De très Joyeuses Fêtes… de la part d’un semi-fantôme!

J’ai été un peu absente ces derniers mois. En fait, 2022 a amené beaucoup de changements dans ma vie et c’est vraiment en 2023 que je l’ai réalisé à plein. J’ai lu moins que d’habitude (quoique bon… presque 160 livres, c’est pas siiii terrible… mais pour moi, c’est une petite année) et je m’étais mis en tête de faire une vidéo Youtube par semaine, ce qui a fait que bon, je n’avais plus de temps pour rien d’autre. Pas certaine que je vais me relancer dans une telle entreprise en 2024 parce que mes billets de blogue me manquent. Ça m’énerve de chercher dans des vidéos pour trouver un avis…

Bref, on me le dit sans cesse, les blogues ne sont plus « à la mode »… mais c’est ce qui me convient le mieux tout de même. Plus facile de chercher, de catégoriser. Instagram ne fait pas tant la job (trop compliqué de faire des photos pour les ebooks et les audios…), il va donc falloir que je revienne ici.

J’espère donc retrouver l’énergie pour ça… parce que ne pas le faire revient à me nuire à moi-même.

Je profite de cette petite réflexion (on va espérer que ce ne soit pas l’une de ces annonces « I’m back »… qui ne dure que le temps d’un billet) pour vous souhaiter un beau temps des fêtes. Des bons moments, des sourires, seuls ou avec les gens que vous aimez.

Have fun!

La maison dans laquelle – Mariam Petrosian

Je voulais lire ce – gros – roman depuis des années. Étrangement, le fait qu’il pèse une demi-tonne m’arrêtait un peu mais suite aux recommandations de Cornelius, je me suis lancée… et j’y suis restée prise 6 semaines.

Ce qui, pour moi, n’est pas normal. À croire que je me suis réellement perdue dans cette maison dont on peut – ou ne veut – pas sortir. Pourtant, j’ai aimé. Beaucoup. Mais ce n’est pas une lecture simple. Mais je m’explique.

De quoi ça parle

Nous sommes dans un internat. Un endroit d’où on ne sort presque jamais, qui a ses propres règles, son propre langage. Les jeunes qui y habitent ont tous un handicap. Il y a les marcheurs, les roulants, ceux qui voient, ceux qui vivent dans leur propre univers. Il y a les petits et les grands. Et tous les 7 ans, à l’aube des 18 dans du dernier groupe, une Sortie.

Il y a aussi la Maison. La Maison qui semble avoir une volonté qui lui est propre, qui cache également un univers tout autre, un Envers.

Ce n’est pas clair? Normal. Ce ne le sera sans doute jamais.

Mon avis

Ce roman fait partie de ceux que je relirai. Plus tôt que tard. D’ailleurs, en le refermant, complètement sonnée (parce que clairement, à le lire sur une si longue période, il y a beaucoup, BEAUCOUP de choses que je n’avais pas comprises), je m’y suis tout de suite replongée… et j’y ai passé un bon trois heures. C’est qu’en entrant dans cette Maison, il faut accepter de perdre nos repères et de parfois croire qu’on a perdu la tête. Entre les différentes temporalités, les jeunes qui évoluent et qu’on rebaptise, le côté onirique, le langage particulier, les contes et légendes du lieu, il est difficile de bien savoir à qui on a affaire… et ce que les interactions signifient vraiment. Il faut porter attention aux détails pour bien faire les liens… et ne pas hésiter à surinterpréter parce que ça, c’est chouette.

C’est chouette pendant 1118 pages. Oui, vous avez bien lu. Je sais. Ça fait peur.

Pourtant, il m’a fascinée du début à la fin. Même si j’y étais perdue et si je me demandais clairement si j’allais réussir à m’y retrouver. Mais au final… eh boy! Il y en a des interprétations possibles. Et en plus, c’est bourré de références aux classiques de la littérature jeunesse, que l’on pense à Peter Pan, à Lewis Carroll ou encore au Livre de la jungle. J’y vois une métaphore géniale de l’adolescence, avec cette peur de grandir, de l’Extérieur où les règles vont changer et où les légendes qui prennent toute la place ne seront plus que de bons souvenirs.

