Train de nuit – Martin Amis

train-de-nuit.jpgCe roman, je devais le lire pour le challenge d’Ys.  Genre, le 20 novembre.  Comment on dit… oups??

 

C’était ma première rencontre avec l’auteur.  C’est d’ailleurs peut-être pour ça que j’ai tant de mal à bien cerner ce roman.  Roman noir?  Parodie des polars?  Du langage américain?  Bref, je sens que je serai un peu décousue parce que probablement que j’ai compris plusieurs points tout de travers… si une bonne âme l’a lu, je serais preneuse pour une bonne discussion!

 

D’emblée, dès la première phrase, on sent que ça va être particulier.  « Je suis de police ».  Heu… ok.  Weird.  On va voir en anglais.  « I am a police ». Pas policeman ou policewoman, mais juste police.    Ici, au Québec, « c’est une police », on dit ça.  Mais aux États-Unis (car c’est dans une ville un peu glauque américaine que ça se passe), je n’ai jamais entendu dire ça.  A cop.  Mais pas « a police ».  Mais bon, je m’égare.  Je ne suis pas États-Unienne non plus hein!  Tout ça pour dire qu’on a affaire à un « je » à la voix bien particulière, parlant une espèce de jargon mi-anglais, mi-américain, mi-policier.  Mike Hooligan, la narratrice (parce que oui, c’est une fille), ne l’a pas eue facile.   Elle enchaîne les bons à rien et a l’air d’un joueur de football.   Puis un jour, on lui demande un service.  Elle doit aller annoncer à son mentor, celui qui lui a sauvé la vie, que sa fille Jennifer s’est suicidée.  Jennifer qui était la joie de vivre incarnée.  La personne la plus équilibrée de la terre.  Belle, brillante astrophysicienne, avec son copain tout aussi beau et intelligent.  

 

Il y aura donc enquête non-officielle.  Ou quête.  Pour comprendre.  Pour voir ce qui se cache derrière ce suicide.  

 

Si j’ai beaucoup adhéré au personnage de Mike et à la narration – en partie – (que j’entendais en voix off, comme dans un vieux film noir, avec un accent populaire), j’avoue être restée un peu en plein milieu d’un souffle à la fin de ce roman.  Et pas certaine de comprendre non plus.  J’ai apprécié les réflexions sur la vacuité de la vie, sur les apparences, sur l’absurdité de certains crimes (genre, pour une histoire de couche-culotte), sur la notion de vie/survie.  J’ai apprécié les interrogatoires, les pistes, la démarche.  Puis, soudainement, le doute… une procédure policière, vraiment?  Hmmm… pas certaine.   Et j’ai beaucoup, beaucoup réfléchi une fois la dernière page tournée.  

 

Toutefois, étant donné que je me suis sentie un peu… stupide à l’occasion, je ne peux pas dire que j’ai totalement embarqué non plus.  

 

Je vous l’avais dit, vous pouviez aisément vous passer de cet avis-qui-ne-veut-rien-dire!  Ma spécialité, n’est-ce pas!  N’empêche que je relirai l’auteur, ne serait-ce que pour voir si le style, avec ses répétitions et sa manière d’aller droit au but est caractéristique ou pas. 

 

Des suggestions?

Le retour de l’ours – Catherine Lafrance

retour-de-l-ours.jpgCe fut une lecture bien particulière que ce roman.   J’ai tout de suite été happée par l’atmosphère un peu onirique, glaciale et hors du monde de ce petit village du grand nord, tout en me demandant à quel genre de roman j’avais affaire.  Fable, conte, adulte ou jeunesse, j’étais perplexe.  Et je dois avouer que si j’ai bien aimé ma lecture, je reste quand même perplexe quant à ce que c’est exactement.  Mais je m’explique!

