Les Plouffe – Roger Lemelin

les-plouffe.jpgPrésentation de l’éditeur

« Voici une famille bien ordinaire. Pourtant, elle sera bouleversée par plusieurs événements. La mère, gardienne des valeurs traditionnelles, constate que ses enfants désirent quitter le nid qu’elle couve… Que de drames, que de frustrations, que d’action, que d’amour, que de chaleur humaine, que de rires chez ces Plouffe, où chaque lecteur pourrait croire se retrouver dans sa propre famille! »

 

Commentaire

Les Plouffe, je croyais que c’était quétaine.  J’avais déjà vu le film « Le crime d’Ovide Plouffe » à la télé payante quand j’avais quoi… 8 ans.  Et il faut dire que ça fait partie de la culture de la génération de mes parents vu que dans les années 50, La famille Plouffe a été un téléroman super populaire.  Je savais en gros qui était Ovide Plouffe, j’associais Cécile à Denise Filiatreault et maman Plouffe à Juliette Huot (les acteurs des années 80).  Après avoir fait une Promenade des écrivains sur Roger Lemelin, j’ai eu envie de me plonger dans le roman, pour le côté culture québécoise plus qu’autre chose. 

 

Et là, après quelques pages, je me suis surprise à aimer ça.

À mon grand étonnement. 

 

Ce roman se passe à Québec, plus précisément dans le quartier St-Sauveur, à la fin des années 30 et au début des années 40.  Les Plouffe, ce sont des ouvriers de la Basse-Ville.  Théophile, le père, est typographe mais dans son coeur, il est encore le champion de vélo qu’il était avant.  Farouche anti-anglais nationaliste, pas question pour lui de faire des courbettes au roi George VI!  Napoléon, début trentaine, du haut de ses 5 pieds 2 collectionne les images de grands sportifs.  Ovide a quoi… une 7ème année mais rêve de culture, d’Europe et d’opéra.  Grand incompris parmi les siens, il peine à trouver sa place dans ce petit monde où monter la côte vers la haute ville est limite un acte symbolique. ll m’a beaucoup touchée, malgré son côté fendant, à s’entêter à choisir la pire femme pour lui.  Guillaume est un sportif, champion de base-ball.  Cécile a le début de la quarantaine.  Vieille fille, elle veille tous les soirs sur la galerie avec son ex-amoureux, maintenant marié et père de famille.  Quant à la mère Plouffe, elle dirige la cuisine. 

 

Ils sont un peu fous, un peu timbrés, mais je les ai beaucoup aimés, ces Plouffe.  Ils ne l’ont pas facile, rien n’est simple dans ce monde où le clergé fait la loi et où les boss et les syndicats sont de mèche (voir si le Syndicat catholique va attaquer l’Alliance chrétienne… voyons donc!) mais ce n’est pas misérabiliste pour autant.  C’est ma foi plutôt drôle, malgré les petits et grands drames, à cause de la façon dont ceux-ci nous sont présentés, par les yeux parfois naïfs et d’autres fois trop perspicaces de ces personnages hauts en couleurs. 

 

Roger Lemelin fait ainsi vivre un quartier (ou devrais-je dire une paroisse), le quartier St-Sauveur, que j’ai pu arpenter avec Marie-Eve Sévigny dans ma promenade.  Les images et les lieux n’en étaient que plus réels.  Ce coin, il prend vie sous la plume de l’auteur.  On y est, on remonte le temps.  On vit les grandes processions, les visites paroissiales, tout ça à l’ombre de ce grand escalier qui représente la différence entre les classes chez Lemelin.   Certaines images sont frappantes, certaines métaphores étonnantes mais elles sonnent étrangement justes au milieu d’une scène qui pourrait par ailleurs être loufoque. 

 

Lemelin n’épargne pas le clergé et l’église, l’hypocrisie de tout ce petit monde qui, comme le bon gouvernement de l’époque (une bonne partie du roman se déroule entre les deux mandats de Duplessis), a tout intérêt à garder la population francophone pas vraiment instruite pour mieux la contrôler.   On y voit la conscription, la réaction face aux anglais, les gens remerciés pour leurs opinions politiques.  Tout y passe.  Et malgré tout, les Plouffe nous font sourire. 

 

Impossible pour la femme que je suis de ne pas réagir devant la condition féminine de l’époque ou encore devant les vacheries que les membres de la famille s’envoient entre eux.  Mais j’ai aimé réentendre les mots de mes grands-oncles et mes grandes-tantes à travers ceux de Lemelin… Et même si j’ai trouvé quelques longueurs, notamment dans la partie sur Denis Boucher,  j’ai maintenant envie de lire « Le crime d’Ovide Plouffe », vu que ma mère riait toute seule quand elle l’a lu cette semaine.  Pour une fois, ce n’est pas moi qui avais l’air bizarre. 

 

Finalement, les Plouffe, c’est notre histoire, c’est nous autres.  Et c’est tout sauf quétaine.

 

Mon Québec en septembre

26 Commentaires

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  1. Ouiiiiin j’ai trop envie de le lire maintenant… e me rappelle du crime d’Ovide Plouffe bien sûr mais je n’ai aps lu le roman moi non plus…. shame !!! il me le faut c’est tout ! 😉

    omondieu je l’ai trouvé sur PM dans l’édition de 1948 avec les acteurs de la série je pense sur la jaquette, je prends ou pas ?

    1. Yueyin: Je pense que ça pourrait te plaire.  Les histoires de clergé, vues avec un certain recul pour l’époque…  Bref, j’ai une vieille vieille édition aussi!

