La route sombre – Ma Jian

La route sombreJe ne sais plus du tout où j’ai entendu parler de cet auteur.  Mais bon, j’ai dû en avoir vent quelque part, hein, vu que je l’avais!  Bref, les mystères de ma pile à lire.  Toujours aussi mystérieusement-mystérieux.

 

J’étais donc dans un trip « Chine » parce que j’étais justement sur le fleuve Yangtze et qu’une partie du roman se déroule dans le coin.   Avec le titre, je me doutais bien que ce n’était pas super joyeux mais dans ce cas-là, j’avoue que le contenu et particulièrement dérangeant.  Bon, peut-être que ça m’a davantage touchée parce que j’étais dans le contexte et tout, mais sérieusement, quand vous prenez ce livre, il faut s’attendre à lire l’horreur.  Sans nom.  On ne tombe pas dans le gore mais c’est extrêmement dur et on ne nous épargne rien (mais alors rien).

 

C’est donc l’histoire de Meili, une paysanne du sud de la Chine.  Elle s’est mariée à Kongzi, l’instituteur du village, a une petite fille de deux ans, Nannan, et est enceinte de son deuxième enfant, en espérant que ce soit un garçon.  Ils vivent dans le village des Kong, car Kongzi est le descendant direct du grand Confucius de la 76e génération et il veut une descendance mâle.  Or en Chine, il y a la politique de l’enfant unique et bien vite, le Planning Familial débarque dans le village pour stériliser les femmes, les avorter ou encore leur poser un stérilet.  Du coup, ils sont illégaux, vont devoir payer une amende… et décident de fuir.

 

Tout d’abord, j’avoue que je pensais que ce roman se déroulait pendant la révolution culturelle tellement on sent l’oppression et la brutalité du gouvernement, qui semble posséder tout le pays, jusqu’à l’utérus des femmes.  Puis, je me suis souvenue que la politique de l’enfant unique datait d’APRÈS la révolution culturelle.   Ensuite, j’ai vu des allusions aux jeux de Pékin et au barrage des Trois Gorges pré-inondation.  Alors, THE réalisation.  C’est un roman contemporain, ou presque.  Tout ça, ça se passe maintenant.  Ok.  Ca fait peur.   Bien sûr, nos guides nous avaient parlé de cette politique, de leurs frustrations,  et parfois de l’impression d’avoir été une génération sacrifiée, mais je n’avais pas réalisé que l’emprise du gouvernement allait jusque là.  J’avais cru comprendre entre les lignes la nette différence entre les paysans et les citadins, mais à ce point?  Des arrestations juste pour être dans les rues?  Des avortements à 8 mois de grossesse?  Où la famille doit en plus PAYER pour les services?  Des amendes pour tout et pour rien?  Même  maintenant, ça me semble complètement fou.   Sachant que l’auteur est connu pour sa vision critique pour son pays, j’ai tendance à me dire qu’il y a du vrai là-dedans.

 

Le roman se déroule donc sur plusieurs années.  Nous voyons évoluer Meili, une jeune femme intelligente qui n’a pas du la chance d’aller à l’école.  Au départ, elle vénère son mari, qu’elle trouve plus brillant qu’elle (il faut dire qu’il le lui rappelle souvent) mais qui la considère comme un instrument pour avoir un héritier mâle, ce qui l’obsède au plus haut point.  Entre le gouvernement et son mari, elle ne s’appartient plus.  Dans le roman, elle commence graduellement à se considérer comme une personne avec des capacités et des droits et on sent une réelle – mais graduelle – évolution.

 

Bien entendu, on pourrait reprocher une accumulation de malheurs (rien n’est épargné à la famille… mais alors, RIEN) mais l’attitude de Meili m’ont permis de ne pas être excédée par cet aspect qui m’énerve terriblement normalement.  Le personnage du mari, bien que compréhensible dans le contexte, m’a insupportée à partir du début.   J’ai beaucoup aimé la voix un poétique et surnaturelle de l’Enfant et le regard de l’auteur sur des problématiques très actuelles en Chine, soit la politique de l’enfant unique (assouplie en 2013), sur la vie des paysans, le statut et la vie des irréguliers ainsi que sur la pollution en Chine, que je n’ai pas du tout vue lors de mon voyage.

 

Un auteur (yep, c’est un homme) que j’ai très envie de découvrir davantage.   Je lirai certainement ses autres romans.

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8 Commentaires

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  1. Je vais peut être attendre s’être en forme pour le lire 🙂

    1. Oui, je pense que c’est mieux! Mais sérieux… scary!

  2. Si, Ma Yan, elle avait publié son journal, il y a quelques années.

    1. Je pense que j’avais mélangé Ma Yan et Ma Jian, en effet!

  3. Je l’ai commencé et laissé de coté, justement à cause de sa noirceur, ce n’était pas le moment. Mais je le reprendrai. Je pense aussi que tout ce qui est relaté est vrai, même si là, il y a concentration.

    1. Oui, voilà, il y a concentration. Je ne pense pas que j’aurais été aussi estomaquée si je ne l’avais pas lu quand j’étais justement dans l’endroit dont ils parlaient…

  4. Trop triste pour mes humeurs présentes.
    Le Papou

    1. Ah oui. Il faut être bien ferré pour s’y mettre. C’est frappant.

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