Le bête creuse – Christophe Bernard

Oh boy!

Comment vais-je faire pour parler de ce roman?  C’est qu’il est fort particulier et que j’aurais bien du mal à vous expliquer de quoi il s’agit.   Et je vous le dis tout de suite, il va falloir que je le relise pour en profiter à plein.  Que je le relise sans chercher où l’auteur s’en va… parce qu’en fait, je ne suis pas certaine que ce soit le but de l’auteur, d’aller quelque part.   Mais quelle langue!  Quelle langue!

 

L’histoire en tant que tel se déroule en une seule journée.  François habite Montréal, il a abandonné son doctorat et se consacre à un ouvrage soutenant que l’alcoolisme de sa famille est soumise à une malédiction.  François a aussi un petit penchant vers « la boisson » et il décide de retourner dans sa Gaspésie natale, où les légendes sont réelles et où tout est exagéré et où chaque histoire devient une hyperbole.

 

Là, je vous entends penser.  Une seule journée?  720 PAGES?!?!   C’est que le récit est ponctué de retours en arrière, d’histoires et de légendes familiales souvent réinventées.  Dans ce petit village fictif, il y a des années, il y a eu une game de hockey légendaire.  Monti, le grand-père, a réalisé un arrêt de fou, il a arrêté la rondelle snappée à toutes forces… avec ses dents.  Mais l’arbitre, Victor Bradley de Paspébiac, déclare le but bon.  (Oui, digne du but d’Alain Côté).  C’est le début d’une guerre à finir entre Monti et Bradley, qui vont de petites vengeances en petites vengeances à travers les années.

 

C’est parfois hilarant, souvent n’importe quoi, et j’avoue avoir passé ma lecture à me demander où est-ce que ça s’en allait comme histoire, ce qui m’a empêchée de l’apprécier complètement.  De délire alcoolique en délire halluciné, d’une tempête à l’autre, je me suis un peu perdue et j’avoue avoir parfois trouvé les histoires redondantes.

 

Mais quelle écriture et quels personnages!  La langue utilisée, très gaspésienne, truculante et foisonnante, très orale, que j’ai parfois qualifiée de rabelaisienne pendant ma lecture, (il faut savoir que je n’ai lu que 8 pages de Rabelais… oui, fouettez-moi) et qui m’a fait vibrer tout au long de toutes ces pages.  Quelle inventivité et je ne vois pas de meilleure façon pour raconter cette Gaspésie fantasque et plus grande que nature.  Les mots donnent un rythme particulier au récit, la parlure nous transporte là-bas et dans la bouche des personnages, ça sonne particulièrement vrai.

 

6 étoiles sur 5 pour la plume… mais bon, pour ma part, j’aurais eu besoin de juste un peu plus de liens, un peu plus d’histoire, pour que je tombe réellement sous le charme.

19 Commentaires

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  1. J’ai vu le pavé à la Foire du livre,ça m’a freinée… Même si l’écriture est belle, il me faudrait plus d’histoire aussi, je crois…

    1. L’écriture est… foisonnante. Amis de la simplicité, passez votre chemin. Certains crient au chef d’oeuvre mais pour ma part, je suis restée sur ma faim.

  2. Pour ce que tu dis de la langue, alors.

    1. C’est très langage parlé québécois. Mais c’est hyper particulier!

  3. Je n’ai pas encore osé m’y attaquer. Tes propos rejoignent ceux de ma librairie chouchou. La langue est renversante, l’intrigue mollassonne.
    J’ai hâte de voir s’il remportera le Prix!

    1. Il ne plaira définitivement pas à tout le monde. Ma mère le lit présentement et elle l’appelle « sa lecture creuse »… il y a des répétitions, des trucs très extravagants… mais bon, pour la langue, je suis quand même contente d’avoir tenté le coup, même si j’ai des réserves. Ce n’est pas mon choix pour prix, tu peux t’imaginer.

      1. Et quel est ton choix pour le prix?!
        Et ta prédiction?

        1. Mon choix, ce serait De bois debout de Jean-François Caron. Ça a été un méga coup de coeur. Ma prédiction… je ne sais pas du tout. Je vais juste me croiser les doigts pour que les libraires pensent comme moi! Mais je n’ai pas encore lu Le jeu de la musique… je suis en attente à la bibliothèque.

        2. Tu en as lu parmi la sélection? Et tes choix à toi?

          1. J’ai lu « De bois debout », « Le palais de la fatigue ». J’ai abandonné « Le jeu de la musique » (je n’étais pas dans le mood). « La bête creuse » est dans ma pal, mais je ne me décide pas à le lire.
            Mon choix? « De bois debout », définitivement. Mais je «crains» que « Le jeu de la musique » ne l’emporte! On saura tout mercredi en 9, et je serai sur place!

