Ninth House – Alex Stern #1 – Leigh Bardugo

Le comment du pourquoi

C’est avec ce roman que je découvre la plume de Leigh Bardugo. J’avais au départ choisi de lire Six of Crows, mais j’ai tellement entendu de bien sur cette série que j’ai perdu l’envie de la lire. Je sais, je sais, il ne faut pas chercher à comprendre. Mais bon, on m’a dit les mots « Yale » et « sociétés secrètes ». Dites, comment on résiste à ça, hein?

De quoi ça parle

Alex Stern n’a pas eu une adolescence facile. Un jour, elle se retrouve sans trop s’en rendre compte dans une relation abusive, et nous savons très tôt qu’elle n’en est sortie qu’à la suite d’un drame. Elle n’a pas du tout le niveau mais se retrouve à Yale, recrutée par un mystérieux doyen pour faire partie de la société secrète Lethe, la fameuse 9th House, chargée de s’assurer que les huit sociétés secrètes majeures de l’université ne dépassent pas les bornes. Pourquoi elle? Car elle peut voir les fantômes. Les Gris, comme ils disent. Alex y voit sa chance. Non seulement elle peut fréquenter une grande université, mais pour une fois, on la croit et personne ne lui dit qu’elle est folle. Mais rapidement, son mentor, Darlington, n’est plus là pour la guider et elle va devoir faire face seule, sans connaître les codes.

Mon avis

Voici donc un roman que j’ai bien aimé, tout en sachant qu’il ne plaira pas à tout le monde. Il est très sombre, parfois glauque, le déroulement du roman est lent (parfois très lent) mais pour ma part, j’ai passé un bon moment avec ce roman, que j’ai dévoré en une journée, dès que j’ai eu un peu de temps. C’est à dire dès que ça a été le week end et que je ne me suis pas effondrée dans mon lit au retour du travail. J’avais fait une fixation sur Yale et ses sociétés secrètes après avoir vu Gilmore Girls. Du coup, j’ai tout de suite adhéré, ne serait-ce que pour ça. Et l’idée d’une fille « comme ça », qui ne vient pas des beaux milieux, qui se retrouve en plein milieu d’une bande de privilégiés qui ne s’en rendent même pas compte, ça me plait terriblement. Cette atmosphère est hyper bien réussie, nous sommes toujours à la frontière entre le réel et l’imaginaire, et même si certaines scènes sont… comment dire… un peu-beaucoup gore, avec moi, ça a passé. Il y a certes beaucoup d’événements très dérangeants, mais au pire, on les lit vite!. Du moins, c’est ce que moi je fais, parce que sincèrement, dans ce cas-ci, on aurait pu se passer de quelques détails.

Alex, notre héroïne, ne vient clairement pas du même milieu que les autres. Elle ne maîtrise pas les codes, mais elle en a vu d’autres. Le roman fait un aller-retour passé-présent entre l’automne, où la jeune fille fait son apprentissage en tant que membre de Lethe en compagnie de Darlington, son mentor, et l’hiver, où nous la retrouvons seule, à tenter de se dépêtrer dans ce monde qu’elle ne comprend pas vraiment, et qu’elle ne prend pas toujours aussi au sérieux qu’elle ne le devrait. C’est quand une jeune femme, une dealeuse, est retrouvée assassinée qu’elle décide de mener l’enquête, et d’entraîner là-dedans Turner, l’inspecteur de police et Dawes, l’Oculus de Lethe. Et un fantôme aussi. Ça donne une idée du genre d’enquête… et du fait que ça ne va pas se passer nécessairement comme prévu.

Sérieux, j’ai passé un bon moment. J’ai a-do-ré Darlington, « The Gentleman of Lethe ». On n’a jamais trop de gentlemen et celui-là est vraiment choupi, avec sa « mission » qu’il prend très au sérieux. J’aurais juste aimé qu’il soit davantage présent car Alex, il faut apprendre à l’aimer, disons. Oui, je sais, c’est un peu lent au début et ça déboule par la suite, on peut tout voir venir (anyway, j’aurais ma place dans une société secrète vu que je suis devin… et que je n’ai besoin d’aucun boyau pour ça… ceux qui ont lu comprendront) et certaines scènes ne sont pas « nécessaires ». Je sais tout ça mais je l’ai quand même dévoré. J’ai particulièrement apprécié la notion de privilège qui est abordée dans le roman, le fait que certains peuvent s’en permettre plus que d’autres et que certains trouveront toujours une bonne raison pour expliquer pourquoi certaines femmes sont traitées comme elles le sont. On explore aussi le stress post traumatique, et j’espère que ça va se poursuivre dans le prochain tome. Les réactions d’Alex ne sont pas toujours logiques, mais nous pouvons comprendre petit à petit pourquoi elle agit de cette façon. Et ça c’est bien.