 

J’ai d’abord mis un moment pour réaliser où j’étais.  Ou plutôt « quand » j’étais.  On parle de cataclysmes, ayant eu lieu il y a longtemps.  Cent cinquante ans, environs.   Mais ce petit village de moins de 500 âmes (350, si ma mémoire est bonne)  est tellement loin de tout que ça pourrait être n’importe quand.  On s’auto-suffit, on chasse, on pêche, les femmes maîtrisent les herbes.  Tout va assez bien jusqu’à ce qu’un jour, le vigile, Aloupa, redescende de son promontoire avec le mot « Nanuk » à la bouche.  Il a revu l’ours.   Celui qui a disparu il y a 150 ans.  Est-ce un bon signe, un mauvais?  On en doute.  Mais ce qui est certain, c’est que son retour dérange, jusqu’à diviser complètement le village qui lutte pour sa survie dans un contexte où tout manque.  

 

C’est surtout à travers le regard de Sakari, jeune fille de 15 ans on ne peut plus normale au départ, que nous vivrons ces saisons dans le village.  Presque normale en fait.  Sakari a bien l’intention de suivre la voie tracée pour elle mais elle est aussi la fille du chef et la petite fille du vigile.   Et ceci va changer son destin, jusqu’à le bouleverser complètement.  

 

Pour apprécier ce roman à sa juste valeur, je l’ai considéré comme un roman d’apprentissage autant que comme un conte écologique.  Découverte de son destin, tâche qui semble au-dessus des forces de la jeune fille, des secrets, des révélations…  Bien entendu, on voit venir les choses.  Les révélations n’en sont pas réellement et on ne peut s’empêcher de se demander POURQUOI il est si important que les connaissances des vigiles soient gardées secrètes.  Il me semble que bien des problèmes auraient pu être évités…  mais bon, je m’égare!  La jeune Sakari devra donc se définir en tant que personne hors des sentiers battus, malgré le fait qu’elle soit une femme.  Elle verra changer ses repères, elle devra faire des deuils.  La relation qui se tisse avec son grand-père est touchante, même si on a parfois du mal à comprendre qui ils sont vraiment, en raison de l’aspect conte, un peu nébuleux, que j’évoquais au début.  J’ai eu l’impression de vivre cette histoire à travers un mur de glace (ou un blizzard, au choix) tant elle a eu pour moi un côté irréel, presque magique.  

 

Un roman de passage à l’âge adulte avec des côtés convenus certes (du moins pour tous ceux qui lisent de la jeunesse, de par la construction et l’évolution du récit… mais – oh bonheur – il n’y a pas l’éternel triangle amoureux des romans YA où l’héroïne est prise entre deux garçons.  Alleluiah!) et un message parfois un peu appuyé, mais une atmosphère de légende glacée véritablement réussie.  L’écriture est maîtrisée et évoque de magnifiques images de paysages enneigés, tout en nous faisant entrevoir une culture bien particulière, près de la nature.  Un roman rempli de luttes de pouvoir, de craintes face au changement mais aussi d’espoir. Malgré tout.  Quand je parle de « luttes de pouvoir », entendons-nous, ce n’est pas « Le trône de fer »!  On a un rythme lent, parfois contemplatif mais il y a là une belle réflexion sur les tournants imprévus que prennent parfois la vie, que ce soit la vie de l’homme ou la vie en général.  

 

Un  roman qui évoque les légendes, qui plaira aux amoureux de la nature et des grands espaces blancs.  Moi, en tout cas, j’ai passé un très bon moment de lecture dans cet univers!  

Un porc-épic dans un sapin – Helaine Becker/Werner Zimmerman

porc-epic.jpg Un petit dernier album de Noël (à moins que je ne fasse une nouvelle razzia-albums d’ici le 24 décembre, ce qui serait somme toute étonnant) avant le grand jour.  Celui-ci m’a été vivement conseillé quand j’ai demandé un livre à structures répétitives (oui, je suis redondante, je sais… mais c’est vraiment bien pour les touts petits avec qui je travaille).  S’il répond parfaitement à ce critère, je l’ai plus ou moins utilisé avec mes cocos pour cause de vocabulaire un peu difficile pour leur niveau.  Mais mes neveux ont adoré!

