Le comment du pourquoi
J’aime beaucoup la ligne éditoriale des éditions Hamac. Du coup, un roman de chez Hamac qui parle de la danse, c’était un incontournable. Allez savoir pourquoi, ça m’a pris deux ans à le sortir, mais c’est une autre histoire!
De quoi ça parle
La narratrice s’adresse à celle qu’elle était plusieurs années avant, alors qu’elle était élève de danse classique à l’École. Elle n’est pas très douée. A beaucoup de problème rédhibitoires. Mais elle est persévérante, travaillante. Elle veut être a good girl. Elle est prête à tout pour ça. Nous la suivrons pendant son parcours de plusieurs années dans cette École, alors qu’elle tente par tous les moyens d’en faire vraiment partie.
Mon avis
Ce que j’ai pu aimer ce roman. Je ne sais pas parce que ça traite de la danse, ou encore parce que j’ai associé ce besoin de reconnaissance au syndrome de l’imposteur (que j’ai de façon « sélective ») mais j’ai été tout de suite happée par cette histoire qui m’a moins semblé une critique du milieu de la danse qu’une réflexion sur cette soumission presque maladive, cette volonté de recevoir la petite caresse, de souffir pour prouver qu’on mérite d’être là, pour tenter de se faire une place. N’importe laquelle, mais une place.
La narration, au « tu », interpelle immédiatement. Pour ma part, ça me plait beaucoup et ce choix permet à la narratrice de prendre une certaine distance, de porter un certain jugement – quoique sans violence – sur la personne qu’elle était, la danseuse qu’elle était. Parce que dès le départ, elle sait qu’elle n’a pas le talent, qu’elle a du retard, un corps qui à la fois « trop » et « pas assez ». Il est clair qu’elle ne fera jamais partie des meilleures, qu’elle n’aura jamais de premier rôle. Elle le sait et on le lui fait sentir. Tous les jours. Même pas méchamment. Les professeurs sont exigeants et considèrent son corps comme un objet. Certaines scènes, le master class, par exemple, est terrible à lire. L’âme de l’adolescente n’est pas prise en considération, seulement son corps, qu’on tente de modeler pour qu’il soit « assez ».
Nous sommes dans le domaine de la danse classique, celui que l’autrice connaît. Mais ça pourrait être n’importe où. L’intérêt a été pour moi cette relation à la soumission alors que la seule opinion importante est celle des autres car l’identité n’est bâtie qu’autour de celle-ci. Que reste-t-il après la danseuse? Qui est-on sans cet horaire, ce constant regard qui définit, qui donne ou enlève sa valeur?
C’est à la fois ça et une réflexion sur les univers élitistes, où il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. Un roman percutant et qui fait réfléchir. Du moins, qui m’a fait réfléchir. Ouais, un jour j’arrêterai de rêver que je suis dans un spectacle où je n’ai absolument rien à faire et où personne ne le réalise. Syndrome de qui, on disait?
10 Commentaires
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Je suis assez fan aussi de cette maison d’édition.
Auteur
Je trouve qu’il y a un vrai travail éditorial et une vraie ligne éditoriale. Ça compte!
Le sujet me fait étrangement penser au dernier roman de Lola Lafon sur le même sujet, ou presque.
Auteur
Oh, c’est quoi le titre? Je le veux!
Hamac, c’est une valeur sûre, je note ce titre !
Auteur
Oui, je suis fan de leurs choix éditoriaux.
ah ah tu as mis la catégorie cette fois 😀 en tout cas ça a l’air très sympa… j’aime bien les livres avec de l’art à l’intérieur moi aussi 🙂
Auteur
Des fois, je fais bien les choses. Surtout quand j’écris les billets APRÈS avoir trouvé les catégories!
autobiographique ou il y a assez de distance pour que ce ne le soit pas? j’ai de la difficulté à voir par ta chronique
Auteur
Il y a assez de distance car c’est le regard porté plusieurs années plus tard sur la personne qu’elle était. Les sentiments sont autobio mais les événements en soi sont peut-être romancés. J’suis pas réputée pour être hyper claire, je pense!
[…] – Bon chien – Sarah […]
[…] Bon chien – Sarah Desrosiers […]