Voyage au bout de la nuit – Louis-Ferdinand Céline

voyage au bout de la nuitLire Voyage au bout de la nuit, c’est une expérience.  Toute une expérience.  Et le lire dans une version illustrée par Jacques Tardi, c’est doublement une expérience.   Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais j’ai pour ma part trouvé que la combinaison du texte et des images rendait le tout terriblement réel.  En fait, il m’a forcée à voir ce que je n’aurais pas osé imaginer, tout en faisant ressortir les aspects ironiques et parfois comiques du roman.

 

Mais par où commencer.

 

Je ne vais pas vous faire une analyse de « Voyage au bout de la nuit ».  Plusieurs l’ont fait, beaucoup mieux que ce que je pourrais vous offrir.  J’avoue avoir d’ailleurs attendu quelques jours avant d’écrire ce billet, le temps de laisser retomber la poussière, de prendre de la distance.  C’est un roman qui marque, qui frappe.  Et qui laisse des marques.  Du moins, qui en a laissé en moi.   Roman dur, certes, mais qui nous remet en pleine face certaines bassesses ordinaires auxquelles on préférerait ne pas penser.

 

Le narrateur, Ferdinand Bardamu, se retrouve embarqué sans trop l’avoir voulu dans la première guerre mondiale.  Attiré par une parade, des drapeaux, il réalise – trop tard – que ce n’est pas pour lui.  Il en sera un peu ainsi toute sa vie, en fait.  Il se laisse porter par les événements, sans jamais réussir à vraiment tirer son épingle du jeu, en jouant le jeu de la fuite et de la lâcheté.   Un roman sur la désillusion, désillusion d’un monde qui déçoit à chaque fois, que ce soit par la guerre, le capitalisme, le colonialisme ou encore simplement l’obéissance aveugle à toutes les règles et à toutes les lois.  Désillusion aussi d’un monde où les actes bons (même quand il sont juste paresseux), sont systématiquement perçus comme de la faiblesse. Et veut veut pas, ça fait réfléchir.

 

Un roman qui nous mène de l’Afrique coloniale (j’en ai presque été physiquement malade… ça et la scène du cheval à la guerre… brrrrrr) en Amérique de Ford (où les hommes sont déshumanisés), pour revenir en France et à la médecine, où le narrateur pourra côtoyer riches et pauvres.  Personne n’est épargné dans ce roman.   Aucune situation.   Tous les personnages finissent (ou commencent) par montrer un côté petit, sombre.  Les descriptions presque drôles ne servent qu’à rendre la réalisaiton encore plus frappante.

 

Un roman fort sombre, certes, mais qui contient certains passages d’une grande beauté.  Et comme c’est souvent terrible, il m’a remise en question en tant qu’humain… comment puis-je trouver ça beau?  Et je pense que c’est ce sentiment qui marquera le plus ma lecture.  Cette mise en lumière de certains côtés de moi-même.   Comme je vous dis, je n’en suis pas sortie la même.   Juste parce que je n’ai pas envie d’avoir cette vision du monde.  Jamais.  Et que je vais tenter – encore plus – d’éviter.

 

Il faut donc être bien accroché mais l’histoire est servie par un style que j’ai trouvé magistral.  Entre parlé populaire et phrases magnifiques, fortes et justes, les niveaux de langage se côtoient et s’entremêlent de façon géniale.   Vraiment, ça vaut la peine d’être lu, ne serait-ce que pour ça.     J’avais pour ma part retardé ma lecture parce que bon, Céline, comme personne, je n’adhère pas vraiment.  Voire même pas du tout.   La preuve que parfois, il est bon de séparer l’oeuvre de l’auteur.

 

Marquant.

12 Commentaires

Passer au formulaire de commentaire

  1. Pour moi c’est un chef d’oeuvre, ni plus ni moins.

    1. Je viens de faire ma liste de 2015… et il fait partie des romans qui m’a le plus marquée.

  2. Un roman fort et coup de poing. La mise en image m’intrigue. Je note donc la BD.

    1. Ce n’est pas une BD hein… c’est vraiment le roman. Illustré! Mais c’est tout aussi coup de poing.

  3. De mon côté, je l’ai terminé mais par contre le style… brrrrrr ! En tout cas, je vois que tu as des lectures très très gaies pour cette fin d’année ! 😉

    1. Je l’ai lu il y a un petit moment… j’ai de l’avance dans mes billets.
      Pour ma part, j’ai trouvé le style particulier et assez génial… comme de quoi chaque sensibilité est différente.

  4. Moi aussi j’ai trouvé l’écriture magistale ! Un livre à découvrir…

    1. Il faut juste avoir le coeur bien accroché…

  5. Je ne lis pas ton billet car je pense faire de cette lecture ma résolution pour 2016; c’est un livre qui me fait un peu peur…
    Cette édition illustrée par Tardi, c’est une BD ou pas?

    1. Cette version, c’Est tout le roman, mais avec des illustrations en plus. C’est magnifique, super adapté… j’ai adoré découvrir ainsi.

  6. Je n’ai jamais pu dépasser la scène du cheval, très belle écriture c’est certain….

    1. Disons qu’il faut parfois prendre sur nous-mêmes. Un roman qui nous ouvre les yeux sur des choses qu’on ne voudrait pas voir…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.