Mal de pierres – Milena Agus

Ce roman était dans ma pile depuis mes débuts sur le blog. Il a fallu finalement que je l’emprunte en audio pour le l’audiolire, en courant dans la neige. Certes, au Québec, en décembre, on est fort loin du climat de la Sardaigne mais les mots de Milena Agus m’y ont quand même transportée, le temps de ce court roman.

Une narratrice va donc nous faire rencontrer sa grand-mère, une jeune Sarde aux cheveux sombres et aux trop grands yeux. Une histoire qui semble simple au départ, mais que l’auteure complexifie graduellement, par petites touches, allant jusqu’à faire revivre tout autour de son héroïne toute une époque. Autour d’elle, plusieurs personnages gravitent autour de cette femme en total décalage avec la norme et son temps.

C’est l’histoire d’une femme mariée à un homme qu’elle n’aime pas, mais avec qui elle réussit à s’entendre. Toutefois, elle souffre de calculs rénaux et l’enfant tarde à venir. Elle sera envoyée en cure, rencontrera le Rescapé, en restera marquée et reprendra confiance, petit à petit. Tout en subtilité et en peu de pages, Milena Agus réussit à traiter de condition féminine, de secrets de famille, de filiation, d’amour et de normes sociales. J’ai beaucoup aimé ce personnage de femme aux repères différents des nôtres. La voix de la narratrice semble parfois décousue, on se demande pourquoi elle prend certains chemins mais tous se rejoignent à la fin, avec l’espoir d’un peu d’équilibre.

Bref, une auteure qui oeuvre tout en finesse, qui nous réserve certains moments étonnants et que je relirai certainement.

Croque-Manoir – Chabbert / Loyer / Maaden

Le pourquoi du comment

J’ai choisi ce court album-roman pour Ingrid Chabbert. Bon, un peu pour la couverture, mais surtout pour Ingrid Chabbert, dont je suis de plus en plus fan. Et j’ai bien fait car cette histoire m’a énormément plu.

C’est quoi, cette histoire?

C’est donc l’histoire de Nabil, un petit garçon à la peau foncée et aux cheveux frisés. Imaginez-vous que son père, éternel enthousiaste, a acheté un Manoir tout pourri pour faire une surprise à sa mère à son retour de mission à l’étranger. Et en plus, le dit manoir est occupé par une petite fantômette qui adore faire peur aux gens. Ce n’est pas gagné, direz-vous. Sauf que…

Et mon avis…

J’adore cette histoire. Neveux et moi adorons l’histoire. C’est drôle, c’est intelligent, rempli d’inférences et d’indices disséminés, le tout en une quarantaine de pages. Entendons-nous, il y a pas mal de texte, mais il est aéré, avec des mots mis en relief qui permettent d’ajouter de l’intonation mais aussi de garder l’attention du jeune. En plus, l’orthophoniste en moi a adoré le choix du vocabulaire descriptif riche et varié, qui permet d’élargir le lexique et qui montre en plus une bonne façon d’utiliser ces nouveaux mots.

L’histoire est entraînante, les dialogues sont piquants et c’est un plaisir de rencontrer Nabil petit à petit. Quant à Blanche, l’occupante pas du tout contente de voir arriver un envahisseur, mais qui espère bien lui causer une bonne frousse, c’est une charmante chipie. Ajoutons à ça des dessins évocateurs, juste assez inquiétants et nous obtenons une histoire bien ficelée qui plait énormément.

Et que dire de la fin! J’aime les mots qui ne sont pas dits et les albums qui font confiance aux enfants, même aux petits! Bref, ici, on aime! Merci Dimedia!

On en parle ailleurs

Moka

Truly Devious – Maureen Johnson

Le pourquoi du comment

J’aime beaucoup Maureen Johnson. Et imaginez une héroïne qui adore les romans policiers et dont le passe-temps est d’étudier les crimes, surtout les crimes non résolus. Mettez tout ça dans un manoir plein de passages secrets et ajoutez l’avis dithyrambique d’une copine, c’est officiel que je ne peux pas résisté. Et en effet, je ne l’ai pas fait.

C’est quoi, cette histoire?