Chacun a son handicap dans cet internat, certes. Mais qui n’a pas ses défis, surtout ado? Leur univers est un peu crade, plein de mythes et de croyances. Il y a une Cafetière, un Croisement, même un Sépulcre. Il y a des guerres de pouvoir mais aussi beaucoup d’entraide. Des moments qui passeront à l’histoire et d’autres faisant partie du quotidien. C’est qu’à cet âge, les choses prennent une telle importance. Les adultes? Témoins. Ils sont davantage une figure qui effraie au lieu de rassurer.

Il y a l’Envers aussi, avec les Sauteurs et les Tombants, ceux qui peuvent passer d’un univers à l’autre. Il y a ces nuits sans fin, ces murs témoins de cet univers, remplis de dessins qui semblent parfois se mouvoir d’eux-mêmes. Il y a la nuit des Contes, contes de l’Envers probablement. Et le Temps, celui qu’on ne voudrait pas voir s’écouler, surtout pour certains. Entre boucles temporelles, sauts dans le passé, secondes qui se transformes en heures, on peut s’y perdre.

Et on peut se perdre entre les voix également. Qui racontent presque la même histoire, mais sous une perspective toute différente. Chacal-Tabaqui (j’adore la ref), conteur, farceur… mais aussi bien plus que ça, Sphinx, grand ou petit ou encore Fumeur, regard un peu externe, arrivé après, qui se fait parfois l’écho de nos pensées.

Bref, envoûtant. Je me souviendrai longtemps de ces ados, vivant dans leurs chambres séparés mais qui s’entraident quand même, malgré les guerre de pouvoir. L’Aveugle, Bossu, Vautour ou encore Loup et Lord. Mon préféré reste Tabaqui, of course, personnage central, mystérieux et semblans sans âge. Je le relirai. Et si vous avez le temps, l’énergie et l’envie de vous perdre dans les couloirs de la Maison, je ne saurais que trop vous le recommander.

Inhumaines – Philippe Claudel

Cette fois, c’est totalement la faute de Sylvain Démenti. Complètement. La couverture ne me tentait moins que pas et après quelques pages, sans le club de lecture, j’aurais laissé tomber. Donc oui. Sylvain est 100% responsable.

De quoi ça parle

Nous avons ici un recueil de nouvelles à l’humour noir, très noir. Toutes les tares de notre société actuelles sont vues à travers un miroir déformant et grossissant. L’humanité sous le pire éclairage.

Mon avis

Ok. Ce n’était pas pour moi. J’aime l’humour noir et grinçant mais le format a fait que c’était trop pour moi. Le narrateur n’a aucune morale, aucune valeur, aucune émotion. En fait, personne n’a aucune émotion. Je sais que ça se veut une parodie de la société mais il m’a manqué de nuances pour apprécier. J’étais juste… écoeurée. Par tout.

Certaines nouvelles étaient bien, un peu moins sombres, mais l’idée de manger ses parents, voire même de les tuer « parce qu’il faut bien », d’acheter des gens pour les tuer… ça me lève le coeur. Je devais passer vite. Alors oui, je comprenais ce qu’on voulait parodier : la cruauté du quotidien, l’insensibilité ambiante… l’inhumanité, quoi. Je comprends. Mais j’aurais compris quand même en allant un peu moins loin.

Le style est froid, incisif, les phrases courtes, les dialogues intégrés au texte. On est loin de Brodeck, qui était pourtant fort dur. Ici, tout le monde agit comme un robot. Bref, aucun plaisir de lecture dans mon cas. Aucun. Assez pour avoir peur de relire l’auteur!

