pas été de tout repos… mais elle est finie et on repart à neuf pour 2023. Heureusement, j’ai eu une très très bonne année de lecture et je vous parle ici de mes meilleures lectures et de mes mentions spéciales.

J’en profite pour vous souhaiter la meilleure des années 2023. Plein de bons moments avec ceux que vous aimez, de petits bonheurs et d’éclats de rire. De bonnes lectures aussi, of course. Parce que ça rend quand même la vie plus belle. Merci d’être encore ici depuis 15 ans malgré mes hauts et mes bas. J’apprécie!

(Et si vous cliquez sur la vidéo, dans la barre d’info, il y a tous les titres dont je parle dans la vidéo… j’ai un petit moment de paresse pour tout récrire!)

Bonne année!

These violent delights – Micah Nemerever

C’est dans le cadre de mon vlog sur les roman Dark Academia que j’ai lu ce roman. Je ne sais plus du tout pourquoi il était dans ma pile par contre… ça, c’est souvent un grand mystère. Bref, j’ai lu… et j’ai été perturbée. C’est le moins qu’on puisse dire.

De quoi ça parle

Pittsburg, années 1970. Paul est un jeune homme de 17 ans, précoce et asocial, qui entre à l’université. Lors de son premier cours, il a une discussion animée avec son enseignant et fait connaissance avec Julian, qui semble tout son contraire. Il se lie très rapidement avec et être solaire mais ils nouent rapidement une relation intense, presque exclusive et surtout malsaine. Dès le premier chapitre, on sait qu’ils vont prendre de fort mauvaises décisions… et la suite nous permettra de comprendre pourquoi et comment.

Mon avis

J’ai mis un bon moment à terminer ce roman. Après une entrée en matière coup de poing, on retourne en arrière et le récit se fait plus lent pour nous permettre de rencontrer nos deux personnages principaux. Ils sont tous les deux difficiles à saisir, ils se cachent à eux-mêmes une partie de ce qu’ils sont… et ce qu’ils sont, ce n’est pas joli joli. Il est difficile d’aimer Paul et Julian, nous semblons les voir à travers un prisme, alors que la narration est à la troisième personne. Toutefois, nous sommes dans la tête de Paul et ce sont ses pensées obsessives qui nous suivent tout au long de la lecture. Et, parfois, c’est beaucoup à encaisser. J’ai lu les yeux grands ouverts, peinant à croire le mal que les deux jeunes se font, volontairement ou non. Vous savez, le genre de relation qui fait ressortir le pire en soi? C’est ce à quoi nous sommes confrontés ici. Un amour fou, déchaîné, passionné, obsessionnel et cruel.

Pour moi, le roman coche beaucoup de cases de la Dark Academia, même si l’histoire se concentre sur ces deux seuls personnages au lieu de la « clique » que nous rencontrons habituellement dans ce type de roman. Il y a relativement peu de scènes académiques ou de discussions savantes, toutefois, celles-ci sont en lien direct avec l’action et influencent les personnages. Les références à Camus, au nihilisme ou à Dostoïevski ne sont pas innocentes, encore moins les référence à l’expérience de Milgram. Les deux jeunes blessés d’avance seront à la fois bourreaux et victimes.

Ce roman est très bien écrit, l’atmosphère est palpable, étouffante et nous sommes dans ces récits lents que j’adore. L’auteur réussit à nous engluer dans le récit et les perspectives sont flottantes tout au long du roman. Pour une fois, nous voyons les choses à leur meilleur et nous avons le temps de comprendre ce qu’ils perdent ou ce qu’ils craignent de perdre. La bascule est graduelle et impossible de ne pas être fascinée. Bref, j’ai adoré.

C’est tout à le fait le genre de roman qui réussit à instaurer une atmosphère de malaise dont nous ne sortons jamais. Reste à espérer qu’il me marquera autant à long terme que d’autres romans du genre… mais un roman qui marque. Et cette dernière phrase… frappante!

Les bons gros Bâtards de la littérature – Aurélien Fernandes et PoPoésie

Quand vous voyez une BD avec les mots « littérature » et « bâtards » dans la même phrase, vous résistez vous? Moi pas. Donc j’ai lu.