Stevie est une adolescente qui se sent très différente de sa famille. En effet, ses parents sont de fervents admirateurs d’un sombre sénateur de droite et elle est plutôt solitaire, préférant s’immerger dans sa passion pour les « true crimes » et les romans policiers. Quand elle est acceptée à Ellingham, une école huppée mais gratuite pour les jeunes géniaux ou créatifs, elle ne pourrait être plus heureuse. En effet, 80 ans plus tôt s’y est déroulé un enlèvement et le crime n’a jamais été vraiment résolu, et Stevie se passionne pour cette histoire depuis des années.

Et mon avis…

J’avoue que je ne pensais pas aimer autant cette histoire. Sérieusement, j’ai adoré et je l’ai dévoré. Il y a un petit quelque chose d’Agatha Christie, mélangé avec ces romans d’école que j’aime tant. Et comme le tome 2 est déjà sorti, je sens que je vais le lire très bientôt. C’est dire à quel point ça m’a plu.

C’est donc un roman jeunesse qui pourra plaire à tout le monde, je crois. Les pages se tournent toutes seules et on passe un excellent moment. Stevie est une héroïne pleine de failles, peu habile socialement et très absorbée dans ses intérêts – souvent envahissants, avouons-le. Elle est intelligente mais anxieuse et très peu expérimentée dans la vie en général, ce qui donne parfois des réactions difficiles à comprendre. Mais pourtant, j’ai trouvé ce portrait d’adolescente insécure et sujette à des crises de panique criant de vérité, même si ce n’est pas le sujet principal du roman. Je me souviens avoir eu exactement ces réflexions sur l’amitié à certains moments de ma vie. Ouais, ça vous donne une idée à quel point j’étais à l’aise socialement hors de mon petit cercle quand j’étais ado!

Bref, Stephie arrive dans ce fabuleux endroit et elle va y rencontrer les autres étudiants. Un jeune vidéaste star de Youtube, une artiste ayant grandi dans une commune, une jeune fille maniaque de sciences et un jeune auteur qui a du mal à écrire. Son projet? Résoudre le mystère Ellingham. Toutefois, son esprit de détective va avoir aussi beaucoup d’autres occupations car il semblerait que Truly Devious soit de retour. La narration alterne entre passé et présent, entre les recherches de Stevie, sa vie de tous les jours et les archives des événements de 1936. Et savez-vous quoi? Même si j’ai des idées, je ne sais pas vraiment ce qui s’est passé. Moi. Du coup, je suis fort curieuse et il me FAUT la suite.

Un petit côté vintage, plein de références, des personnages très particuliers (celui m’ayant le moins intéressée étant David, celui qui rend Stevie toute chose) et une intrigue qui m’a beaucoup intéressée. Et bon, cet endroit! J’aurais aimé voir plus de ces passages secrets et des mystères de cet endroit. Après tout, le personnage d’Ellingham semble vivre pour jouer.

Attendez-vous à lire mon avis sur le tome 2 bientôt!

Americanah – Chimamanda Ngozi Adichie

Le pourquoi du comment

Ça me fait tout bizarre de commencer ma découverte de l’auteur par ce roman alors que j’ai « Lhibiscus pourpre » dans ma pile depuis le début de mon blog. Pourquoi j’ai pris celui-ci? En fait, je n’en ai aucune idée. Une copine me l’a prêté et j’ai une envie folle de me dépayser dans mes lectures. J’ai bien choisi, n’est-ce pas! Et en plus, c’est le African American History Month chez Enna. Ça adonne over bien, je trouve.

C’est quoi, cette histoire?

Ce roman nous raconte l’histoire d’Ifemelu, une jeune femme nigeriane directe et intelligente. Son enfance n’a rien à voir avec la misère humaine. Sa famille n’a pas beaucoup d’argent, le quotidien n’a rien de faste, mais ce n’est pas la préoccupation principale d’Ifemalu adolescente. Elle est amoureuse d’Obinze, fils d’une professeure d’université qui l’élève seule. Ils sont de classe moyenne, vivent bien, mais Obinze rêve d’Amérique et il veut quitter son quotidien qu’il trouve trop étriqué.

Le roman s’ouvre alors qu’Ifemelu est aux États-Unis et qu’elle souhaite retourner chez elle, au Nigéria. Pendant qu’elle se fait tresser les cheveux (j’adore cette scène), elle se souvient de son parcours et nous la voyons évoluer à travers les années, autant en Afrique qu’en Amérique. Elle qui dit être devenue Noire à l’instant où elle a débarqué aux USA, va porter un regard critique sur ce qui l’entoure et nous, comme lecteur, nous serons les témoins privilégié de son changement de perspective et de sa façon de voir les choses.

