Dernière journée complète en Espagne. Tout le week-end sera sur la route. C’est que c’est pas la porte à côté, la région de la Cantabrie. Au moins 12 heures de route. Du coup, on va couper la route en deux et passer par conséquent deux jours sur les beaux (et embouteillés) chemins de France. Dès le matin, on commence les bagages, les lavages, on récupère nos affaires qui sont disséminées un peu partout dans la maison. Le temps est maussade, du coup, pas de plage le matin et ils prévoient aller à la crique en après-midi.
Après avoir paressé et traînassé un peu sur la galerie (maussade veut dire « pas ensoleillé », pas « pluvieux ») et profité des rayons de soleil qui perçaient de temps en temps, on a décidé d’aller faire le fameux « chemin des contrebandiers », dont tout le monde nous parle depuis le début. C’est qu’ils ont découvert un escalier un peu caché qui mène à la mer et qu’ils y ont trouvé des poissons. Du coup, c’est devenu la légende familiale et on se raconte des histoires de pirates et de trafic de bijoux (ou de drogues) à n’en plus finir.
Of course, Fabienne et moi on s’est un peu perdues et trompées de chemin (c’est devenu un véritable running gag… JAMAIS on ne va marcher sans se perdre) après avoir visité un champ joyeusement (et récemment) recouvert de bouse de vache, on a bien réalisé que ça n’allait pas le faire et qu’on allait devoir retourner (et retraverser le champ). Une chance, la vue est magnifique.
On trouve finalement le fameux escalier, qui semble totalement dangereux et qui mène à une crique seulement accessible à marée basse. Bon, selon le cafetier (qui a une tête de personnage de roman), c’est plutôt un endroit pour aller récolter des algues super précises qui sèchent ensuite pour aller dans les cosmétiques. Beaucoup moins romantique que les contrebandiers, j’avoue! Mais bon, on voit les séchoirs et c’est un endroit génial pour baser une histoire du genre à la Daphné du Maurier!
Et au retour, la vue du village est magnifique!
Après le traditionnel repas du midi en gang, je profite du fait que la voiture n’est pas nécessaire pour aller à la crique et hop! Kidnapping de voiture. Je ne sais pas trop où je m’en vais et j’hésite entre Oviedo et prendre la route des montagnes et voir. Finalement, l’idée de devoir me stationner en ville me hérisse et je choisis la route des pics d’Europe, mais pas du même côté, en me disant que peu importe, ce sera joli.
Et j’ai de la chance.
Je prends la route qui part de Panes vers Potes, le défilé de la Hermida qui fait un peu plus de 20 km. Il longe la Deva, qui a creusé un peu partout dans la roche et qui donne un paysage un peu déchiré qui serpente entre les deux montagnes. Au milieu se trouve le petit village de la Hermida, un peu au milieu de nulle part. D’ailleurs, sur le chemin, les villages n’ont parfois que 2 maisons entre les deux pancartes du début et de la fin. Je riais toute seule.
J’adore ce genre de route, avec ces paysages qui nous font sentir minuscules. Après mon entrée dans le défilé, miracle, le beau ciel bleu et le soleil. On voit les cimes des montagnes et il y a juste une toute petite mini brume. Merveilleux!
Je vois donc une pancarte avec une vieille église. Pourquoi pas! Bon, elle n’est accessible que par visite guidée… en espagnol. Et on ne peut pas prendre de photos à l’intérieur. Tant pis. On y va quand même. Elle est trop mignonne, nichée entre les montagnes, dans la verdure. La dame qui fait la visite a pitié de moi et me donne des dépliants en anglais!
L’église Santa Maria de Lebana est une petite église mozarabe du Xe siècle. La tour et le portique sont plus récents. On attribue sa fondation au comte de Lebana, don Alfonso. C’est un plan avec des rectangles, un grand et neuf plus petits. Elle est composée de trois nefs dont centrale un peu plus grande. Le retable central est très doré et très espagnol, avec une copie d’une célèbre statue d’une vierge qui allaite (virgen de la buena leche) du 18e. D’autres retables du 16e sont encore visibles à l’arrière et sur les côtés. On trouve aussi plusieurs colonnes avec des chapiteaux aux motifs végétaux. On voit émerger l’art roman.
L’autel est particulier, une grande pierre posée à la verticale gravée de motifs surtout circulaires. C’est sa forme qui m’a davantage marquée, en fait. Mais bon, pas de photos!
Ceci dit, j’ai compris au maximum 30% du truc, surtout les détails architecturaux. Mettons que c’est pas gagné, cet apprentissage!
