Joséphine Baker – Catel / Boquet

Je suis toujours fan de ces énormes BDs de Catel et Bocquet, qui racontent la vie de femme hors-norme. Du coup, pour l’African American History Month d’Enna, je me suis tout de suite dirigée vers celle-ci, qui raconte la vie de Joséphine Baker, chanteuse et danseuse noire américaine qui est devenue star en Europe pendant les années folles. Vous savez, la célèbre photo avec le tutu en bananes? Ben c’est elle.

Encore une fois, quel plaisir que de découvrir l’histoire de Freda Josephine McDonald, appelée Tumpie par sa mère, qui naît dans le Missouri au début du siècle. Femme libre, qui n’en fait qu’à sa tête, elle va aboutir à Paris et devenir l’une des premières stars noires en France, où elle va charmer tout le monde avec sa personnalité forte, sa joie de vivre et son espièglerie. Nous la verrons faire sa place, se battre, réussir et parfois se casser la gueule, avec son paquet d’animaux, ses maris, amants et autres excentricités.

Un bel hommage à cette femme engagée, qui fait face à deux cultures fort différentes (la France et le midwest des États-Unis) et qui sera reçue de manière totalement différente. Elle va se battre pour ses convictions, sans hésiter à utiliser sa célébrité pour faire passer ses messages. Comme toujours, le dessin de Catel, en noir et blanc, est particulièrement expressif et on reconnaîtrait l’oeil malicieux de Joséphine Baker entre mille.

Une très belle introduction à a la vie de cette artiste… et ça donne envie d’aller fouiner plus loin pour en savoir davantage et bien détecter les nuances. À découvrir.

C’était ma BD de la semaine et c’est chez Stephie cette semaine.

The Kiss Quotient – Helen Hoang

On m’avait vendu ce roman comme « un roman contemporain sur l’autisme avec de la romance dedans ». Je n’aurais pas dû écouter. Comme ça, je serais partie avec des attentes plus réalistes parce que c’est – clairement – une romance, avec une héroïne autiste. Et à part cette héroïne non-neurotypique, rares sont les clichés qui nous sont épargnés. Si je m’étais attendue à ça, peut-être que j’aurais apprécié davantage, mais j’avoue que j’ai eu du mal.

Stella Lane a la trentaine et est un génie des maths. Elle a du mal à supporter les étiquettes dans les vêtements et réussit toujours à se mettre les pieds dans les plats dans les relations sociales. Bref, Stella est très intelligente mais a des intérêts marqués, des défenses sensorielles et a du mal à décoder les gens, l’humour et le sarcasme. Stella est rationnelle et ses expériences sexuelles étaient ayant été plus que décevantes, voire même désagréables, elle décide de prendre les choses en main et de se faire enseigner comment faire. Et qui de mieux pour être son professeur qu’un homme fort expérimenté, une escorte ayant reçu des critiques 5 étoiles sur le site internet. C’est donc ainsi qu’elle va rencontrer Michael Phan, jeune homme aux ascendances suédoises et vietnamiennes… et bon, vous devinez la suite.

Vous comprendrez que je ne peux qu’applaudir l’idée d’avoir des personnages de romans qui ne sont pas neurotypiques. Connaissant plusieurs personnes se reconnaissant dans ce terme, je n’apprends absolument rien dans ce type de roman, même si je ne peux m’empêcher de les lire. L’autisme au féminin est souvent difficile à reconnaître car plusieurs femmes ont souvent des intérêts particuliers plus « socialement acceptables » que les hommes… et elles souhaitent souvent davantage avoir des comportements sociaux plus normatifs. Ok, faut pas généraliser. Il y a autant d’autismes que d’autistes. Mais c’est ce que la littérature nous dit. Donc, si on ne connaît pas, ça peut être intéressant d’entrer dans la tête d’un tel personnage et encore plus en sachant que l’auteure est elle-même autiste. Bref, vous comprenez, je pense.