Et mon avis?

J’ai adoré. Je dis souvent que je lis pour voir la vie et le monde avec un autre regard que le mien et c’est tout à fait ce à quoi j’ai eu droit avec ce roman. Un regard extrêmement intéressant, de plus en plus revendicateur, mais surtout, un regard qui fait réfléchir, réagir et prendre position. Ifemelu se définit comme une noire non-américaine, surtout au début de l’histoire. Pour elle, la race n’a jamais été une question centrale et soudain, ça prend toute la place. Au Nigéria, elle est nigériane de Lagos. Ici, elle est Noire, c’est tout. Et être Noire dans un pays où le racisme est profondément ancré et souvent très insidieux, ça a plusieurs implications.

Il est très difficile de parler de ce roman tellement il est riche en thèmes divers et à quel point il est dense. Il y a une histoire d’amour, certes, mais si elle sert de fil conducteur, le roman est loin de se limiter à ça. Ça parle de racisme, de relations humaines, de faux semblants, d’histoire et le portrait des sociétés fait par Ifemelu ou Obinze sont souvent sans concession. En tant que blanche, très peu confrontée au multiculturalisme (j’habite au bout du monde), c’est confrontant parce que parfois, on se reconnaît dans les comportements des gens, même si on ne voudrait pas. Et aussi parce qu’il y a tellement peu de « bonnes » façons de faire aux yeux l’Ifemelu la blogueuse sur la race, que ça fait parfois peur. Et tout ça, ça fait réfléchir sur le manque de compréhension et encore une fois sur le regard, sur les bonnes intentions (et les moins bonnes) et sur l’influence du contexte sur l’évolution de notre pensée et de notre façon de penser.

Nous suivons donc Ifemelu à son arrivée aux États-Unis, étudiante pauvre, alors que rien ne va et où elle va se résoudre à effectuer des boulots qu’elle n’aurait jamais cru avoir à faire. Nous la verrons aussi avec son petit ami blanc richissime (et sexy), qui lui offre une vie qu’elle n’aurait jamais imaginée pour elle, puis avec Blane, noir américain universitaire et engagé, qui va aussi faire évoluer notre héroïne. En parallèle, nous avons droit à quelques chapitres du point de vue d’Obinze, qui quitte aussi le Nigéria pour tenter de rêver plus grand, en Angleterre, alors que rien ne va se passer comme prévu.

J’ai beaucoup aimé les personnages, pleins de défauts, modelés par leur éducation, qui prennent souvent des mauvaises décisions et qui tentent de s’en sortir. J’ai aimé la quête d’identité d’Ifemelu, sa tentative de se définir, de s’observer et de ne pas toujours aimer ce qu’elle voit. J’ai aimé son évolution, aimé le fait que ses propos à la fin du roman n’auraient jamais pu être les siens au début. Il y a aussi une réelle critique de société, que ce soit pour l’hypocrisie et le racisme de l’Amérique ou que les moeurs souvent corrompues au Nigéria. Les passages en Afrique font d’ailleurs partie de mes préférés.

Bref, un roman qui dépayse et avec lequel je ne me suis pas ennuyée une seule minute. Je ne suis pas satisfaite de ma façon d’en parler mais j’ai a-do-ré.

D’autres en parlent

Aleslire (un peu déçue), Ys (j’adore son billet), Joëlle, Lilly

Bergères Guerrières – tomes 1-2 – Jonathan Garnier / Amélie Fléchais

Non mais comment résister à cette série BD jeunesse! C’est un véritable bonheur de lecture dans un monde fantasy, avec des héroïnes (et un héros) badass, qui ne s’en laissent pas conter! J’ai lu d’affilée les deux premiers tomes et j’en aurais pris encore plus.

Nous sommes donc dans un petit village au bord de l’eau. Dix ans plus tôt, les hommes sont tous partis combattre au loin et on ne les a jamais revus. Du coup, les femmes du villages se sont mobilisées et ont créé l’ordre des Bergères Guerrières, pour protéger le village. La série s’ouvre alors que Molly a 10 ans et qu’elle est initiée à ce fameux ordre, où les femmes et jeunes filles combattent à dos de bouc. Les héroïnes de Molly ne sont pas des princesses douces qui se regardent dans le miroir en attendant leur prince, loin de là. Ses idoles, ce sont les grandes combattantes de l’ordre, qui n’ont pas froid aux yeux et qui savent se battre. Son ami Liam, garçon de son état, aimerait bien en être aussi… mais voilà, c’est un ordre de filles.

