Avouons-le d’emblée, je suis très mitigée par rapport à ce roman jeunesse. En fait, c’est le titre qui m’a attirée au récent salon du livre. J’étais curieuse de voir comment le sujet serait traité. Toutefois, je dois avouer que je suis déçue à la fois par l’histoire et l’évolution de Belle, l’héroïne, ainsi que par le traitement du sujet de l’homosexualité et de la réception d’un coming out à l’adolescence. Le très bon « Recrue » de Samuel Champagne (dont j’ai récemment parlé) en traite ma fois beaucoup, beaucoup mieux.
Point de départ, donc. Belle a 17 ans. Elle habite dans un village du Maine de 6000 âmes où tout le monde sait tout sur tout le monde. Elle amoureuse de Dylan depuis 2 ans, ils s’aiment d’un amour tendre, se voient tous les soirs, idéalement dans le lit de l’héroïne. Elle a une meilleure amie géniale, Emily. Puis, au tout début du roman, la bombe. Dylan lui annonce qu’il n’aimera aucune autre femme qu’elle et pour une bonne raison: il est gai.
Effondrement du monde parfait de Belle. Of course.
Nous suivrons donc les héros pendant 7 jours. Yep, 7 minuscules petites journées. Les sentiments sont volages à l’adolescence, je sais, mais quand même, il y a des limites. Et c’est d’ailleurs l’une des principales critiques que j’adresse au roman: tout va trop vite. Mais vraiment trop vite. Il y a « montagnes russes d’émotions » et « montagnes russes d’émotions ». Et là, on passe du tout au tout en un gros 4 jours. Max. Et on s’en tire avec une jolie pirouette. Bref, je n’ai pas cru à l’évolution des personnages mais alors là, pas une seconde. En fait, étant donné la vitesse où ils virent leur capot de bord, je n’ai pas cru à leurs sentiments non plus. Et vu que c’est l’un des points principaux du roman, il y a comme un problème.
Pourtant, il y avait de quoi faire. Mettez la même histoire, étalez-la sur plus de temps et tamisez les clichés (yep, j’ai fait du gâteau aujourd’hui, de là mon vocabulaire « cuisine »… rassurez-vous, je ne poursuivrai pas les personnages avec un rouleau à pâte, malgré ma déception), conservez l’humour et vous auriez quelque chose de bien. Les listes sont assez drôles et il y a quand même une agréable auto-dérision dans tout ça. Le ton est bien placé. Par contre, les clichés… oh boy! Dylan trippe sur Streisand? La bitch de l’école (et ex-meilleure amie) est cruche en plus d’être bitch? Les « réactions type » face à l’homosexualité de Dylan qui sont totalement sans nuance? Les grandes réalisations existentielles qui arrivent à l’héroïne en 2 minutes et quart? Et que dire de la réaction de certains face à l’épilepsie? Non mais, c’est quoi ça!
Finalement, je parlerai des répétitions qui deviennent lassantes à la longue. Les foutus souliers Snoopy, les 89 mentions et quart du Postum, la raison pour laquelle Emily prend des photos, Gabriel-la-guitare (c’est moi ou le nom ne fitte pas??)…
Une déception donc, avec une héroïne un peu trop « gentille » (non mais quand ça finit qu’elle s’excuse à Dylan – genre 5 jours après leur rupture – pour l’avoir empêché d’être ce qu’il était… alors que le lendemain du jour où il l’a laissée, il s’affiche avec sa nouvelle flamme, tout en disant à Belle qu’il l’aime énormément… super cohérent), une intrigue à l’évolution trop rapide et un manque de profondeur dans les personnages. Malgré tout, il y a de l’humour, des personnages secondaires drôles (la maman, les profs) et des moments touchants. Ça a plu à plusieurs lectrices… ne vous fiez pas à mon seul avis!
Juste pour rire, des phrases sorties de leur contexte (j’avoue) qui m’ont amenée à me dire que la traductrice avait dû en rire un bon coup en bossant…
Page 19 – « Je caresse le manche de Gabriel avec un de ces bouts de doigts durcis par la corne »
Gabriel, c’est la guitare.
Un peu plus tard: « je saisis ma chatte »
Il s’agit bien d’une chatte avec des poils et 4 pattes… quoi que les poils, ce n’est pas vraiment un bon critère, n’es-ce pas. Je pense qu’un peu plus loin, il y a un truc genre « Je me penche et plonge mon nez dans les poils de ma chatte » mais je ne le trouve plus alors considérez que c’est une approximation!
6 Commentaires
Passer au formulaire de commentaire
j’étais très sceptique devant ce titre, après lecture de ton billet je passe mon tour et vais plutôt noter « Recrue » 😉
Faelys: Je plussoie!
Le livre de Samuel Champagne est un petit bijou du genre, si rare en littérature jeunesse. Mais j’ai entendu les mêmes commentaire que tu fais sur le livre de Carrie Jones. Je passe assurément…
Geneviève: Oui, je suis tout à fait d’accord. J’ai aussi discuté avec lui au salon et j’ai bien hâte de voir son roman sur la transsexualité adolescente. ET celui-ci, je en conseille pas vraiment.
Il ne me tente pas du tout celui-là. J’espère que tu trouveras des lectures plus à ton gout la prochaine fois. Belle année à toi !
Praline: Je n’ai franchement pas été convaincue.