  2. Lu il y a longtemsp mais un excelleent souvenir de lecture. Beau commentaire dame Karine (comme toujours) 😉

    1. Suzanne: Merci, c’est gentil!  J’ai vraiment eu une très agréable surprise avec ce roman.  Et je vais lire Le crime d’Ovide Plouffe aussi.  Il paraît que c’est un peu plus fou.

    • Lise pas de blogue sur 16/09/2012 à 06:06
    • Répondre

    Lu moi aussi il y a très longtemps et je le relierai peut-être un jour. J’avais beaucoup aimé mais misère qu’il avait de la soutane à cette époque! J’ai quarante-seize ans (c’est moins vieux que cinquante-six bon!) et quand j’étais enfant la religion était aussi omniprésente mais ça commençait à changer..

    Le crime d’ovide Plouffe est bien aussi mais j’ai préféré le premier. J’ai vu les films aussi et (c’est rare)  je les ai autant aimés que les livres. Je me souviens d’une scène avec Denise Filiatraulx, assise dans la cuisine et disant à sa mère qu’elle économisait afin de se faire arracher toutes les dents pour se faire mettre « un beau dentier ». Le pire c’est que c’était courant à l’époque. Brrrr!

     

    1. Lise: C’est comme  moi qui dis que je suis restée à 23 ans… depuis disons quelques années!  Et oui, il y en avait de la soutane.  Mais j’ai trouvé que Lemelin avait un certain recul pour l’époque, j’ai été agréablement surprise.  Et la scène dont tu parles est presque telle quelle dans le roman.  j’ai sursauté!

  3. Je l’ai lu quand j’étais ado ou début vingtaine, quel bon souvenir! Par contre tu m’en apprends, j’étais sûre que ça se déroulait à Montréal!

    1. Grominou: Ben est-ce que c’est possible que dans la série télé, ça se passe à Montréal?  Je ne suis certaine de rien mais il me semble que cette info me dit quelque chose…

  4. Quétaine … voilà un mot qui fait plouf dans ma tête !

    mais je note ce livre, j’y retrouverai surement des ressemblance avec « une jeune femme en guerre »

    1. Michel:  Bon, on va tenter d’expliquer le sens profond du mot quétaine.  C’est quelque chose de dépassé, de kitsch mais dans le sens péjoratif du terme.  Ca fait matante, ça fait beauf, genre l’équivalent littéraire d’avoir des flamants roses en permanence sur son terrain et de sortir dehors avec des bigoudis… tu vois le genre??

  5. Quétaine ? il va falloir que j’aille dans google traduction 

    1. Gambadou: Comme je viens de le dire à Michel, j’ai beaucoup de mal dans le commentaire juste avant, j’ai beaucoup de mal à définir ce que c’est. C’est passé date, étriqué, kitsch mais un kitsch pas beau!

  6. t’as fait la promade finalement? C’était bien?  Cet auteur manque à ma culture et là, j’ai vriament le goût de le lire!

    1. Oui, je l’ai faite et je l’ai bien aimée.  JE ne connaissais pas du tout ce quartier.  Il est possible que j’aille faire celle sur les polars dimanche prochain… si jamais ça te dit!

  7. Je ne connais pas du tout mais cette saga doit être intéressante pour découvrir l’histoire du Québec fin 19e et début 20e siècles.

    Bonne semaine.

    1. Catherine:  C’est plus mi vingtième mais oui, c’est le reflet de toute une époque!

  8. Karine,

     

    à fouiller dans ma bibliothèque j’ai retrouvé mon exemplaire des Plouffe, en format poche. J’ai été mise en appétit par ton billet et dès que j’aurai terminé ma lecture du moment, je replongerai dans cet univers avec bonheur.

     

    Les cousins Français ne comprennent pas le mot « quétaine »; avec ton humour j’ai hâte de lire tes réponses…

     

    1. Lise:  J’espère que ta plongée dans cet univers sera aussi agréable que la mienne!  Quant au mot quétaine, il est super dur à définir…  j’ai tenté du mieux que j’ai pu!

  9. J’Avoue que j’avais le même préjugé que toi… Les Plouffe… dand ma tête c’est la vieille émission… c’est « vieux »… et « kétaine ». Mais je crois que je vais l’emprunter et le lire, tiens. Ton billet est fabuleux et me donne envie de le lire…:D

    1. Laila:  Si tu le lis, j’espère que ça te fera le même effet que moi.  C’est très ancré dans l’époque, plein de soutanes et tout, mais pour moi, ça a très bien passé!

  10. Humm, il me semble que les gens de Québec auraient poussé les hauts cris si on avait transplanté la série à Mtl… C’est sans doute moi qui s’en souviens de travers, tout simplement!

    1. Grominou: En fait, selon cet article (http://www.journaldemontreal.com/2012/06/20/une-tele-marquante), ça se passait bel et bien à Montréal dans le feuilleton des années 50.  Et il me semble bien que j’avais entendu ça ailleurs… peut-être dans la promenade des écrivains.  Mais je ne suis plus certaine.  Moi et ma petite mémoire.

  11. Pas pu lire l’article (il faut être abonné du JM), mais selon Wikipedia le film de 1981 était bien à Québec… Au fait, je ne sais pas pourquoi j’ai parlé d’une série télé, Les Plouffe était un film! La vieille série des années 50, je l’ai pas vu, bien évidemment…

    1. Grominou: Ah oui, sérieux?  Je ne suis pas abonnée, pourtant!  L’une des bizarreries du web !  Et oui, dans les années 80, il y a eu 2 films.  Les Plouffe et Le crime d’Ovide Plouffe.

  12. Hum, je ne sais pas c’est la période des pommes et nous irons la journée où il fera le plus beau…

    1. Jules: On en reparlera, alors!

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