 

L’album est basé sur la chanson « Les douze jours de Noël » (The twelve days of christmas… vous savez, celle qui énumère plein de cadeaux et qui finit toujours par « and a partridge in a pear tree »).  Sauf qu’ici, la perdrix est un porc-épic et le poirier un sapin.  Très Noël, quoi!  À chaque page, on ajoute un cadeau… ou deux… ou trois…  Et ici, ce sont des animaux/personnages fortement associée au Canada.  Des caribous, des castors, des Coupe Stanley, des joueurs de Hockey (des Maple Leafs de Toronto, plus exactement, qui veulent désespérément la fameuse coupe)… bref, ça fait très couleur locale.   Les écureuils-balayeurs (comme au curling), les macareux cornemuseurs et surtout les polices montées avec leurs beignes m’ont bien fait rire.  

 

Je l’ai déjà dit, je travaille avec des enfants en difficulté langagière, parfois sévère.  Donc, le vocabulaire de cet album est un peu compliqué (et surtout pas super utile au quotidien… des cornemuseurs, des huskies, des gendarmes) pour eux mais par contre, pour les plus grands ou les enfants qui n’ont pas ces difficultés, il présente des mots moins courants et des adjectifs variés, que la structure répétitive permet de retenir.  Question vocabulaire, je regrette seulement l’amploi du mot « brailleur », qui n’est pas du tout utilisé en ce sens au Québec.  Brailler, ça veut dire pleurer ici.  Mais bon, c’est peut-être juste dans ma région éloignée, je ne voudrais pas parler pour tout le monde!

 

Ceci dit, les images sont vraiment jolies et pleines d’humour.  Il y a toujours du nouveau dans la mise en scène de chaque page (pauvres écureuils!) et certains enfants se sont amusés comme des fous à recompter à chaque fois les personnages pour s’assurer que « le monsieur qui dessine » n’avait pas oublié d’en dessiner un (conclusion : il y a un joueur de hockey dont on ne voit que les doigts et ça a été bien difficile de faire comprendre que les huskies-voleurs-de-beignes n’avaient pas été « oubliés » mais qu’ils étaient en train de sortir de la page… bref, une longue, longue histoire!)  Pour faire compter répétitivement, c’est génialement merveilleux!  De plus, comme ils font toutes sortes d’actions, il y a beaucoup de petites phrases à faire produire avec des verbes variés (manger, courir, attraper, danser, se sauver, voler, jouer, transporter, etc) (et bon, un huskie, ça peut s’appeler un chien hein, si l’enfant est petit!) et plusieurs causes à effet à exploiter dans les images.   

 

Un album que j’ai eu besoin d’explorer un peu plus que d’habitude pour en découvrir les possibilités mais que finalement j’aime beaucoup, surtout pour l’humour et les détails.  En fait, les enfants ont vu tout ça beaucoup plus rapidement que moi et c’est grâce à eux que la magie de cet album a opéré pour moi!  Il faut aussi savoir qu’il existe un coffret avec le petit porc-épic en toutou.  

Je. Le. Veux. :)))

A Storm of Swords (Le trône de fer – 3) – George R. R. Martin

A-storm-of-swords.jpg Il est toujours difficile de parler de séries.  Dans le cas de celle-ci en particulier, c’est doublement difficile car l’auteur étant célèbre pour faire subir à peu près n’importe quoi à ses personnages (et par « n’importe quoi », je veux VRAIMENT dire « n’importe quoi »), juste de dire qui est encore en vie au début du roman, c’est spoiler.  Pas facile de parler du roman dans ces conditions n’est-ce pas!