Je reprends la route vers Potes, une très jolie petite ville de montagne à la rencontre de 4 vallées assez touristique, mais avec une fort jolie vue. Un stop pour prendre un verre (de coca… je conduis, voyons!). Il paraît qu’il y a un monastère tout près aussi mais je préfère poursuivre vers le téléphérique et profiter du beau temps. C’est un dédale d’escaliers et de ruelles, qui a des origines à la préhistoire mais que l’on retrouve surtout dans les textes à partir du 9e.
C’est donc parti pour le téléphérique. À la montée, je suis seule dans la cabine et pas grosse pantoute dans mes culottes, disons! On monte de 800m en 3 minutes pour arriver au balcon, à 1800 quelques mètres d’altitude. On y trouve des chèvres à travers les gens et surtout un joli sentier qui mène au refuge d’Aliva, vers la base du glacier. Au loin, on voit les montagnes se découper, il fait 30 degrés et c’est magnifique. Un petit moment d’éternité. Si je n’avais pas d’heure de retour, j’aurais tout descendu à pieds, je pense. Là, j’ai dû me limiter un peu. Ceci dit, deux espagnols tenaient absolument à faire la route avec moi pour être certains que je ne perde pas, jeune fille esseulée en jupette et en camisole, qui semblait totalement pas arrangée pour aller randonner! Ceci dit, je montais pas mal plus vite qu’eux (et ça ne montait presque pas)! Je dois être pas si pire, vu que Charles m’a demandé, il y a quelques jours, si mon métier était de randonner!
Ceci dit, c’est une vraie montagne. Le paysage est grandiose et le fait de me promener toute seule me fait me sentir toute minuscule et totalement présente, là, à ce moment. C’est probablement pour ça j’aime me balader seule de temps en temps.
Au retour, je décide de prendre une route différente pour voir un point de vue « classé 3 étoiles » sur les guides. Je suis « presque » à l’heure pour manger et techniquement, en m’arrêtant, je devrais n’avoir que 10 minutes de retard sur l’heure demandée par Mme V. Sauf que bon. Le destin en a décidé autrement.
En effet, je roule 45 minutes et je vois des voitures arrêtées. Beaucoup de voitures arrêtées. Dans un tout petit chemin de montagnes large comme une voiture et quart. J’attends un peu, sors de la voiture en me disant qu’il y a peut-être un accident et que mon passé de secouriste va peut-être servir. C’est donc en mode full adrénaline que j’avance un peu pour voir…
Des chèvres. Mais genre un PAQUET de chèvres.
Comment dire… il y a un fuckignos troupos de cabrales qui bloque la route.
Tout le monde klaxonne et tente comme il peut de leur faire débarrasser le plancher (ou plutôt le bitume) et je suis à même de constater que « shhhhh » est international. Et visiblement inefficace.
On ne devrait pas dire têtu comme une mule mais têtu comme une chèvre. Ou plutôt comme un troupeau de chèvres qui se montent entre elles. D’un autre côté, étant donné la largeur de la route et le fait qu’il y ait un mur d’un côté comme de l’autre, je vois assez mal où elles pourraient aller ! Même si les gens s’obstinent à leur gueuler dessus pour les faire partir (ou s’envoler, ou s’évaporer… j’ai pas bien compris)
Après plusieurs minutes d’attente, je décide de rebrousser chemin. Ok, le fait que deux chèvres se soient visiblement donné le mot pour charger sur la première voiture de la file (avec un superbe échantillon d’insultes en espagnol en réaction… profitez de toutes les occasions pour enrichir votre vocabulaire) a probablement influencé ma décision. Et là, peu importe le calcul, je vais être en retard pour manger. Heureusement, sur les routes de montagne, aller et retour sont forcément très différents quand on conduit. En fait, j’imagine parce que je n’ai pas vraiment testé le contraire hein. N’empêche que j’ai eu un moment de panique. Ils vont m’attendre. Et m’en vouloir. J’envoie des textos désespérés à Fabienne et Claire (au cas où un téléphone serait mort entre temps), qui ont bien fait rire tout le monde. Le tout le monde en question s’est bien foutu de ma gueule à mon retour.
Demain, on retourne en France, avec un petit stop par le pays basque. Comme Charles veut manger du jambon de Bayonne…
Ce soir, ce sont les dernières fois. Dernier repas tous ensemble, dernières blagues pourries, derniers pokémons attrapés et surtout, surtout, dernière cagna con limon. Et ça c’est triste !
On profite donc des derniers moments avec la superbe vue sur la mer. C’est qu’elle était bien, cette terrasse !
À bientôt !