À relire mon dernier paragraphe, on dirait une histoire d’acceptation et de garçon contre les filles, mais pas du tout. Ça fait partie de l’histoire, mais c’est un récit d’aventures et de quêtes. Les fillettes apprennent le métier de guerrière (en plus de garder les moutons) et vont découvrir d’autres gens, d’autres peuples. Si le premier tome nous fait découvrir le monde, on se retrouve rapidement face à un ennemi que l’on ne comprend pas réellement et qui va mettre notre ordre à l’épreuve, autant les grandes que les petites.

C’est plein d’action, d’aventures, il y a un côté merveilleux et beaucoup de rebondissements. Et la fin de ce tome 2… non mais ça va pas de nous laisser comme ça?

Les dessins sont à la fois choupi comme tout, je suis fan de la colorisation, les personnages sont expressifs, les décors ont un côté grandiose, et ça contraste joliment avec le propos de l’histoire et la teneur de l’aventure. On est immédiatement happé dans les différentes ambiances de certaines parties du récit.

Bref, j’adore. À tel point que j’avais emprunté à la bibliothèque… et que je vais certainement tenter de mettre la main sur la série, quand elle sera complète. Je VEUX que ma nièce-princesse lise ça. Je suis certaine qu’elle pourrait adorer et se reconnaître dans plusieurs des personnages. Car dans le village, tout le monde a son rôle et son importance, pas juste les guerrières. Quand je vous dis que c’est bien fait!

C’était ma BD de la semaine! Et me semble que c’est Stephie qui nous accueille. Me semble!

À moi seul bien des personnages – John Irving

John Irving et moi, c’est une histoire qui remonte à loin. En fait, je les finis toujours par les lire, mais souvent bien après leur sortie. J’avoue que mon préféré (que je refuse de relire d’ailleurs) reste toujours « Une prière pour Owen » mais entrer dans un livre d’Irving me donne à chaque fois l’impression de me retrouver en terrain connu. Du coup, je pardonne beaucoup. Je pardonne les éternels retours en arrière, les balades dans le temps pas toujours logiques, les redites et les souvenirs qui remontent encore et encore. Voire même que j’aime ça.

Ce roman nous emmène à First Sister, Vermont, une petite ville où se trouve un pensionnat de garçons et une équipe de lutte. Billy Abbott, le narrateur, y grandit et s’éveille à la sexualité alors qu’il n’a pas toujours le béguin pour les « bonnes personnes ». Sa mère l’a élevé seule et il n’a aucun souvenir de son père, parti alors qu’il était tout petit mais sa famille est toute proche. Entre le mari de sa mère (sur lequel il a un crush), son grand-père qui adore jouer les rôles féminins sur scène et sa femme germaine, son oncle qui boit un peu trop et sa tante à l’égo aussi gros que ses seins (désolée… c’est tout ce dont je me souviens d’elle). Toute la famille est impliquée dans le théâtre amateur et tout le roman est bercé par les vers de Shakespeare, ce dont je ne vais certainement pas me plaindre. Et il y a aussi miss Frost, la mystérieuse bibliothécaire.

Ceux qui ont un peu lu Irving reconnaîtront le contexte. Une petite ville, des personnages aux lubies étranges et souvent hauts en couleur, un narrateur âgé qui revient sur son passé… ça vous dit quelque chose hein! Ici, le narrateur est écrivain, il est bisexuel et dans les années 60, ce n’était pas si simple. Il est donc question d’homosexualité, de bisexualité et il y a plusieurs, plusieurs personnages trans, beaucoup, beaucoup de travestissement. Certes, je vous entends penser. Jamais trop de diversité. Mais sérieusement, ça fait beaucoup. Beaucoup de coïncidences et de personnages queer pour un si petit milieu. La réflexion sur ce sujet est certes intéressante, on se balade entre les États-Unis et l’Europe, et on passe à travers les années 80 dans le milieu queer. Cette époque me touche particulièrement et je suis et resterai toujours profondément ahurie par tous ces yeux qui se sont fermés alors que les gens mouraient les uns après les autres.