            1. Et moi je serai à ma librairie qui diffuse normalement en direct! Je vote aussi pour De bois debout… Il ne me reste que le jeu de la musique à lire.

  4. Je l’ai lu à haute voix, c’était notre livre anniversaire de vie amoureuse à Marsi et moi. Te dire combien ce roman est difficile à lire à haute voix ! J’en ai pris pour mon rhume. C’est certain qu’à partir de ce moment-là, les défauts sont grossis. Disons aussi que les personnes qui aiment la sobriété et le côté épuré, s’abstenir ou, sinon, risque d’imploser. Marsi a passé le commentaire que si on retirait tous les superlatifs, le roman deviendrait plat comme une galette. C’est un peu exagéré mais quand même, ça donne une idée. Personnellement, j’ai trouvé le fond de l’histoire défaillant, mais comme la forme en met plein les yeux, il y a quand même moyen de tirer son épingle du jeu. Si je devais choisir entre « aimer ou non », je serais tout de même obligé de choisir « non ». Mais je manquerais de nuances.

    Merci pour ta critique, je suis contente de recevoir des échos d’autres personnes qui l’ont lu.

    1. Ma mère dit EXACTEMENT la même chose que toi. Et non, ce n’est pas pour les amateurs de sobriété dans la langue. Et je suis assez d’accord pou rl’intrigue.. mais pour ma part, je dirais que je suis mitigée… quand même assez mitigée.

  5. Je l’ai écouté (un peu) au festival america, il expliquait ce qui lui avait donné l’idée du roman (une histoire d’un de ses ancêtres)

    1. Oui, c’est ça! Il nous a raconté ça, et tout l’exercice de style. La scène des cartes (la première qu’il a écrite) est génialissime selon moi.

  6. J’ai croisé ce livre à la librairie hier, dans le rayon nouveauté, et j’ai de suite été intrigué, puis, en lisant le résumé, j’ai de suite pensé à toi (il me semblait que je l’avais croisé icite et je ne me suis pas trompé), puis je l’ai ouvert, et j’ai commencé à le lire (en essayant de faire abstraction des petits bruits ambiants dans la librairie). J’ai de suite trouvé que l’écriture était originale, mais bon sang de bois, que ce début fut un petit calvaire, mais un plaisir aussi (je suis toute contradiction parfois). Puis je l’ai reposé (parce que j’étais déjà bien chargé et qu’il faut être raisonnable) parce qu’il me fait un petit peu peur (de par la langue et sa grosseur) mais terriblement envie. C’est bien simple, le livre me trotte dans la tête depuis hier.
    Bon, je t’avoue, les romans difficiles ne me font pas peur (je lis bien les romans de J.C. Oates qui sont parfois difficile d’accès). Seulement, je me demande si la langue utilisée dans ce roman peut être comprise par un petit français de France sans avoir constamment à me demander: kikidit?

    1. Ah oui, ça peut être un peu compliqué à comprendre si tu n’es pas Québécois. Mais même pour les Québécois pas gaspésiens, c’est compliqué aussi des fois. Si le côté foisonnant t’intéresse, n’hésite pas. Au pire, je te servirai de traductrice.

  7. Bon ça y est, je l’ai (enfin!!!!!) lu, ce livre qui m’intriguait, et Oh boy! Qu’est ce j’ai adoré le style de l’auteur. En fait, je trouve que ce livre est plus appréciable en tant qu’une expérience littéraire que pour un roman qui raconte une histoire, car, on va pas se mentir, ce n’est pas l’histoire qui nous retient icitte…mais l’écriture foisonnante et chantante de l’auteur. J’ai kiffé comme pas possible d’entendre cette langue à mon oreille. De plus j’ai pu profité de ma semaine de vacances pour prendre le temps de le lire et de me plonger dedans. j’ai aimé cette lecture jusqu’au bout…et j’ai compris le sens des expressions utilisées dans le livre (bon certaines sont restés sur le bord de la route, mais pas grave, je comprenais le sens général), merci à mon voyage canadien, merci à mes écoutes répétés des chanteuses québécoises (et plus particulièrement ma chère Lynda Lemay). Et merci à toi pour cette découverte et ton encouragement à tenter l’expérience. Maintenant, il reste plus qu’à découvrir d’autres livres et d’autres auteur/trices de votre belle littérature, car la littérature québécoise, c’est quand même ben bon c’tte affaire là!

    1. Ah oui, ya du bon icitte!
      Je suis ravie que ça t’ait plu et je suis très d’accord avec ton avis. Quelle langue, quelle truculence! Ça prend en effet le pas sur l’histoire mais j’en garde un souvenir fort. D’une atmosphère, de personnages plus grands que nature aussi.

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