Patients zéro – Histoires inversées de la médecine – Luc Perino

Le comment du pourquoi

Je suis une grande curieuse et l’histoire de la médecine est remplie de gens qui, à leur façon, ont contribué à faire avancer les connaissances. De fois sans nécessairement avoir donné leur avis, mais à une certaine époque (une longue certaine époque), c’était un détaillounet. Du coup, lire leurs histoires m’a tout de suite tentée. Et je l’ai fait.

Mon avis

Entendons-nous tout de suite, j’ai un background dans la santé. Du coup, je connaissais plusieurs de ces histoires, certaines pas mal plus en profondeur que ce qui est exposé ici. J’espérais par contre vraiment que la « parole » serait donné aux gens, aux patients, à leur histoire personnelle. C’est le cas pour certains et j’étais quand même bien partie. L’auteur nuance certaines légendes et les histoires sont parfois étonnantes. Ici, on parle de rage, d’aphasie, de dyspraxie verbale développementale, d’un homme pratiquement « sans » cerveau, d’étranges mutations ou d’amnésie antérograde. C’est varié, les chapitres sont courts et très accessibles et, avouons-le, ça se lit tout seul. C’est que ces histoires folles sont « intéressantes ». Oui, curiosité morbide. Je sais.

Premiers doutes quand on tombe sur les explications scientifiques de sujets que je connais bien. C’est souvent très près de la réalité (exemple: distinction entre parole et langage), mais pas tout à fait. Du coup, ça me permet de douter un peu sur le reste, sur ce que je ne connais pas vraiment. Même si l’auteur est médecin. Et de fait, les sources bibliographiques sont assez minces… mais bon, ne pinaillons pas. Ce n’est pas un article scientifique.

Là où je bug réellement, par contre, c’est que l’auteur a tendance à profiter de ces histoires pour faire passer ses propres messages et ses propres opinions sur certaines questions. Certes, il y a des dérives médicales à dénoncer (on pourrait en parler longtemps… mais ce n’est pas le sujet) mais ici, c’est généralisé et souvent sensationnaliste. Et quand tu n’es pas dans le domaine, tu peux le croire. Comme si TOUS les neurologues passaient directement à l’IRM sans faire un examen neurologique. Voyons donc. Il tend aussi à exposer des théories (sur lesquelles je n’ai pas d’opinion faute de connaissances nécessaires) comme des faits avérés. Et d’autre fois, c’est très capillotracté. Comment un enfant né avec un os pénien peut mener à la conclusion que nous devrions « considérer l’assistance médicale à la procréation après 40 ans avec plus de prudence »? Belle finale pour un essai sur les « patients ».

Bref, je ne truste pas.

Malgré l’aspect distrayant de l’essai et la bonne volonté de départ. Il y a encore beaucoup trop de « médecin » là-dedans.

Cette maison – David Mitchell

Le comment du pourquoi

J’avais envie de découvrir David Mitchell depuis un moment. C’est cette ma-gni-fi-que couverture de chez Alto qui m’a donné envie de choisir celui-ci. Ça et le fait qu’il était assez court et que ça me donnait une idée de l’univers de l’auteur sans me plonger dans une énorme brique de 600 pages. Des fois, c’est pratique.

De quoi ça parle

Slade House est une magnifique maison avec jardin, située dans une ruelle en plein milieu d’un quartier ouvrier. Au coin de la rue, un pub, le Renart et Mâtins. L’histoire commence en 1979, alors que Rita Bishop y arrive avec son fils Nathan pour y faire un concert. Nathan est un enfant précoce, probablement pas neurotypique, qui a du mal avec les gens qui se sent extraterrestre. Lorsqu’il fait la connaissance de Jonah, le fils de la maison et qu’ils semblent s’entendre à merveille, c’est presque trop beau pour être vrai. Sauf qu’il semble être encore plus difficile de quitter la demeure que d’en trouver la porte…

Mon avis

En premier lieu : lire ce roman en fin de soirée, à la lueur des chandelles alors qu’il y a une pluie torrentielle qui frappe à la fenêtre, ce n’était pas l’idée du siècle. Ce n’est pas hyyyper épeurant, mais par définition, je suis vraiment peureuse. Du coup, ma nuit a été… agitée. Et relativement peu efficace. Bref, bienvenue dans ma vie!