Une intrigue certes longue à démarrer, mais une chose est certaine, je veux lire la suite. J’aime bien la plume , ce qui ne nuit pas et, peut-être que je lirai Six of Crows, pour finir!

Camp – Rosen A.C.

Le pourquoi du comment

J’ai reçu ce roman juste un peu avant sa sortie et je l’ai sorti de la pile pour le challenge de l’été de Booktube Québec : lire un roman jeunesse /YA qui a un lien avec l’été. En plus, plusieurs personnes le lisaient. Du coup, je l’ai sorti. Et bon, on ne peut résister à un badge de camp en paillettes!

De quoi ça parle

Randall Kapplehoff a 16 ans et, pour la 4e année, il arrive au Camp Outland, son safe space à lui, un camp d’été de 4 semaines pour les jeunes queer. Mais cette année, pour Randy (oups, pardon, pour Del), c’est un extreme makeover car lui, le mec de théâtre, adepte de danse, de vernis à ongles et de licornes à paillettes, est follement amoureux de Hudson et ce depuis 4 ans. Le même Hudson dont les relations ne dépassent jamais 2 semaines et qui ne craque que pour des mecs « masculins » comme lui, ce que Randy n’est pas. Mais Del, oui! Del aime le sport, la nature, il est musclé et très « straight looking ». Donc, cet été, Del ne fera pas partie du musical annuel, mais ira plutôt à la conquête d’Hudson.

Mon avis

Entendons-nous tout de suite, je ne vais pas me poser en experte des problématiques vécues par la communauté LGBTQIA+. J’ai pas mal de copains qui en font partie, on en a discuté pas mal (avec une intensité directement proportionnelle au nombre de coupes de champagnes ingurgitées), mais si j’ai retrouvé certains des thèmes évoqués avec eux, ça ne représente pas leur vécu à eux (à noter: ils ne se connaissent pas nécessairement) et du coup, j’ai été prise de court au début du roman. En effet, eux dans le milieu gay, mes copains se sont toujours fait dire qu’ils n’étaient « pas assez ». Certains sont d’allure plus masculine, d’autres beaucoup moins, mais ils ont du mal à se faire accepter dans la communauté parce qu’ils ne fittent pas dans le moule. Du coup, le discours du début (qui est modulé par la suite, don’t worry), m’a un peu fait tiquer. Un mec gay ne peut pas être masculin sans jouer un rôle? Ben voyons! Le but, justement, ce n’est pas qu’il y a autant de façons d’être queer qu’il y a de personnes?

Bon, ceci dit, il paraît que c’est un vrai problème dans les communautés, ce fait qu’avoir l’air straight est « mieux » et du coup, je comprends pourquoi il est important d’en parler. De plus, le discours est modulé, à travers des conversations entre les jeunes. Ces conversations sont d’ailleurs ce que j’ai préféré dans le roman. Elles ont un côté très instructif, qui m’ont permis de mieux comprendre certaines réactions, mais ne semblent pas pour autant plaquées. Ça passe de façon hyper naturelle.

Mais bon… retournons au début. Le tout commence sur une idée que – avouons-le – plusieurs d’entre nous ont déjà eue : notre personnage principal veut se transformer en dreamboy pour son crush. Et ça, ça veut dire renier tout ce qu’il est et pas mal tout ce qu’aime. Cette année, il faut oublier la comédie musicale, les glitters et le vernis à ongles et faire du sport. Certes, il découvre que ça lui plait assez, mais ce n’est quand même pas sa passion. Ses amis, un peu étonnés de ce makeover extrême, tentent bien de lui dire que ce n’est peut-être pas l’idée du siècle, et que tout l’esprit du camp, c’est de pouvoir être lui-même, mais rien à faire, Del veut Hudson.