 

Dans « A storm of swords », nous reprenons nos personnages là où nous les avions laissés à la fin du tome 2.  C’est à dire souvent en très très mauvaise posture.  Je dois avouer que j’ai eu un peu de mal à réellement me remettre dedans au départ.  Pas que c’était moins passionnant, pas que l’atmosphère était moins bien rendue… seulement, il y a BEAUCOUP de personnages.  Et ils sont tous dispersés d’un bout à l’autre de Westeros (là, je ne spoile pas hein…  ça arrive dès le début).  Du coup, d’un chapitre à un autre, c’est presque comme si nous passions d’un roman à un autre.  Du  moins, dans la première moitié.  Et il faut bien comprendre qu’avec tant de sous-histoires, chacune d’entre elles n’avance pas nécessairement à la vitesse de l’éclair…  De là le long moment que j’ai mis à lire le début.  

 

Par contre… que d’émotions!  Même en m’étant fait spoiler copieusement plusieurs éléments clé de ce tome (thanks to people who watch the series), il y a toujours des détails, des trahisons, des dialogues qui choquent.  Il y a une réelle originalité dans le traitement, et un grand réalisme aussi (tout en restant dans la fantasy).   C’est l’histoire des guerres et des rois de Westeros qu’on nous raconte, pas celle d’un super héros tout puissant qui tue une armée à la seule force de son bras.     C’est le jeu du pouvoir et ce qu’il implique.  

 

Toute la dernière partie est plus riche en rebondissements, il y a moins de pages entre chaque  chapitre d’un même « Point of vue character » et on a donc l’impression que tout va beaucoup plus vite… seulement parce que d’autres histoires sont davantage en arrière-plan, en fait.  Ceci dit, même si je savais beaucoup de choses et en avais deviné plusieurs autres, je n’ai pu me retenir de tourner les pages avec avidité, me suprenant davantage de l’habileté de l’auteur à amener les rebondissements.  Car rien ici ne sort de nulle part.  Tout est amené.  Avec brio, soit.  Souvent en non-dits et en sous-entendus.  Mais les règles sont respectées, l’univers et l’histoire sont d’une richesse incroyable, ce n’est jamais lourd et toutes les informations sont nécessaires soit pour comprendre les motivations et le déroulement, soit pour ajouter à l’atmosphère.  Car au cours de ces pages, nous sommes transportés dans cet univers.  À un tel point que l’auteur n’a plus besoin de nous situer sans cesse dans l’époque… ça va de soi.  C’est assez incroyable de réussir à créer un monde tellement bien construit et logique qu’il est rapidement possible pour lui d’aller dans l’implicite et pour le lecteur de tirer ses propres conclusions et interprétations à la lumière des coutumes de cet univers.  Le tout sans transformer son roman en long exposé magistral.  C’est quand même quelque chose. 

 

Je ne m’attarderai pas sur les personnages ici pour ne pas donner d’indices sur le déroulement, mais encore une fois, je vais simplement m’émerveiller de leur complexité et de leur grande humanité.  Même pour les plus cruels d’entre eux.  Trahis par leurs forces ou leurs faiblesses, se trahissant eux-mêmes et leurs intentions par moments, pas toujours honorables même s’ils le voudraient (des fois), ce sont eux qui nous font nous intéresser à ces intrigues hautement politiques.  Leurs sentiments sont contraductoires, évolutifs, ils sont impulsifs, pas toujours réfléchis…  Et, ce qui fait la force de la série,  il n’y a pas que les personnages principaux qui sont ainsi.  Et je dirai simplement que je suis ravie que l’un des mes personnages préférés soit POV character dans ce tome.  Je ne dirai juste pas qui!

 

Je ne saurais trop conseiller cette lecture.  Bon, il faut avoir du temps… mais c’est un voyage dans le temps garanti… et des émotions fortes assurées!  Je ne sais pas si j’entamerai le tome 4 rapidement (je me suis fait dire que nous n’y retrouvions que peu les personnages que nous connaissons) mais en attendant, j’élabore des théories toutes plus farfelues les unes que les autres… et ça m’amuse!