Bref, des longueurs, un propos assez politique, une réflexion sur l’identité, beaucoup de nostalgie (j’aime la nostalgie), des amitiés fortes, des obsessions, des secrets qui n’en sont pas vraiment, de la littérature et… des coïncidences. Pas mon roman préféré de l’auteur, mais un roman qui m’a fait croire à ces personnages et à leurs vies. Et ça, ça n’arrive pas à chaque lecture.

John Irving, quoi!

Je marche avec Vanessa – Kerascoët

Pour le défi lecture du Fil Rouge, il faut lire un ouvrage d’une maison d’édition québécoise par mois. En février, c’est La Pastèque et vu que, pour une fois, j’y ai pensé, j’ai choisi de lire cet album.

« Je marche avec Vanessa » est un album sans parole et terriblement universel. Une fillette voit un jour une autre petite fille se faire intimider, et ça la rend toute triste. Et elle va décider de faire quelque chose. Quelque chose de tout simple. Et c’est super beau.

C’est définitivement un album à mettre entre toutes les mains. Très accessible, très mignon, mais qui parle d’un sujet qui compte et dont on doit parler aux petits. Les pistes de réflexion proposées permettent d’avoir des vraies discussions avec les cocos (j’ai fait pleurer ma sensiblounette de nièce quand j’ai lui ai demandé comment elle se sentirait, elle, si elle se faisait intimider), qui font souvent preuve de plus d’introspection que nous ne l’aurions cru de prime abord. Ce qu’ils peuvent avoir comme idées!

Le dessin me plait beaucoup, le jeu de couleurs avec la luminosité et les émotions des personnages et très bien vue et assez facile à comprendre pour les enfants. Bref, à mettre entre toutes les mains! Jamais trop tôt pour parler d’intimidation.

Le grand Meaulnes – Alain-Fournier

Je n’avais jamais lu ce classique. J’étais certaine de l’avoir lu, sauf que non. Et quelle découverte. J’ai adoré cette histoire, adoré l’ambiance, l’atmosphère onirique, la passion adolescente qui va jeter une nouvelle lumière sur toute une vie. Un coup de coeur pour moi.

Le narrateur est François Seurel mais il n’est pas le héros de cette histoire.  C’est un adolescent de 15 ans, fils de l’instituteur, calme, posé, un peu à l’écart. Il sera l’ami d’Augustin Meaulnes, le fameux grand Meaulnes, qui va le fasciner. Il va l’accompagner dans sa quête folle, presque la prendre pour sienne.

Un jour, Augustin Meaulnes va se perdre et tomber dans un mystérieux domaine qui se prépare pour les noces. C’est la fête, les enfants sont rois, les fiancés vont bientôt arriver. Le grand Meaulnes ne sait trop s’il est dans un rêve ou dans la réalité et c’est à ce moment qu’il croise Yvonne de Galais, jeune femme qu’il n’aura cesse de retrouver.

C’est un roman envoûtant, empreint d’idéalisme, à la poursuite du rêve entrevu, de la fameuse inaccessible étoile. C’est aussi la fin de l’adolescence, la désillusion d’une quête chimérique, presque. Il est empreint d’une profonde mélancolie et d’une certaine nostalgie de ce temps où tout était imaginable, de l’époque de tous les possibles. C’est tout en retenue, rempli de pudeur, et c’est magnifique.

Ce roman a été publié en 1913, un an avant la mort de l’auteur au champ de bataille lors de la première guerre mondiale. Le fait de n’avoir qu’un roman de sa plume est infiniment triste car celui-ci m’a terriblement émue.

Un coup de coeur, comme je le disais.

Entre ici et ailleurs – Vanyda

De Vanyda, j’avais beaucoup aimé « Un petit goût de noisette« . Du coup, quand j’ai réalisé que ce roman graphique traitait des origine et qu’il avait beaucoup plu, je l’ai aussitôt emprunté à la bibliothèque. Et, aucun suspense, j’ai beaucoup, beaucoup aimé ce roman, qui fait réfléchir sur la filiation, la culture et ce qu’elles représentent pour une personne qui se cherche.

