Le Christ obèse – Larry Tremblay

christ-obese.jpgOh qu’il est étrange ce roman.  Profondément dérangeant, troublant.  Au point que j’ai dû le refermer à plusieurs reprises car c’était juste too much.  Trop de violence, trop d’instabilité, trop peu de justification à toutes ces horreurs.  Juste parce que.  Et malgré tout, cette étrange culpabilité qui plane, ce doute permanent qui assaille le narrateur.

Nous avons donc affaire à roman métaphorique sur le christianisme, sur la religion, qui nous questionne et qui nous secoue.  Du moins, je crois.  Parce que j’en ai sans doute manqué quelques bouts hein… un roman qui mériterait sans doute une relecture.  Le personnage principal est Edgar, 37 ans.  Il a toujours vécu sous l’emprise de sa mère, figure essentielle de sa vie mais aussi assez froide, qui a fait disparaître un jour tous les souvenirs de son époux, décédé le jour de la naissance d’Edgar.  Relation particulière, inégale, limite malsaine, même si nous ne faisons que l’entrevoir.  Puis, après sa mort, alors qu’il est sur sa tombe, il voit une jeune femme se faire tabasser par quatre personnes, qu’il identifie au quatre cavaliers de l’apocalypse.  Pour une raison qu’il ne s’explique pas lui-même, au lieu d’appeler la police ou l’ambulance, il décide de l’amener chez lui pour la soigner.

À travers ces pages, nous verrons se tisser lentement une relation très étrange de codépendance, où les rôles sont flous et où les sentiments sont contradictoires.  La figure du Christ se superpose, se confond avec celle de la personne blessée qui souffre, qui a été maltraitée et abusée.  Graduellement, toute la vie d’Edgar se mettra à tourner autour de cette figure qui le domine, alors qu’il est lui-même le soignant, l’aidant, le pourvoyeur.  Le tout presque sans parler.    Petit à petit, nous découvrons la mère, ses sentiments contradictoires, ses actes, qui ont pu déclencher quelque chose dans la tête du petit Edgar de quelques années à peine.

Difficile de s’attacher à ce personnage.   Difficile de le comprendre, car il est en constante opposition avec lui-même, se présentant tour à tour comme une personne rationnelle, qui se questionne et une personne dérangée, qui doute de sa santé mentale et qui s’auto-justifie avec une logique qui lui est propre.  Des actes horribles nous sont racontés avec une froideur et une distance incroyable et c’est cette combinaison qui m’a parfois fait manquer de souffle.  Et quand on y pense un peu et qu’on fait certains parallèles, qu’on se repose vraiment certaines questions qui sont soulevées par rapport à la religion, au christiannisme, ça secoue encore plus.  Et on est ramenés à la question initiale… pourquoi la souffrance du Christ vaut-elle plus que la nôtre?  Et toute cette foutue culpabilité judéo-chrétienne, qui nous fait douter de nous en premier lieu, de notre bonté ou encore de nos droits…  Ce roman, avec toutes les horreurs qu’il contient (sérieux… comment voulez-vous que ça finisse bien), a le mérite de faire réfléchir et de nous offrir une métaphore ma foi fort réussie.

Même si je ne peux pas dire que j’aie eu une lecture… agréable et pétillante de joie!

Ailleurs… le billet de Jules

24 Commentaires

Passer au formulaire de commentaire

  1. Joli billet, tu parles bien de ce livre.
    Par contre, cette fois je passe mon tour, trop de violences pour moi 😉
    Bonne journée !

    1. J’ai eu vraiment du mal à en parler. Sérieusement, c’est un roman dérangeant.

  2. J’aime bien le dérangeant mais dès que la religion s’en mêle, je freine des 4 fers !

    1. hahahaha! Ce n’est pas si direct direct, en fait, le côté religieux. Bon… oui mais non. Je suis d’une clarté folle, je le sens!

  3. Mouais… (je peux passer mon tour aussi, même si les questions que tu soulèves m’intéressent beaucoup ?)

    1. Si si, tu peux! Ce n’est clairement pas pour tout le monde!

  4. C’est sûr qu’après ce livre-là tu n’auras pas envie de lire Le Bourreau de Heloneida Studart 😉 Mais sinon il a l’air bien celui-là, je ne sais pas si je saisirai tous les niveaux de lecture mais je note. Je ne crois pas connaître la maison d’édition en plus !

    1. C’est Alto, une maison d’édition québécoise qui produit beaucoup de bon, voire même de très bon. MAis bon, après ça, je n’avais pas très en vie du bourreau!

  5. Je trouve le titre intéressant et interpellant. Après, ce que tu en dis me convainc suffisamment pour ne pas le lire : je ne suis pas sûre qu’il me conviendrait !

    1. C’est un roman bien intéressant, mais qui ne conviendra clairement pas à tous!

  6. Tu vas peut-être me trouver lâche, mais je ne me le suis pas offert justement parce que le sujet est dur et Larry Tremblay efficace. J’espère que certaines personnes seront plus courageuses que moi !

    1. Ah oui, pour être efficace, il l’est. Ca frappe et ça dérange.

  7. Enfin, j’ai changé l’adresse de ton blog dans mon agrégateur !!
    Ça m’évitera de manquer tes articles désormais !!! 🙂

    1. Merci de ta visite! :))) Plein de monde m’ont perdue!

  8. J’ai lu « L’orangeraie » du même auteur et j’ai éprouvé les mêmes gênes.Je ne sas pas si je veux recommencer ce mal-être
    Le Papou

    1. Le Papou: C’est fouuuuu hein comment il est efficace, cet auteur! (PS: welcome in my new chez moi!)

  9. Je m’en doute! Ce ne doit pas être une lecture réjouissante mais originale et forte certainement!

    1. Voilà, tu résumes fort bien!

  10. Il est dans ma PAL, mais je vais attendre un peu avant de le lire. Peut-être entre deux lectures légères 😉

    1. Oui, tu fais bien d’attendre le bon moment. C’est un roman qui demande ton attention et ta disponibilité.

  11. bon je l’ai hien mais je n’ai pas encore osé me frotter (littérairement hein) à larry tremblay… il me fait peur cet homme

    1. Je te comprends! :)) Mais il frappe fort, où ça fait mal. Il faut avoir le coeur bien accroché!

  12. Bon, au moins, il fait réfléchir.

    1. Yep. Et on a pas toujours des réflexions super joyeuses en le lisant!

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.