Je suis capable. C’est Noël – Dominique Pelletier

je-suis-capable-noel.jpgEncore sur le thème de Noël. Yep, j’ai parfois des idées fixes!

 

Ce petit album m’a été conseillé par Chantale quand je lui ai demandé des livres de Noël avec des structures répétitives. Et en effet, pour ce que je fais avec mes cocos, c’est super. Gustave et Olivia (que je renomme allègrement selon les sons que j’ai à travailler) sont deux enfants qui, comme tous les enfants, peuvent tout faire. Y compris les préparatifs de Noël.

 

Ici, ce n’est pas tant une histoire avec un schéma narratif. Il s’agit plutôt d’une énumération d’actions « de Noël », avec le « Je suis capable » qui revient à chaque fois. Le tout agrémenté d’une finale rigolote.

 

Les illustrations sont drôles et très simples, ce qui fonctionne très bien pour attirer l’attention des enfants sur ce qui est important. Mes cocos adorent les personnages et me font toujours remarquer qu’ils ont « juste deux dents »! De plus, comme tout faire tout seul, c’est parfois disons… hasardeux, disons que les résultats le sont à l’occasion. Et vu qu’il n’y a pas de ligne de texte relative à ces gaffes, ça nous laisse libre cours pour travailler soit la cause à effet, soit pour rechercher des solutions ou prévoir ce qui va arriver ensuite.

 

On explore aussi le vocabulaire de Noël en contexte simple et il y a possibilité d’explorer diverses petites phrases sujet-verbe-complément, avec des verbes variés. Sans compter le « je suis capable » répétitif qui peut être travaillé avec les enfants. Ben oui, c’est pratique à dire, comme phrase. Et ça peut éviter bien des frustrations.

 

Je sens que je vais l’utiliser pendant plusieurs années!

Merci pour le conseil, Mme Chantale de Scholastic!

Avenue des Géants – Marc Dugain

Avenue-des-geants.jpgOn pourra dire que cette lecture n’aura pas été une lecture facile. En effet, toute la virtuosité du roman repose sur la voix du héros (ou plutôt anti-héros… tres anti-héros), tueur en série génial qui luttera toute sa vie contre lui-même.  Avec un succès tout relatif, comme vous pouvez vous en douter étant donné qu’au début du roman, Al purge une peine de prison à vie.  Il reste complètement en retrait de ses sentiments et passe le temps en lisant des romans pour les aveugles.  Et il décide d’écrire pour raconter sa vie. 

 

Ce récit n’est pas une accumulation de faits sordides.  Bien entendu, il y en a.  On parle d’un tueur en série psychopathe/sociopathe/schizophrène (je ne sais pas trop, en fait… en tout cas, ça ne va pas bien du tout dans sa tête).   Mais cette incursion dans son esprit se révèle à la fois dérangeante et fascinante.  On sent l’escalade, le contrôle qu’il tente d’exercer sur ses pulsions, ses pensées et ce malgré la voix distante du narrateur, sa froidenr, son absence de remords.  On ne se demande pas « si » mais « quand » et « comment » ça va exploser.  Et malgré tout, étrangement (et ça, c’est un peu freakant), on ne parvient pas à détester tout à fait Al Kenner.  J’ai eu plus d’antipathie pour sa mère que pour lui, c’est tout dire.   Et la relation entre les deux est tellement malsaine que ça nous fait physiquement réagir.  

 

Le narrateur nous entortille dans son histoire sans chercher à se rendre sympathique mais sans tout dire non plus.  Sa pensée erre un peu, il tente de se comprendre d’un point de vue psychiatrique, analytique, de se libérer de l’étouffement qu’il ressent, de ne pas être ce qu’il est.   Il jette aussi un regard étranger, externe sur la côte ouest américaine mythique des années 70, sur le Viet Nam, le mouvement hippie.  les grandes routes et les les valeurs de l’époque.

