Rob Scotton et l’univers de Splat le chat

splat-range-sa-chambreSplat le chat est un personnage que j’ai découvert récemment et qui m’a conquise.  Du coup, quand on m’a offert de rencontrer l’auteur lors du salon du livre de Montréal, j’ai sauté sur l’occasion et j’ai pu passer une très agréable demi-heure en compagnie de cet auteur, qui a énormément de choses à dire sur ses personnages et son univers.

Mais je vous en raconte un peu plus.

 

Le personnage de Splat a d’abord été créé en tant que personnage et sa première vitrine a été… sur de la vaisselle!  Il y a en effet toute une série avec Splat dessus, qui a gagné un prix en 2004.  L’histoire de sa création est assez drôle d’ailleurs.  Scotton était chez lui en Angleterre quand soudain, le chat du voisin, pas commode, bagarreur et terriblement maladroit, décide de grimper sur une clôture de grillage.  Il était là à limite l’encourager quand il y a eu un coup de vent et … SPLAT… le chat s’est étalé par terre.  La rime est restée dans sa tête (Splat the cat en anglais) et il a ensuite créé ce personnage, sans réelle histoire en tête.

 

Mais l’histoire de Splat ne s’est pas arrêtée là.  En effet, plus tard, Scotton qui était au départ illustrateur, se rend àsplat-beaux-reves New Yord à un « Licencing show » où des gens de chez Harper Collins ont cliqué avec deux personnages : Splat et Russel le mouton.  Avait-il une histoire?

 

Non, pas vraiment.  Par contre, quand il crée ses illustrations, Scotton crée toujours une personnalité et une histoire (backstory) à chacun des personnages.  Du coup, après des rencontres avec les éditeurs, le premier album de Russel est sorti, puis, Splat.  Dans les premiers albums, il y a même des clins d’oeil à la maladresse de Ninja, le fameux « chat du voisin », celui qui a fait SPLAT!

 

Les histoires sont toujours très proches de la réalité des lecteurs et il met ses personnages dans des situations que la plupart des gens ont vécues.  Splat a un côté vulnérable, il fait des erreurs, il ne réussit pas tout le temps et savez-vous quoi?  Ce n’est pas grave.   Ce sont des histoires bien construites, avec souvent un vrai problème, des tentatives (bonnes ou non) et une vraie fin, souvent surprenante et très drôle.  INutile de préciser que ça plaît aux enfants, cette finale.

 

splat-aquariumRob Scotton croit fermement que les enfants apprennent mieux en s’amusant.  Dans la version anglaise, il y a une vrai travail sur les sons, avec des rimes, des allitérations et du contenu à exploiter pour les profs.  Malheureusement, ça passe beaucoup moins dans la version française.  Par contre, pour les histoires, ça passe super bien!   Et que dire de Harry la souris (Seymour en anglais), l’ami très différent de Splat, une souris dans un monde de chat, qui est un indicateur émotionnel pour Splat.  Il y a une vraie amitié et ça permet de parler des différences et de leur acceptation.  Bref, j’aime le concept.

 

Ceci dit, la demande pour Splat est trop grande pour un seul auteur et il y a maintenant toute une équipe – qui a toute la confiance de l’auteur – qui travaille avec Scotton sur cette série.  Il mentionne que c’est un réel travail d’équipe et il qu’il a travaillé sur toutes les histoires.

 

J’ai lu quatre albums de Splat, en français et en anglais, pour réaliser cette entrevue.   Mon préféré est « Splat range sa chambre », où notre petit chat a une liste de choses à faire… choses qu’il n’a pas du tout envie de faire.  Comme tout bon enfant, quoi!  Sauf que son père va lui donner un truc… et vous verrez bien!  C’est mignon comme tout, c’est une ode au pouvoir de l’imagination des enfants… et la fin m’a bien fait rire!  Je suis fan des illustrations, jolies, attrayantes, colorées et juste assez chargées pour attirer l’attention des enfants et permettre à ceux-ci d’en parler et de pointer des détails.  J’adore!

