The Hate U Give – Angie Thomas

Depuis l’an dernier, on voit ce roman jeunesse partout.  J’ai donc bien entendu eu envie de m’y plonger et je profite du African American History Month d’Enna pour le lire.   C’est un roman dont il m’est très difficile de parler parce que les sensibilités sont hyper exacerbées depuis un bout.   Je me suis fait traiter de white supremacist (par une autre personne ayant la même couleur de peau que moi) récemment parce que j’ai appelé le crayon rose-beige « couleur peau » sans y penser.  Ok, je vois le biais culturel.  Mais bon.

 

Il faut aussi savoir que j’ai grandi dans un endroit où tout le monde se ressemblait.  Ado, j’ai eu une copine italienne et aussi une copine innue.  C’est tout.  Pas parce que je fuyais ces gens, mais parce que je n’en connaissais sincèrement pas.  Dans mon école primaire, tout le monde était caucasien.  Tout le monde.   Même maintenant, où il y a UN PEU  plus de diversité culturelle, on les voit surtout à l’université comme étudiants et comme professeurs. Tout ça pour dire que la question du racisme s’est posée assez tard.  Pour moi, c’était des personnes.  Et la couleur de la peau était un détail (oui, je sais, ne pas frapper). Des conditions de vie comme celles du ‘hood de Starr, je n’ai jamais vu ça.  Seulement dans des livres.  Et à la télé.   J’ai donc des perceptions qui sont teintées de ça.  Je ne connais pas les clichés.   Je ne connais pas les codes des gangs.  J’ai toujours vu ça de loin.   Mais bon, encore une fois, j’arrête de parler de moi et je parle du roman.  Un peu.  Parce que je vais reparler de moi plus tard!

 

Ce roman est pour moi nécessaire.  Angie Thomas est africaine-américaine et elle s’est bien évidemment inspirée de choses qu’elle a vues ou vécues.  Et ce roman est nécessaire car il fait entendre une autre voix, une voix qui n’est pas souvent entendue.  Il m’a permis de voir par d’autres yeux ce monde qui est un univers en soi, qui fait peur vu de l’extérieur (et de l’intérieur aussi, je crois).  Bien entendu, ça secoue à l’occasion.  Oui, on pourrait lui reprocher plein de choses.   Mais je l’ai lu en une soirée et un matin, j’en ai rêvé la nuit et je me suis surprise à rêver de policiers qui m’en voulaient parce qu’étais en pyjama… bref… sans commentaire.  Je l’ai dévoré.

 

Starr a 16 ans.  Un soir, elle revient d’un party qui a mal tourné avec son ami Khalil et ils se font arrêter par deux policiers sans raison apparente.   Et le policier lui tire dans le dos, devant les yeux de Starr.  Son père lui a bien enseigné, le jour de ses 12 ans:  avec les policiers, tu parles quand on te parle, aucun mouvement brusque, garde toujours tes mains en vue.   C’est que dans son quartier, ça brasse.  Entre les gangs rivaux et les coups de feux, le quotidien n’est pas toujours safe.  Aller jouer dehors?  Heu… comment dire… non.  Son père y a une épicerie et est un activiste pour les droits des Noirs.   Starr fréquente une école privée huppée à 45 minutes de là.  Elle y a deux meilleures copines, des amis sur l’équipe de basket et Chris, son petit copain blanc.  Inutile de préciser que son père n’est pas au courant.

 

Ce roman nous fait donc voir les suites de ce meurtre via les yeux d’une adolescente qui ne comprend pas cette injustice ni l’aveuglement de la société en général face à ces actes qui restent souvent impunis.  Brutalité policière, racisme quotidien, mais aussi la rage que tout ça engendre.  Et les dérapages, ensuite.   Ça parle de prise de parole, de droits de l’homme, de fierté et d’injustice.  Mais ça parle aussi d’amour et d’amitié, de famille et de solidarité.   Ça parle aussi de mondes difficiles à réconcilier en raison d’idées préconçues et de préjugés (des deux côtés) et d’intolérance.  J’ai beaucoup aimé la famille de Starr, pas toujours parfaite mais débordante d’amour.   En lisant, on est enragés par la direction que prend les choses.  On a parfois le goût de secouer tout le monde et de dire « nooooon »!  On se surprend à refermer le livre pour réfléchir  par moments.

 

La langue est celle de Starr.  Celle de Starr qui vit dans le ‘hood.  Car la jeune fille se sent double.  Déchirée entre ses deux milieux de vie, en raison des étiquettes qui pourraient lui être attribuées.  Le roman nous permet de comprendre l’origine de la violence et de pouvoir ouvrir – un peu –  les yeux sur la réalité de certaines personnes, nées dans certains quartiers dont il est difficile de sortir.

 

Certes, la femme blanche née dans un bon milieu se sent un peu beaucoup alien dans ce roman mais je n’ai pu m’empêcher de me dire que c’est probablement comme ça que ce sentent beaucoup de personnes d’autres origines ethniques dans une énorme quantité de romans.  L’auteur essaie de ne pas généraliser mais ses personnages ont aussi leurs préjugés et leur colère.  Pour la réflexion qu’il suscite, je conseille fortement ce roman.

 

Et je rêve du jour où tout le monde pourra célébrer les différences (culturelles ou autres), se permettre d’en parler, sans que ce soit insultant pour personne d’autre.  Même s’il ne faut pas trop rêver… l’héritage historique – et plusieurs faits récents –  rendent le tout très difficile.

14 Commentaires

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  1. Il ne sortira que début avril en France mais je sais déjà que je vais me précipiter dessus !

    1. Ah, je pensais qu’il sortait bientôt, il y a tout plein de booktubers qui l’ont montré sur leur chaîne. C’est un roman qu’il faut lire, je pense. J’ai quelques petites réserves, mais pour la réflexion, ça vaut le coup.

  2. Il a l’air parfait pour des ados. Je le note.

    1. Il permet d’ouvrir la discussion et de voir une réalité de façon différente.

  3. Je le note pour essayer de le trouver lors de mon prochain voyage en Angleterre car tu me tentes énormément! J’en profite pour prendre ton lien pour le recap’ du challenge!

    1. Thanks! Écoute j’ai pensé au logo… c’est bien non??

      1. C’est parfait 😉 et puis ton blog j’y passe de toute façon 😉

        1. :))) Je suis une grosse paresseuse pour les liens. Je pense que tu en sais quelque chose!

  4. Je ferai comme Jérôme !
    Tout ce qui a trait à ce sujet m intéresse beaucoup !

    1. Ce roman est un « ownvoice » en plus. Ca a une valeur particulière pour moi. Et ça permet de confronter les visions, les points de vue… J’ai beaucoup aimé.

  5. You have a dream… So do I 🙂

    1. Yep, always a dreamer.

  6. je n’avais encore jamais entendu parler de ce livre mais tu m’a intrigué. Je note la référence

    1. Il va sortir en France dans 2 mois je pense. Sur les blogs anglophones, on en parle +++ depuis plusieurs mois. Et il m’a fait réfléchir.

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