 

Un roman qui déroute, qui dérange, parce que basé sur une histoire vraie, celle d’Ed Kemper et parce que le narrateur a réussi à tromper tout le monde, à déjouer les gens, professionnels ou non, à attirer la confiance.  Ça fait froid dans le dos.  Et on réalise qu’en tant que lecteur, malgré la vérité toute crue, on s’est peut-être un peu – juste un peu – faits avoir.  

 

Une plume qui va droit au but, qui coule, et qui rend parfaitement cette histoire où s’entremêlent détails très réalistes et réflexions détachées sur la mort.   Une rencontre réussie pour moi!

Gros pipi – Emile Jadoul

gros-pipi.jpgQu’il est mignon, ce petit pingouin!

 

Et oui, j’ai des thèmes de lecture très évolués.  Les enfants adorent.  Voire même qu’ils sont morts de rire avant même que l’histoire commence et tout disposés à participer.   Le pipi, c’est toujours over-vendeur.  Et surtout, pour une orthophoniste-en-moi, c’est un mot que l’enfant dit super souvent et une habitude de vie super significative et ancrée dans la vie quotidienne du jeune.  J’adore, donc.  pour une toute autre raison. 

 

J’ai déjà crié mon amour pour la collection Lutin poche de l’école des loisirs et c’est encore un très joli album que voici.  L’histoire est toute simple.  Petit pingouin veut faire pipi toutes les nuits.  Et pour ça ben… il faut réveiller maman et papa, qui sont très fatigués…  Quelle solution va-t-on trouver?

 

Ce que j’aime dans cet album (en plus des illustrations adorables), c’est la possibilité pour moi de faire travailler des mots simples, souvent monosyllabiques  (lit, pot) ou encore des bisyllabiques rédupliqués (dodo, pipi, papa, maman, bébé), voire même de les juxtaposer dans le cadre d’énoncés super simples (« maman pipi » ou « maman gros pipi », « tout seul »).  Quand on a des cocos avec des difficultés de planification des mouvements de la parole, ça fait super bien pour commencer.   Sans compter que le vocabulaire est courant et très simples.  De plus, l’histoire est quand même répétitive, c’est du concret pour l’enfant… et on se paye même le luxe d’une mini-bébé-inférence très simple à la toute fin, qui fera sourire les adultes…

… parce que c’est tellement, tellement ça!

 

Bref, un charmant album qui peut être exploité de plusieurs façons, voire même en abordant le schéma narratif de base, avec notre problème, la recherche de solution… et le résultat!  

 

Je conseille pour les touts petits!

Recrue – Samuel Champagne

RecrueJe suis tombée sur ce texte au hasard de ma boîte aux lettres.  J’avais déjà pu lire quelques ouvrages de la collection Tabou, chez les éditions de la Mortagne, et je m’étais fait l’observation  que ces romans rejoignaient réellement les problématiques des jeunes, sans faire la morale, sans avoir une vision trop pessimiste ou trop optimiste, tout en donnant de l’espoir et en faisant réaliser aux jeunes qu’ils ne sont pas tous seuls à vivre ce qu’ils vivent.  Que leurs sentiments, ils sont normaux.  Que d’autres sont passés par là. 

 

Et franchement, ce roman traitant de l’homosexualité masculine est tout à fait dans cette ligne de pensée.  Il s’adresse aux jeunes, mais pas que.  Aux jeunes gays… mais pas que.  Une histoire d’amour et d’amitié, vraiment, entre deux jeunes ados qui en sont à différents moments dans leur processus de connaissance et d’acceptation d’eux-mêmes.   Thomas est en secondaire 4.  Il est danseur, traité de fif par presque toute l’école.  Mal dans sa peau (sauf quand il danse), il sait qu’il n’aime pas les filles.  Mais pour le reste, il ne s’est pas vraiment posé la question.  Pas encore. 