De quoi ça parle

Cette BD nous offre une série de vignettes plus ou moins longues (de quelques pages à quelques lignes) mettant en vedette certains « grands » de la littérature qui se sont révélés… pas toujours des gentils. Ou parfois pas très gentils. Who would resist authors talking trash about one another? Not me!

Mon avis

J’ai passé un bon moment avec ce graphique. Certes un peu anecdotique, mais je crois que c’était le but de l’ouvrage, n’est-ce pas? Je connaissais plusieurs de ces anecdotes (ou de ces graves histoires, selon le cas) mais j’ai beaucoup aimé les retrouver regroupées pour pouvoir me rappeler à quel point ces auteurs étaient parfois de leur temps, mais parfois… juste des salauds. Et rien d’autre!

À la lecture de cette BD, impossible de ne pas se poser la fameuse question de l’oeuvre et de l’auteur. Je considère toujours les deux, pour ma part, mais j’ai beaucoup aimé certaines oeuvres écrites par de gros connards pour leur valeur purement littéraire. Est-ce qu’il faut savoir? Oui, selon moi. Savoir et juger par soi-même. Cet avis n’engage que moi, of course, et je le sais controversé. Ceci dit, certains de ces grands hommes (ce sont surtout des mecs, ouais…) ne se sont vraiment pas manqués entre eux.

En rafales, saviez-vous que…

… Diderot avait fait parler des vagins à l’aide d’un anneau magique?

… Flaubert n’était pas toujours très classe dans ses ruptures

… Proust faisait torturer des rats…

… Poe a épousé sa cousine… alors qu’elle n’avait que 13 ans, et lui 26.

… le fait de tuer sa compagne n’a pas empêché Burrough d’être nommé chevalier des arts et des lettres.

Bref, pas un pour rattraper l’autre. On y retrouve aussi quelques apostrophes bien salées. C’est souvent présenté de façon drôlatique, plusieurs d’entre eux seraient clairement cancel aujourd’hui (on comprendrait pourquoi hein… ils osaient tout. Sans honte). Si certains se permettaient ce qui était ok à leur époque, ce n’est clairement pas le cas de tous. Même à ce moment c’était ma foi… too much! Toutefois, le langage un peu « djeun » utilisé occasionnellement m’a un peu dérangée (parce que des fois, je suis obtuse et que je ne comprends pas tout tout de suite). Ceci dit, les dessins ne sont pas esthétiques, mais ils font mouche et sont souvent assez drôles.

Bref, bon pour votre prochaine partie de Génies en herbe. Ou de Quelques arpents de pièges!

Valide – Chris Bergeron

J’ai lu le précédent ouvrage de l’autrice et la dernière fois que j’ai eu celui-ci entre les mains, je sortais de La fille d’elle-même et je souhaitais mettre un peu de temps entre deux ouvrages auto-fictionnels écrits par des femmes trans québécoises. Pourtant, ce n’était pas nécessaire car les deux ouvrages sont très, très différents.

De quoi ça parle

Christian a déjà eu une autre vie. Une vie avant David, intelligence artificielle qui contrôle le quotidien des gens. Pour leur bien, of course. Nous sommes dans un futur proche et c’est sous la forme d’un long monologue de l’homme à la machine que ce récit nous est présenté. Un récit de révolte, qui parle de liberté, de diversité et d’identité. De transidentité.

Mon avis

Voici donc une plume que je découvre avec bonheur. Réussir une auto-fiction dans un récit SF, il fallait faire et Chris Bergeron réussit ici son pari. Elle nous tient en haleine dans ce récit qui, même si on se doute d’où il s’en va, nou permet de comprendre non seulement le parcours de Chris mais aussi celui d’une société qui a choisi, pour se « sauver », d’aplanir les angles, de masquer et d’illégaliser les différences. Ça a un petit côté 1984 (avec un peu plus d’espoir quand même) et le mal-être du personnage principal, obligé de masquer son identité, résonne suffisamment fort pour nous permettre d’être en empathie avec lui. Ou plutôt avec elle.

Je l’ai lu d’une traite.

Imaginer un tel futur nous permet de comprendre à quel point la situation passée (ou présente pour plusieurs) a dû être frustrante et comment le manque de mots, de concepts, la fin de non-recevoir qui s’élevait devant eux quand ils évoquaient leur ressenti devait être violente. Ici, la transidentité, la révolte, ça n’existe pas. Ce n’est plus conçu. Et cette réflexion est toujours pertinente aujourd’hui. Les batailles ne sont jamais gagnées… et on sait à quel point le retour de balancier peut être rapide.