Nous rencontrons donc Coralie, 28 ans. Elle est née d’un père laotien et d’une mère française, s’est séparée il y a quelques mois, vient de déménager dans un nouvel appartement et a perdu le contrôle de son quotidien. Elle a un boulot qu’elle aime bien, des collègues agréables, mais est distraite et un peu à côté de la plaque. Puis, un jour, je ne vous dis pas comment parce que j’ai trouvé ça plutôt drôle, elle va découvrir la capoeira, rencontrer des gens et réfléchir sur ses origines asiatiques. À travers un sport brésilien. Je sais. Mais si vous lisez le roman graphique, vous allez tout comprendre.

J’aime beaucoup le trait de l’auteure, en noir et blanc, pour ses détails et ses visages expressifs. C’est à la fois réaliste et contemplatif, surtout pour certaines planches qui nous plongent dans la tête du personnage principal.

Une BD intimiste, sur la recherche de soi et de ses origines et de leur importance, qui ouvre aussi sur des thèmes d’actualité et qui traite, en arrière plan, du racisme ordinaire et de la difficulté de discuter de ces sujets. Quels mots utiliser, comment les aborder… bref, il n’y a pas de bonne réponse car les ressentis sont variés, mais ça permet d’en discuter et d’ouvrir les yeux sur ces sujets, sans se faire faire quelque morale que ce soit. Ce n’est pas toujours politically correct et ça fait du bien.

Je conseille. Et avec enthousiasme, en plus. C’était ma BD de la semaine… et c’est chez Noukette cette semaine!

Nous avons toujours habité le château – Shirley Jackson

Le pourquoi du comment

Nous mais vous avez vu cette édition?  Comment on résiste à cette édition d’un presque-classique? Parce que oui, pour moi, un roman publié en 1962, c’est devenu classique. 50 ans, c’est une bonne balise, non?

C’est quoi, cette histoire?

Il est difficile de parler de ce roman sans trop en dire. Pour moi, il vaut mieux le découvrir petit à petit, sans trop savoir au début, et de se laisser embarquer dans l’histoire, de s’attacher aux personnages sans vraiment comprendre. Un vrai cas de « ne pas lire la 4e de couverture ».  C’est un roman à l’atmosphère sombre et angoissante. Vous savez, l’un de ces romans où le fait de « savoir » ajoute à l’ambiance anxiogène? Le roman s’ouvre sur Mary Katherine Blackwood (Merricat, pour les intimes), seul lien de la famille Blackwood avec l’extérieur, et dont la voix nous accompagnera tout au long de l’histoire. La famille est ostracisée et haïe ouvertement, Merricat doit faire face à de l’hostilité franche, des menaces et une comptine a même été composée en leur (dés)honneur. 

Dans la maison Blackwood, en plus de Merricat, sauvageonne adepte de magie protectrice, un peu sociopathe et remplie de superstitions, il y a Constance, la soeur aînée, agoraphobe et naïve, qui n’a pas mis les pieds en dehors du domaine depuis 6 ans. Il y a aussi l’oncle Julian, confiné à un fauteuil roulant, dont l’esprit est pris dans une spirale qui passe en boucle les mêmes évènements, la même journée. Lorsqu’un livre cloué à un arbre tombe, malgré ses précautions, Merricat réalise qu’un changement approche…

Et moi, j’en pense quoi?

Ceux qui me suivent le savent, je suis la number one des peureuses.  Mais vraiment.  Sachez donc que ce roman, aussi « soft » soit-il, m’a empêchée de dormir et m’a fait faire des cauchemars. Oui, je sais, défense de rire. Ceci dit, j’ai adoré et je sens que ce sera un roman marquant dans mon année de lectrice. J’ai toujours un faible pour les narrateurs qui ne sont aucunement fiables et les histoires déformées par leurs yeux. Je me suis terriblement attachée aux trois habitants du fameux « château-pas-château », malgré ce qu’on sait, et surtout malgré ce dont on se doute. Et quelle entrée en matière.  J’adore, ce premier chapitre!

C’est un roman court, l’écriture est simple, souvent presque oralisée, mais la voix de Merricat est terriblement vibrante et nous entraîne dans son univers, entre le réel et l’imaginaire. Certaines scènes sont d’une terrible violence et le thème de l’ostracisation, de la peur de la différence et du rejet de l’autre dans les petits villages américains est poussé à son maximum. 

Un roman déroutant, qui m’a vraiment embarquée. 

Et non, je ne peux pas vous raconter mon cauchemar, aussi burlesque soit-il… ça vous en dirait trop!