Le bureau d’éclaircissement des destins – Gaëlle Nohant

Je lis toujours Gaëlle Nohant avec plaisir sans pour autant savoir à quoi m’attendre. En effet, son style et son approche varient d’un roman à l’autre. Entre L’ancre des rêves, Légende d’un dormeur éveillé et ce roman, on passe d’un univers à l’autre, même quand certains thèmes se rapprochent. On s’entend, le Dormeur Éveillé reste mon préféré (c’est pour moi un gros gros coup de coeur) mais j’ai passé un bon moment avec ce roman-ci.

De quoi ça parle

Irène est archiviste à l’International Tracing Service, grand centre est le plus grand centre de documentation sur les persécutions nazies situé dans un petit village allemand au passé nazi. Elle y est arrivée par hasard dans les années 90 et y a trouvé sa place, se laissant emporter par ses dossiers alors que sa vie personnelle ne comporte que son fils depuis son divorce avec son mari allemand.

En 2016, nouvelle mission. Restituer les objets du centre aux descendants des déportés. De modestes objets parfois qui ont leur histoire et leurs secrets. Ici, un Pierrot de tissus et un médaillon la feront plonger dans deux destins bouleversés.

Mon avis

J’aime toujours autant la plume de Gaëlle Nohant. Ici, elle se fait accessible, souvent terre à terre malgré le sujet, tout en réussissant à glisser occasionnellement certaines images qui m’ont vraiment touchée. Plus simple que le roman sur Desnos, mais très agréable à lire, simple, précis. J’avoue avoir eu du mal au début. Si l’ITS m’a fascinée (et m’a fait faire de nombreuses recherches, on ne se refait pas), je suis restée assez éloignée d’Irène tout au long du roman et ce sont plutôt les personnages secondaires qui m’ont touchée. Eva, Wita, Lazar sont des personnages marquants, qui sont restés humains malgré l’indicible mais dont une partie d’eux-mêmes a été détruite par toutes ces horreurs.

Je ne connaissais pas du tout cet institut Arolsen, qui encore aujourd’hui reçoit des milliers de demandes de partout à travers le monde. Des gens qui sont à la recherche de leur passé et de celui de leurs parents. Un institut qui a été un peu balloté par les autorités internationales parfois laxistes mais qui a survécu grâce à des employés impliqués, souvent des anciens déportés (du moins, c’est ce que dit le roman et je n’ai pas vérifié cette partie). Juste imaginer ces objets, ces traces… je me souviens de l’atmosphère de Terezinstadt ou d’Auschwitz et c’est un peu ce que l’autrice réussit à nous faire ressentir à certains moments. Se souvenir de ce qui est arrivé, comprendre que ces gens ont été jeunes, qu’ils avaient la vie devant eux, les revoir des années plus tard… bref, c’est la partie qui m’a le plus marquée.

La réflexion sur la mémoire, sur l’importance de se souvenir de ces crimes et sur les répercussions qu’ils ont eus sur les générations suivantes reste pertinente et essentielle encore aujourd’hui. Ces destins, ces questions qui restent, des gens qui ont choisi de refermer certaines portes derrière eux pour survivre, le désarroi de leurs enfants qui eux, n’ont pas toutes les clés. Certains veulent savoir, d’autres non, et ces descendants ont réussi à me toucher.

Irène moins. Je ne saurais trop quoi dire à son sujet d’ailleurs, ni au sujet de son fils. Ce qui m’a intéressée à son sujet était surtout l’histoire de son mariage et de sa relation avec Eva. Ici, la plume n’est jamais larmoyante, les scènes sont fortes et Gaëlle Nohant n’ajoute aucun pathos inutile. Les Kaninchen de Ravensbrück entre autres… ouf!

Une lecture que je recommande et qui met l’accent sur les petites victoires, les petites rébellions dans une horreur sans nom.

