Oh my… comment vous parler de ce tome final de la recherche… Je sens que je ne vais pas y arriver, pas arriver à vous faire comprendre tout ce que j’ai pu ressentir, à vous faire bien saisir tous les petits moments où j’ai eu l’impression, comme le narrateur, d’avoir de micro-révélations, où le temps s’est entrouvert pour moi. Bref, ce tome termine magnifiquement cette fresque qu’est la Recherche et nous permet de la voir un peu autrement. Pas totalement, mais un peu.
Du coup, j’ai le goût de tout relire. Et j’ai l’impression que j’en retirerais tout autre chose. C’est pas gagné, hein!
Ce roman s’ouvre sur Tansonville où il retrouve Gilberte, mariée à St-Loup. Celui-ci est à la guerre et elle a quitté Paris pour éviter les bombardements. Nous retournerons ensuite à Paris, où, en raison de la guerre, tout le monde est germanophile (sauf Charlus) et où les mentalités évoluent doucement. Puis, la partie qui m’a le plus marquée, la matinée chez la princesse de Guermantes, où le narrateur retrouve – en raison de quelques moments de grâce – la croyance qu’il peut écrire et qu’il a une oeuvre grandiose en tête, qui n’attend qu’à être écrite… et qu’il manquera peut-être de temps.
C’est dans ce tome que tous les personnages prennent une dimension supplémentaire, celle de leur évolution dans le temps. Ce moment où le narrateur réalise que le temps a passé, qu’il n’y a pas échappé et qu’il a eu prise sur tout le petit monde. Et soudain, tout le roman prend une autre perspective, tous les personnages gagnent en épaisseur et on prend conscience que même en analysant, en tentant de les considérer sous toutes les facettes possibles, le fait qu’on soit arrivé au milieu de leur histoire a influencé toute notre perception… J’ai adoré constater l’évolution du monde, le voir sous différents angles, et réaliser, plus tard, que peut-être avais-je moi aussi pris pour acquis son immuabilité?
Lire Proust et le réinterpréter à la lumière de sa perception de l’art, telle qu’exposée dans le roman, c’est toute une expérience. Impossible de ne pas s’arrêter à l’occasion pour tenter d’y ajouter nos propres idées, nos propres expériences. Et à la fin du roman, le romancier émerge, tardivement, et donne à la recherche une autre dimension.
Bien entendu, on retrouve les personnages que l’on connaît. Saint-Loup, Mme Verdurin, la duchesse de Guermantes, Françoise, Gilberte, Charlus… et on découvre certains aspects d’eux, on les voit évoluer. Et on voit comment leur perception du passé a changé. Je ne vous mentionnerai aucune scène (même si une m’a fait éclate de rire et texter les copines, hilare…) mais j’avoue qu’il y a des choses que je ne croyais pas trouver dans Proust. J’ai été fort intéressée en voyant la guerre par le regard de Proust. J’ai tout aimé. Et il a passé trop vite. Vraiment trop vite. J’en aurais voulu encore.
Comme je disais, il va falloir que je le relise, un jour, quand j’aurai grandi encore un peu. Et je garderai en mémoire l’art qui émerge quand le passé devient partie intégrante du présent.
Magistral.
4 Commentaires
Passer au formulaire de commentaire
Ce fut mon tome préféré -et pour cause ! Comme tu le dis il donne envie de tout relire !
Ouiiiiiiiiiiiiiiiii ! Je retrouve mes impressions. Et tu vois qu’on a envie de relire!!! C’est complètement mon expérience (j’en suis à la quatrième lecture, a hum). Ah l’histoire des pavés qui bougent, génial!
Quant à la scène qui a dû t’étonner chez Proust, hé oui hé oui (avec le fouet je suppose?)(si je me souviens bien) (ah ce proust nous étonnera toujours! il n’y a pas que des ‘thés chez les comtesses’)
Contrairement aux proustiennes confirmées, tu ne me donnes pas envie de relire, mais tout simplement de reprendre ma lecture de cette fresque. Merci pour tes billets, j’ai beaucoup aimé suivre ta découverte.
Je suis en train de re-re-relire la Recherche donc ton enthousiasme me touche beaucoup ! C’est une oeuvre inépuisable et qui parle tellement à l’intime…