J’ai adoré l’amitié et la solidarité dans ce roman. Beaucoup plus ce que les relations amoureuses, qui constituent une grosse partie de l’intrigue. Vous savez, la romance et moi… J’ai aimé que les amis laissent Del faire ses propres expériences (et ses propres erreurs par le fait même), qu’ils le supportent malgré tout et qu’ils sont just fabulous (ouais, j’ai lu en anglais… j’ai du mal à rédiger mes billets en français ensuite). Il y a une réelle diversité de personnages queer, des situations complètement folles car Randy/Del doit cacher son identité (et réussit plus ou moins), et j’ai beaucoup aimé l’atmosphère camp de vacances, où tout est super intense et on ressent vraiment cette sensation de « bulle de bien être ».

Je ne suis pas la meilleure personne pour juger de la qualité des représentations queer mais je crois que ce roman peut sincèrement parler aux jeunes, qu’ils se questionnent ou non sur leur identité. Il y a un côté « sex positive » et plusieurs moments sweet. En tant que lectrice adulte qui ne trippe pas tant sur la romance, j’ai trouvé que cette partie de l’intrigue prenait pas mal de place et le reste m’intéressait davantage.

Un joli message de « Be yourself, no matter what they say » et sur le fait que les étiquettes ne nous définissent pas vraiment, qu’il y a davantage à une personne.

Et je serais vraiment contente de savoir ce que les gens de la communauté LGBT en penseront!

Les deux vies de Pénélope – Judith Vanistendael

Le comment du pourquoi

Je pense que je l’ai vu sur les blogs, dans nos mercredis… mais je ne sais plus où. Moi qui n’oubliais jamais ce genre de choses, on dirait que mon cerveau s’est mis à off!

De quoi ça parle

Après 4 mois à Alep en tant que médecin sans frontière, Pénélope revient chez elle et retrouve sa fille et son mari qui l’aime, mais elle se sent déchirée entre ses deux vies, ses deux univers.

Mon avis

Voici une très belle BD, très touchante, qui m’a énormément plu. J’ai été séduite autant par le graphisme à l’aquarelle que par l’histoire, belle et déchirante à la fois. Et dès le début, on sait que ça va faire mal, mais on est intrigué… et pour ma part, j’ai été happée.

Pénélope n’a rien de la femme d’Ulysse. Elle, elle part. Ceux qu l’attendent, ce sont son mari Otto et sa fille, Hélène, ainsi que toute sa famille. Si Otto et Hélène sont compréhensifs et tentent de la supporter dans ses fréquentes absences à la poursuite de ses ambitions et de ses rêves, c’est un peu plus compliqué pour sa famille, qui juge ses absence, son absence. Lors de cette visite, Hélène a 13 ans, elle vient d’avoir ses règles, et aurait bien besoin de sa mère, qui est là sans y être. C’est que dans son bagage, elle a ramené une jeune fille, une jeune fille qui n’a pas survécu à sa chirurgie.

On traite, par petites touches, de la relation mère-fille, du rôle de mère, d’épouse, de femme. de la difficulté de concilier ses deux vies tellement différentes. Elle semble aussi en choc post-traumatique (qui n’est jamais nommé), et ne réussit pas à vraiment revenir de Syrie. Elle est là sans l’être et est constamment déchirée entre ses deux rôles.

C’est une très belle BD, une parenthèse dans la vie de Pénélope… et un récit qui ne peut que bouleverser.

La mariée de corail – Roxanne Bouchard

Le comment du pourquoi

Parce que j’avais eu un coup de coeur de la mort qui tue pour « Nous étions le sel de la mer » de la même autrice, et que ce roman en est la suite. Il me le FALLAIT.

De quoi ça parle

Nous sommes toujours en Gaspésie, cette fois avec l’inspecteur Joaquin Morales, arrivé depuis peu de Longueuil dans ce petit monde au goût de sel et aux accents de vérité. Nous l’avions déjà rencontré dans « Nous étions le sel de la mer », alors qu’il enquêtait sur la mort de Marie et cette fois, il est appelé près de Gaspé pour enquêter sur la disparition d’Angel Roberts, pêcheuse de homards qui semble évaporée en mer. Il hésite un peu car Sébastien, son fils, vient de débarquer avec des casseroles pour tout bagage, mais va y aller parce que bon, cette femme est aussi la fille de quelqu’un.

Mon avis

Roxanne Bouchard prouve encore une fois qu’un polar poétique, ça existe, et que c’est drôlement bien. Contrairement au premier tome, dans cette seconde enquête, l’inspecteur Morales est le personnage principal et c’est lui que nous suivrons presque tout au long du roman. Il est dans une impasse avec son épouse Sarah et son fils est aussi clairement en plein coeur d’une crise conjugale.