Sourcery (Sourcellerie) – Disque-Monde #5 – Terry Pratchett

J’ai entrepris il y a de NOMBREUSES années (je ne vous dirai pas combien) de tout relire Pratchett, en anglais et dans l’ordre. J’en suis au tome 5. C’est n’im-por-te quoi. Mais je n’en suis pas à une incohérence près, n’est-ce pas!

De quoi ça parle

Après une petite incursion dans le monde des sorcières et de la Mort, nous revoilà dans le monde des mages avec notre mage incapable Rincewind (je vais avoir du mal avec les noms, vu que le lis en anglais) qui se retrouve au coeur d’une aventure qu’il ne contrôle absolument pas, pour faire changement. Il va donc être balloté par la situation du moment : un Sourcier est apparu dans le monde des mages et a décidé de dominer le monde, rien de moins.

Mon avis

Lire Pratchett, c’est toujours un régal pour moi. Je suis super fan de son humour à la fois intelligent et absurde, qui sort de nulle part et qui réussit – toujours – à me surprendre. Il joue sur tous les clichés, les tourne dans tous les sens et réussit à nous faire rire et réfléchir en même temps.

Ici, nous sommes à l’époque où les personnages réagissent aux événements au lieu d’agir sur ceux-ci. Ceci dit, impossible de ne pas faire le lien avec certaines séries de fantasy. Ici, Rincewind est encore plus inepte que d’habitude, pris avec une Conscience et une Libido. Il se retrouve donc pris dans une quête dont il ne veut rien savoir (pour faire changement), avec Conina la Coiffeuse (fille de Cohen le Barbare) et Nijel the Destroyer, barbare qui a tout appris dans un livre. Charmante équipe!

Arrive donc dans la Unseen University (tiens… où est mon t-shirt d’ailleurs… probablement parti dans le glissement de terrain) un jeune garçon armé d’un bâton de sorcier très particulier qui va rapidement défier tous les mages, les battre, et décider de devenir le maître de l’univers. Rien de moins. Le seul opposant? Un chapeau. Tellement Pratchettien.

Je suis toujours aussi fan du Bagage et des notes de bas de page. Fan des réflexions sorties de nulle part et des retournements de situation qu’il est presque impossible de voir venir. Pratchett est l’un des rares auteurs qui réussit à me surprendre à presque chaque page. Et je lis le tout avec le sourire du début à la fin. Bref, je n’attendrai pas 10 ans (oups, je l’ai dit) pour continuer!

Atlas – L’histoire de Pa Salt – Lucinda Riley / Harry Whittaker

Les sept soeurs a été une série que j’ai lue au complet, et assez rapidement. En bougonnant du début à la fin. Mais j’ai lu 8 tomes. Alors que je ne finis jamais mes séries. Est-ce que c’est addictif? Clairement. Est-ce une oeuvre d’art? Clairement pas, du moins pas à mon goût à moi. Mais bon, n’empêche que je voulais savoir si mes théories étaient vraies!

De quoi ça parle

Dans les sept tomes précédents, les filles du mystérieux Pa Salt ont toutes retrouvé leurs origines – et l’amour, parce que si on est pas en couple, on a raté sa vie, c’est bien connu – après la mort de leur père qui leur avait laissé des indices. Ce tome va relater son histoire à lui… et nous allons peut-être comprendre pourquoi il a adopté six filles dans six pays différents!

Mon avis

Avant de commencer à vous dire tout ce qui m’a fait les yeux au ciel, je dois quand même être honnête. J’ai lu 800 pages en deux jours. Je voulais savoir. Avec le temps, j’avais des théories et je voulais voir à quel point j’étais à côté de la track. En vrai? J’avais deviné 95% du truc. Et si j’aurais aimé être surprise un peu, j’avoue que c’était la fin que je voulais et que j’ai aimé démystifier le personnage de Pa, qui était resté ma foi assez évanescent. De plus, s’il y a certes une histoire d’amour – voire même une grande histoire d’amour – ce tome est moins « romance » que les précédents, ce qui n’est pas pour me déplaire. On revisite certaines histoires, étant donné que Pa Salt faisait des apparitions dans presque tous les tomes, et on finit par comprendre pourquoi il a adopté ces filles… et pourquoi la soeur disparue a disparu.