 

Arrive Maxence, fraîchement débarqué d’Angleterre.  Extraverti, super joueur de soccer. Là-bas, il était « out and proud ».  Ici, il veut juste être accepté.  Quitte à cacher une partie de ce qu’il est pour mieux être inclus dans l’équipe de soccer (ou de foot, c’est selon!).  Et puis, les deux se rencontrent, ce qui va tout remettre en question. 

 

C’est donc une histoire d’amour, certes.  Et une jolie histoire, en plus.   J’ai trouvé nos deux ados très mignons mais aussi très adolescents, très vrais, avec tous les hauts et les bas émotionnels que ça implique.  Mais surtout, c’est le regard des autres.  Les réactions diverses et variées, avec tout ce qu’elles comportent d’ambivalences.   Et c’est ce qui m’a réellement plu dans tout ça.  Le jeune ado qui se questionne aura droit à un portrait positif de l’homosexualité, mais pas peint en rose bonbon.  Il y en a qui vont réagir de travers.  Il y en a qui vont essayer.  Il y en a d’autres qui vont réussir.  Et il y en a pour qui ça ne changera rien du tout.   Les réactions sonnent vrai, que ce soit chez les parents ou les autres jeunes. 

 

J’ai aussi beaucoup apprécié l’évolution non-linéaire des deux héros, leurs retours en arrière, leurs questionnements, mais aussi leurs grands moments de bonheur, d’exaltation, de fierté d’être différent.  D’oser être différent.   On réalise que pour ces jeunes, un coming out, il n’y en a pas qu’un.  C’est un éternel recommencement.   Ce n’est pas après le premier bisou que tout est réglé et bien ficelé. 

 

Bref, un roman touchant, qu’on lit davantage pour le fond que pour la forme (quoique j’aie adoré les dialogues) mais qui saura rejoindre plusieurs adolescents.   Qu’ils se questionnent sur leur orientation sexuelle ou pas.  Parce que bon, les questions d’identité, de prise de conscience, d’image de soi, d’être ce qu’on est, ce n’est pas  juste une question d’orientation sexuelle, n’est-ce pas!   J’ai été rejointe par certaines réflexions, tout en étant – indubitablement – straight et – tout aussi indubitablement – plus du tout une ado!

 

 

Je conseille!

La nuit de Noël – Barbara Reid/Clement Clarke Moore

Nuit-de-Noel.jpg coup-de-coeur.gif En cette fin de novembre, avec mes cocos, on prépare Noël. En effet, quand on a de la difficulté avec les mots, on commence tôt, en espérant que le petit creton pourra bien communiquer quand le temps des fêtes arrivera. En visitant le salon du livre, mon premier objectif – avoué – était donc de trouver des nouveaux livres de Noël.

 

C’est Jules qui m’a vendu celui-ci comme SON coup de coeur de Noël cette année. Comment résiter à une telle recommandation! Je connaissais déjà le travail de Barbara Reid avec ses magnifiques illustrations en pâte à modeler, ainsi que le poème de Moore (mais en anglais… vous savez, celui qui commence par « Twas the night before Christmas », écrit au début du 19e). Laissez-moi vous dire que l’association des deux donne un magnifique album de Noël, féérique, magique… et tous les « ique » que vous voulez!

 

C’est donc la nuit de Noël chez les souris. Et pendant la nuit, l’une des petites souris se réveille… et va voir des choses merveilleuses! C’est une version classique de la tradition de Noël païenne, avec tous les éléments importants. Le père Noël, les cadeaux, la cheminée, les rennes… C’est aussi la routine d’avant Noël, avec les petites souris qui vont se coucher et qui attendent le lendemain avec impatience. Ça donne hâte aux petits et ça fait retomber les adultes en enfance.