Nous sommes dans la Baie de Gaspé, encore une fois près de la mer, dont les vagues rythment le récit. On sent presque le vent sur nos visages ainsi que l’odeur prégnante du sel et du varech. Le récit nous amène sur les traces d’une autre femme plus grande que nature, qui a toujours foncé pour faire sa place dans un métier d’hommes qui ne lui ont pas toujours rendu les choses faciles. Loin de là. Une femme capitaine de homardier, imaginez.

Autour d’eux gravitent de nouveaux personnages (et un ancien, Cyrille, marin en fin de course… quel plaisir de le retrouver), qui ne rendront pas l’enquête facile pour Morales. Il ne connaît pas les gens, les histoires de familles, ni même le fonctionnement de ce petit univers gaspésien somme toute fermé, presque désert une fois que les touristes sont partis.

Les personnages, leur langage oral, très imagé, donnent énormément de saveur à cette enquête. C’est aussi une magnifique ode à la Gaspésie, ses paysages et ses habitants. Suivre l’enquêteur est très intéressant, certes pour découvrir ce qui est arrivé, mais surtout QUI sont ces gens. Ce n’est pas le genre de polar qui nous fait tomber sur le derrière avec ses révélations. L’intérêt est ailleurs selon moi. Qui étaient vraiment Angel, ses frères, son mari, ses amis? Une touche d’humour, une plume qui va droit à mon petit coeur et si je n’ai pas eu le coup de coeur incroyable du premier tome (la voix de Catherine m’avait transportée), j’ai été touchée par les images et j’ai adoré ma lecture… et j’espère pouvoir retourner dans cette Gaspésie magnifique et magnifiée par le regard de l’autrice.

J’adore!

Acouphènes : les reconnaître et les oublier – Sylvie Hébert

Le comment du pourquoi

Ici, nette intrusion de mon boulot et de mon domaine d’études sur le blog! Je l’ai dit assez souvent, je suis orthophoniste et « dans mon temps », on avait un tronc commun « orthophonie-et-audiologie ». Du coup, j’ai quand même pas mal de notions de base en audio et un ouvrage sur le acouphènes, ça m’intrigue. Of course. On ne se refait pas!

De quoi ça parle

Les acouphènes, vous savez ce que c’est? Vous savez, ces bruits souvent gossants qu’on a parfois dans les oreilles sans qu’on sache d’où ils viennent? Ben c’est ça. Et quand ça n’arrête jamais, ça peut pourrir la vie. Ce livre est destiné aux personnes qui en souffrent, mais aussi à l’entourage, pour qu’ils puissent comprendre.

Mon avis

Entendons-nous, Sylvie Hébert a déjà été ma prof (ou chargée de cours… je ne sais plus) et elle est hyper au fait de toutes les nouvelles percées scientifiques et des nouvelles recherches. Du coup, ici, aucun doute à avoir sur la crédibilité à apporter aux propos. Tout est « backé » à la fois par la rechercher par l’expérience clinique. Et de nos jours, disons que ça compte double!

Est-ce accessible? Je dirais que les différentes parties s’adressent à différentes personnes. Certaines pages « roses » sont simplifiées, résumées, et seront particulièrement utiles pour les usagers (ma grande amie est audiologiste en réadaptation… du coup, vous pouvez vous imaginer que ce livre lui est passé entre les mains) qui veulent connaître les grandes lignes par rapport à leurs acouphènes. C’est accessible pour tous mais exact scientifiquement. Ce qui est top.

Par contre, si on veut aller plus loin et vraiment comprendre les mécanismes qui sous-tendent les acouphènes, il y a de quoi faire avec ce livre. On nous explique comment on entend, d’où viennent les acouphènes, d’où ils ne viennent pas (et pourquoi), à quoi ça peut être lié (ou pas). On aborde ensuite les différents traitements, incluant les thérapies incluant le son et la réaction et leur efficacité, telle que démontrée par la recherche. Si l’audiologiste est au coeur du traitement, l’autrice ne néglige pas non plus les autres professionnels (médecin, physio, pharmacien, etc.) qui peuvent participer au traitement et au diagnostic. De plus, quand on ne sait pas, on ne sait pas, et c’est mentionné. Et ça, ça me plait beaucoup.

J’aurais juste aimé un peu d’information sur les traitements moins traditionnels car les clients posent souvent, souvent la question (en particulier l’acupuncture), ne serait-ce que pour nous dire ce qu’on sait, ce qu’on ne sait pas, et diriger les gens. Mais à part ça, je trouve l’ouvrage très complet, très facile à lire, et je conseille!