Comme d’habitude, les personnages sont assez unidimentionnels. Je crois que j’ai dit « en carton » dans les tomes que j’ai moins aimés, mais ici, comme il y en a une quantité folle, ça m’a moins dérangée. Chacun fait une courte apparition et il y avait peu d’occasion de développer. N’empêche que de tous les tomes, mon personnage préféré reste Orlando, rencontré dans le tome sur Star. Sa théâtralité me fait mourir de rire. Par contre, chaque soeur pourrait être définie par quoi… 5 adjectifs? Ok j’arrête, je suis mauvaise langue.

L’écriture manque de relief, certains dialogues sont ma foi… presque drôles et pas toujours naturels. Je suis l’une des seules mais je n’ai pas réellement ressenti l’affection entre les soeurs et les scènes qui les mettent toutes en scène manquent de sentiment. En fait, c’est dit. Souvent. Mais l’émotion n’a pas fait le chemin jusqu’à moi.

Ceci dit, dans ce tome, on ne passe pas notre temps à vanter la beauté des protagonistes, c’est toujours ça. Est-ce que c’est crédible? Certes non mais ça, je m’en fiche. On a une réécriture des Pléiades, une atmosphère de conte de fées, alors toutes les exagérations et les facilités, ça passe. Disons qu’ils ont la distribution de bébés facile, dans cet univers! C’est très manichéen et bon, Saint Atlas priez pour nous! Mais c’était chouette de voir explicités les liens entre les différentes histoires et de voir que YES, j’avais raison!

Suis-je contente de l’avoir lu? Certes. C’était un bon moment de lecture malgré tous mes malgrés. Je suis toujours un peu fâchée par certains processus pour garder le suspense « il lui raconta son histoire et elle pleura longuement »… ALORS QUE MOI JE NE SAIS RIEN? Deux, trois fois? Un peu facile, non?

Voilà qui met donc un point final à la saga quoique… il reste un petit mystère! Sait-on jamais!

Blackwater – Tomes 2 à 6 – Michael McDowell

Non mais, imaginez! J’ai lu TOUTE une série en un mois. Qui aurait cru? Pourtant, c’est ce qui est arrivé. Moins d’un an après l’avoir reçue en cadeau. Non mais on ne me reconnaît plus!

De quoi ça parle

Dans le tome 1, la ville de Perdido, Alabama, subissait une terrible crue détruisant presque toute la ville. Avec la crue est arrivée Eleanor, étrange personne semblant vernir d’ailleurs, n’ayant pas de réel passé. Elle va bouleverser la ville et particulièrement la riche famille Caskey, dirigée par Mary Love à la poigne de fer. Entre la calme Elinor et l’aïeule qui a l’habitude d’être écoutée au doigts et à l’oeil, les choses ne vont pas nécessairement être de tout repos.

Les tomes 2 à 6 nous vont voyager à travers les décennies alors que la famille Caskey va vieillir, grandir… jusqu’à la seule fin possible.

Mon avis

Cette série a été pour moi addictive. L’auteur a réussi à créer un univers tangible, avec des personnages qui évoluent, parfois pour le mieux et d’autres fois non. Je voulais absolument savoir ce qui allait arriver à chacun des membres de cette famille que j’ai parfois aimé et parfois aimé détester. Ils nous surprennent parfois, nous font enrager et la touche de surnaturel est pour moi juste parfaite pour créer une ambiance glauque assez unique. Il ne fait pas oublier que le roman a été écrit il y a 40 ans! Et quelles matriarches!