Bref, une très bonne surprise!

L’archiviste – Alexandra Koszelyk

J’avais l’intention de lire ce roman depuis son annonce, mais il n’était pas dispo au Québec. Toutefois, après le VLEEL avec l’autrice, il FALLAIT. Du coup, je l’ai commandé de France. Et je suis bien contente de l’avoir fait.

De quoi ça parle

K est archiviste. Quand la guerre éclate en Ukraine, elle devient dépositaire des grandes oeuvres représentatives de son pays. Un jour arrive un mystérieux homme au chapeau qui lui demande, insidieusement, une faveur qu’elle a du mal à refuser. Il protégera sa famille si elle accepte de dénaturer l’art.

Mon avis

Dans le contexte actuel, je dirais que c’est un roman qu’il faut lire. C’est un véritable roman d’atmosphère, avec du réalisme magique et un petit côté Kafkaïen, qui nous permet de revisiter l’histoire de l’Ukraine ainsi que plusieurs événements marquants de son histoire.

Je suis toujours fan de la plume d’Alexandra Koszelyk, toujours lyrique, jamais lourde, qui réussit ici à transformer cette bibliothèque abandonnée et ce pays en guerre en des lieux hantés par le passé et par que qu’on veut faire de l’avenir. L’autrice réussit à nous faire comprendre l’importance de la culture dans l’identité des peuples et des façons insidieuses que les gagnants ont tendance à la réécrire, et ce de plusieurs façons. Un très bel hommage à la résistance des peuples, à l’importance de l’art dans les coeurs et les mémoires. Dans ce roman où chaque rature accentue la défaite, il est question de l’art qui nous survit, de légendes, de coutumes et de famille aussi. Sur ce qu’on est prêts à faire pour elle. Sur la peur qui devient rébellion.

Un roman qui parle de résistance, de liberté, des petites et des grandes trahison. Ça a été pour moi une merveilleuse façon de découvrir la culture ukraininenne ainsi que les figures de son passé, parfois glorieux, d’autres moins. Je l’ai dévoré et j’en conseille la lecture à tous!

The distant hours (Les heures lointaines) – Kate Morton

Kate Morton est la spécialiste des histoires de secrets de famille et du passé présent. Quand j’ai parlé de découverte de romans gothiques, on m’a proposé ce titre en particulier, je l’ai fait entrer dans mon Cold Winter Challenge et je l’ai lu. Des fois, je me fascine moi-même!

De quoi ça parle

Edie Burchill travaille dans une toute petite maison d’édition londonienne. Elle vient de se séparer mais n’en a pas encore avisé sa famille, qui ne semble pas avoir le premier prix de la communication intrafamiliale. Un jour, arrive une lettre vieille de 50 ans adressée à Meredith, sa mère et elle va découvrir que celle-ci, pendant la deuxième guerre mondiale, a été évacuée dans le château de Milderhurst, où habitaient trois soeurs et leur père, célèbre auteur ayant écrit le conte préféré de la petite Edie : the Mud Man.

Quand un jour elle passe devant un panneau menant à Middlehurst, elle n’hésite pas et emprunte le chemin… et des secrets de famille seront petit à petit dévoilés.

Mon avis

Je suis toujours acheteuse pour les romans passé-présent, avec des grandes maisons et des secrets de famille. Vous pouvez donc vous imaginer que j’ai passé un bon moment dans roman, même si je n’ai pas eu de coup de coeur ou encore moins de surprises. Toutefois, c’est bien écrit, la prose est belle et fluide à la fois, réussissant parfaitement à nous faire visualiser ce château maintenant en ruine et le paysage inquiétant qui l’entoure. On a l’impression de flotter dans ce village et cet endroit dont les murs chuchotent encore à ce jour les secrets du passé. Une bonne lecture donc. Mais je n’ai pas eu l’impression de réellement vivre les émotions avec les personnages et j’ai gardé une distance. Probablement parce que j’ai tout vu venir vite. Très vite.