« Cette maison » nous offre une atmosphère sombre et glaçante. Nous rencontrons tour à tour plusieurs personnages en plus de Nathan. Un policier sûr de lui, une jeune fille ronde qui ne s’aime pas, ainsi que quelques autres. Chaque personnage a une voix qui lui est propre et en quelques pages, l’auteur réussit à les rendre réels et humains. Pas toujours aimables, mais leur personnalité transparait et nous donne l’impression de les connaître. C’est bien écrit, l’abiance est angoissante et hyper bien maîtrisée et je n’ai pas réussi à le lâcher. Cet auteur, il FAUT que j’en lise davantage de lui.

Mon bémol : j’ai trouvé les révélations trop complètes, trop précises, ce qui rend les choses moins mystérieuses. J’aurais préféré qu’on me fasse davantage confiance en tant que lectrice et qu’on laisse quelques zones d’ombre. Je dois avouer par contre que ce genre de révélation très complète n’est vraiment pas mon procédé préféré.

Une bonne lecture, juste assez stressante, une maison qui fascine… et je ne remercie pas David Mitchell pour la nuit blanche!

Tom Thomson – Esquisses d’un printemps – Sandrine Revel

Le comment du pourquoi

Tom Thomson est un peintre que j’aime beaucoup. Précurseur du groupe des sept, j’aime beaucoup sa façon de représenter la nature et les grands espaces de l’Ontario.

Pourquoi maintenant? Réponse assez simple. Je devais le ramener à la bibliothèque… hier. Donc, fallait. Ah oui, je précise : je l’ai emprunté AVANT la pandémie. Quand je dis que je suis miss dernière minute !

De quoi ça parle

Tom Thomson est une figure assez énigmatique de la peinture canadienne. Mort à 39 ans, retrouvé dans un lac du parc Algonquin, amoureux de la nature et garde forestier, les circonstances de son décès sont nébuleuses. Que s’est-il vraiment passé en 1917?

Mon avis

J’aime beaucoup l’oeuvre de Tom Thomson. Ses natures me touchent toujours. Ici, Sandrine Revel choisit un récit en plusieurs temps : moments de vie du peintre, derniers mois et flash forward dans les années 50 où des gens tentent de résoudre le mystère de sa mort. Cette construction me plait toujours et ça a encore une fois fonctionné ici. Nous rencontrons un homme dont la famille n’approuve pas toujours ses choix, amoureux des bois et qui peut passer des semaines dans la forêt pour observer la lumière sur les arbres dans différentes conditions. Et il peint, envers et contre tous.

J’aime beaucoup cette BD, dans les tons neutres, avec parfois quelques touches de couleurs vives. On est quand même assez loin de la vibrance de Thomson et j’ai bien aimé la réinterprétation de certaines de ses toiles, dans un style un peu différent. Le choix graphique ajoute au mystère et il m’a beaucoup plu. C’est que c’est beau!

Ok, j’admets que la partie en 1950, avec ceux qui cherchent dans le parc à résoudre le mystère de la mort du peintre. J’ai eu du mal à comprendre POURQUOI cette histoire de déplacement fictif de corps… mais bref. Cette partie m’a moins passionnée. Ceci dit, ça ne m’a pas empêchée de beaucoup aimer la BD, surtout pour le graphisme et la découverte. Bon, la totale non-physionomiste que je suis a parfois eu du mal à distinguer les personnages, mais c’est un détail.

Un peintre à découvrir, une atmosphère très réussie, un peu gloomy et une autrice que je suivrai. J’avais d’ailleurs beaucoup (ok, un peu plus) aimé Glenn Gould, de la même autrice, que je conseille également!

