La porte du ciel – Dominique Fortier

la porte du cielAussi bizarre que ça puisse paraître, je n’avais jamais lu de roman de Dominique Fortier.   Je n’ai d’ailleurs aucun souvenir d’avoir acheté celui-là ce qui, à défaut d’être étonnant, est plutôt révélateur.  Mais j’ai un vague souvenir d’avoir VOULU l’acheter après avoir entendu parler d’une des inspirations de l’auteur, les célèbres courtepointes de Gee’s Bend.  Vous ne connaissez pas?  Fouinez un peu, vous allez voir, elles sont magnifiques!

 

Le roman s’ouvre sur deux fillettes.  L’une est blanche est l’autre est noire.  Nous sommes dans le sud des États-Unis, deuxième moitié du 19e.  L’esclavage existe encore et le Docteur McCoy, pour faire un grand geste altruiste, achète celle qui s’appellera Eve et qui cause des problèmes à sa plantation où elle est esclave depuis qu’on a vendu sa mère à on ne sait qui.   Elles vont grandir, l’une avec un statut clair, l’autre, beaucoup moins.  Entre servante et amie d’Eleanor (la jeune fille blanche), elle ne sait trop où est sa place.

 

Il est difficile de parler de ce roman car comme les courtepointes dont elle s’est inspirée, Dominique Fortier tisse ici un patchwork de moments passés et actuels, de personnages tout plus ou moins prisonniers de leur société et des attentes que celle-ci a pour eux.  En toile de fond, la guerre de Sécession, guerre fratricide, guerre d’idéaux, dont les répercussions se font encore sentir de nos jours (vous ne me croyez pas?  Allez juste voir la carte électorale aux États-Unis, juste pour rire…).  Dans le sud, le racisme, ce n’était même pas une question, mais un mode de vie.   C’était ancré dans les moeurs.  Et si la guerre a aboli l’esclavage, elle n’a pas aboli le racisme pour autant, même 150 ans plus tard.

 

C’est d’un personnage à l’autre, d’une maison à l’autre que l’auteur nous fait témoins des petites et des grandes trahisons, de la vie de ceux qui sont restés derrière, des violences ordinaires et des grands espoirs… et des désillusions.  Et, étrangement, cette narration fragmentée, qui passe du je, au tu, au il, forme un tout étrangement cohérent, malgré des parties qui détonnent, qui frappent, et dont nous ne comprenons l’impact que lorsque nous reculons pour avoir une vue d’ensemble de la construction étrange et belle que nous avons pu lire.

 

Une plume sobre et évocatrice, une construction audacieuse, des silences parfois assourdissants, une auteure qui nous laisse souvent inférer des sentiments plutôt que de nous les décrire et un certain hommage à ces femmes qui prenaient leur liberté là où elle leur était permise et qui criaient leur douleur à leur manière.  Dans des courtepointes.

 

Ailleurs…  les billets de Venise et Anne

12 Commentaires

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  1. j’avais beaucoup aimé Du bon usage des étoiles, encore beaucoup plu Les larmes de Saint-Laurent alors celui-là, je l’attends 🙂

    1. j’ai récupéré les étoiles. Il traînait chez maman en quelque part! Du coup, je le lirai bientôt.

  2. Ce livre a été un gros coup de coeur pour moi. Je crois que c’est mon préféré de dame Fortier 🙂

    1. Tout le monde a son préféré… mais personne n’a le même. Va tous falloir les lire. Pour ma part, j’ai beaucoup aimé.

  3. J’ai aimé mais ce n’est pas mon préféré de cette écrivaine à la plume magnifique!

    1. Elle a en effet une plume incroyable. Je ais certainement découvrir les autres!

  4. Moi non plus, je n’en ai jamais lu, c’est grâce ?!

    1. C’est à découvrir, en tout cas. Une très belle plume québécoise.

  5. Merci pour le lien ! Et merci de si bien remémorer ce très beau roman. J’ai trouvé Du bon usage des étoiles, publié par ici chez Phébus !

    1. Je l’ai trouvé aussi… dans les armoires de ma mère :))) Je le lirai sans doute dans l’année!

  6. J’avais beaucoup aimé Du bon usage des étoiles, mais je n’ai pas accroché sur celui-là… Dommage!

    1. II faut donc que je lise Du bon usage des étoiles. J’ai pour ma part bien aimé celui-là, ça a été la découverte de la plume!

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