Présentation de l’éditeur
« Le paradis et l’enfer s’étaient enlacés dans le ventre de notre bateau. Le paradis promettait un tournant dans notre vie, un nouvel avenir, une nouvelle histoire. L’enfer, lui, étalait nos peurs: peur des pirates, peur de mourir de faim, peur de s’intoxiquer avec les biscottes imbibées d’huile à moteur, peur de manquer d’eau, peur de ne plus pouvoir se remettre debout, peur de devoir uriner dans ce pot rouge qui passait d’une main à l’autre, peur que cette tête d’enfant galeuse ne soit contagieuse, peur de ne plus jamais fouler la terre ferme, peur de ne plus revoir le visage de ses parents assis quelque part dans la pénombre au milieu de ces deux cents personnes. »
Ru est le récit d’une réfugiée vietnamienne, une boat people dont les souvenirs deviennent prétexte tantôt à l’amusement, tantôt au recueillement, oscillant entre le traique et le comique, entre Saigon et Granby, entre le prosaïque et le spirituel, entre les fausses morts et la vraie vie. »
Commentaire
J’étais réticente par rapport à ce roman. Imaginez-vous que j’ai l’esprit de contradiction. Et il a trôné au numéro 1 des ventes dans une librairie grande surface pendant un long moment. Du coup, ça m’avait enlevé toute envie de le lire. Il a fallu que l’auteure soit présente au salon du livre de ma région, que je l’écoute un peu parler avec les gens (je n’ose pas parler aux auteurs… je suis une grande timide, au fond), que j’aime ses propos pour que je me décide. Et j’ai bien fait parce que ce fut vraiment un beau moment de lecture, même si je sens que je vais avoir du mal à en parler.
Je me contenterai donc de dire que j’ai été très, très touchée par ce texte qui, par courtes scènes qui nous font parfois sourire, parfois frissonner ou qui nous atteignent, tout simplement, raconte Nguyen An Tihn (avec un diacritique de plus, que je ne sais pas comment faire sur mon clavier), une femme d’origine vietnamienne qui est arrivée au Québec à 10 ans, sur un bateau de réfugiés. Du Viet Nam « en paix », ils sont passés par un camp de Malaisie pour arriver à Granby. Les textes sont courts, percutants, souvent très poétiques, dans une langue très belle, qui peut décrire magnifiquement des choses horribles, sans que ça choque. L’auteure alterne les souvenirs de Saigon, du camp, du Québec, avec un regard souvent tendre, parfois détaché. Elle raconte sa vie en tant que fille de ses parents, de nièce de son oncle Deux ou de sa tante Sept, sa vie de mère d’un enfant autiste aussi. Sa vie de Québécoise, sa vie de femme de Nulle Part à l’occasion.
Ru veut dire, en français, « petit ruisseau ». En vietnamien, il veut dire « bercer » ou « berceuse ». Les images du Viet Nam qui nous sont offertes sont fortes, évocatrices. Surtout pour une fille pour qui, quand on évoque cette guerre, se rappelle immédiatement les images de Forrest Gump et, surtout, le musical « Miss Saigon » (ne pas taper… mon inculture fait limite peur, je sais).
Les textes nous font réfléchir. J’ai souvent levé les yeux à la fin d’une page pour essayer de me représenter tout ça. J’ai aimé sa vision, sa façon d’accepter, de vivre pour maintenant, de collectionner les images dans sa tête. Sa façon de ne jamais oublier d’où elle vient et de ne pas se laisser engloutir par ce qui l’entoure.
Un roman émouvant sans jamais tomber dans le misérabilisme.
Et selon moi magnifiquement écrit.
Je n’ai jamais vu l’auteure dans des entrevues (je n’écoute pas la télé, c’est bien connu) mais elle semble avoir beaucoup en commun avec son personnage. Arrivée aussi au Québec à 10 ans, dans les mêmes circonstances, elle est devenue écrivaine après un parcours éclectique. Son dernier roman est sorti il y a peu… et c’est certain que je le lirai bientôt!