Toutefois, pour l’histoire… pas mal, distrayant… mais sans plus. Un héros assez parfait (malgré son métier), une femme qui est certes très angoissée à l’idée de proximité physique, mais qui se découvre ma foi fort douée (et fort mouillée… c’est dit je ne sais combien de fois) et qui rend le héros complètement fou. Les personnages secondaires sont très divers et pour la plupart fort bienveillants. Et il y a du cul, du cul… Ok, c’est un peu le thème du roman, une femme qui explore sa sexualité, mais je pense que j’ai trop lu de ces scènes. Elles en deviennent répétitives, ennuyantes… et j’avoue que je les passe vite. Dans ce roman, on en passe pas mal! Surtout quand le mec parle de sa mère en s’envoyant en l’air! Bref…

Une romance qui suit le schéma type, avec les stéréotypes du genre, avec certains moments assez drôles et désespérants à la fois (le souper de famille a été ma scène préférée… criant de vérité et ça m’a rappelé beaucoup de souvenirs)… mais qui ne m’aura pas marquée. Mais c’est long, long! Ça a clairement été un cas de « il y a beaucoup trop de pages pour moi »!

À lire pour découvrir une facette de l’autisme. Il y a une suite qui va sortir… mais je pense clairement passer mon tour!

Elle a persisté – autour du monde – Clinton / Boiger

Cet album est celui qui me tentait le plus dans les propositions de Scholastic ce mois-ci. Des histoires de femmes de partout à travers le monde, qui ont surmonté des obstacles et qui ont réalisé de grandes choses, je suis pour. Et encore une fois, ça a fort bien fonctionné pour moi, et pour ma Charlou-nièce, qui a posé plein de questions sur les pays où ont vécu ces femmes. Certes, elle ne comprend pas vraiment pourquoi les choses sont si différentes (elle voulait leur envoyer des policiers pour leur dire que ce n’était pas bien), mais quand même, ça ouvre à la discussion.

Chaque double page nous fait rencontrer une femme venant d’un pays différent du monde. Une courte biographie, très accessible aux jeunes, et une citation. Le choix des femmes est selon moi judicieux, elles proviennent de milieux différents, d’époques différentes, avaient des projets différents. Il y a une sportive, une scientifique, des militantes… J’ai même eu le plaisir d’en découvrir certaines pour la premières fois. Bref, j’ai beaucoup aimé cette lecture ainsi que les images choisies pour illustrer leurs histoires. Chaque page a une teinte et une couleur qui lui est propre, le graphisme me rejoint (je ne sais pas si c’est de l’aquarelle, mais il y a un côté « aquarelle »). Je vous invite d’ailleurs à aller visiter la page de l’illustratrice, dont le travail me plaît énormément.

Un projet très réussi, féministe et empowering!

Fat Girl on a Plane – Kelly deVos

Le pourquoi du comment

Sérieusement? Je ne sais plus. J’en ai entendu parler quelque part, et je l’ai aussitôt emprunté, prise par une envie de lire du young adult. Et en fait, c’est juste moyen du young adult. Mais ce n’est pas mal non plus.

De quoi ça parle

Un jour, en allait faire l’entrevue de sa vie, Cookie Vonn, jeune adulte (ou grande ado) a été interpellée par une hôtesse de l’air. Elle est trop grosse pour voler. Elle doit acheter deux sièges. Ou ne pas embarquer, et ce même si dans le vol juste avant, elle n’était pas trop grosse. Serrée dans le siège, certes, mais pas « trop ». Après avoir réussi à emprunter des sous à son meilleur ami, dont elle est secrètement amoureuse, elle va finalement rater sa chance. C’est certain que quand on veut percer dans le domaine de la mode, selon Cookie, le poids a son importance. Elle va donc passer de Fat Cookie à Skinny Cookie… et découvrir que ça ne règle définitivement pas tous les problèmes.

Et mon avis…

Sachez-le d’emblée, ce n’est pas un « body positive book ». Ceci dit, ce n’est pas « body negative » non plus, mais c’est l’histoire d’une fille qui décide de maigrir car selon elle, c’est la solution. J’ai lu partout que ce roman était problématique, justement pour ça. Parce qu’elle a maigri et que plusieurs problèmes venaient du fait qu’elle soit en surpoids. Entendons-nous, je ne parle pas en connaissance de cause. Mon « problème de poids » (défense de rire, Mme Morelli) est uniquement dans ma tête et suis bien mal placée pour juger du traitement de la problématique. Toutefois, ces filles qui veulent perdre du poids ou en ont beaucoup perdu, elles existent. J’en connais. Et selon moi, une telle histoire mérite d’être racontée. Même si ce n’est pas parfait.