D’ailleurs, à ce propos, l’auteur ose quand même plusieurs thèmes et plusieurs personnages hors-normes. Des personnages queer, des femmes fortes, mais un contexte social ma foi fort ancré dans l’époque, avec la ségrégation toujours présente. Et pour la lectrice moderne, il est très impressionnant de voir ce qui était « progressiste » à l’époque. Oh qu’ils étaient généreux, ils avaient même fait une tente pour les Noirs. Quelle générosité!

Bref, nous allons suivre les Caskey pendant des décennies. Certains vont naître, d’autres vont mourir (et on peut dire que l’auteur ose), mais tous vont parfois nous surprendre. L’évolution de Sister, entre autres… ouf! D’ailleurs son nom à elle est tellement révélateur. Chacun vit avec ses traumatisme d’enfance et son héritage, chacun tente de faire ce qu’il peut. C’est que dans ce roman, le passé n’est jamais loin et peut revenir nous hanter quand on s’y attend le moins. Idem pour le fantastique. On l’oublie presque… surtout dans les premiers tomes, jusqu’à ce que tout explose.

Une vraie saga familiale sur plusieurs générations, une famille hors-norme et surtout une vraie réflexion sur le bien et le mal, sur la peur de l’inconnu et les résurgences du passé. On peut bien vouloir que Elinor l’emporte sur Mary Love dans la guerre qu’elles se livrent mais bon… Elinor est quand même… spéciale, non? Et elle n’est pas toute blanche non plus.

Pour moi, la fin est parfaite et je garderai un excellent souvenir de la série, le tome 5 étant un peu moins dans mes goûts car ça parle d’argent (et moi bof… pas trop pour moi). Et que dire de ces éditions de Monsieur Toussaint Louverture! Bref, je ne serai clairement pas très originale… et vous dire que pour moi, ça vaut le coup!

Et merci encore Odehia!

Frankenstein à Bagdad – Ahmed Saadawi

Après avoir relu Frankenstein, j’ai décidé de commencer un vlog où je lirais des romans qui en sont inspirés. Celui-ci était parfaitement raccord avec mon challenge Lisons l’Asie en plus. Yavait plus qu’à!

De quoi ça parle

Dans le Bagdad d’après Sadaam Hussein, les attentats sont quotidiens. Dans le quartier de Batawin, anciennement riche mais aujourd’hui délabré et repaire de caïds habitent plusieurs personnes en ayant vu d’autre. Un photographe, un journaliste, un propriétaire d’hôtel décrépi, une vieille dame qui attend désespérément son fils mort et Hadi, un chiffonier conteur.

Hadi, n’en pouvant plus des cadavres abandonnés, décide d’en amener un chez lui et de le compléter, avec des parties d’autres gens morts lors d’attentats ou de tirs perdus. Le seul problème, c’est qu’un jour, il réalise que cette créature, ce Trucmuche, a disparu… et qu’il souhaite se venger.

Mon avis

Voici un roman dans lequel j’ai eu besoin de temps. Il n’est pas vraiment long mais j’ai mis trois éternités à le finir, allez savoir pourquoi. Peut-être parce que je ne comprenais pas tout, manquant de background historique sur l’histoire récente de l’Irak. Peut-être aussi que je n’arrivais pas à démêler les personnages qui ont des noms qu’il m’était facile de confondre. Normal, direz-vous, c’est une autre culture, un autre registre. Toujours est-il que pendant la première moitié du roman, si on ne donnait pas le métier du personnage, je n’avais aucune idée de qui il s’agissait. Bref, pas simple de s’attacher à qui que ce soit et de comprendre les multiples trames.

Ceci dit, je ne pense pas que ce soit le but du roman. Si au départ, on ne voit de lien avec le roman initial que la créature, on réalise ensuite que le thème du bien et du mal et de la responsabilité – personnelle ou collective. Qui est ce Frankenstein de Bagdad? Vengeur ou criminel? Et si c’était un peu des deux? Qui est tout bon ou tout mauvais? Et existe-t-il vraiment ou bien est-il seulement une histoire?

