Il a fallu que cet ouvrage soit en sélection pour le Prix des libraires du Québec pour que je me décide à le lire. Il me tentait depuis un bon moment, soit, mais on aurait dit que je ne trouvais jamais le temps. Sur la page couverture, c’est écrit « nouvelles ». Pourtant, le narrateur reste le même et nous le suivons de l’adolescence jusqu’à l’âge mur. Des moments de vie, quoi.
Nous le rencontrons dans une première nouvelle, où il habite la Rive Sud avec sa mère et son frère. Il hait cette nouvelle maison pleine de tapis « shag ». Sa mère n’avait pas un sous mais comme elle couche avec un riche promoteur libanais, elle a pu avoir accès à cette demeure. Quant à son frère, il est passionné de musique celte et milite pour l’indépendance de la Bretagne. Leur quotidien « plate », à vivre en parallèle les uns avec les autres, va changer quand leur oncle va un jour débarquer avec un ourson à la patte amputée.
À quel moment décide-t-on d’écrire, à transposer le quotidien en mots? Chaque nouvelle parle d’échecs, d’abandons et de désillusions mais le thème est abordé avec une certaine distance, comme vu d’ailleurs, ce qui permet de conférer à ces histoires une étrange douceur malgré les sujets. Entre la mère qui renie le désir d’écrire de son fils, l’amie joyeuse et rêveuse qui abandonne ce en quoi elle croyait et le jeune artiste qui tente de percer, quitte à courber le dos, tous les personnages vivent des échecs ordinaires qui ont réussi à me toucher particulièrement. L’ambiance est particulière, douce-amère, parfois lourde sans être pour autant difficile à supporter. J’en aurais pris davantage, j’aurais aimé rester plus longtemps dans ce récit, cette réflexion sur l’art et la création. J’ai beaucoup apprécié les clins d’oeil à Jean-Paul Daoust (j’ai eu tellement de mal à me remettre de Les cendres bleues ) et Nicole Brossard (souvenir de Désert Mauve). J’adore quand un auteur fait ça!
Une oeuvre touchante, qui parle de rêves qui ne résistent pas toujours à la vie et des fois où on s’abandonne nous-mêmes. Un très bon choix pour la sélection selon moi. Il me semble juste que quelques nouvelles supplémentaires auraient été les bienvenues… mais quand arrêter une oeuvre est un autre questionnement, n’est-ce pas!
Marie-Claude en parle aussi!