 

Dans « Splat fait de beaux rêves », on a affaire à un Splat qui a peur de dormir… parce qu’il a peur de faire des splat-creme-glaceecauchemars.  Ça vous rappelle quelque chose, ceux qui ont des enfants?  Mon petit doigt me dit que oui!  Dans ce cas, pas de schéma narratif typique, mais beaucoup de situations assez cocasses (ah, l’imagination des enfants quand vient le temps de ne pas dormir) et encore une fois, les enfants adorent.

 

Splat à l’aquarium nous emmène dans une visite à l’aquarium avec l’école.  Son but dans la vie?  Impressionner Kattie avec ses connaissances disons… originales!  Mais Grouff, son camarade-qu’il-n’aime-pas, est toujours là pour le détromper… et révéler aux autres ses tentatives pour se rendre intéressant.   Ici, encore une fois, la finale est comique et c’est une jolie occasion pour discuter avec les petits des mensonges et des inventions.  Plusieurs jeux de mots dans ce tome et il est intéressant de faire faire aux jeunes le processus qui a pu amené Splat à penser, par exemple, que les poissons-dragons crachent du feu!

 

Celui que j’ai le moins apprécié est Splat aime la crème glacée, même si, étrangement, c’est celui qui a le plus plu à ma nièce, qui s’est limite roulée par terre!  Par contre, on a un vrai schéma, avec un problème et plusieurs solutions.  Il est donc bien utilisable pour travailler cet aspect du langage.

 

Et puis, avez-vous envie de découvrir ce minet?

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Je vous avais dit que c’était de la vaisselle aussi,  Splat!
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La Conquête de Plassans – Émile Zola

conquete-de-plassansJ’en suis donc au quatrième tome des Rogon-Macquart.  Je l’ai commencé il y a plusieurs mois, avant de partir en Europe, en fait.  Je l’ai donc mis en pause un long moment mais, bizarrement, je n’avais rien oublié  Étrangement, l’abbé Faujas, les Mouret, la sous-préfecture et les Rastoile, légitimistes, étaient bien gravés dans ma mémoire et j’ai pu replonger immédiatement dans l’atmosphère.   C’est qu’on sent, dès le début, que ça risque de mal finir!  Ceci dit, c’est Zola hein… pas trop gai, vous direz!

Dans ce roman, nous retournons donc à Plassans, avec ses trois quartiers.  On se souviendra que dans le premier tome, suite aux machination des Rougon, la ville semblait acquise à Napoléon.  Toutefois, le candidat de la région est légitimiste… et semble pas mal inutile.  L’histoire commence chez Marthe et François Mouret.  Elle est la fille de Pierre Rougon et Félicité.  Il est le fils d’Ursule Macquart.  Ils sont donc cousins, bourgeois et regardent passer la vie en travaillant dans le jardin pour lui et en faisant de la couture pour elle, bien installés entre les deux partis de la ville qui se rencontrent dans leurs jardins respectifs, de chaque côté de chez les Mouret.

Puis, un jour, pour avoir un peu de sous en plus, ils décident de louer une chambre à un nouvel abbé, l’abbé Faujas.  Il arrive avec une soutane usée, sans le sou, austère et peu amène.  Il a sa mère avec lui et s’installe au deuxième étage de la demeure Mouret… et à partir de ce moment, leur vie va changer.

Comme souvent, Zola s’attaque à certains problèmes de sa société.  Ici, c’est l’implication de la religion dans la politique.  De même, le thème de la folie est abordé, thème qui avait déjà été effleuré avec Adélaïde Fouque, l’aïeule enfermée aux Tulettes, un asile psychiatrique.  Je ne vous expliquerai pas le pourquoi du comment mais nous assistons, impuissants, parfois découragés, parfois enragés, parfois presque contents, à la manipulation d’une ville entière, à des changements d’allégeance, à des ascensions et à des chutes… bref, j’ai vibré dans cette histoire.  Sérieusement, je n’ai JAMAIS détesté autant certains personnages.  J’avais le goût de les secouer et j’étais totalement dépassée par la situation qui devient presque ridicule tellement c’est gros.  Le moins que l’on puisse dire, c’est que le roman ne m’a laissée indifférente!

Je prends une petite pause… mais vous aurez d’autres Rougon-Macquart bientôt!