C’était ma BD de la semaine!

Cette semaine chez Moka

La forêt sombre (Le problème à trois corps #2) – Liu Cixin

Le comment du pourquoi

J’ai TRIPPÉ sur le premier tome. Il m’a virée de bord et m’a redonné envie de lire de la SF. Et comme il y a beaucoup de personnages, beaucoup de noms chinois, et que la fin m’avait vraiment intriguée, j’ai tout de suite enchaîné sur le tome 2.

De quoi ça parle (attention, ça spoile le premier…)

Nous sommes à quatre siècles de la fin du monde. Quatre siècles avant l’invasion de la flotte trisolarienne. La technologie terrienne est bloquée par les intellectrons et ceux-ci rapportent en temps réel toutes les conversations terriennes. Un nouveau projet nait alors : le projet colmateurs. Quatre personnes auront toutes les ressources disponibles pour monter un projet secret susceptible de confondre les trisolariens qui ne peuvent lire entre les lignes et ne peuvent comprendre la notion de mensonge et de dissimulation. Nous suivrons donc ces quatre hommes mais surtout celui qui vient de Chine, Luo Ji, scientifique sans trop d’envergure et anonyme, qui n’en demandait pas tant…

Mon avis

Ok, j’avoue. Ce tome 2 n’a pas eu pour moi le même effet que le tome 1, dans lequel je suis entrée les yeux fermée et qui m’a surprise à la fois par son thème, son contexte et son déroulement. Le début a été pour moi particulièrement difficile. En effet, le colmateur Luo Ji ne fait absolument rien vu que pour lui, c’est perdu d’avance (j’avoue que ça m’a plu au début)… à part rêver à une espèce de femme idéale. Et comment dire… c’est interminable et la dite femme est, est… Bref, mettons que la féministe que je suis a cringé rare. Ça aurait pu être moins long. Vraiment moins long. C’était donc la partie négative de cette chronique parce que j’ai totalement adhéré au reste.

Nous allons nous balader dans le temps dans ce tome 2 et explorer un futur possible. C’est encore une fois très scientifique, très Hard SF. Nous sommes un peu dans la peau d’un citoyen qui observe une stratégie qu’il ne comprend pas nécessairement. Ce concept de fin du monde dans 400 ans m’a amenée à réfléchir à la façon de réagir de chacun, aux changements philosophiques et politiques qui pourraient arriver et c’est ce qui m’a passionnée. J’ai été tenue en haleine, j’ai vécu des hauts et des bas et j’ai adoré la vision du monde futuriste proposée. J’aurais aimé mieux comprendre certains concepts (celui de famille, notamment), rencontrer davantage de nouveaux humains, explorer leur psyché et leur façon de penser.

Ceci dit, j’ai aimé les nombreux rebondissements mais surtout les visions brèves mais distinctes de la situation par le biais de nombreux personnages, militaires ou civils, qui vivent dans un monde où l’avenir est limité et où l’espoir se fait rare. Ça donne un contenu riche, complexe et rempli de points de vue divers et variés. Encore une fois, plusieurs réflexions ressortent du roman. Sociologiques, philosophiques, morales… que vaut la vie d’un individu (ou d’un groupe d’individus) face à la survie d’un monde? L’humanité et sa civilisation mérite-t-elle tous ces efforts? Quels sont les effets de la perte d’espoir à long terme sur le quotidien?

Bref, un récit fascinant, dont la fin m’a étrangement satisfaite. J’aurais tendance à attendre un peu pour le tome trois, question de me reposer un peu de toute cette anxiété sauf que je me connais, je risque d’oublier le nom des personnages! Du coup, ce sera pour bientôt!

Ma pile à lire – Québec en novembre 2020

Bon, croyez-vous une demi-seconce que je vais VRAIMENT lire tout ça? Alors que je n’ai lu que genre… 6 titres depuis le début d’octobre? On y croit, n’est-ce pas!