C’est que c’est Hadi qui raconte cette histoire, et que ce n’est pas toujours simple de démêler le vrai du faux. C’est un vieil homme qui boit du matin au soir et que personne ne croit. Les récits enchassés rappellent aussi le roman original alors que la créature va raconter son histoire et ses questionnements… qui trouveront leur chemin vers le roman que nous lisons. Et chacun des témoins, à leur manière, contient en lui du bon et du moins bon. Comment déterminer lequel est lequel quand tout s’effondre autour de nous et que l’histoire n’a pas encore décidé qui seraient les « bons »? Quand tout est chaos et destruction?

À travers les yeux des habitants aux prises avec leurs propres problèmes et questionnements, nous pourrons explorer la question de la corruption, des croyances mais surtout de la justice, peu importe d’où elle vient. Un roman qui m’a fait réfléchir mais qui n’a pas été une lecture fluide pour autant. J’étais intéressée et étouffée par la poussière des explosions en Irak, mais on aurait dit que je ne pouvais que le lire petit à petit, maogré la touche d’humour qui parsème parfois le récit.

À tenter… mais il faut s’accrocher au début. Ce qui semble dispersé va finir par se rassembler.

Frankenstein – Mary Shelley

J’ai lu Frankenstein adolescente. J’en avais un pas pire souvenir mais comme le roman était à l’honneur du Club Démenti, je me suis dit que ce serait une bonne idée de le relire. Surtout que je venais de recevoir cette très belle édition. C’était un signe!

De quoi ça parle

Voici l’histoire bien connue du Dr. Viktor Frankenstein, savant fou qui voulait créer la vie… et qui a réussi. Pris d’horreur devant sa créature, il l’abandonne à son propre sort, en faisant un être terriblement seul. La créature n’aura de cesse que de punir ce créateur, qui en a fait ce qu’il est.

Mon avis

Tout le monde sait que j’aime les classiques. J’aime leur prose parfois alambiquée, j’aime les « tropes » de l’époque (dont la plus fréquente est la coïncidence) et j’aime me replonger dans les croyances passées. Lire avec les références des différentes époques nous oblige toujours à nous mettre dans une position inconfortable ainsi qu’à réaliser à quel point, malgré le chemin qui nous reste à faire, les croyances ont évolué. Bref, ce roman a été publié en 1818 alors que Mary Shelley avait 18 ans, pendant la régence. Toutefois, la légende raconte que cette histoire avait d’abord été imaginée en 1815, lors d’une soirée où Shelley, son futur époux Percy et Lord Byron, avaient choisi de se raconter des histoires terrifiantes. Il y en a eu deux versions et je n’ai pour ma part lu que la dernière… mais je suis fort, fort curieuse de lire la première maintenant. Oui, on a bien compris, Mary Shelley avait 17 ans.

Ce récit est une histoire en poupées russes. Un explorateur qui souhaite trouver la route maritime du nord aperçoit un homme au bord de la mort, qui pourchasse une étrange créature. Il se prend d’amitié pour Frankenstein (parce que c’est lui), qui va lui raconter son histoire. Et dans son histoire, il y en aura une autre, celle de la créature. J’aime beaucoup cette structure, qui nous fait changer de point de vue plusieurs fois au cours de l’histoire. Bref, dans cette histoire, nous serons amenés à réfléchir sur le bien et le mal, sur leur possible coexistence dans chaque circonstances ainsi que sur les conséquences de nos actes et la responsabilité que ça implique. Parce qu’entendons-nous, Viktor Frankenstein est tout sauf sympathique.

Jamais dans l’histoire sa remise en question ne sera vraiment complète, même s’il finit par s’interroger. Il est davantage préoccupé par les conséquences pour lui-même que pour la créature qu’il a créé. Et le tout demeure très actuel car il fait réfléchir sur la responsabilité. Qui est le vrai coupable des meurtres? Le créateur ou la créature? Un être peut-il être brisé par la société? La différence et ce qui est considéré comme la laideur fait-il toujours aussi peur? Bref, énormément de questions universelles, auxquelles s’ajoute la nature du bien et du mal ainsi que l’aveuglement volontaire face à certaines situations.