Bordeterre – Julia Thévenot

Le comment du pourquoi

Je pense que j’avais vu ce roman chez Steph de Pikiti, sur Booktube. En fait, j’avais lu que l’un des personnages principaux n’était pas neurotypique. Du coup, comment je résiste, moi? Un roman fantasy avec un héros présentant probablement un TSA (ce n’est pas nommé… mais bon), il fallait que je le lise.

De quoi ça parle

Inès, 12 ans, et Tristan, 16 ans, sont frères et soeurs. Inès est assez rentre dedans et, depuis toujours, défend son grand frère Tristan qui n’aime pas regarder dans les yeux, n’aime pas être touché et a du mal avec les relations sociales. Il a besoin de ses routines, de ses repères et aime faire des mots croisés dans sa tête. Un jour, alors qu’ils sont au camping, ils voient au loin un château… et leur chien disparaître. Ils vont le suivre et se retrouvés soudainement ailleurs, à Bordeterre, où ils seront accueillis par un Gardien… étrange et où il se révèlent être transparents. Débordés de première génération. Des moins que rien, quoi.

À Bordeterre règne une ambiance très particulière et surtout une politique un peu immonde, où les riches ont tous les droits et où un Gouverneur sinistre fait régner la terreur. Une fois débordés, impossible de revenir et rapidement, ils oublient leur ancienne vie. Séparés, Tristan et Inès vont être entraînés dans des troubles politiques intenses et surtout, chercher à ne pas s’oublier mutuellement, dans un monde où la magie passe par la chanson.

Mon avis

N’y allons pas par quatre chemins, j’ai beaucoup aimé ce roman fantasy jeunesse/young adult, qui nous entraîne dans une révolution menée par des jeunes, rien de moins. Je ne suis pas aussi over the top que Pikiti, pour qui ça a été un réel coup de coeur de la mort qui tue, mais somme toute, on embarque hyper facilement dans ce monde étrange dont on ne sait presque rien. Nous ne suivons pas uniquement la fratrie mais nous rencontrons aussi une tripotée de personnages provenant de différents environnements de Bordeterre: Alma, jeune révolutionnaire qui sort de prison, Philadelphe, capitaine de la garde amateur de poésie, Aïssa, femme de chambre du dit Philadelphe, toute une Chorale d’orphelins qui n’ont rien, des Cordiste (je vous laisse découvrir) et des nobles plus ou moins sympathiques. Nous avons donc différents points de vue sur cet univers où les plus récents arrivants sont les esclaves des anciennes familles. Et comme Tristan et Inès ont rapidement des destins très différents, on peut appréhender les deux côtés de la médaille, ce qui est chouette.

C’est un roman qui met un moment à s’installer mais une fois dedans, c’est rempli d’action, de rébellion et d’aventures entre Bordeterre, le Plan Zéro, le château, Bordetôle et les grottes des rebelles. J’ai apprécié l’esprit révolutionnaire et surtout la place de la musique et la poésie dans l’histoire. Un peu partout sont disséminés des paroles de chansons et des vers de grands poètes… et vous pouvez vous imaginer que ça m’a plu. Plus que plu. La plume est assez exigente (genre, ce n’est pas pour les enfants de 8 ans… et à bien y penser, certains des thèmes ne sont pas non plus pour des enfants de 8 ans!) mais très belle et agréable. Je sens que c’est une autrice que je vais suivre.

Mon bémol à moi est à propos du personnage de Tristan, qui démarrait bien pour un personnage non-neurotypique. Pourtant, après son arrivée à Bordeterre, alors qu’il gagne confiance, il y a un peu un petit miracle… Disparu le bégaiement… et presque disparu l’autisme. Bon, on peut pardonner car il est passé dans un autre plan, mais j’aurais aimé qu’il soit « quelqu’un d’important » en gardant ses caractéristiques. Bref, ça m’a agacée.

Un récit très dense, dans un univers que j’aimerais découvrir davantage (un tome 2 serait très appréciable, même si ce livre se suffit à lui-même), vu que quelques indices nous sont données, mais qu’elles auraient mérité d’être davantage exploitées, notamment en ce qui concerne la mythologie et l’histoire de Borderre. C’est complet, il y a de la diversité, beaucoup d’action, il n’y a pas trop de descriptions mais l’autrice réussit à nous transporter dans son univers… et j’ai passé un très bon moment.

