Quand on va faire une promenade des écrivains avec Marie-Eve Sevigny, on ressort toujours avec une liste des oeuvres obligatoires. Et cette année, je n’ai fait qu’une promenade alors j’ai le temps d’être bonne élève. J’ai donc lu, à sa suggestion, Laure Clouet, oeuvre québécoise datant de 1961. Et comme elle est bonne prof, elle a su bien choisir, et me donner les clés nécessaires pour l’apprécier davantage. Ne vous méprenez pas, c’est très très accessible sauf qu’une fois replacé dans l’époque, le propos est encore plus révélateur.
Ce court roman nous présente donc Laure Clouet, vieille fille héritière d’une riche famille de la Grande Allée. Elle a des sous, du standing mais aussi toute une réputation familiale qui tient maintenant sur ses seules épaules depuis la mort de sa mère qui maintennait la maisonnée dans une époque révolue, sans évolution possible. Laure a bien des envie de voir le monde autrement, mais les traditions et l’éducation qu’elle a reçue ne rendent pas les choses faciles. Elle vit donc seule, sans avoir absolument rien changé, jusqu’à ce qu’une lettre d’une jeune nièce vienne bouleverser ses certitudes.
On se retrouve ici à l’aube des grands changements des années 60. L’aristocratie québécoise s’effrite et avec le changement vient le clash des générations. Imaginez, les habitants des quartiers qui se mélangent! Et une nièce qui osent demander de l’héberger, comme ça! Ça ne se fait pas. Et avec le vieux monde qui se meurt, Laure perd peu à peu ses guides et se sent ballotée par ceux qui la poussent en avant et ceux qui la tirent en arrière. Et c’est ce portrait d’une société en bouleversement, d’une femme prise au milieu de tout ça qui nous est ici offert. Parce que malgré l’âge de la protagoniste, il s’agit ici de prendre ses premières vraies décisions d’adulte et j’ai trouvé ses déchirements passionnants. De la demande, nous en savons somme toute peu… que va-t-il arriver? Sont-ils bienveillants? Mais qu’importe car il ne s’agit que du déclencheur vers une transformation tout autre.
L’écriture est fine et ciselée sans pour autant être alambiquée. Elle dresse le portrait de Québec (et d’une partie du Québec) avec adresse et se balader dans les endroits où se déroule le roman était ma foi fort agréable. Une belle découverte pour moi qui ai toujours eu un peu en grippe les classiques québécois!