Le roman est deux séparé en deux parties, qui se situent à environ 1-2 ans d’intervalle, je ne sais plus trop et dont les chapitres s’alternent, jusqu’à se rejoindre. Et cette alternance est frustrante parce que j’étais intéressée aux deux histoires… et que je bougonnais à chaque fois qu’on changeait d’époque. Parce que, avouons-le, j’aime beaucoup Cookie et sa grande gueule malgré ses insécurités. C’est le genre de fille que j’aurais aimé avoir comme amie. Me semble qu’on aurait eu du fun. Quoiqu’elle m’aurait rapidement perdue avec ses histoires de mode.

Comme je le disais, Cookie veut être créatrice de mode et elle a du talent. Elle a toujours voulu entrer dans une célèbre école de New York et créer sa propre ligne pour tailles plus. Après sa perte de poids, tout semble possible à ses yeux et elle va débarquer à New York et se voir offrir une opportunité en or. En apparence. Certes, il est question de perte de poids, c’est l’une des principales intrigues, mais il y a plus que ça. J’ai beaucoup aimé explorer le milieu de la mode (j’ai dû faire des recherches, je ne connaissais aucun des célèbres modèles évoqués), même si ce que j’y ai découvert ne m’a pas toujours marquée positivement. Certains personnages sont un peu repoussants et on a tout de même le goût de secouer les personnages pour les sortir des relations dans lesquelles ils sont embarqués. Ce n’est pas parce que Cookie est maintenant « skinny » que tout est réglé, au contraire. Elle se cherche et n’est pas guérie des insultes qu’elle a pu subir, elle est obsédée parce qu’elle mange (ce régime semble horrible) et compte ses points à longueur de journée. Bref, j’ai bien aimé la réflexion que ça implique.

Certes, ce n’est pas parfait, les personnages nous font fâcher, mais j’ai trouvé réaliste, quoique décevante, les réactions de certains personnages adolescents, qui comprennent tout de travers. Je regretterai la présence d’un personnage un peu trop « bitch » à mon goût, mais en gros, j’ai passé un bon moment. Pas inoubliable, mais un bon moment.

Ce qu’on respire sur Tatouine – Jean-Christophe Réhel

C’est Billy Robinson, célèbre libraire de Verdun, qui m’a conseillé ce roman il y a quelques mois. Il m’avait vanté son originalité. De plus, comme il était sur la liste préliminaire du Prix des Libraires du Québec, j’ai tenté le coup. Suis-je totalement convaincue? Moyennement. Je pense que c’est surtout un mauvais pairage entre moi et le roman, en fait et je vois tout à fait ce qui peut plaire. Mais je dois avouer qu’une grande partie du texte ne m’a pas du tout rejointe.

C’est l’histoire d’un jeune homme de 31 ans. Il vit seul, passe de petit boulot en petit boulot et semble vouloir remplir son corps de Sidekicks et de Cheminaud. Le protagoniste a la fibrose kystique et tente de se sortir de son quotidien en rêvant de Tatouine, son Eldorado à lui, l’endroit où il croit pouvoir se sauver de lui-même et surtout de la fibrose kystique (pour les amis européens, c’est la mucoviscidose), la maladie avec laquelle il doit composer et dont il se sent prisonnier.

Il y a quelque chose de touchant dans le style. Parmi les descriptions ma foi très terre à terre (beaucoup trop pour moi, en fait) apparaissent soudain quelque images fulgurantes et très belles. Les phrases sont courtes, hachées, on sent le manque de souffle ainsi que l’état de fatigue et de solitude du personnage principal dans le rythme du récit. Celui-ci, sans chapitres, nous ramène également au tourbillon de pensées du jeune homme, pensées qui semblent se cogner aux murs pour soudain prendre une toute autre directions. Avouons-le il ne nous épargne rien de ce qui lui passe par la tête! Je pense que c’est ce que j’ai le plus apprécié dans cette lecture. Ça et les références à Star Wars.