À découvrir donc! Je conseillerai, je le sens!

Cinq branches de coton noir – Cuzor / Sente

Le comment du pourquoi

J’avais repéré cette BD dans l’un de nos rendez-vous du mercredi il y a plusieurs semaines… genre… vraiment plusieurs semaines. Et dans le contexte actuel, j’ai trouvé que cette BD était appropriée. Oui, je sais, les bédéistes ne sont pas noirs. Toutefois, le thème du racisme à travers l’histoire est plus que jamais d’actualité alors go!

De quoi ça parle

1944. Lincoln est soldat, en Europe, jamais au combat, of course. Un Noir au combat? Impensable. Un jour, il reçoit une lettre de sa soeur Johanna, qui a retrouvé un vieux journal intime datant de 1776, qui raconte, du point de vue d’une lointaine ancêtre, la création du premier drapeau américain, où serait cachée une mystérieuse étoile noire.

1776. Angela, noire affranchie, travaille pour Betsy Ross, couturière émérite, qui reçoit la commande de confectionner le drapeau des États-Unis qui sera présenté le fameux 4 juillet. Pour une raison que vous découvrirez, elle va coudre une étoile noire, bien cachée dans le drapeau.

Mon avis

Cette BD de presque 175 pages m’a passionnée. Je ne sais pas à quoi je m’attendais, mais pas à cette balade à travers 200 ans d’histoire de noirs américains dans un monde blanc qui ne les reconnaît pas en tant qu’égaux… et parfois à peine en tant qu’humains. Si l’histoire de départ est fictive (je ne crois pas qu’il y ait eu une étoile noire sous une étoile du premier drapeau américain), cette idée de base nous offre une épopée complète et dense, qui fait encore écho à ce qui se passe encore aujourd’hui. Le racisme se transforme, mais il perdure, malheureusement.

Nous suivons donc plusieurs personnages que l’entourage juge par la couleur de leur peau, sans tenter de les connaître. Pour l’armée, les soldats noirs ne sont bons qu’à laver les toilettes, certainement pas assez fiables pour combattre. Nos trois héros voient donc une occasion d’aller au front et enfin de prouver qu’ils peuvent le faire. Bon, ils seront dans les Monument men, donc barouettés un peu partout, mais nous les suivrons dans des batailles incroyables, incluant le débarquement de Normandie, toujours à la recherche du drapeau mythique volé par les Allemands. C’est une histoire complète, fascinante et surtout révoltante. Certaines réparties, certains regards font vraiment mal et on ne peut s’empêcher de se dire qu’en fait, ça n’a pas vraiment changé. On tremble pour nos héros, la fin demeure amère, mais cette BD est marquante.

Je suis très fan du dessin, toujours bicolore et évocateur, sombre et très collé à cette histoire somme toute terrible. Les planches regorgent de détails et créent une ambiance très particulière. Une BD que je conseille fortement. J’aimerais avoir l’avis de personnes noires, vu que cette histoire est racontée par des blancs… mais elle a su toucher ma corde sensible!

C’était donc ma BD de la semaine!

Toutes les BDs chez Stephie cette semaine!

Janua Vera – Jean-Philippe Jaworski

Le comment du pourquoi

Après ma lecture de « Gagner la guerre », je ne POUVAIS pas quitter le vieux royaume. Ce monde existait dans ma tête, rien de moins. Du coup, il fallait que j’y reste et j’ai pris Janua Vera, dans sa nouvelle version (celle avec la préface de Benvenuto et les deux nouvelles supplémentaires). Il fallait.

De quoi ça parle

Je vous avais dit dans mon billet sur Gagner la guerre (ou alors c’est dans la vidéo youtube… ou encore sur Insta… bref, quelque part) que le monde créé par Jaworski était incroyable et que je sentais qu’on ne faisait que l’entrapercevoir? Clairement, c’était le cas parce que dans ce recueil de – longues – nouvelles, nous découvrons petit à petit différents aspects et peuples du Vieux royaume ainsi que son histoire. Et elle est riche, cette histoire!

Mon avis

Vous savez quoi? Je ne lis jamais les ouvrages « pas dans le bon ordre ». Mais ici, c’est APRÈS Gagner la guerre que je me suis lancée dans ces nouvelles et ça l’a vraiment fait pour moi. Quel plaisir de voir apparaître quelques personnages aperçus dans Gagner la guerre et de comprendre leur histoire. En effet, nous y croisons l’elfe Annoeth, le duc de Broemel, Cecht et Dugham les Ouromans, Gaidéris ou encore Albinella et Melanchter. Du coup, malgré les styles différents des nouvelles, les époques variées et le fait qu’on se balade un peu partout dans le vieux royaume, il se dégage une certaine unité du recueil et j’étais hyper déçue de voir arriver la fin. Je veux d’autres histoires dans ce monde!