46 Commentaires
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Je ‘lai déjà repéré de nombreuses fois sur les blogs, les avis sont généralement très bons voire excellents. Mais je ne pense jamais à l’acheter !
Leiloona: Il paraît qu’il est sorti en poche, du moins chez vous. Ici, je crois qu’on peut le commander mais je ne l’ai jamais vu en inventaire dans les librairies à date, seulement le grand format. Donc, tu n’as plus de raison de ne pas l’acheter!
C’est vraiment un très beau texte, émouvant souvent, bien sûr mais très maîtrisé aussi. C’est un récit qui m’a beaucoup impressionnée.
Mango: Idem. Très émouvant et ça rentre dedans, disons.
Il m’a manqué un petit quelquechose avec ce roman pour qu’il me plaise totalemente t passionnément. mais il reste de grande qualité.
Hélène: Pour moi, ça a fonctionné. Une histoire terrible racontée avec tout plein de délicatesse. J’ai vraiment été émue. Il te manquait quoi exactement, tu as réussi à mettre le doigt dessus?
Ce livre m’a beaucoup touchée aussi. S’il y a un second roman bientôt, chouette !
Anne: Le second roman est sorti ici depuis quelques temps. C’est une correspondance et j’ai bien hâte de la lire.
Ca me semble tout à fait bien ça!
Hérisson: Pour moi, ça l’a été!
J’ai envie de le lre depuis un bon moment et il est sorti en poche, donc je n’ai plus aucune excuse
Aifelle: Si en plus tu peux le trouver en poche (ici, je pense qu’on ne peut pas vraiment. Mais bon, je parle peut-être à travers mon chapeau…) tu n’as plus aucune excuse, en effet!
Je suis content que ce bouquin t’ai plu, coup de coeur du Papou qui l’avait acheté tout de suite apràs le passage de l’auteur dans une émission télé…mais comme t’as pas le temps de regarder la télé ni…lire le Papou (je blague)
Un livre d’autant plus surprenant quand on entend les sourires de cette femme (eh oui ça s’entend les sourires) quand on sait qu’elle a des gros problèmes avec un de ses enfants ou les deux (autisme je crois!)
Le papou
Le Papou: Si, si, je lis le Papou ;)) Je ne me souviens juste plus de ce que j’ai pu lire où, parfois. Faut mettre ça sur le compte de la vieillesse. Oui, on entend les sourires, dans ce roman. Et elle en fait beaucoup en vrai aussi.
Ah tiens, celui-ci aussi me fait envie depuis des lustres. Il me semble que ma médiathèque l’a en plus, donc ça ne compte pas pour la PAL 😉
Stephie: Non, tout à fait, ça ne compte pas. J’ai bien hâte de voir ce que tu vas en penser.
Haaahaa !!! je l’ai adoooré !!! Lu il y a une bonne année déjà, je ne me souviens pas spécialement des détails mais d’un moment de lecture fort ! Quand je pourrais sortir mes livres des cartons, je pense le relire !
Sandy: C’est probablement un livre que je vais relire aussi. Il m’a beaucoup plu et je pense que ça supportera très bien la relecture, vu le format!
Je lis ton billet en diagonale car il est déjà sur ma LAL! Un peu comme toi, j’étais peu attirée au départ, mais après avoir vu l’auteure en entrevue à la télé, ça m’a donné le goût…
Grominou: Moi ce sont les billets blog qui m’ont donné le goût. Et ensuite, j’ai entendu une entrevue et ça m’a décidée.
Un coup de coeur pour moi.
Suzanne: J’ai beaucoup aimé aussi.
Très beau souvenir de lecture que Ru… je m’intéresserai au prochain livre de Kim Thuy, c’est sûr !
Kathel: Il risque de faire partie de mes prochains achats, en tout cas.