Et vous, de quoi avez-vous choisi de nous parler en novembre? Curieuse je suis. La page de Récapitulatif sera par thème cette année et en ligne le 1e novembre!

On jase de toi – Noir silence   Un livre sorti en 2020.

  • L’avenir – Catherine Leroux
  • École pour filles – Arianne Lessard
  • J’ai appris ça au cirque – Baron Marc-André Lévesque
  • La dernière fois qu’on l’a vu, c’est au Perrette – Claude Champagne
  • Le lièvre d’Amérique – Mireille Gagné

L’amérique pleure – Les cowboys fringants   Un roman engagé.

  • Le Mammouth – Pierre Samson
  • Avant l’après – Frédérick Lavoie
  • Ma tête, mon amie, mon ennemie – Florence Meney/

Grand champion – Les trois accords   Un livre ayant gagné un prix littéraire.

  • Les petits garçons – Sophie Bédard
  • Renaissance – Valérie Jessica Laporte

Arnaq – Elisapie  Un roman d’un auteur autochtone.

  • N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures – Natasha Kanapé Fontaine
  • Un thé dans la toundra – Joséphine Bacon

Tu m’aimes-tu – Richard Desjardins  Un roman où il y a de l’amour.

  • Le goût de l’élégance – Johanne Seymour
  • Nirliit – Julianna Léveillée-Trudel

Martin d’la chasse galerie – La bottine souriante   Un roman SFFF

  • La balance et le sablier – Elisabeth Vonarburg
  • Tyranaël 3 – Elisabeth Vonarburg
  • Une fille pas trop poussiéreuse – Matthieu Simard

Fracture du crâne – Ariane Moffat  Un roman issu de la diversité ou dans lequel on parle de la diversité.

  • La grosse laide – Marie-Noëlle Hébert
  • Pourquoi pas – Mylène Viens

Plus tôt – Alexandra Stréliski Un classique québécois ou un futur classique selon vous.

  • En pièces détachées – Michel Tremblay
  • Le Saint-Elias – Jacques Ferron

Place de la République – Coeur de pirate  Un roman qui a traversé l’océan.

  • Les grandes marées – Jacques Poulin
  • Ténèbre – Paul Kawczak

Nos joies répétitives – Pierre Lapointe   Un roman qui fait partie d’une série.

  • Fanny Cloutier – tomes 2-3
  • Mystères à l’école – 2 – dirigé par Richard Migneault
  • Sarah-Lou détective privée – Audrée Archambault

J’aurais voulu être un artiste   Un roman dans lequel il y a de l’art.

  • Bon chien – Sarah Desrosiers
  • La raison vient à Carolus – David Turgeon
  • Gens du milieu – Charles-Philippe Laperrière
  • Automne rouge – Côté/Vallerand

Dans la nuit qui tombe – Karim Ouellet  Un polar/thriller/roman d’horreur/roman noir.

  • Les cousines vampires – Alexandre Fontaine Rousseau
  • Still life – Louise Penny

Tit-Cul – Les cowboys fringants  Un roman ou un album ou une BD jeunesse.

  • Et j’ai crié sur les murs de ta ville – Maé Sénécal
  • Olga – Elise Gravel
  • Les livres de madame Sacoche – Delaunois / Merola
  • Le petit musicien – Gilles Tibo

Balade à Toronto – Jean Leloup  Un livre d’un auteur canadien, mais pas québécois.

  • Croc Fendu – Tanya Tagaq
  • Birdie – Tracey Lindberg

N’importe quoi – Éric Lapointe  Le titre dit tout.

  • Ceci n’est pas une histoire de dragons – Mathieu Handfield
  • La mort de Roi – Gabrielle Lisa Collard
  • Faire les sucres – Fanny Britt
  • L’autre Jeanne – Marie Larocque

Alors, qui participe?