Encore une fois, on se délecte de la langue et de la plume de Jaworski. J’adore sa prose, sa façon de tortiller les histoires et de leur donner, à toutes un côté épique. La préface de Benvenuto Gesufal est géniale et j’ai beaucoup aimé la nouvelle le mettant en vedette « Mauvaise donne » (et dont je vous ai déjà parlé dans son adaptation BD) et qui nous offre une histoire hyper complète, complexe et qui nous explique encore mieux QUI est Leonide Ducatore. J’ai adoré retrouver Ciudalia et, bizarrement, le lire après Gagner la guerre ne m’a pas du tout dérangée. Mais bon, ça, c’était écrit dans le ciel que j’allais aimer! Parlons plutôt des autres nouvelles.

Si la première nouvelle, qui nous plonge dans l’esprit de Leodegan, le roi-dieu troublé par un rêve et confronté à sa propre mortalité, est plus onirique, les styles sont hyper différents d’une histoire à l’autre. On trouve un côté Pratchett dans « Jour de guigne » (pas ma préférée mais il y a vraiment un côté « grand n’importe quoi » qui m’a plu) et on se croirait dans les romans de chevalerie avec un Aedan certes chevaleresque (mais bon, j’avoue avoir éclaté de rire à la fin) dans « Le service des dames ». Il y a certes des récits de guerre, mais j’ai été hyper touchée par « Le conte de Suzelle », qui explore la confrontation entre espoirs et réalité, avec une allure de conte nordique, et où nous voyons apparaître le rêveur Annoeth. C’est une histoire du quotidien, triste et mélancolique à la fois. « Comment Blandin a disparu » m’a beaucoup touchée, avec le récit d’Albinello, qui parle de peinture, de fresques, mais surtout d’idéal amoureux qui amène presque au bord de la folie. La fin m’a beaucoup plu. Et que dire du récit de Cecht, étrange au départ, mais qui parle surtout de deuil… La nouvelle que j’ai le moins aimée, la plus étrange, est « un amour dévorant », où de mystérieux appeleurs terrorisent les habitants de Noant-le-Vieux. Mais le recueil se termine en beauté avec « Le confident », qui nous fait pénétrer dans les confins du culte du Désséché. Ouf!

Plus ça va, plus je me dis que cet auteur a un vrai don pour créer des univers et des mythologies. D’ailleurs, à la fin du volume, on nous explique les dynasties, les cultes, la géographies et les guerres. Et c’est là qu’on réalise qu’il y aurait tellement à dire!

Ya pas à dire, je suis fan!

Hamnet – Maggie O’Farrell

Le comment du pourquoi

Maggie O’Farrell + Shakespeare.

Ai-je vraiment besoin d’en dire plus?

De quoi ça parle

Straford-upon-Avon, fin du 16e siècle. Un jeune professeur de latin croise Agnes, la fille aînée de la famille, connue pour son extravagance, ses dons et sa connaissance des herbes. Ils tombent amoureux, se marient, et eurent trois enfants : Susanna, Judith et Hamnet.

Au début du roman, Hamnet est un jeune garçon solide, espiègle et en bonne santé. Une semaine plus tard, il serait mort.

Mon avis

Je n’avais lu que des avis hyper enthousiastes sur ce roman. En plus, il est dans la shortlist pour le Women’s Prize for fiction. Du coup, j’avais des attentes au top. Imaginez, une autrice qu’on adore, qui essaie de raconter la vie de la femme de Shakespeare, vie d’ailleurs très peu documentée et imaginer ce qu’elle a pu être… ça avait tout pour me plaire. Et j’avoue que, dans ce cas-là, c’est un cas de « c’est pas lui, c’est moi »… et que je n’ai pas détesté… mais je m’explique.