Harry Potter et la chambre des secrets – JK Rowling / Jim Kay

harry-potter-illustre-2Ai-je vraiment besoin de vous présenter cet album?   En 2015, on avait eu droit au premier tome et, suite logique, le deuxième est sorti cette année.   Parfait cadeau de Noël, direz-vous.  Et vous auriez raison!

 

On adhère ou on adhère pas aux illustrations de Jim Kay mais pour ma part, je trouve qu’elles sont en parfait accord avec l’univers de Rowling et qu’elles nous font plonger direct dans ce monde.  Dans ce tome, c’est le terrier, Mimi Geignarde, les araignées géantes, le retour à Diagon Alley et la voiture volante.   Comment ne pas craquer?

 

L’album est d’excellente qualité et comporte encore une fois tout le texte original dans une mise en page originale, agrémentée d’illustrations et de fonds de pages qui sont en accord avec le propos.    Je l’ai déjà dit, je pense, mais je n’ai jamais lu les Harry Potter en français. Je profite de cette magnifique édition pour découvrir la saga dans ma langue et ça fonctionne parfaitement.  Un réel plaisir de lecture!

 

À consommer sans modération!

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Rénovation – Renaud Jean

renovationQuel roman étrange que voilà.   Je suis entrée dedans sans trop savoir à quoi m’attendre et j’en suis sortie à la fois hébétée et angoissée.  Entre incohérence et illogisme, le narrateur évolue dans un univers qui rappelle un peu celui de Kafka, où l’on côtoie un peu le grand n’importe quoi mais un grand n’importe quoi qui n’est parfois pas aussi éloigné que ça de certaines réalités.  Quand on travaille dans la santé ou l’éducation, des fois… mais bon, je m’égare!

 

Un jour, le narrateur est dérangé dans son chez lui capitonné et sans fenêtre par une équipe de rénovations.  Il n’a aucune idée d’où ils viennent, ils le traitent comme quelqu’un de limite suspect,avec hauteur et mépris.   Peu importe ce que le locataire en pense, on rénove, on éclaire, on ajoute de la transparence aux murs de cet appartement.  Il ose se plaindre?  Ben voyons, il a signé!  Et en plus, la seule chose qui soit vraiment inquiétante, dans tout ça, c’est que la pièce était autrefois capitonnée, non?  Suspect… fort suspect…  C’est lui aussi… il doit avoir de terribles difficultés d’adaptation!

 

Ici, on ne tombe jamais dans le larmoyant, mais on a le goût de secouer ce narrateur qui reste passif, qui ne dit rien (bon, d’un autre côté, dès qu’il ose, ça lui retombe dessus) alors que tout devient de plus en plus absurde autour de lui.  Entre les réhabilitations, les réformes alors que la réforme précédente n’est pas encore terminée, les chefs improbables et les situations où personne ne dit quoique ce soit, on sait d’avance que ça ne va pas bien aller pour cet homme (qui a, ceci dit, fort probablement des difficultés d’adaptation).  De toute façon, personne ne semble avoir un réel pouvoir dans cette énorme structure sensée vouloir « aider » les pauvres gens.

 

Miroir de la société, où personne n’est à l’abri et où plusieurs sont oubliés par le système, à qui ile dit système ne convient pas.  Privatisation, stages non-rémunérés, incohérences, redressement financier, coupures, diminution de la qualité de vie et surtout, surtout, impossibilité de s’en sortir pour certains.  J’en suis sortie pleine d’angoisse, fâchée aussi.  J’avais le goût de secouer tout le monde. Ceci dit, si la première partie a très bien passé, j’ai trouvé que le processus s’essoufflait un peu au fil des pages. La froideur se ressent par moments. On a affaire à un style assez direct, sans flaflas.  Même si ça m’a bien plu, j’avais quand même préféré son recueil de nouvelles, où le style m’avait davantage interpellée.

 

C’est malin, j’ai envie de relire Kafka maintenant!

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Pomme S – Eric Plamondon

pomme-sOn m’avait dit qu’on pouvait lire les trois volumes de cette trilogie dans le désordre.  Oui.  Et non.  Ceci dit, je dois tout relire, maintenant que j’ai davantage compris le fil conducteur, aussi mince soit-il.