Par contre, par contre… je n’ai jamais réussi à m’attacher ou à ressentir de l’empathie pour le personnage principal. Sa solitude fait mal au coeur, on ressent presque sa fatigue, sa totale incapacité à se prendre en main, mais on jurerait qu’il fait exprès pour prendre toutes les mauvaises décisions. Il n’a aucune idée d’où il va, avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête et en fait, il ne va nulle part et n’essaie même pas. Et, témoins de ça, j’ai surtout eu envie de le secouer et de lui crier de s’aider un peu! Et comme le personnage, je ne pouvais m’empêcher de me dire que l’histoire n’allait, elle non plus, nulle part.

Bref, ce n’était pas pour moi. Les descriptions répétitives de sécrétions (avec couleur et texture), de vomissures, de plaies ou des envies de ch… m’ont rapidement tapé sur les nerfs et me rendaient carrément agressive. Hypocondriaque je suis. Pas le match idéal pour le roman hein. Si certaines réflexions font parfois sourire, j’ai été peu sensible à l’humour et je me crispais à chaque répétition (voulues, on s’entend. C’est un choix stylistique, pas une maladresse) et j’en sors un peu perplexe.

Je suis somme toute déçue de ne pas avoir adhéré car je n’ai lu que des critiques très élogieuses dans les médias. Ne vous fiez pas à mon seul avis donc. Mais je tenterai probablement sa poésie… si on me jure que ça ne parle pas que de sécrétions!

Le prince et la couturière – Jen Wang

Le pourquoi du comment

Parce que je le voyais partout et que l’histoire d’un prince qui aime les robes et qui mène une double vie me plaisait énormément. Et vous savez quoi? L’album tient toutes ses promesses.

C’est quoi, cette histoire?

Frances est une jeune couturière qui rêve de devenir créatrice de mode. Un soir, elle doit faire une robe de toute urgence pour une jeune fille qui lui laisse le champ libre, et son travail attire l’attention de la royauté. Et pas n’importe qui : le prince Sébastien, qui est l’homme à marier du moment, du haut de ses 16 ans. Il a été ébloui pas sa création et souhaite faire d’elle sa couturière personnelle.

Et mon avis…

J’ai adoré. Rien de moins. Un très beau récit sur l’acceptation, la découverte de soi et aussi sur l’amitié, dans un monde de froufrous, de princes, de princesses et de bals. Frances a beaucoup de talent, est en avance sur son temps et le prince Sébastien, quand il est Lady Crystallia, lui permet d’exploiter ses idées et ses extravagances.

Sébastien est un personnage extrêmement attachant. Il est ce qu’il est, le sait, s’accepte de plus en plus ainsi mais a peur des réactions de ses proches, du peuple, en raison de ses obligations. Il ne sait trop comment réagir à cette nouvelle confiance, ce tout nouveau sentiment d’être à sa place et comme Frances est la seule qui sait, ils sont très proches et leur relation est adorable. J’ai aimé que chacun d’entre eux tienne à ses convictions et soit prêt à aller jusqu’au bout, finalement. Et que dire de cette finale, certes éclatante, mais tellement jouissive.

Les dessins sont entre le manga et le dessin animé, très mignons, pleins de robes, de chiffons et de glamour. J’ai aimé ces personnages hors-norme et la façon de représenter les salons et les cabarets parisiens. Une très très belle découverte.

Hotel Lonely Hearts – Heather O’Neill

J’ai décidé, comme chaque année, de lire les romans présélectionnés pour le Prix des Libraires du Québec. Ce gros roman m’avait attirée parce qu’il était publié chez Alto et que j’aime beaucoup leur ligne éditoriale. Je ne savais pas du tout dans quoi je m’embarquais et je l’ai lu en duo avec ma mère, qui a – comme souvent – une opinion assez différente de la mienne!