Campusland – Scott Johnson

Le comment du pourquoi

Je ne sais pas pourquoi, mais je ne suis pas capable de résister à un roman qui se passe dans une école. Donc, je n’ai pas résisté à celui-là, mais je pensais plutôt que c’était une Dark Academia. Moi et ma manie de ne pas lire les quatrièmes.

De quoi ça parle

Nous sommes à Devon, collège progressiste de la nouvelle Angleterre, librement basé sur l’université de Yale, aux États-Unis. Eph Russel est professeur de littérature du 19e, il est chargé de cours et voudrait bien un poste d’enseignant. Il vient du fin fond de l’Alabama et il adore l’ouverture et le côté grandiose de son milieu de travail et dans sa tête à lui, il a déjà fait un grand pas par rapport à son éducation.

Avertissement : nous sommes dans une caricature, un pastiche, une satire. Le débâcle va commencer quand une jeune militante réagit dans une classe au syllabus qui est « very white ». Il va – maladroitement – réagir et tout le groupe dont il fait partie va débarquer en classe en lisant des parties de Huckleberry finn où figurent le mot n***. Et à partir de là, rien ne va plus.

Il y a aussi Lulu, jeune « it » girl détestable qui veut son moment de gloire et qui est prête à tout pour l’obtenir, quitte à utiliser tous les combats du moment, et s’en suivra une année universitaire ma foi fort particulière.

Mon avis

Malaise. Profond malaise.

C’est la première chose que j’ai à dire à propos de ce roman. C’est une totale caricature des dérives de la pureté militante mais aussi des fraternités et de la lâcheté des administrations. Tout y passe. Mais surtout le militantisme. Et là, je ne sais plus du tout si c’est vraiment une satire ou si c’est vraiment ce que pense l’auteur. Parce que s’il y a certes des choses qui sonnent vrai et où c’est clairement poussé à l’extrême, pour d’autres, j’étais plutôt d’accord avec les militants et j’étais un peu insultée qu’on en rie. Assez pour que je referme le livre et que je prenne le temps d’y réfléchir. Bref, malaise. Et je ne suis pas particulièrement « woke ». Je suis dans la quarantaine, consciente de mon privilège, et j’essaie de suivre les changements de vision sociale mais j’en ai encore du chemin à faire. Donc si vous êtes hyper sensibles, ne lisez pas ce livre. Sérieux, vous allez être enragés.

Ce livre est clairement destiné aux adultes, qui peuvent se faire leur propre idée et juger par eux-mêmes ce qui est risible ou ce qui ne l’est pas. De plus, on rit de tout et ici, tout le monde est un peu con. Les militants sont tous extrémistes et là pour le pouvoir et j’aurais aimé voir des gens qui sont là pour les vraies raisons. Certaines actions de Lulu sont méprisables et enlèvent de la crédibilité aux véritables victimes. Et ça dérange. Vraiment. Bon, c’est call out, à une occasion. Mais quand même, ça représente le 0,1% des accusations de viol. Et le discours ressemble à la défense de plusieurs… bref.

Je n’ai quand même pas détesté parce que, j’avoue, la finale m’a beaucoup fait rire tellement c’était du grand n’importe quoi. Et je me suis sentie coupable de rire vu que clairement, ce roman va blesser des gens. Rire de tout ne semble plus être possible et c’est vrai que la société a le jugement facile, moi y compris. Mais bon, malaise quand même.

Est-ce que ça parait que je ne sais pas trop quoi en dire? La fin est bof mais logique en fonction du personnage principal – souvent niais – auquel nous avons affaire. Le pire, c’est que si j’avais trouvé ça juste drôle et que je m’étais sentie d’accord avec le propos, je n’aurais JAMAIS osé le dire publiquement. Genre que j’étais contente de ne pas être siiiiii rétrograde que ça.