 

Disons-le tout de suite : j’adore ce truc.  C’est limite jubilatoire.  Il faut avouer que ces textes en apparence décousus, ces informations distillées, parfois étalées, sans qu’on ne sache trop pourquoi au départ, c’est mon truc.   J’avais vraiment aimé Hongrie-Hollywood Express, le premier tome du triptyque, qui parlait de Johnny Weissmuller.  Ceci dit, j’avais dit que je me jetterais sur la suite.  En 2013.  Oui, je sais, je sais.

 

Cette fois, on nous fait entrevoir le personnage de Steve Jobs, ainsi que l’arrivée de l’informatique, de l’ordinateur personnel et la montée d’Apple.   Le tout par petites touches qui semblent décousues mais qui forment, en fait, un tout très cohérent.  Étonnamment.  Ici, pas d’idéalisation du personnage.   Juste une vision choc, comme cette publicité d’Apple qui a fait les annales du Superbowl de 1984.

 

Encore une fois, on nous balade d’une époque à l’autre, d’un pays à l’autre, d’une vie à l’autre.  De l’histoire du code binaire, en passant par l’invention du zéro, les déboires de Turing et les conférences de Job.  Et Gabriel Rivière, le personnage récurrent, qui traverse ces histoires, mine de rien.  Pour tenter de se trouver à travers d’autres existences.  Je crois.

 

Bref, je vais lire le deuxième.

Que j’ai acheté.  Of course!

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L’avalée des avalés – Réjean Ducharme

lavalee-des-avalesOh my…

Comment je vais faire pour vous parler de ça.  Ce roman fait partie des classiques québécois.  Publié en 1966, en plein pendant la révolution tranquille, il donne la parole à Bérénice, 9 ans au début de l’histoire, une enfant qui n’en est pas une.  Pour la petite histoire, quand mon prof en avait parlé au début du secondaire, je pensait que le titre était « La vallée des azalées »… mettons que ce n’était pas tout à fait ça!

Mais revenons à Bérénice.  Née au sein d’une famille bourgeoise.  Père juif.  Mère catholique.  Pour que ce soit juste, ils se sont partagés les enfants.  La mère a Christian, l’aîné et le père a Bérénice, la plus jeune.  Oui, je sais, c’est super sain, comme truc.

« Tout m’avale. Quand j’ai les yeux fermés, c’est par mon ventre que je suis avalée, c’est dans mon ventre que j’étouffe. Quand j’ai les yeux ouverts, c’est par ce que je vois que je suis avalée, c’est dans le ventre de ce que je vois que je suffoque. »  Ce sont les premières phrases du livre, les premiers mots que nous adresse Bérénice.  Avaler pour ne pas être avalée.  Contrôler l’amour pour ne pas être faible.  Et se décider parfois à aimer, à la folie, pour posséder.

La voix de Bérénice est très particulière.  Une voix d’enfant qui n’est pas un enfant, mais qui refuse totalement d’être une adulte, qui méprise ceux-ci et qui s’efforce d’haïr.  Haïr sa mère, qu’elle appelle « chat mort » ou « chamomort ».  Un truc vraiment répugnant, qu’elle ne peut pas aimer.  Et le pire, c’est que l’on est rapidement happés par cette folie, ces propos violents, que ce soit dans la haine ou dans l’amour.   C’est rempli de références, autant à Nelligan qu’aux poètes antiques,  Plus ça va, plus on lit avec de grands yeux, Parce que ça dérange.  Parce qu’on se demande où on s’en va, entre New York et Israël, les lettres incroyables et le bérénicien, langage inventé.

Un roman auquel il faut parfois s’accrocher, qui ne s’offre pas si facilement, mais qu’on referme soufflés.  Ça ne plaira clairement pas à tout le monde, ce délire, ce monologue intérieur avec ses digressions et ses répétitions.   Mais c’est disons… une expérience.

Qui m’a plu. logo-petit

Une casserole sur la tête – Alain M. Bergeron / Philippe Germain

casserole-sur-la-teteC’est l’histoire de Guillaume, le chevalier de la table carrée.  Ben quoi… la table de la cuisine est carrée!  Guillaume a une armure et un beau casque de chevalier… fait de la plus belle des casseroles.  Sauf qu’elle est entrée plus facilement qu’elle sort (je parle de la casserole… vilains!  Faut penser mal!).  Et du coup, notre grand chevalier va avoir un sérieux problème à régler!