 

Les illustrations sont chaleureuses et superbes. Remplies de détails amusants (j’ai souri à voir les bâtons de popsicle faire les volets des fenêtres chez les souris, ainsi que les berceaux en coquille de noix), elles permettent de faire parler les enfants, de leur en faire décrire les particularités, ce qui ravira les plus observateurs d’entre eux. Ces images peuvent également servir à faire faire de petites phrases simples, vu qu’elles représentent des actions quotidiennes incluant de nombreux verbes.

 

Ajoutons finalement la richesse du vocabulaire de Noël exploité et le côté universel de l’histoire, qui permet aux petits de participer pleinement, même à la première lecture. Idéal pour faire des liens entre ce qui se passe dans l’album et ce qui se passe dans sa maison à lui.  

 

Bref, un magnifique album avec une histoire classique réinventée par la beauté des illustrations. Pour les cocos à l’attention fragile, les images peuvent paraître chargées mais les éléments importants sont suffisamment saillants pour que l’histoire se suive bien avec encadrement. Ajoutons aussi que le texte lu tel quel est mignon comme tout, avec un vocabulaire riche, des rimes et un rythme qui plaît aux touts petits.  Ça éveille à la conscience phonologique tout en restant amusant.  En plus, le texte n’est pas trop long.  Super donc!

 

Je conseille donc.

Avec enthousiasme.

Un coup de coeur pour moi aussi.

Histoires nordiques – Lucie Lachapelle

histoires-nordiques.jpgNormalement, je ne suis pas très « nouvelles ».  Mais suite à ma lecture de romans traitant des populations autochtones du Québec, j’ai eu envie de découvrir celles-ci.  Ajoutons que j’ai tendance à faire confiance à XYZ…  il me fallait ce recueil. 

 

Ce sont donc 13 nouvelles d’environ une dizaine de pages chacune, se déroulant dans un petit village du Nunavik, image d’un endroit où l’auteure a enseigné dans les années 70.   Oui, ce sont des nouvelles mais il y a quand même un fil rouge, la plupart d’entre elles se déroulant pendant la période où enseigne Louise, blanche venue enseigner aux Inuits, tombée en amour avec cette immensité blanche, ces paysages de toundra, fascinée par ce monde et désirant réellement comprendre, aller à la rencontre de la culture Inuit et malgré tout toujours extérieure, malgré la meilleure volonté du monde.  De tout le monde. 

 

C’est une immense tendresse et de sensibilté qui ressortent de ces nouvelles.  Beaucoup d’ouverture vers l’autre, une réelle volonté de comprendre, mais aussi un choc de cultures, un grand.   Il y a un fossé entre la vie dans le Nord de cette époque et ce que connaît Louise.  Pourtant, il n’y a aucun jugement et malgré son émerveillement devant cette vie, son désir de la faire sienne, les relations qu’elle tisse, elle n’en reste pas moins une blanche dans un village d’autochtones au mode de vie si différent du sien.   Certaines nouvelles sont drôlatiques, d’autres cruelles, d’autres magnifiquement poétique.  Il y a de la solitude, de l’amour pour les hommes et pour le pays, un réel combat contre les éléments, de la violence aussi.  Plusieurs aspects de la vie dans le nord sont évoqués avec beaucoup de respect, avec un regard extérieur et bienveillant sans être condescendant. 

 

J’ai beaucoup aimé l’aspect presque légendaire, avec les rivières qui attendent leurs dus, les tempêtes qui font perdre le nord (et le village), les sauvetages de justesse, la sorcière du village, les maisons à une pièce avec tout plein d’enfants.  J’ai aussi apprécié que plusieurs aspects ne soient pas gommés, malgré le regard que pose Louise sur ce village et ces gens qu’elle veut aimer.  La vie est rude, les références tout autres.  Et en tant que lecteur, on ressort infiniment curieux, avec un sourire aux lèvres, malgré la grande nostalgie qui ressort de la dernière nouvelle. 

 

Bref, une lecture que j’ai énormément appréciée, dans un style poétique et fluide, où ressortent des pointes de réalisme qui sent le vécu.  Je relirai l’auteure!