La mère de Pierrot avait 12 ans et une enfance à vivre. La mère de Rose a tenté de la sauver mais la fillette a fini sous un arbre. À l’orphelinat où ils vont se retrouver, toutes les filles s’appellent Marie et tous les garçons s’appellent Joseph. Les bonnes soeurs ne sont pas toujours bonnes et souhaitent étouffer dans l’oeuf toute dose de folie ou d’anticonformisme. Toutefois, à eux deux, les enfants vont créer des moments magiques et concevoir, dans leurs petites têtes, le plan d’un cirque fantastique, peuplé de clowns tristes , de musique et de danses envoûtantes. Pierrot est lunaire, musicien génial, un peu hors du monde. Rose est fonceuse, espiègle, égocentrique et elle n’a peur de rien. Toutefois, certaines personnes voudront les séparer… et vous verrez!

Nous sommes donc dans le Montréal du début du 20e siècle, où la religion, la pègre et la police se partagent le pouvoir. L’ambiance est un peu fantasmagorique et teintée de réalisme magique, très présent et très prégnant. C’est poétique, plein d’images évocatrices et j’ai été pour ma part complètement absorbée dans ce Montréal incroyable et fantasmé. Une fois plongée dans cet univers, je pardonne tout, toutes les invraisemblances et les lubies de l’auteure, contrairement à ma mère, qui a été à la fois agacée et ennuyée par tout ça. Comme de quoi on peut avoir des ressentis très différents aux mêmes éléments.

C’est glauque, noir, empreint d’une sexualité souvent hors-norme. Rien ne nous est épargné et le ton sur lesquels certaines horreurs nous sont livrées ne concorde absolument pas avec la teneur – assez horrible – du propos. Imaginez un décor complètement sombre, avec, en avant-scène, des clowns, de la magie et des paillettes. C’est tout à fait ce qu’est ce roman. C’est fou comme les mots ont du pouvoir. Il se passe des choses terribles, les personnages font des horreurs, et on se prend à vouloir que ça fonctionne. Les deux personnages principaux, amoureux maudits auxquels la vie ne laisse que très peu de chance, sont imparfaits, plein de failles, et ils prennent mauvaise décision sur mauvaise décision. Leurs destins s’entrecroisent, se frôlent et nous marchons avec eux dans le Montréal de la grande dépression, guidés par le même espoir qu’eux : se revoir et une mystérieuse fantasmagorie des flocons de neige.

Un roman d’ambiance, provocateur, qui laisse un goût étrange quand on le referme. J’ai pour ma part été très sensible à la poésie de l’auteur tandis que ma mère a trouvé ça long et peu crédible. Deux opinions… mais je compte bien pour ma part lire autre chose de l’auteure!

Fais de beaux rêves Cthulhu – Ciaramella / Murphy

Je vous ai parlé, il y a quelques mois, d’un mignonissime abécédaire de Cthulhu qui nous amenait au coeur de R’lyeh et de ses habitants emblématiques. Voici maintenant un autre album cartonné (avec les coins ronds… j’aime quand il y a les coins ronds. Moins inquiétant pour les petits yeux) qui aborde les cauchemars et la peur de la nuit.

La peur du noir est un thème récurrent chez les cocos. Et on a jamais assez d’albums pour désamorcer tout ça parce que je ne sais pas pour vous, mais trouver THE album qui va fonctionner avec un coco particulier, c’est quand même quelque chose. Ici, nous rencontrerons Cthulhu, qui devrait faire peur (parce que bon, malgré sa cutitude, il est quand même un monstre aux yeux des petits), mais qui n’est quand même pas rassuré quand vient le soir. Non seulement la peur est normalisée mais les auteurs démontent les grosses frayeurs une par une. C’est encore une fois un plaisir de revoir Lovecraft interagir avec sa créature.

Et bon, il n’est jamais trop tôt pour présenter Cthulhu, non?

C’est ma foi fort choupinou… et maintenant, ma nièce veut un toutou Cthulhu. Peut-être que tout n’est pas perdu avec elle!

Les filles bleues de l’été – Mikella Nicol

Ce que je retiendrai de ce roman, c’est cette plume. Quelle écriture, quelle poésie, quelle délicatesse! Les mots de Mikella Nicol m’ont interpelée dès le départ et ne m’ont jamais lâchée.