 

C’est un petit album assez drôle, qui nous fait vivre le total calvaire d’un petit garçon qui a un problème… et que ce problème fait rire tout le monde.  Pauvre chouchou!  Bon, ma nièce était assez peu réceptive à son malheur et elle riait comme une folle.  Mais je dois avouer que ça lui en prend peu.

 

Ce qui est bien, c’est que nous avons ici un schéma narratif super simple, avec des solutions pas très efficaces, ce qui permet de travailler le résultat des dites tentatives… et de leur expliquer que quand la solution est inefficace… il faut essayer autre chose.  Ça a l’air simple pour plusieurs, mais pour mes cocos, ce ne l’est pas toujours!

 

Il y a aussi quelques inférences intéressantes à faire à propos des images.  Pourquoi la mère est fâchée?  Pourquoi chevalier de la table carrée?  Pourquoi tout le monde rit?  Que va-t-il arriver à la fin de l’histoire?  Quelles solutions vont-ils tenter?

 

Bref, tout plein de façon d’utiliser ce petit album, qui fait juste un peu trop rire les enfants! (Surtout quand ça occasionne un pipi inopiné… fait vécu!  Pas moi!  Un coco!)

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La bête à sa mère – David Goudreault

la-bete-a-sa-mereJ’ai écouté ce roman en audio.  Il m’a accompagnée durant quelques jours dans mes allers-retours au travail.  Et chaque matin, j’avais une nouvelle indignation à partager à mes collègues : « vous savez pas ce que le gars de mon livre a dit/fait? »   C’est qu’il m’a fait rager, ce mec!  Rager et rire en même temps parce qu’il faut l’avouer, c’est tout un numéro!  Et il a fini par m’émouvoir.  Un peu.

 

Et quand même, il fallait le faire!

 

Ce récit s’ouvre donc sur l’aveu d’un meurtre et tout ce qui va suivre est une longue confession.  Le narrateur va nous raconter sa vie, depuis son enfance, en tentant de nous expliquer comment il en est arrivé là.  Lui, né dans une famille monoparentale où « sa mère se suicidait souvent », il a été un jour placé en famille d’accueil par la DPJ.  Et ne s’en est visiblement jamais remis.   Toute sa vie durant, entre une arnaque et un cambriolage, il va chercher cette mère qu’on lui a arrachée.  Et crosser tout le monde par la même occasion.  Parce que bon.. pourquoi pas!

 

Ce qui fait la spécificité de ce roman, c’est la voix du narrateur.  Il est… il est… arghhhh!!!  Il est un bandit, un menteur, il réinvente sa vie à toutes les 5 minutes et en plus, il torture des animaux.  En plus, il est très fier d’être ce qu’il est (un crosseur, quoi) et il adore profiter du système.  Bref, il me rappelle certaines personnes.  Ce qui m’énerve.  Sauf que lui, contrairement à eux, c’est qu’il est drôle dans sa provocation!  Il est d’une mauvaise foi incroyable, a une façon de voir le monde complètement barrée, pense tout savoir et tout connaître… bref, c’est ma foi fort distrayant!   Et documenté, of course!   Il égraine les citations n’importe comment, attribue les mots de l’un à l’autre. C’est du grand n’importe quoi!

 

Ceci dit, le roman est à la foi fort, marquant et drôle à la fois.  Notre perception du narrateur évolue avec la lecture, on est fasciné par sa capacité à ne pas voir les choses, à tout interpréter pour que ça fitte avec son idée de départ.  Et vers la fin, on est limite découragés pour lui, en raison de  toutes les incompréhensions et de sa totalement déformée de la réalité.

 

C’est écrit dans une langue très québécoise et l’écouter, c’était juste parfait!  Il y a une suite… que je lirai certainement bientôt… en espérant qu’il l’aie un peu plus roff dans la suite!

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L’homme blanc – Perrine Leblanc

lhomme-blancJe vous emmène en URSS en plein mois québécois !  C’est étrange, je sais.  Mais bon, le climat se ressemble, non?  Et rassurez-vous l’auteure est bien québécoise!