Les Rigoles – Brecht Evens

Le comment du pourquoi

J’avais repéré un autre titre de l’auteur dans l’un de nos rendez-vous hebdomadaires et le graphisme m’avait fait envie, c’était fou! À ma bibliothèque, il y avait celui-ci. Alors j’ai pris, sans savoir de quoi il serait question. On ne se refait pas.

De quoi ça parle

Une nuit d’été, une ville endiablée, des héros qui se croisent. Oiseaux de nuit, ils sont au tournant, tous et chacun d’entre eux. Un regard particulier et désabusés sur ces nuits sans fin.

Mon avis

Ce roman graphique est un vrai bonheur pour les yeux. Une oeuvre d’art. Bon, je ne suis pas certaine d’avoir vraiment tout compris, mais j’en ai pris plein les pupilles!

Sincèrement, l’univers graphique est fabuleux. Certaines planches sont remplies de détails du quotidien, du banal, mais qui nous font nous plonger immédiatement dans une atmosphère un peu glauque, un peu désabusée, et ce malgré les couleurs et les lumières. Le vide est palpable derrière les détails et certaines situations sont terriblement tristes.

Nous suivons plusieurs personnages qui vont fréquenter les mêmes endroits le temps d’une nuit. Tous sont des noctembules, tous sont à un tournant et sont un peu désespérés. On comprend petit à petit ce qui les fait souffrir, au détour de conversations qui semblent mondaines, de celles qu’on entend à tous les coins de rue.

Ils sont par moment touchants, mais la plupart du temps, on aurait envie de les secouer. Ils vont de mauvaise décision en mauvaise décision, sont rattrapés par leurs passés. Ça va un peu partout, c’est éclaté et je me suis un peu perdue. Je ne suis pas certaine d’avoir bien compris les tenants et aboutissants ni compris le propos. J’ai du mal à saisir l’intention de l’auteur, ni bien lié les fils… mais au final, on se dit que ce n’est pas bien grave.

Parce que c’était beau.

Atmore, Alabama – Alexandre Civico

Le comment du pourquoi

C’est la faute à Séverine, de Ilestbiencelivre. Aucune autre raison. Elle est coupable. C’est sa faute.

De quoi ça parle

Il était une fois un professeur qui porte en lui un désespoir sans fond. Il arrive dans la petite ville d’Atmore, Alabama, on ne sait trop pourquoi et dans ces 30 et quelques jours, nous allons le suivre dans ses déambulations et ses rencontres avec trois femmes engluées dans ce trou-du-c… du monde.

Mon avis

Quel roman. Il est court, sombre, profondément glauque et déroutant. Mais c’est aussi une parfaite description de cette Amérique très loin du rêve américain. À Atmore, il y a un énorme casino. Il y a aussi une prison, une grande prison avec un couloir de la mort. Un portrait aussi de la douleur, de la souffrance et du désespoir, celui qui dépasse ce qui peut être exprimé. Nous ne saurons presque rien de cet homme, sauf qu’il a vécu l’enfer.

La ville est un personnage en soi. Elle représente pour moi tout ce que que l’Amérique profonde a de malsain. Racisme, intolérance, immigration, crime, préjugés et inactivité… tout ça dans sa forme la plus « ordinaire » et insidieuse. On ressent que l’état d’esprit de notre personnage principal est parfaitement en phase avec l’atmosphère pesante de la petite ville et les liens particuliers qu’il tissera avec les trois personnages féminins sont à la fois difficiles à saisir et évidents. Son désespoir à lui fait écho au leur… et le dépasse peut-être.

Nous ne saurons trop ce qui est arrivé en France. Par bribes, trois récits s’entrelacent et nous permettent d’avoir une petite idée. Une mélopée joue en sourdine vers cet homme irrésistiblement attiré vers la prison et la mort. C’est sombre, l’atmosphère est une vraie réussite et avec la fin, le lecteur prend réellement part à l’histoire.