Est-ce gothique? Un peu. Il y a certes un manoir en décrépitude qui a un rôle dans l’histoire et qui a un réel poids pour les trois soeurs qui y vivent. Mais je n’y ai pas trouvé ce sentiment de destin tragique en puissance, cette épée de Damoclès qui plane au-dessus de la tête des personnages. J’aurais aimé y passer plus de temps, m’imprégner de cette atmosphère, avoir un peu peur, entendre la voix de ces heures lointaines. Peut-être avoir peur du fameux Mud Man.

Ceci dit, j’ai bien aimé ma lecture. Edie est un personnage pas toujours aimable, elle fait des erreurs et pour une fois, son obsession pour le passé est expliquée par l’histoire de sa mère, personnage très secret (que j’ai beaucoup aimé), qu’elle ne comprend pas et qu’elle aimerait mieux connaître. J’ai d’ailleurs aimé l’évolution de la relation mère-fille. J’ai davantage été touchée par les trois soeurs, surtout Percy, l’aînée, la sévère, qui tente de faire tenir la famille, souvent fort maladroitement. Quand Edie les rencontre, elle lui fait un peu peur, alors qu’elle aime beaucoup Saffy, sa jumelle, plus douce et gentille, et est fascinée par Juniper, qui vit encore dans le passé, le jour où son fiancé n’est pas venu. Juniper, qui semblait avoir une relation privilégiée avec la mère d’Edie et qui a maintenant perdu la raison. J’aurais aimé en savoir davantage sur le personnage du père, le fameux auteur, mais bon.

Quand au mystère, c’est bien amené hein… tout se tient, c’est bien construit. C’est moi qui vois trop trop vite. Je n’ai donc pas été retournée ou bouleversée. Mais c’était pas mal et je l’ai lu en quoi… 2 jours. Pour 560 pages. Je ne devais pas m’ennuyer hein!

Je recommande donc si vous avez envie de passé-présent, d’un château en ruines et de la genèse d’un conte. De l’autrice, j’ai préféré l’autre roman que j’ai lu, Le jardin secret, et j’en ai un autre dans la pile. Je lirai. Un jour!

Une petite fille sur un grand chapeau – Marie Yanick Dutelly

Ce roman n’est pas ce que je choisis pour lire d’habitude. Toutefois, j’ai pu discuter avec l’autrice au salon du livre de Montréal et quand elle m’a parlé d’Haïti, pays actuellement bouleversé, elle a réussi à me tenter. Donc moi, j’ai lu un roman basé sur l’histoire de sa famille. Et savez-vous quoi? J’ai passé un très bon moment.

De quoi ça parle

Une dame balaie le sous-sol de sa maison canadienne quand son regard tombe sur deux petites rondelles de plomb, qui la ramènent plusieurs années en arrière, en Haïti. Nous rencontrerons donc plusieurs générations de femmes qui devront lutter pour survivre dans ce pays où l’injustice règne, surtout quand on est femme.

Mon avis

Cette lecture a été une agréable surprise pour moi, non seulement en raison de la plume de l’autrice mais également de l’atmosphère qu’elle réussit à créer, qui nous transporte ailleurs. Il est toujours difficile de noter ou de critiquer une histoire qui est à ce point liée avec les mémoires d’une famille et avec les expériences de l’autrice mais ce texte vaut la peine d’être lu et donc, d’en parler.

Nous avons donc ici un texte à la fois accessible et poétique. L’autrice nous raconte des événements clés, de façon directe et sans chichi, pour nous transporter à Haïti avec ces femmes, ces pilliers de la société qui se retrouvent souvent à devoir vivre et survivre en même temps, tout en ayant un nombre incroyable de responsabilités. Ce n’est jamais misérabiliste et elle réussit à nous faire ressentir chaque petit bonheur, même dans les moments difficiles. Le roman sent bon les épices et les coutumes, si différentes des miennes, émergent des pages. Et c’est cette ambiance que j’ai particulièrement aimée. On s’y croirait.

J’aurais peut-être aimé une fin un peu moins rapide, le discours du soignant m’ayant semblé un peu plaqué, mais de façon générale, un bon moment de lecture, dans laquelle nous souffront pour la population haïtienne qui a souvent peu de moyens pour se débattre dans ce pays qui n’épargne pas ses habitants malgré tous leurs efforts et leur volonté de vivre mieux. Pas riches, mais mieux, sans être sous la coupe d’un gouvernement totalitaire ou d’hommes qui se croient tout permis.

Une bonne lecture! Un peu courte, mais agréable.