Certes, il y a des coïncidences que je ne laisserais pas passer dans une oeuvre plus moderne. Des réponses qu’un homme aussi brillant aurait dû trouver. Mais il y a un vrai souffle dans cette histoire, qui doit être vue avec la lunette de l’époque et la vision biaisée du monde que pouvait avoir un jeune homme en moyens, dans un monde où la langueur était « à la mode ».

Bref, une relecture très intéressante pour moi, un très bon moment de lecture et je vous renvoie à notre discussion sur Youtube, sur la chaîne de Sylvain – où je pense que je dis que c’est victorien… SHAME ON ME!!

The Island of the missing Trees (L’île aux arbres disparus) – Elif Shafak

Pour mon Lisons l’Asie, j’ai choisi de relire Elif Shafak. Je l’ai lue plusieurs fois depuis mon voyage en Turquie et je suis rarement déçue, même si mon préféré reste ma première lecture doit « La bâtarde d’Istambul« . Donc, un roman qui se passe à Chypre, par une autrice turque, why not!

De quoi ça parle

Deux adolescents, à Chypre. Il est un Chypriote-Grec, elle est une Chypriote turque. Leur amour est interdit et ils vont se rencontrer dans une taverna très particulière, cosy et bruyante, au milieu de laquelle pousse un immense figuier qui sera témoin de leurs amours et de leur séparation.

Vingt ans plus tard, il revient à Chypre. Et encore plus tard, en Angleterre, un figuier sera enterré dans la cour de la maison où habite Ada Kazantzakis, adolescente à la recherche d’elle-même, originaire d’une île qu’elle n’a jamais vue.

Mon avis

On va s’entendre, je ne savais RIEN de l’histoire de Chypre. Non mais comment c’est possible? Une guerre qui a divisé le pays en deux? Il y a si peu de temps? Et je ne savais pas? Il ne resterait que deux village mixtes dans tout Chypre. Bref, ne serait-ce que pour ça, je suis très contente de l’avoir lu.

Nous commençons donc l’histoire avec Ada. Ada a perdu sa mère. Elle est à la recherche d’elle-même mais ne le sait pas encore. Mais son mal-être s’évacue dans un cri, un hurlement, en pleine classe. Puis elle apprend la mort de ses grands-parents turcs. Et sa tante, qu’elle ne connaît pas, débarque. Peut-être va-t-elle mieux comprendre les secrets de sa famille, ceux qui faisaient trop mal pour être révélés.

Comme souvent, ce n’est pas tant l’histoire d’amour qui m’a touchée, même si Kostas et Defne sont très attendrissant et si leurs retrouvailles sonne vrai, à défaut d’être parfaite. Pour moi, les sentiments qui ressortent sont surtout la nostalgie de l’enfance, de l’adolescence perdue, interrompue par les horreurs de la guerre. La pire nostalgie, celle des choses qui ne se sont pas déroulées, celles qui auraient pu être. Certaines scènes sont terribles, les traumatismes du passé sont prégnants pour Defne, qui n’a jamais quitté cette époque et qui cherche à comprendre. Le sort de certains personnages m’a brisé le coeur. Et c’est l’une des premières fois où j’ai réussi à comprendre « pourquoi » certains secrets sont juste « trop ». Pourquoi certains parents choisissent de taire des parties de leur histoire en croyant faire le mieux pour leurs enfants. Pourtant, Ada, elle, a besoin de comprendre.

Toutefois, pourmoi, ça n’a pas été un page turner. J’ai mis un bon 2 semaines à lire ce roman, certes lu dans une étrange période. Je ne m’ennuyais pas en le lisant mais je n’avais tout de même pas envie d’y revenir à tous prix. Ceci dit, ce roman m’a tout de même fait tomber amoureuse d’un figuier!