Aurais-je aimé quelques détails de plus? Tout de suite après ma lecture, j’aurais dit oui. Mais maintenant, après y avoir réfléchi BEAUCOUP, je dirais non. Je ne saurai pas. Mais l’âme humaine est-elle assez simple pour que tout soit limpide, surtout lorsqu’elle a cette noirceur?

À découvrir, assurément. Pour le voyage. Au complet.

Jasette « littérature autochtone » avec Michel Jean

Cette année, pour la catégorie correspondant à la chanson « Arnaq » d’Elisapie, on va parler de littérature autochtone pour Québec en novembre. Michel Jean, auteur et lui-même Innu de Mashteuiatch a accepté une jasette avec moi où on parle de littérature autochtone et ce qu’elle peut représenter ici au Québec. 

Bien entendu, il nous fait quelques recommandations… et encore une fois, je suis preneuse de davantage d’idées, d’auteurs et de textes à découvrir. Y en a-t-il là-dedans que vous avez lus? 

Des oeillets pour Antigone – Charlotte Bousquet

Le comment du pourquoi

J’avais bien aimé découvrir Charlotte Bousquet dans « Là où tombent les anges« , qui se passait pendant la première guerre mondiale. Du coup, quand j’ai vu un roman jeunesse avec le mot « Antigone » dedans, je me suis dit que ce serait parfait pour la catégorie du pumpkin autumn challenge qui rapportait aux mythes. J’ai oublié le titre de la catégorie, of course… sinon ce ne serait pas drôle. Et je me souvient que Mylène avait adoré. Alors j’ai lu.

De quoi ça parle

Nous sommes en 1991 et Luz tombe sur le journal de sa soeur Sabine, décédée 5 ans auparant. Elle va aussi retrouver un mystérieux médaillon ayant appartenu à sa tante Alma, décédée en 1971, alors qu’elle était une jeune adulte, au Portugal, quelques années avant la révolution des oeillets ayant mené à la chute de l’Estado Novo de Salazar. Trois époques, trois femmes qui résistent au système et qui ne demandent qu’à être fidèles à elles-mêmes. Ce roman, à travers des flashbacks et la lecture du journal intime de Sabine, nous racontera leurs histoires ainsi que celle de leur famille, dans des temps bouleversés.

Mon avis

Ce roman a été pour moi une très bonne surprise, avec, en arrière-plan, des éléments du mythe d’Antigone, sans être une réelle réécriture. Les trois femmes savent ce qu’elles veulent et sont prêtes à aller jusqu’au bout de leurs idées, envers et contre tous, autant les gens que leurs époques. Luz a des relations compliquées avec sa famille et son ancre est son meilleur ami Julien, malade du sida. Au début des années 90. Inutile de préciser que ce n’est pas facile à vivre pour lui.

J’ai beaucoup aimé cette histoire de famille située dans un moment et un endroit que je connais somme toute peu. J’ai beaucoup aimé découvrir ce moment de l’histoire du Portugal, alors que les campagnes étaient surveillées et où la délation faisait rage. Le grand-père, salazariste convaincu, a été laissé derrière il y a longtemps alors que le père de l’héroïne a fui en France il y a longtemps. Quand Luz va décider de partir sur les routes, elle ne sait pas ce qui l’attend.

Entre le roman classique et le réalisme magique, ce roman m’a plongée dans les années de mon adolescence, avec de nombreuses références à la musiques et aux icônes de l’époque. La relation d’amitié en tre Julien et Luz m’a beaucoup touchée et même Sabine, avec ses commentaires souvent désobligeants, devient émouvante quand elle sent qu’elle perd ses repères et qu’elle ne comprend plus ce qui lui arrive. Bien entendu, on voit les choses venir, mais sérieusement, ça ne m’a pas dérangée plus que ça. Faut dire que j’ai l’habitude.

C’est doux-amer, ça parle d’amitié, de choix et d’autodétermination. Un voyage initiatique où nos héros en apprendront certes sur le passé mais aussi sur eux-mêmes.

Très belle découverte.