Tout ceux que je connais ont aimé ce roman. En tant que grande curieuse, j’ai donc voulu me faire mon propre avis, avec un peu d’appréhension, je l’avoue. En effet, quand il s’agit des mémoires de quelqu’un, c’est toujours un peu délicat au cas où on n’aime pas. Bon, cette précaution était seulement plus ou moins nécessaire, vu que j’ai beaucoup aimé… et beaucoup réfléchi.
De quoi ça parle
Un jour, alors qu’elle était enfant, les parents de la petite Caroline lui ont dit qu’ils partaient, qu’ils quittaient le Chili pour un lointain pays, le Canada. Elle ne sait pas trop pourquoi mais la petite fille qu’elle est va devoir passer à travers la vie de réfugiée et définir qui elle est dans un monde où elle a perdu tous ses repères.
Mon avis
Cet ouvrage nous permet de passer de l’autre côté du miroir et ainsi mieux comprendre l’arrivée au Canada de gens qui ont dû tout laisser derrière eux, non seulement leurs biens matériels mais leur emploi et leur statut social. Les parents de la fillette ont quitté la dictature de Pinochet et arrivent ici en se retrouvant devant rien. Sauf que Caroline ne sait pas vraiment ce qui se passe et vit plutôt sa vie d’enfant, mais loin de tout ce qu’elle connaît. Et comme la fillette veut plaire, veut bien faire, elle va se conformer au moule canadien, à ce qu’on attend d’elle. Être comme ces fillettes toutes pareilles qui sont à son école et qui ont toutes le même nom.
C’est un récit qu’on entend moins souvent que celui-ci. En effet, malgré les mesures mises en place par le pays où arrivent les gens, il demeure que les rapports de force demeurent, même quand ils ne sont pas toujours volontaires. Les parties du récit qui parlent de sa mère sont bouleversants car celle-ci fait des ménages – beaucoup de ménages – pour parvenir à boucler les fins de mois et permettre à sa fille d’avoir le meilleur avenir possible. Et ça fait réfléchir car on réalise l’insuffisance des programmes et des mesures pour permettre aux réfugiés de se réaliser pleinement tout en comprenant que ce n’est pas si simple. Bref, impossible de ne pas se questionner.
Ceci dit, la construction de Caroline s’effectue en reniant une partie de ce qu’elle est et qu’elle devra reconquérir petit à petit, avec des émotions conflictuelles. Jusqu’où doit-on aller pour s’intégrer dans un nouveau milieu? Je crois que c’est une question qui rejoint tout le monde et qui est magnifiée par le contexte d’immigration. C’est un récit émouvant, sensible, qui rend le lecteur profondément inconfortable et ça fait du bien d’être bousculé.
Ceci dit, la voix d’enfant est très mature pour 7-8 ans. J’avais l’impression d’un adulte qui réinterprétait ses souvenirs d’enfant alors qu’on nous disait qu’elle avait « tout de suite su » ou « réalisé à l’instant ». J’ai souvent ce problème avec les voix d’enfant. Toutefois, qui suis-je pour juger des mémoires et de la perception de l’autrice vu qu’elle nous raconte son vécu?
À tenter, donc. Pour voir les choses autrement.