J’ai toujours hâte de lire les romans de Kev Lambert car non seulement il s’agit pour moi des plumes les plus marquantes de sa génération, mais on ne sait jamais sur quoi on va tomber. Ici, nous avons d’une histoire d’enfance sur fond de réveillon de Noël et de partys de famille. Parfait pour lire au début des vacances de Noël.
De quoi ça parle
2004. Zoey, 8 ans, va vivre son premier Noël depuis la séparation de ses parents. Il ne se sent pas bien dans sa peau, voudrait jouer avec des jouets dits « de fille » et n’est pas toujours bien traité à l’école. Pour Noël, il va dans la famille de son père au Lac-St-Jean où il ne se sent pas à sa place mais aussi où il y a sa cousine préférée, Emie-Anne, celle qui ose tout. Tous les deux vont partir dans un monde imaginaire où il devront sauver un mystérieux personnage masqué
Mon avis
Il y a toujours quelque chose dans la plume de Kev Lambert qui vient me chercher. Ici, nous nous éloignons du style plus formel de « Que notre joie demeure » mais c’est toujours aussi bien fait. Défitivement, il sait écrire. Je suis prête à lire n’importe quoi de cet auteur. Ici, nous sommes dans un conte un peu surnaturel, qui fait parfois pense à Ça de King par sa façon de parler des traumatismes de l’enfance, avec un brin de Zelda et des références à toutes ces portes secrètes qu’on ne trouve jamais. Sauf qu’ici, les deux enfants vont la trouver.
Pour apprécier, il ne faut pas avoir peur du côté « conte » et des métaphores qui vont avec. Pour ma part, j’adore les voix d’enfants, surtout quand elles sont dérangeantes. Emie-Anne l’est presque autant qu’une certaine Bérénice de l’oeuvre de Réjean Ducharme (vacherie de vacherie). Elle est née dans un autre pays et se sent étrangère malgré tous les efforts de sa mère pour éviter que ça se produise. Mère qu’elle méprise ouvertement. Pour Zoey, Emie-Anne est fabuleuse, extravertie alors qu’il préfère rentrer dans coquille. Et lors de cette soirée de Noël, ils vont se trouver et partir pour de grandes aventures.
Nous avons donc une réflexion sur l’identité, sur les secrets refoulés ainsi que sur la crainte du passage à l’âge adulte, qui bien qu’inévitable, leur fait terriblement peur. Surtout ne pas être comme eux, ces adultes qui portent toujours un masque, masque qui tombe parfois après 3-4 bières. Et ce n’est pas toujours beau. La famille de Zoey a un gros accent du lac, s’ils trouvent quelque chose mauvais, c’est « gai » et tout le monde est bien ancré dans les valeurs dites « traditionnelles ». La fête est vue à hauteur d’enfant, avec toutes les incohérences que ça soulève. C’est à la fois touchant et drôle.
Si nous voyons certes le côté des enfants, Lambert nous entraîne parfois dans la tête des adultes, ceux qui font de leur mieux, ceux qui souffrent aussi et ceux qui sont juste trop centrés sur eux-mêmes. Ceci apporte nuance et profondeur au récit centré sur le mal-être des enfants, souvent difficile à comprendre. Bref, une réussite quand on adhère au côté fantastique et qu’on accepte de ne pas tout comprendre.