Hihi ! Heureuse de voir que je ne suis pas la seule à avoir ce genre de réaction avec certains hits ! Un film, un livre… trop encensé ? J’ai tendance à ne pas vouloir le lire ou le voir… Et je passe sûrement à côté de pleins de choses. Comme Ru… no1 en librarie, constamment emprunté à la bibliothèque – il y a même une liste d’attente – il ne me tentait pas du tout. Mais tu en parles si bien ! 😀 Je me laisserai sûrement tenté quand il sera moins populaire et que je pourrai l’emprunté ! Merci pour ta belle chronique !
Laila: Exactement pareil. Numéro 1 chez A… ça me fait toujours un peu peur. Pourtant, je ne suis pas littérairement snob, du moins, je ne le pense pas! J’ai beaucoup aimé, en tout cas! Une bien agréble surprise.
Merci d’en avoir parlé, ça me tenterait de le lire, mais spure que j’en aurais jamais connu l’existence sans toi… bon je note, on verra si je tombe un jour dessus.
Cryssilda: Il est en poche dans ton pays… donc moins cher chez toi que chez moi ;))
Moi aussi, je suis assez timide avec les auteurs. Et comme toi, trop de pub lors de la sortie ne me donne pas forcément envie de mlire le bouquin.
Alex: C’est fou hein… je ne sais jamais quoi dire. NO WAY que je me présente comme blogueuse (tout d’un coup qu’ils voudraient aller lire, j’aurais limite honte) et de toute façon, je me considère pas comme une blogueuse sérieuse… du coup, je ne sais pas quoi dire, à part faire un beau sourire!
Un livre qui semble vraiment touchant. J’ai vu l’auteur en entrevue à la télé ici au Qc et elle semblait vraiment très sympathique je me rappelle qu’elle a raconté une histoire à propos du grille-pain: il ne savait pas qu’est-ce que c’était il l’utilisait donc comme miroir 🙂
Cloange: Tu es au Québec aussi?? Je n’avais pas tilté! Oui, elle parle du grille pain dans le roman 😉 C’est fou, quand même, toutes ces différences culturelles.
Lu il y a peu, j’avais hâte, lors du la sortie en format poche. Un très joli moment de lecture comme tu dis. Il reste quelque chose de ces mots-là.
Emmyne: tu as tout à fait raison. Je pense que je vais changer mon regard sur certaines choses suite à cette lecture.
Je l’ai lu il y a peu (pas encore fait de billet) et j’étais persuadée que ce n’était pas du tout un roman mais un témoignage autobiographique (non romancé)…
Brize: Il y a une grande partie de témoignage, c’est un mini peu romancé, je pense. Très peu! Genre qu’elle a changé son nom!
Chouette liste 🙂
Tigger Lilly: :))
Tout pareil que toi, en fait j’ai été tellement touchée par ce livre que je ne savais pas comment en parler et que du coup je n,’ai jamais écrit mon billet, ce qui est très bête… je vais le relire tiens 🙂
Yue: Voilà une over bonne excellente excuse!
Chouette ! Ton billet me fait bien plaisir vu que je viens de profiter de la sortie poche de ce roman pour me l’offrir ! 😉
Noukette: Très, très bonne idée!
Un roman très touchant, en effet!
Amiedeplume: Je crois même qu’il est impossible de ne pas être émue!
C’est vrai que c’est très joliment écrit et poétique mais la façon dont l’auteur égrène ses souvenirs (ou plutôt ceux de sa narratrice), dans le désordre, et le fait que tout ne soit finalement qu’effleuré m’a vraiment frustrée.
Auteur
Je peux comprendre. pour ma part, j’adore ce genre de narration où on nous offre des images, des bribes…et où on doit reconstituer le reste!
[…] Thuy Kim, Ru (Argali) […]
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[…] Thuy – Non seulement ses romans (Vi, Man, Ru) m’ont tous plu, mais rencontrer Kim Thuy est toujours, toujours un plaisir. C’est une […]