 

Le héros de cette histoire, c’est Kolia.  Kolia est né en Sibérie, dans un camp de travail.  Et avec lui, nous traverserons une grand partie du 20e siècle dans un pays en grand bouleversements.  Au camp, il rencontrera Iossif qui lui apprendra à lire, à écrire, et qui lui fera mémoriser le code du zek, pour survivre dans se monde déshumanisé.

 

Il s’en sortira du camp.  Ce n’est pas un spoiler que de vous le dire.  C’est un survivant, endurci et enlaidi par la souffrance.  Moins laid qu’il ne le croit, pourtant.  Mais cette vision de lui-même va influencer ce qu’il va devenir.  Prestidigitateur, artiste du cirque, gentleman cambrioleur…  et toute sa vie, il va chercher Iossif, l’homme qu’il a aimé comme un père et qui, seul, l’a traité comme un enfant quand il en était un.

 

Élevé dans la violence, elle va toujours le poursuivre, mais autour du personnage va se greffer une panoplie de personnages fort imparfaits mais attachants tout le même.  J’ai beaucoup aimé ma lecture, beaucoup aimé la distance, l’absence d’apitoiement et de mélodrame alors que le thème aurait pu l’appeler. J’ai dévoré ces pages, apprécié l’écriture sobre et j’ai même fouiné un peu partout pour savoir si le fameux Kolia avait existé pour vrai.  Si ses mentors avaient existé pour vrai.  Parce qu’à la fin, ils étaient devenus réels pour moi.

 

J’avais lu toutes sortes d’avis sur ce roman mais avec moi, ça l’a franchement fait!

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Le cahier noir – Michel Tremblay

le-cahier-noirLe cahier noir a été mon Michel Tremblay annuel.  J’ai lu plusieurs romans, mais on dirait que je m’y suis prise trop tard… et que je ne rattraperai jamais!  Le cahier noir a été publié en 2003 mais nous emmène en 1966, dans le centre-ville de Montréal au Sélect, resto de la rue Ste-Catherine où se côtoient les clients de Dupuis Frères le jour, et la faune de la Main la nuit.  Au milieu de tout ça, Céline, waitress.  Aînée de trois filles, elle joue à la mère avec ses deux soeurs adolescentes parce que la mère, la vraie, est alcoolique et pas souvent en état de le faire.    Entre la mère et la fille, une lourde histoire, teintée de honte, de culpabilité, de manipulation.

 

Le cahier noir, c’est le cahier de Céline.  À travers les mots, elle tente d’accepter ses particularités, d’exorciser les horreurs que lui dit sa mère et de survivre à sa vie un peu plate.   Puis, un jour, Aimée, une cliente qui n’est même pas son amie, va lui demander de lui donner la réplique pour une audition des Troyennes d’Euripide.  C’est à ce moment que Céline va commencer, peut-être, juste peut-être, à arrêter de se cacher.

 

Comme toujours, on est profondément ancrés dans le Québec des années 60, avec les excès de la faune de la nuit et le quotidien des petites gens.    Céline est un personnage qui évolue, qui s’émancipe et tente de devenir elle-même.   Étonnamment, le drame personnel de la jeune femme de 20 ans résonne de façon très particulière avec les grands drames de l’histoire, qui nous est proposée en parallèle.  Chacun a sa bataille à livrer et ses fins du monde à vivre.

 

Sans être écrit en joual, c’est profondément québécois et on sent pointer l’auteur dans le fameux cahier.  On y trouve d’ailleurs une réflexion sur le langage québécois, son identité, qui fait sans doute écho aux questionnements et commentaires qu’a dus recevoir Tremblay quand il a choisit d’écrire dans la langue d’ici.  Encore une fois, on retrouve des personnages cultes de l’oeuvre de Michel Tremblay : la Duchesse, Maurice, Carmen, Fine…  tous y font des apparitions.  Et avec la finale, douce amère, j’ose espérer qu’on les verra encore davantage dans les prochains tomes!  C’est que ce cahier noir est suivi d’un rouge, puis d’un bleu!

 

Beaucoup aimé!

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