Dans ce roman, deux voix. Clara et Chloé, petite vingtaine, amies d’enfance. Clara se remet difficilement d’une rupture amoureuse, d’une trahison tandis que Chloé a du mal à vivre, à accepter son corps. Pour tenter de guérir, elles se retrouvent le temps d’un été dans le chalet où elles ont vécu les étés de leurs enfance.

C’est à travers le regard qu’elles portent l’une sur l’autre que nous les rencontrerons surtout. Ces deux jeunes femmes peinent à trouver leur place, se sentent étrangères et se voient s’éloigner de leurs amis, de leurs familles. Elles sont touchantes et en tant que lectrice, je me suis sentie terriblement impuissante face à leur désespoir. J’avais l’impression qu’elles me glissaient entre les doigts et j’ai aussi été émue par leur entourage, par ce qu’ils doivent ressentir, eux aussi, même si les deux filles ne le réalisent pas vraiment.

C’est un roman dur, profondément triste, qui dépeint de façon très juste le sentiment de vacuité de l’existence qu’on ressent parfois. Chloé et Clara ne réussissent plus à donner le change dans un monde où tout le monde semble être comme un poisson dans l’eau… sauf elles. Je me suis souvenue une certaine période où j’avais l’impression qu’être moi ne suffirait jamais et que je devais être en perpétuelle représentation, que je devais faire semblant de vouloir ça, moi aussi. Mikella Nicol décrit avec énormément de précision ces sentiments, cette difficulté à grandir et à trouver son propre chemin.

Un très beau roman et une auteure que je relirai avec plaisir.

Les filles de Salem – Thomas Gilbert

Pourquoi ce livre

Parce que Salem. C’est tout.

De quoi ça parle

Cette magnifique BD (je sais, je ne maîtrise pas encore les sous-section… je viens de spoiler mon avis d’aplomb!) pose un certain regard sur la tristement célèbre histoire des sorcières de Salem. La narratrice, Abigail Hobbs, a 14 ans et un jour, un événement tout simple en apparence va modifier le cours de son existence.

Mon avis

Je ne vais pas beaucoup parler de l’histoire en tant que telle parce qu’elle est bien connue et que pour ceux qui ne la connaissent pas, ce serait bien que vous ayez quelques surprises. Toutefois, pour une mise en contexte, à Salem, près de Boston, au 17e siècle, des jeunes filles ont commencé à avoir des crises et ont accusé plusieurs membres de la communauté de sorcellerie. Résultat : plusieurs exécutés et 200 personnes emprisonnées. Cette BD brode autour de ce thème et offre une réinterprétation de cette histoire. C’est sombre, triste et cruel, ça met en avant la folie des hommes et leur petitesse devant la différence et ce qui leur fait peur.

Ici, il ne faut pas chercher à voir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. L’auteur utilise certains faits, en occulte d’autres et nous construit une histoire effrayante et possible à la fois. Le personnage principal, Abigail, sort de l’enfance et sa féminité fait peur à la société puritaine dans laquelle elle grandit. Autour d’eux, on craint la population autochtone et on craint surtout le diable, dont parle toujours le pasteur. Celui-ci souhaite ramener sa paroisse dans le droit chemin et est prêt à beaucoup pour récupérer son pouvoir, et de l’argent pour l’église.

Encore une fois, la femme fait peur et est diabolisée. L’hystérie collective est décrite de façon frappante et le dessin, souvent très cru, sert parfaitement le propos. C’est révoltant, cruel, et on se dit que ça pourrait tellement être vrai. Ça pourrait tellement être ça, la vraie histoire. La façon qu’à le pasteur de tout retourner à son avantage (et à celui de dieu) est effrayante, et nous fait réaliser à quel point, quand certains veulent convaincre, aucun argument n’est efficace. Aucun. Et ça n’a pas changé.

J’ai pour ma part beaucoup aimé les illustrations, avec un coup de coeur pour la dernière page, qui m’a fait fondre en larmes. Une lecture que je conseille, et que j’ai vraiment appréciée.

C’était ma BD de la semaine!

Et c’est chez … quelqu’un… note à moi-même, ne pas oublier d’ajouter le lien…