Le roman est divisé en deux parties. Avant la mort du fils de Shakespeare, et après. La première partie raconte la rencontre et l’installation du couple, en flashbacks, alors que Judith, la fille de Shakespeare, est malade et au lit, avec une grosse fièvre et des bubons. Et pour moi, la terrible hypocondriaque, ça a été un peu le problème. Une épidémie de peste, en pleine épidémie de Covid. C’était pas une bonne idée. J’ai passé 2 jours à checker pour les puces et à me gratter partout. Je n’avais donc pas nécessairement hyyyyper hâte de me mettre à ma lecture, pendant la dite première partie. J’ai aussi eu l’impression que tout était survolé, mais peut-être est-ce parce que MOI je survolais! Tsé, question de ne pas me faire peur à moi-même!

Par contre, la seconde partie, centrée sur le deuil d’Agnes et de la famille, est magnifique. La souffrance est palpable, et on croit sentir le poids de la culpabilité et de la peine sur les épaules de cette femme forte, un peu crainte, hors-norme, qui voit l’avenir dans la main et qui « sait » beaucoup de choses. L’évolution de la femme, du couple, de l’entourage à travers cette épreuve est criante de vérité. Et cette partie m’a passionnée. De plus la plume de Maggie O’Farrell est toujours aussi belle, fluide et imagée et ce tout au long du roman. Je suis fan depuis le début de sa façon de décrire la nature ou les sentiments. Elle a vraiment un don pour nous faire faire un voyage dans le temps et faire vivre les époques.

Shakespeare est là, mais on voit davantage l’homme que la légende. L’homme faillible, souvent à contretemps avec son entourage et peu reconnu par ses proches. L’homme vu par son épouse qui l’adore mais qui le voit tel qu’il est, sans son halo de gloire. C’est un roman sur la femme, sur sa femme, restée dans l’ombre alors qu’il rayonnait sur les scènes londonniennes et qu’il osait écrire une pièce appelée « Hamlet ».

Est-ce la vérité? On s’en fiche un peu, en fait. L’autrice a brodé, inventé, a créé un personnage de femme qui n’a pas existé comme telle, mais qui était probablement tout autre. L’histoire en dit peu… et on voudrait bien y croire, à cette version. C’est juste dommage pour moi que je sois restée si extérieure à la première partie…

13e avenue – #1 – Vigneault / Pettersen

Le comment du pourquoi

Parce que tout le petit groupe qui participe au défi estival le lisaient… je ne pouvais pas être en reste, comme vous pouvez vous imaginer.

De quoi ça parle

Un jour, au retour de l’école, Alexis, 12 ans, trouve sa mère en larmes. Son père a trouvé la mort dans un accident de travail. Elle décide donc de quitter Chicoutimi pour aller habiter à Rosemont, en plein Montréal, cette ville qui lui fait peur. Il va rapidement rencontrer Alice, la plus belle fille qu’il n’ait jamais vue mais aussi Ernest, le mystérieux voisin d’en haut.

Mon avis

Qu’est-ce qu’il est bien cet album! J’aime toujours ces albums du déraciment et dans le cas du petit Alexis, il est total. Il est en deuil de son père, ses routines familiales sont changées, nouveau quartier, nouvelle ville, nouveaux amis et entrée au secondaire. Il a perdu tous ses repères et se retrouve face à lui-même, à explorer son nouveau quartier alors que sa mère, mauvaise chauffeuse émérite et en ayant rien que juste pour elle, conduit l’autobus 67.

La fin de l’enfance et la découverte d’une nouvelle vie sont super bien exploitées dans cette bande dessinée. On se souvient avec un sourire de nos propres balades dans nos quartiers, des popsicles (au bananes, dans mon cas) et des premières games de cachette BBQ. Cette atmosphère si particulière, qui ne dure rarement plus d’un été, est réellement bien représentée et c’est un plaisir de s’y retrouver. Certes, Alexis est déboussolé. En plus du deuil de son père, il vit ses premiers émois, voit sa mère pleurer et ne sait trop comment réagir. Ajoutons à ça une petite dose de fantastique… et on passe vraiment un bon moment.

Le dessin, toujours en noir et blanc mais grisé pendant les souvenirs, est très attrayant, avec ses traits simples et ses décors très détaillés. Que ce soit l’Étape ou le quartier Rosemont, on y trouve plein de clin d’oeils et d’éléments du décor réel. C’est aussi une ode à l’enfance en ville, qui peut être aussi très chouette, entre ruelles, cours et escaliers extérieurs. On y sent un réel amour pour ce quartier de Montréal.

Il semblerait qu’il y aura plus d’un tome (j’espère, étant donné la fin, qui soulève plein de questions)… et je lira la suite avec grand plaisir!

C’était ma BD de la semaine!

Tous les billets chez Noukette